Lettre Ă Henry Mont Jovis Puis passera le mĂ´t Iouis,
Le Gallique ogmium, accompagné de si grand nombre que
de bien loing l'Empire de sa grande loy sera presenté, & par lors
& quelque temps apres sera espanché
profuseement le sang des Innocens
par les nocens vn peu esleuez: alors par grands deluges
la memoire des choses contenues de tels instrumens receura innumerable perte, mesmes les
lettres: qui sera deuers les Aquilonaires—par
la volonté diuine, & entre vne
fois lié Satan. Et sera faicte paix vniuerselle entre les humains, & sera deliuree l'Eglise de Iesus Christ
de toute tribulation, combien que par les Azos-tains voudroit mesler dedans le miel du
fiel, & leur pestifere seduction:—&
cela sera proche du septiesme millenaire,
que plus le sanctuaire de Iesus Christ ne sera conculqué par les infideles qui
viendront de l'Aquillon, le monde approchant de
quelque grande conflagration combien que par mes supputations en mes propheties, le cours du temps aille beaucoup plus loing—Dedans l'Epistre que ces
ans passez ay dedié à mon fils Cesar,
Nostradamus i'ay assez appertement
declaré aucuns poincts sans
presage.—Mais icy, ô Sire,
sont comprins plusieurs grands & merueillieux aduenemens, que ceux
qui viendront apres le verrôt.—Et
durant icelle supputation Astrologique, conferee aux sacrees lettres, la persecution
des gens Ecclesiastiques prendra son origine par la
puissance des Roys Aquilonaires,
vnis auec les Orientaux. Et
ceste persecution durera onze ans, quelque peu moins,
que par lors defaillira le
principal Roy Aquilonaire,—lesquels ans accomplis suruiendra son vny Meridional, qui persecutera
encore plus fort par l'espace de trois ans les gens d'Eglise, par la seductiô apostatique, d'vn qui tiendra toute puissance absoluë
Ă l'Eglise militaire, & le sainct peuple de Dieu obseruateur de sa loy, & tout
orde de religion sera grandement persecuté
& affligé tellement que le sang des vrais Ecclesiastiques,
nagera par tout,—& vn des horribles Roys temporels par ses adherans luy seront donnes telles louanges, qu'il aura plus respandu de sang humain des innocens
Ecclesiastiques, que nul ne sçauroit
auoir du vin.—& iceluy
Roy cĂ´mettra des forfaicts enuers l'Eglise incroyables, coulera le sang humain par les
rues publiques, & temples, comme l'eau par pluye impetueuse, & rougiront de sang les plus prochains fleuues, & par autre guerre nauale
rougira la mer, que le rapport d'vn Roy à l'autre luy sera dit: Bellis rubuit naualibus aequor.—Puis dans la mesme annee & les suiuantes s'en ensuiura la plus
horrible pestilence, & la plus meruelleuse par la
famine precedente, & si grandes tribulations que iamais soit aduenue telle depuis
la premiere fondation de l'Eglise Chrestienne,
& par toutes les regions Latines, demeurant par
les vestiges en aucunes contrees des Espaignes.—Par lors le tiers Roy Aquilonaire
entendât la plaincte du
peuple de son principal tiltre, dressera si grande armee, & passera par les destroits
de ses derniers auites & bisayeuls,
qui remettra la plus part en son estat,—& le
grand Vicaire de la cappe sera remis en son pristin estat: mais desolé, & puis du tout abandonné, & tournera estre Sancta Sanctorum
destruicte par Paganisme & le vieux & nouueau Testament serôt dechassez, bruslez,—en apres l'Antechrist sera le prince
infernal,—encores par la derniere
foy trembleront tous les Royaumes de la Chrestienté, & aussi des infideles,
par l'espace de vingt cinq ans, & seront plus grieues guerres & batailles, & seront villes, citez
chasteaux, & tous autres edifices
bruslez, desolez, destruicts, auec grande effusion
de sang vestal, mariees,
& vefues violees, enfans de laict contre les murs
des villes allidez & brisez, & tant de maux
se commettront par le moyen de Satan, prince infernal, que presque le monde vniuersel se trouuera defaict & desolé:—& auant iceux advenemens aucuns oyseaux insolites crieront par l'air, Huy huy, & seront apres quelques
temps esuanouys.—Et apres
que tel temps aura duré longuement, sera presque renouuellé
vn autre regne de Saturne,
& siecle d'or, Dieu le createur
dira entendant l'affliction de son peuple, Satan sera mis, & lié dans l'abysme du barathre dans la profonde fosse: & adonc
commencera entre Dieu & les hommes vne paix vniuerselle,—& demeurera lié enuiron
l'espace de mille ans, & tournera en sa plus grande force, la puissance Ecclesiastique, & puis tourne deslié.—Que
toutes ces figures sont iustement adaptees
par les diuines lettres aux choses celestes visibles, c'est à sçavoir,
par Saturne, Iupiter, & Mars, & les autres conioincts, comme plus Ă plain par aucuns quadrins l'on pourra voir. Ie
eusse calculé plus profondement, & adapté les vns auecques les autres.—Mais
voyant Ă´ Serenissime Roy, que quelqu'vns
de la sensure trouueront
difficulté, qui sera cause de retirer ma plume à mon repos nocturne:—Multa etiam, ô rex omnium potentissime, praeclara et sanè in breui ventura, sed omnia in hac
tua epistola innectere non possumus, nec volumus: sed ad intelligenda quaedam facta horrida
fata, pauca libanda sunt, quamuis
tanta sit in omnes tua amplitudo et humanitas homines, deosque pietas, vt solus amplissimo
et Christianissimo Regis
nomine, et ad quem summa totius
religionis auctoritas deferatur dignus esse videare.—Mais tant seulement ie
vous requiers, Ă´ Roy tres clemĂŞt;
par icelle vostre singuliere
& prudente humanité, d'entendre plus tost le desir de mon courage, & le souuerain
estude que i'ay d'obeyr à vostre Serenissime Maiesté, depuis que
mes yeux furent si proches de vostre splendeur
Solaire, que la grandeur de mon labeur n'attainct ne
