Les Angelets

Les Angelets

 

VII, 2

 

2000-2001

 

Par Mars ouvert Arles ne donra guerre,

De nuict seront les soldats estonnez :

Noir, blanc Ă  l'inde dissimulez en terre,

Sous la feincte ombre traistre veuz & sonnez.

 

Mars - Arès

 

Le col d'Ares fut toujours un lieu de passage : son nom, comme celui d'Arles sur Tech, vient peut-être d'autels élevés sur les hauteurs, au col même, en l'honneur des divinités protectrices des itinéraires montagnards. Dès le Moyen âge, c'est là que passaient les Roussillonnais attirés par les foires de Camprodon ; le col devait être même très fréquenté alors puisqu'un hospice y fut construit pour assister les voyageurs et les pèlerins : sa chapelle, faite de grocs blocs et dédiée à sainte Marguerite, est encore debout (Michel Bouille, Jean François Brousse, Chemins du Roussillon, 1969 - books.google.fr).

 

Au col d'Ares franchi pour la première fois par les Carthaginois, l'attribution de ce nom fut faite pour glorifier le Dieu de la Guerre chez les Grecs d'Ampurdan. [...] Le col d'Arès, c'est le col de Mars, le Dieu de la guerre des Latins. Ce sont les Latins qui fondèrent Port-Vendres le port de Vénus. Sur un rocher, au bord du rivage, se trouvait le temple de la Déesse. Les Grecs d'Ampourdan avaient depuis longtemps honoré cette même Déesse qu'ils appelaient Aphrodite et le temple l'Aphrodision, sur les pics escarpés voisins du port de Rodhas, le Rosas actuel, était l'objet de visites continuelles des navigateurs en mal d'amour (Georges Dominique Bo i Montégut, Légendes populaires des villages du Roussillon, 1978 - books.google.fr).

 

Les Angelets

 

L’impôt sur le sel est aboli par les tribunaux catalans depuis le temps du roi Jacques II de Majorque, en 1283. En 1661, les Français le rétablissent. Son montant est destiné à financer

l’entretien et la construction de places fortes, ainsi que le traitement des fonctionnaires français. La mesure est très impopulaire. En Vallespir, pays de pâtures, le sel est nécessaire à l’alimentation du bétail et à la conservation de la viande.

 

Lors de la première révolte (1667-1668), la contrebande s’organise. Les contrôleurs traquent les trafiquants, pour tenter de mettre fin à cette activité. Les paysans réagissent, se transformant en véritables guérilleros, harcelant les soldats français, et surtout les fonctionnaires de la gabelle. Une résistance armée s’organise, sous la conduite de Josep de la Trinxeria, un négociant de Prats-de-Mollo.

 

Le président du Conseil souverain, Francesc de Segarra, offre une récompense de 100 doubles d'or à qui dénonce les chefs des résistants. Le 14 septembre 1668, il part avec 300 soldats se

baser à Arles, afin d’engager une dure répression. L’expédition punitive est mise en déroute au pas del Llop, et doit se replier sur Arles.

 

Les autorités de la gabelle se résolvent à négocier : la lutte armée cesse et, en échange, les communes du Vallespir peuvent se procurer du sel de contrebande. Par le «compromis de Céret», les percepteurs du sel s’engagent à mettre fin aux contrôles et à s’entendre avec le conseil de chaque village, qui est chargé désormais de la distribution aux habitants.

 

La seconde révolte (1670-1674) est déclenchée en 1669, en Conflent, par Joan Miquel Mestre, dit le Juste Héritier, qui exige un semblable arrangement pour Baillestavy. De septembre à novembre, il reprend la traque des gabelous. C’est à ce moment-là que les révoltés sont désignés sous le nom d’«angelets».