requiert. De Salon, ce 27. de Iuin, 1558. Faciebat Michaël Nostradamus Salonae Petrae Prouinciae. Mont Joux Un temple de Jupiter, situé sur le mont qu'occupe aujourd'hui l'hôpital du grand Saint-Bernard, attirait encore des adorateurs; et de là vient que ce pic a porté très-longlemps le nom de mont Joux (mons Jovis). Il s'agit de Bernard de Menthon fondateur de l'hospice. Saint Bernard naquit, au mois de juin 923, dans le château de Menthon, manoir héréditaire de ses aïeux, dépendant alors du diocèse de Genève, et situé sur les bords du lac d'Annecy, en Savoie (Armand Le Gallais, Chroniques du mont Saint-Bernard, 1872 - books.google.fr). Gallique Ogmium Mais, au-delà du témoignage convenu d'une banale romanisation, l'inventaire des inscriptions laisse quelques impressions fortes : - le rôle ancien de Marseille et la densité des témoignages au carrefour entre delta et Crau (Glanum, Tericias) dans cet arrière-pays que la Table de Peutinger nomme encore « Gretia » ; - le rappel insistant des voies qu'on disait « héracléennes » : celle du littoral avec Aix-en-Provence (deux inscriptions), Ollières, Fréjus et Cimiez ; celle du Montgenèvre avec Briançon, Suse, (C. V. 7240) Usseglio, (C. V. 6947) Torino ; la route du Petit-Saint-Bernard (Salins-les-Thermes, Aime, Bourg-Saint-Maurice...) des voies qui d'ailleurs « remontent » vers le nord au rythme de la pénétration romaine. Les inscriptions, on le voit, se concentrent essentiellement dans les hautes vallées comme s'il s'agissait surtout d'invoquer Héraclès/Hercule avant d'entreprendre l'ascension du col ou de le remercier pour un passage réussi ; - s'affirme, en effet, le rôle capital des cols : conformément au rôle de « maître des passages » que lui confere le mythe, Héraclès/Hercule est honoré au Petit-Saint-Bernard où un voyageur a déposé pour lui un ex voto d'argent le représentant avec massue et peau du lion, dans l'encadrement d'un temple13 et au sommet du Grand- Saint-Bernard, il est représenté au côté de son père Jupiter ici associé à Poeninus, divinité indigène de la montagne (Colette Jourdain-Annequin, Quand Grecs et Romains découvraient les Alpes: les Alpes voisines du ciel, 2011 - books.google.fr). Le culte d'Hercule, l'Herculeus
Graius des inscriptions de Salins-les-Thermes, d'Aime
et peut-ĂŞtre de Bourg- Saint-Maurice, comme l'Herculeus
Bibax dont la tĂŞte en marbre provient d'Aime,
recouvre certainement celui d'une divinité indigène, assimilable au dieu
celtique Ogmios, protectrice des cols et des passages.[…] L'inscription de Salins-les-Thermes est signalée, au XVIe
siècle, par Aymard du Rivail
- Perdu. Texte, jadis conservé, d'une ligne. Le reste était déjà illisible Aymar du Rivail est un juriste
et historien dauphinois, né en 1491 à Saint-Marcellin et mort en 1558. Il est
l'auteur de nombreux ouvrages juridiques, dont Aymari Riuallii Allobrogis
Iuris Consulti Ac Oratoris Libri
De Historia Iuris Ciuilis
Et Pontifici (1515). Son Histoire du Droit Civil (Civilis Historiae Juris, 1527) le fit devenir conseiller au parlement de
Grenoble O. Hirschfeld a intégré cette
inscription dans les suppléments du CIL XII en citant in extenso le texte latin
d'Aymard du Rivail et n'a
pas mis en cause son authenticité malgré un formulaire quelque peu surprenant
et la leçon Herculeio. Pour sa part, Th. Reinach
voulait comprendre Herculei Ogmio,
ce qui est peu vraisemblable, car Ogmios n'est jamais
attesté dans l'épigraphie de la Gaule On peut penser que "gallique ogmium"
désigne Hercule simplement sans imaginer une voyance de l'interprétation de
Reinach. Le val d'Aoste, drainé par la Doire Baltée, est encadré
par deux chaînes de hautes montagnes entre lesquelles il s'immisce grâce à une
douzaine de vallées latérales. Les cols du Petit-Saint-Bernard à l'ouest et du
Grand-Saint-Bernard au nord constituent les voies d'accès, le premier à la
France, le second à la Suisse. Ancienne colonie romaine, il fut érigé en duché
par l'empereur Frédéric II de Hohenstaufen en 1238 et fit dès lors partie des
possessions de la maison de Savoie "gallique" peut
renvoyer à "français". La maison de Savoie, petite famille originaire de la
Maurienne, haute vallée de l'Arc, affluent de l'Isère, qui conduit au passage
du Mont-Cenis, possède sur le versant italien, le
Piémont et Turin, à l'orient des Alpes. Mais la Maison de Savoie détient les
passages qui mènent sur le versant français; et, sur le versant français, elle
possède des territoires de langue française aussi étendus que ses territoires
italiens : d'abord la Savoie, pays de langue française, avec Chambéry, avec Annecy,
avec Saint-Jean-de-Maurienne; par les régions hautes de Faucigny et du Chablais,
la Maison de Savoie atteint le lac de Genève, déborde au-delà du lac de Genève,
au-delà du Rhône, jusqu'au contact de la Franche-Comté, cernant à moitié
Genève, ville libre mais toujours convoitée Typologiquement, le col du Grand Saint Bernard est le
lieu de passage des armées de Bonaparte, encore lui. C’est avec la traversée des Alpes par l'armée de réserve
le 13 mai 1800 que Napoléon intervient dans la deuxième campagne d’Italie, déclenchée
par la reprise de Milan par les Autrichiens. Il fallait surprendre les
Autrichiens du général Melas et fondre sur eux en
profitant de l’effet de surprise. Avec son armée de réserve, il passe le col du
Grand-Saint-Bernard, le corps du général Moncey franchit le col du
Saint-Gothard et le corps du général Turreau se
dirige vers le col de Montgenèvre. Le 18 mai, Bonaparte quitte Martigny et se
met en route vers le Grand Saint-Bernard. Le 20 mai, habillé d’un uniforme bleu
que recouvre une redingote blanche et coiffé d’un bicorne couvert de toile
cirée, il monte une mule, et escorté par le guide Dorsaz,
traverse le col.Du 15 au 21 mai, les troupes
gravissent les monts et acheminent des tonnes de matériel et l’artillerie logée
dans des troncs d’arbres évidés pour en faciliter le transport. L’artillerie
fut retardée au fort de Bard par la résistance des Autrichiens, mais le reste
de l’armée fut au rendez-vous de la première bataille importante à Montebello.
La reconquête de l’Italie par Napoléon favorise le rapprochement avec l’Espagne
du roi Charles IV qui commande le portrait équestre du Premier Consul Napoléon
Bonaparte qui sera peint par Jacques-Louis David entre 1800 et 1803 Le Livre de l’Etat et de la mutation des temps, écrit en 1550, de Roussat, reprend les
données d’Ibn Ezra avec un décalage de quelques années dans les dates par
rapport à celles données par Trithème : l'an 7000
correspond à l'année 1793 pour celui-ci, et à 1801 pour Roussat
Azostains Un système d'encodage prophétique fourni par la
littérature pseudojoachimite, est contenu dans le Liber de oneribus,
composition adaptée des malédictions adressées par Isaïe aux différents peuples
proche-orientaux (onus Babylonis,
onus Damasci, onus Aegypti...), dans laquelle
chaque entité politique de l'Europe occidentale, et certaines catégories
particulières de la population du XIIIe siècle se voient assigner une
concordance avec une malédiction isaïenne, par exemple Egypte/France ;
Philistins/Ligures ; Juda/Italie ; JĂ©rusalem/Eglise d'Occident ; Edom/Grecs ;
Arabes/Anglais... C'est donc naturellement que les routes du nord par
lesquelles surgissaient les envahisseurs proche-orientaux du royaume de Juda
dans l'antiquité devinrent dans les prophéties médiévales l'aquilon dont
descendaient pour la ruine de l'Italie les différentes manifestations
(dynastiques) du mal incarné par les Staufen,
Frédéric Ier, Henri VI, Frédéric II, Conrad IV, Conradin : Contre la Ligurie
(La Lombardie) - contre les Philistins : Ne te réjouis pas, ô toi tout
Philistin, car même si pour l'instant la verge de la persécution est foulée aux
pieds, il est nécessaire que par retour de fortune la Ligurie soit écrasée de
toute part. De la racine, dit-il, du serpent précédent, Frédéric, sortira un
autre serpent roitelet, c'est-à -dire Frédéric, dont la semence – le troisième
Frédéric selon Raynier – absorbera les peuples orgueilleux.
De l'Aquilon, dit-il, de la Germanie, viendra une fumée, et personne ne pourra
fuir son armée. Car vraiment le Philistin se scinde en cinq serpents-roitelets,
et il paraît que ces confins, les Toscans, tous enfin, seront brisés à la fin. Ils voleront, dit-il, les
Philistins, sur la mer, et les fils de l'Orient feront alors leur butin. On imagine sans peine comment les nombreux passages des
lettres politiques de Frédéric utilisant ces images dangereuses de l'aquilon
pouvaient être interprétés par des clercs imbus de ces idées. Une lettre telle
que PdV II, 8, (PdV :
Pierre de La Vigne) extrêmement offensive, adressée au sénat et au peuple
romain en 1242, saturée de références isaïennes mais aussi la lettre PdV II, 56, adressée par les Viterbiens
à Frédéric et implorant sa venue, tout comme l'éloge de Frédéric II par Pierre
de la Vigne du troisième livre (PdV III, 44), doivent
ĂŞtre lus en fonction de cet encodage. L'usage volontairement abondant par la
chancellerie impériale de références prophétiques isaïennes a certainement
contribué à accroître ces effets de réception, dont il est difficile de savoir
Ă quelles parties de la population (et de l'Europe) ils s'Ă©tendaient, mais dont
l'importance ne doit pas être minorée, dans l'ambiance électrique de la
décennie 1240. [...] L'histoire mouvementée de la fin de la lignée masculine
des Hohenstaufen et de la revendication de leur héritage par la maison royale aragonaise
a prolongé l'utilisation de ces références jusque parmi les dictatores
de l'époque des Vêpres siciliennes qui ont écrit un diptyque de lettres de défi
échangées entre Charles d'Anjou et Pierre d'Aragon après les Vêpres. La réponse
aragonaise, Ă©crite selon MĂĽller par le vieux Pierre de Prezza,
se termine ainsi : nous viendrons dans
une telle puissance avec nos insignes victorieux, que nous te détruirons, toi
et ta descendance, de la face de la terre, et le lion qui déplumait les
poussins de l'aigle en les tuant, nous le détruirons de telle sorte par les
morsures empoisonnées de notre dragon, que de toi il ne sera plus fait
ultérieurement mention sur la terre. Alors tu sauras ce que peut la dextre des
Aragonais, et ce que t'aura valu d'avoir tué des rois, et répandu un sang
innocent, scélérat ! Les « Vêpres siciliennes » sont un soulèvement et une
révolte populaire de l'île de Sicile contre la domination féodale du roi
d'origine française Charles d'Anjou, survenu à Palerme et Corleone,
le 31 mars 1282, mardi de Pâques. À la suite de ce soulèvement et du massacre
des Français, les Siciliens se libèrent du joug angevin en passant sous la
protection du roi d'Aragon Pierre III1. L'événement est donc à la fois un
moment clef de l'histoire nationale sicilienne et un tournant géopolitique Pierre de la Vigne, Petrus de Vinea,
ou Pierre des Vignes, poète et chancelier de FrĂ©dĂ©ric II du Saint-Empire, nĂ© Ă
Capoue vers 1190, d'une famille pauvre. Il incite Frédéric à se rendre
indépendant des papes, et indispose vivement par cette politique la cour de
Rome. Frédéric finit pourtant par se croire trahi par son protonotaire de la
cour impériale (depuis 1246), l'accuse d'avoir voulu l'empoisonner (pour se
racheter auprès d'Innocent IV), et ordonne de le livrer à ses ennemis pisans
après lui avoir fait crever les yeux : Pierre de la Vigne, dans son désespoir,
se brise la tête contre les murs de sa prison (1249). On pense généralement
qu'il était innocent. On a sous son nom un recueil de Lettres, publiées pour la
première fois en 1566, et souvent réimprimées Les Azostains seraient les
habitants de la ville d'Ashdod (Azot, Azoth) une des cinq villes de la Pentapole philistine.
Selon le Liber de oneribus prophetarum editus ab abbate Ioachim, ils désignent les
Lombards ou Liguriens (Génois). Alliance orientale Les Orientaux devraient être les Byzantins, plutôt que les Mongols. L'empereur Frédéric II, retenu en Italie par ses querelles frontalières avec le pape Les Hohenstaufen croient à l'Empire unique, mais ils
contestent la lĂ©gitimitĂ© de l'Empereur d'Orient. Dans une lettre adressĂ©e Ă
Manuel, Frédéric Barberousse pose en principe « que les Empereurs d'Allemagne
qui ont reçu leur pouvoir des glorieux Empereurs romains, doivent gouverner,
non seulement l'Empire romain, mais aussi le Royaume grec » Jean Doukas Vatatzès, empereur
grec de Nicée, luttait avec un succès croissant contre le faible empire latin
de Constantinople ; le temps où, en Occident, Frédéric II de Hohenstaufen
recommençait, une fois de plus, sa guerre éternelle contre la papauté. Or
Baudouin II, empereur de Constantinople, protégé du souverain pontife et ne se
soutenant que par lui, se trouvait par là même nécessairement hostile au grand
empereur souabe, et la politique de Frédéric II devait naturellement s'efforcer
d'atteindre ici aussi et de mettre en échec l'adversaire irréconciliable que le
pape était pour lui. Dans ce but il n'hésita pas, lui catholique romain et
latin, Ă faire alliance avec les Grecs schismatiques contre un Ă©tat catholique
et latin. Ceci n'est point pour surprendre, quand on se souvient quel libre et
puissant esprit fut ce dernier des Hohenstaufen. Initié en Sicile, dès
l'enfance, aux splendeurs des civilisations grecque et arabe, savant et Ă©pris
de science comme un humaniste de la Renaissance, étrangement séduit en outre
par les mœurs voluptueuses et violentes de l'Orient musulman, ce prince à l'âme cosmopolite et
laïque avait entrepris d'arracher le monde à l'étreinte de l'Église, non
seulement en détruisant la puissance temporelle de la papauté, mais en ruinant
l'ascendant spirituel de Rome. Mettre fin pour jamais Ă l'inutile folie de la
croisade, conclure la paix avec l'Islam, transférer du pape à l'empereur la
direction suprême de la chrétienté, tels furent quelques-uns des rêves que
caressa le vaste génie de ce souverain presque moderne. Ses ennemis déclarent
qu'il ne croyait point en Dieu, qu'il niait l'immortalité de l'âme, qu'il
proclamait, en face de la foi aveugle, les droits suprĂŞmes de la raison, disant
« que l'homme ne doit croire que ce qui peut être démontré par la force des
choses et par la raison naturelle ». On conçoit qu'étant tel, son esprit libéré
de scrupules vieillis n'éprouvât nul embarras à traiter avec des schismatiques
ou des infidèles, si leur appui pouvait lui être utile contre sa grande
adversaire, la papauté. De là vinrent les relations qu'il engagea avec la cour
byzantine de Nicée. Frédéric II promettait à Vatatzès
de faire évacuer Constantinople par les Latins et de la restituer à son maître
légitime ; en échange, l'empereur grec s'engageait à se reconnaître le vassal
de l'empereur d'Occident et à rétablir l'union rompue entre les deux Églises.
Il est difficile de dire quel degré de sincérité renfermaient ces promesses.
Dans l'alliance qui se concluait, les Grecs voyaient surtout un moyen de
reprendre plus aisément Constantinople, Frédéric II un moyen d'enlever à la
papauté une force qu'elle s'efforçait d'attirer de son côté. Toujours est-il
que les deux parties s'accordèrent. Dès 1238, des troupes grecques étaient
mises par le basileus en Italie Ă la disposition de l'empereur souabe. BientĂ´t
le rapprochement des deux souverains devint plus Ă©troit encore. En 1244, une
fille de Frédéric II épousait l'empereur grec de Nicée. En 1241, Jean Doukas Vatatzès avait perdu sa première femme, Irène Lascaris.
Bientôt, « fatigué de sa solitude », comme dit un contemporain, il songea à se
remarier, et il fit demander à son grand allié la main de sa fille. Elle
s'appelait Constance, et elle était née de la liaison de Frédéric II avec
Bianca Lancia, celle-là même qui fut également la mère du fameux Manfred.
L'empereur consentit volontiers Ă une union qui fortifiait son alliance avec
les Grecs ; et encore qu'il y eût entre les deux futurs époux une singulière
disproportion d'âge - en 1244 Jean avait cinquante- deux ans, et Constance
était toute jeune - le mariage fut résolu. La chose fit en Occident, en
particulier dans le parti pontifical, un scandale prodigieux. Au concile de
Lyon, un peu plus tard, Innocent IV n'hésitera pas, parmi les raisons qui lui
semblaient justifier l'excommunication prononcée contre Frédéric II, à invoquer
ce motif, « qu'il avait contracté parenté avec des hérétiques ». Auparavant
déjà , et pour la même cause, le pape avait solennellement excommunié l'empereur
Vatatzès et tout son peuple, "traitant
impudemment d'hérétiques, comme Frédéric II l'écrivait à son confédéré, ces
Grecs très orthodoxes, par qui la foi chrétienne s'est répandue à travers le
monde », qualifiant « d'apostats et de fauteurs de scandales une nation qui
depuis des siècles, et dès l'origine, a été riche en piété et qui a porté
l'évangile de paix au monde latin que gouverne le pontife ». Rien ne pouvait mieux que cette
condamnation commune rendre étroitement solidaires les intérêts des deux
souverains. « Ce n'est point, disait Frédéric II à un autre de ses correspondants,
notre droit seul que nous défendons, mais ceux de tous les peuples nos amis que
réunit l'amour sincère du Christ, et spécialement les Grecs, nos alliés et
amis, que le pape, Ă cause de l'affection que nous leur portons, et quoiqu'ils
soient très chrétiens, a traités avec la dernière insolence qualifiant d'impies
ce peuple très pieux, et d'hérétiques cette nation très orthodoxe ». Vatatzès pareillement, en envoyant à l'empereur un
contingent de ses troupes, se félicitait des victoires que le prince souabe
remportait sur leur commun adversaire Vicaire Contrairement à la politique que les Capétiens et les
Valois ont menée dans le royaume de France, les empereurs n'ont pas voulu — ou
n'ont pas pu — s'opposer à l'essor de cette grande principauté d'Empire
qu'Ă©tait la Savoie. En simplifiant on peut Ă©voquer l'entente avec les
Hohenstaufen, le conflit avec les Habsbourg et de nouveau l'entente avec les
Luxembourg. Thomas Ier est un gibelin résolu, il se rallie à Philippe de
Souabe, ce qui lui vaut de recevoir en 1207 Moudon,
clĂ© de pĂ©nĂ©tration au nord du LĂ©man. Plus encore FrĂ©dĂ©ric II ne tarde pas Ă
faire de lui son vicaire impérial en Italie du nord et à le pousser à  à ce titre en Provence
et en Piémont à partir de 1226. Puis le même empereur coopère avec Amé- dée IV dans les grands conflits contre les Guelfes italiens
(Ă commencer par l'Ă©vĂŞque de Turin) et obtient du comte de Savoie qu'il barre
le passage des Alpes aux troupes pontificales, moyennant pour lui et pour son
frère Thomas une pluie de concessions de droits sur le nord du Piémont.
Philippe de Savoie, devenu le protecteur du pape Innocent IV fixé à Lyon en
1245, cherche certainement, il est vrai, à entraîner ses frères dans une
politique plus favorable à la papauté. La disparition progressive des
Hohenstaufen n'empêche pas la Maison de Savoie de faire régulièrement confirmer
ses droits sur Ivrée et tout le Canavais, sur Turin
et sur le Piémont central. Mieux encore, durant le Grand Interrègne du
troisième quart du XIIIe siècle, Pierre de Savoie se voit charger de la protection de Berne et de Morat. Il
reçoit bientôt du roi des Romains, Richard de Cornouailles, l'époux d'ailleurs
d'une petite-fille de Thomas Ier, les fiefs impériaux de Kybourg
situés au nord-est du pays de Vaud, ce qui amorce la pénétration en Suisse
alémanique. Institué vicaire d'Empire perpétuel pour toutes ses possessions
alpines, Pierre II voit ainsi reconnaître et approuver l'expansion savoyarde
déjà réalisée. C'est un encouragement à persévérer ! Malheureusement dans sa
progression au nord-est la Savoie se heurte aux Habsbourg; Pierre II trouve un
adversaire dans la personne de Rodolphe, un seigneur alémanique (aussi
ambitieux que modeste) qui, après quelques offensives contre la Savoie restées
heureusement infructueuses, devient réellement inquiétant lorsqu'il est élu
empereur en 1273. Longtemps accaparé par les affaires de Bohême et d'Autriche,
Rodolphe de Habsbourg crée en 1282, avec l'appui de Charles d'Anjou, une grande
coalition anti-savoyarde. Par de nombreuses mesures militaires et
diplomatiques, Philippe Ier et Amédée V limitent les pertes, qui sont
d'ailleurs momentanées, aux secteurs de Payerne, de Morat et de Berne. La mort
de Rodolphe en 1291 ne ramena pas la bonne entente avec l'empereur car,
quelques années plus tard, fut élu un autre Habsbourg anti-savoyard, Albert
d'Autriche. Ce dernier toutefois n'eut guère le loisir d'agir hors de Germanie
et après sa mort en 1 308, l'autoritaire et déjà redoutable famille de
Habsbourg se trouva écartée pour longtemps. Et désormais, à la place de cette
famille alémanique fâcheusement proche de la Savoie, ce furent les Luxembourg
qui presque toujours occupèrent le trône impérial. Très lié à la France dont
Amédée V s'était justement rapproché, cette Maison espérait surtout rétablir
l'autorité impériale. Elu en 1308 Henri VII se mit à préparer une descente en
Italie pour se faire couronner empereur et afin de balayer par l'épée et par la
négociation l'opposition des Guelfes il chercha des soutiens. C'est Amédée V
qui en 1 3 10 lui ouvre la route de Turin à Rome — où le couronnement a lieu en
1312 — et qui après s'être vu reconnaître tous ses titres, y compris les plus récents tel celui de seigneur de Bâgé et de Coligny, devient enfin officiellement prince
d'Empire, tandis que son neveu Louis de Savoie- Vaud est nommé sénateur de Rome.
Ainsi plus que jamais, les Savoyards ont toute liberté d'expansion car dans la
suite des événements les empereurs interviennent peu hors de Germanie, si ce
n'est le versatile Charles IV (1346-1378), célèbre pour avoir concédé ou
révoqué des droits dans le simple but de manifester son autorité et de recevoir
des fonds. Amédée VI se contenta alors de constater qu'en 1356 il a reçu la
connaissance de tous les appels (même interjetés contre les sentences des
évêques et des abbés), qu'en 1365, à l'occasion d'un voyage où Charles IV fut
somptueusement accueilli en Savoie, il a
obtenu la concession du vicariat impérial, enfin dix ans plus tard la liberté
de saisir les biens du marquis de Saluces pour félonie, nonobstant toutes
affirmations contraires de la France au nom du dauphin. Qu'importent toutes les
mesures prises par Charles IV en faveur du dauphin, du comte et de l'évêque de Genève
? AmĂ©dĂ©e VI s'est en effet bien rendu compte qu'il pouvait les ignorer Grâce Ă
l'empereur Wences- las, Amédée VII retrouve dès son
avènement le vicariat impérial dont il peut se prévaloir pour acquérir en 1388 Nice
et la «Terre Neuve de Provence». Dans l'ensemble, hormis Rodolphe de Habsbourg
à la fin de son règne, l'empereur n'a donc jamais gêné l'expansion savoyarde Le comte de Savoie Thomas Ier était vicaire impérial pour
tout le pays situé entre Turin et Pavie. Il y eut aussi un vicaire pontifical. Dès son élection, le pape Alexandre IV, en 1254, remplace
le royaume d'Italie par un vicariat pontifical avec Charles d'Anjou (1246-1285)
comme vicaire et rétablit ainsi un semblant d'unité en Italie. Toujours en
lutte contre l'empereur d'Allemagne, Manfred, le pape soudoie les rois
d'Angleterre et de Norvège pour qu'ils l'attaquent. Il faut cependant ajouter que
Manfred s'Ă©tait fait couronner roi de Sicile en 1258 avant de s'approprier
quelques États pontificaux ! La "cappa" est une pièce d'habillement, des
cardinaux (magna cappa) en particulier. Mais on ne peut parler de vicaire d'un
cardinal. Souverain absolu, Charlemagne n'avait pas de premier
ministre, qui Ă©tait le maire du palais sous les derniers MĂ©rovingiens, non plus
homme de loi, mais homme de guerre. Toutes les fonctions hier détenues par des
spécialistes sont maintenant dévolues à des grands serviteurs du palais, qui
partagent les responsabilités politiques et diplomatiques avec leur fonction
interne. Le personnage le plus important Ă©tait cependant l'apocri-
siaire, « officier préposé aux affaires
ecclésiastiques », selon la définition d'Hincmar, et qui nommait sous Louis le
Pieux l'archichapelain. Cet office avait été créé par Constantin le Grand
quand, devenu protecteur des chrétiens, il voulut manifester son affection et
sa gratitude envers les apĂ´tres Pierre et Paul et, affirme encore Hincmar, il
fit don de la ville de Rome au pape saint Silvestre quand il quitta l'antique
cité pour s'installer à Constantinople. Le pape et l'empereur eurent alors
besoin d'un intermédiaire, légat du Saint-Siège auprès du souverain. Saint
Grégoire le Grand, avant d'être élu pape, fut apocrisiaire du pape Pélage II
auprès de l'empereur Tibère II. La fonction avait changé ; l'apocrisiaire
n'était plus un légat du pape auprès de l'empereur d'Orient, mais un chef du
personnel ecclésiastique du palais impérial d'Aix-la-Chapelle ; et s'il avait
tant d'importance, ce n'était pas à cause de l'autorité politique qu'il pouvait
exercer, mais en tant que représentant de la religion chrétienne auprès de l'empereur.
Son office s'étendait d'ailleurs sur un très vaste domaine, car il n'était pas
seulement responsable du clergé et des cérémonies du palais, mais en outre des
diocèses et des abbayes. À l'origine, l'apocrisiaire n'était que l'aumônier du
roi pour son oratoire d'Aix ; l'oratoire ne se nommait pas chapelle, ni
l'aumônier chapelain. Or, ce modeste lieu saint, outre le privilège de son
caractère royal, possédait une relique insigne, la tunique de saint Martin. Ce
précieux vêtement avait été emprunté par un roi mérovingien, probablement
Clotaire Ier, pour le faire porter comme gage de victoire devant ses troupes
quand il partait pour la guerre. Dans l'intervalle, il le plaçait dans un
oratoire du palais royal. Cette conduite fut imitée par ses successeurs. Or, la
tunique de Martin portait un capuchon, et fut appelée pour cette raison cappa
(du latin caput, tête), en français chape. Et le lieu où elle était conservée prit le
nom de chapelle, dénomination conférée ensuite à tous les oratoires. Aix est la
traduction française du latin aquœ, « les Eaux », sous-entendu
« thermales ». Avant d'être choisie pour résidence des Carolingiens,
Aix-la-Chapelle s'appelait Aquœ Grani.
Elle devait son nom, d'après la légende, au légat romain Granus
Serenus, qui aurait découvert les sources, ou, selon
une autre version, à Granus, frère de Néron, qui
bâtit à cet endroit le premier palais, mais plus vraisemblablement à Granus, dieu celte qui avait de l'analogie avec Apollon.
Les Pépinides s'emparèrent de la prestigieuse relique,
et Pépin le Bref, installant une nouvelle résidence à Aix, l'y plaça dans son
oratoire. Ce fut ainsi que la bourgade thermale d'Aix devint Aix-la-Chapelle,
et que l'aumônier du roi en devint spécifiquement le chapelain. Charlemagne,
qui aimait prendre les eaux en cet endroit, le préféra à tout autre ; il
conserva la fameuse chape, et fit agrandir l'oratoire pour le transformer en
basilique ; celle-ci prit la forme d'un sanctuaire octogonal, surmonté d'une
coupole byzantine imitée de Saint-Vital de Ravenne Le troisième étage, désigné aujourd'hui encore sous le
nom de « salle impériale », avait été conçu pour être une « Capella », c'est-à -dire
une salle réservée aux prestations de serment sur la « Cappa », manteau de
saint Martin, et plus tard, après la disparition de ce manteau, sur la cappa de
saint Martial que l'on peut voir actuellement à Aix. Le haut relief situé dans
le hall d'entrée de l'église Notre-Dame de Maastricht, qui se trouvait
auparavant dans l'abside, représente une prestation de serment sur la Cappa,
devant l'empereur. L'un des deux assistants encadrant l'empereur, assis sur son
trône, porte l'épée impériale. Devant l'empereur est agenouillé le candidat au
serment ; la Cappa est déposée sur une petite colonne. Cette œuvre très
intéressante du point de vue historique a sans doute été réalisée vers 1204.
[...] Cette salle servait vraisemblablement, comme autrefois la salle royale,
aux assemblées « profanes » présidées par l'empereur, dans la mesure où l'on
peut qualifier de « profanes » ces séances au cours desquelles se faisaient la
prestation du serment sur la « Cappa », l'attribution de fiefs et où l'on
rendait justice "Persécutions"
de l'Eglise et paix universelle Les trois dates de 11, 3 et 25 années de persécutions,
additionnées font 39. A sa mort qui arriva en 1250, après cinquante-trois ans
de règne comme roi de Sicile et trente-neuf comme empereur d'Allemagne,
Frédéric II avait laissé le royaume de Sicile à son fils Conrad, alors en
Allemagne, et avait nommé régent, en attendant son retour, son fils Manfred,
prince de Tarente Il ne s'agit pas ici de recenser toutes les péripéties du
conflit entre les papes et l'empereur. Notons ce qui se passa sous Innocent IV
: Son premier et principal soin, dès qu'il fut élu, fut de
terminer la lutte qui s'était élevée entre Frédéric II et l'Église, lutte qui
s'était extrêmement aigrie sous Grégoire IX, et de rétablir la paix universelle
dans toute la Chrétienté; mais l'espoir qu'il avait conçu de voir l'empereur
répondre à ses bienveillantes dispositions fut complétement déçu. Innocent IV
proposa à l'empereur de faire décider par une assemblée de rois et des grands
de l'État et de l'Église leurs griefs réciproques, s'engageant, dans le cas où
la décision serait favorable à l'empereur, à ne rien négliger pour le
satisfaire. Frédéric ne voulut entrer dans aucune négociation avant que
l'excommunication prononcée contre lui par Grégoire IX eût été levée, tandis
que, de son cĂ´tĂ©, Innocent prĂ©tendait qu'on mĂ®t en libertĂ©, prĂ©alablement Ă
tout arrangement, les prélats retenus prisonniers. L'empereur, sans plus
tarder, envahit les États de l'Église, mettant tout à feu et à sang. Cependant,
cĂ©dant aux instances des dĂ©putĂ©s de diffĂ©rents princes, il consentit enfin Ă
entrer en conférence avec le Pape. Déjà ses députés, Pierre Desvignes
[Pierre de la Vigne, voir ci-dessus] et Thaddée de Suessa,
avaient fait des promesses solennelles, lorsqu'ils rompirent brusquement les
conférences. Innocent IV, apprenant que l'empereur lui dressait des embuches pour
s'emparer de sa personne, se réfugia en toute hâte sur les galères de Gênes, sa
patrie, et de là , après être entré en convalescence d'une maladie mortelle, il
se rendit à Lyon, où il convoqua un concile œcuménique. Cette assemblée devait
non-seulement juger le différend entre l'empereur et le Pape, mais encore être
consultée sur les moyens d'empêcher les progrès des hérétiques et de prévenir
les malheurs dont l'invasion des Tartares menaçait l'Occident. Dans la
troisième session (17 juillet 1245) l'empereur fut excommunié et destitué de
ses honneurs et de ses dignités, pour s'être rendu indigne par ses crimes du
pouvoir suprĂŞme. En face de la lutte mortelle qu'un pareil arrĂŞt devait
nécessairement entraîner, Innocent IV proclama qu'il était prêt à affronter la
mort pour soutenir la volonté du concile, et, afin que les cardinaux se
souvinssent de cette espèce de testament solennel, Innocent leur donna à cette
occasion le chapeau rouge, dont toutefois ils ne se servirent pour la première
fois qu'un an plus tard, lors d'une entrevue entre le Pape et Louis IX.
L'intervention de ce monarque, qui, Ă la demande du Pape, avait entrepris de le
réconcilier avec l'empereur, n'eut pas le résultat désiré. Cependant, pour
mettre à exécution la sentence de déposition de Frédéric II, les princes d'Allemagne
élurent roi des Romains, à l'instigation du Pape, le 17 mai 1246, Henri Raspe, landgrave de Thuringe, auquel, après sa prompte
mort, ils donnèrent pour successeur Guillaume, comte de Hollande (29 septembre
1247). Innocent IV ne ménageait rien pour abattre en Allemagne le parti des
Hohenstaufen et relever l'autorité de l'antiroi. Il finit même parfaire prêcher
une croisade contre Frédéric II, son fils, le roi Conrad IV, et ses partisans.
Après la mort de Frédéric II, en 1251, Innocent revint en Italie. Il s'arrêta
quelque temps à Gênes, à Milan, près d'un an et demi à Pérouse, et finit, à la
demande instante des Romains, par revenir à Rome, où il fut reçu, en octobre
1253, avec les cris de joie ordinaires d'un peuple mobile dans ses haines comme
dans son amour. Conrad avait, à la tête d'une nombreuse armée, envahi la basse
Italie et s'en Ă©tait soumis toutes les villes. Innocent, pour se procurer un
appui contre ce prince, offrit le royaume des Deux-Siciles d'abord Ă Richard,
comte de Cornwalls, frère d'Henri III, roi
d'Angleterre, qui était puissamment riche. La négociation échoua, Richard
n'ayant point accepté les conditions du Pape. Il en arriva de même de la
négociation qu'on entama avec Charles, comte d'Anjou et de Provence, frère de
Louis IX, qui avait sollicité l'investiture du royaume de Sicile, mais que ses
amis et ses parents avaient détourné de se mêler d'une entreprise aussi
hasardée. Tandis qu'en dernière analyse Innocent IV négociait, par son légat
Albert, avec Henri III, roi d'Angleterre, qui avait fini par proposer son fils
Édouard pour le royaume de Sicile, Conrad IV mourut, à peine âgé de
vingt-quatre ans. Cet événement affaiblit singulièrement le parti des Hohenstaufen
en Italie ; Mainfroi [Manfred] lui-mĂŞme se
soumit à Innocent IV, et au bout de très-peu de temps la paix sembla rétablie
dans la basse Italie. Mais Ă peine on respirait que Mainfroi
abandonna la cause du Pape, se mit à la tête des Sarrasins de Nocéra, et battit complétement l'armée pontificale, le 2
décembre 1254. Cinq jours plus tard Innocent IV mourut à Naples; son corps
repose dans la cathédrale de cette ville. Il avait heureusement rempli sa
mission en sauvant la liberté de l'Eglise des mains de ses plus dangereux
adversaires Tous les empereurs médiévaux s'en étaient
faits les champions. A la fin du XIe me siècle, Henri IV la défend contre
Grégoire VII et les apologistes de l'empereur vitupèrent les grégoriens qui
combattent «le prince de la paix». «Notre patrie n'a pas d'autre nom que celui
de la paix» écrit Walram de Naumburg, et Pierre
Crassus fait de son maître «le créateur, le prêcheur, le protecteur de la
paix». Il appelle toute la chrétienté à la résistance contre Hildebrand «ennemi
des lois, ennemi de la paix, ennemi de la communauté tout entière». Cent
cinquante ans plus tard, Frédéric II renoue la tradition. «Le roi, proclame
l'exorde du Liber augustalis, fera tout ce qui sera
en son pouvoir pour conserver aux peuples la paix, et doter les peuples
pacifiés de la justice...» et cette phrase devient un leitmotiv repris tout au
long des constitutions de Melfi. Frédéric II convoque
un parlement Ă Ravenne «pour rĂ©tablir la paix universelle de l'empire, rendre Ă
l'Italie un état prospère et tranquille, apaiser les querelles entre cités...
et écarter tout trouble et toute semence de haines » (Walram
de Naumburg, De unitate ec-
H., Leges, s. IV, Const.,
II, p. 155: "desiderio summo
zelantes ad honorem Dei et imperialem gratiam paxcem universalem imperii reformate, disponere statum Italie prosperum et tranquilium sedare dissidia civitatum intus et extra ferventia et inter
vicinos populos omnem turbidinem et odii fomitem amovere") Typologiquement on ne s’étendra pas sur le conflit entre le pape et Napoléon, plus qu’entre celui-ci et l’Eglise puisqu’il rétablit le culte catholique en France. Dans cette partie de la Lettre à Henry, depuis la seconde chronologie biblique (voir "1792"), l'intérêt est porté sur la maison de Savoie. On la retrouve dans les quatrains V 3,6,7,29,30,39,44,49,50 interprétés comme illustration de la formation de l'unité italienne. On pourra dire que, les Centuries s'incrivant, par l'époque de leur rédaction, dans le contexte des guerres d'Italie, des connexions avec cette région européenne s'en suit. |