 

Il est arrêté sur la route de Camprodon en janvier 1670. Ce qui déclenche une révolte des habitants, menés par Josep de la Trinxeria qui prennent en otage la femme et les enfants du gouverneur, et négocient leur libération contre celle du Juste Héritier. L’échange effectué, les angelets redescendent le Tech, voyant leur troupe grossir jusqu’à 1 500 hommes.

 

À ce moment, la révolte non seulement reprend, mais se durcit considérablement. Les combats s’étendent à tout le Vallespir : le 27 février 1670, les insurgés s'emparent d'Arles, dont ils chassent la garnison et tuent le maire (fr.wikipedia.org - Angelets).

 

Un des premiers pĂ©nalisĂ©s de ces agissements est Pierre-Paul Riquet, le fermier de la gabelle du Languedoc, d'autant plus qu'il a entrepris depuis 1666 la construction du «canal royal du Languedoc» (renommĂ© le canal du midi Ă  partir de la RĂ©volution française) dont il est, avec la Province du Languedoc et l'Etat, le troisième financeur Ă  hauteur de 20%. Il a aussi depuis 1666 la jouissance des mines de fer du Canigou pour la construction de ses Ă©cluses. Dans une lettre datĂ©e du 28 janvier 1688, il s'en inquiète auprès de Jean-Baptiste Colbert, le contrĂ´leur gĂ©nĂ©ral des finances de Louis XIV : «[...] la guerre d'Espagne me fait plus de mal que je ne saurais vous dire. Les miquelets courent sur mes commis, les tuent, enlèvent mon argent, et les affaires Ă  ce point que personne ne veut plus demeurer sur la frontière, que j'ai Ă©tĂ© contraint de faire abandonner et retirer les gardes des gabelles au milieu dudit pays» (GĂ©rard Rabat, Les Angelets en 1670 Ă  Py, 2019 - pideconflent.free.fr).

 

"traistres"

 

Le 27 février 1670, vers 10 heures du matin, à Arles, trois jeunes gens arrivent en courant «de la maison que l ' on appelle lo martinet (d'en Torrent)» criant que l'on a tué le batlle Abdon Guerra. Le consul fait sonner «la cloche à sometent». Les habitants s'assemblent en armes et se dirigent vers la forge. Ils entendent des coups de feu. «C'était deux hommes dont on disait qu'ils étaient de ceux qui avaient tué ledit Balle de Arles et qu'ils avaient tiré à nouveau non pas pour  faire de mal aux gens du sometent (...) sinon par galanterie ce que l'on appelle communément pour chahuter (per algarepar)». On retrouve le batlle «mort de deux blessures mortelles faites par des armes à feu l'une au cou aux veines jugulaires et l'autre sous la mamelle gauche avec d'autres blessures au bras». L'homme se trouvait à la forge «pour ses  propres affaires » en compagnie des dénommés Viosa et Bassú, estiradors (étireurs de fer). Cinq individus sont entrés et l'ont tué. Il s'agit de Josep Sellas, de Fontanills, de Pau Manorga, de Céret, du roig de Paracolls, de Montalbà, de Pere Llobera de Saint-Marsal - mais qui habite Palalda - et de Josep Valls, des Bains, dit quatre ulls. Les consuls décident de fermer une des portes de la ville, de murer la porte del hospital, et de laisser l'autre, celle d'avall, ouverte mais gardée par douze hommes payés deux réaux chacun. Un témoin pense que l'on a tué le batlle parce que les Angelets «le tenaient pour traître car c'est ce nom qu'ils donnent à ceux qui ne sont pas de leur côté», et qu'il aurait dit au sous-batlle de la ville que s'il capturait ou tuait l'un des amis de l'hereu Just, il lui donnerait dix doublons. C'est peut-être parce que le batlle décide de ne plus payer les Angelets comme gardes de la gabelle que ceux-ci se débarrassent de leur employeur. Il semble en effet que les Angelets aient été payés comme gardes «jusqu'à trois ou quatre jours avant que l'on tuât ledit batlle» (Alain Ayats, Les guerres de Josep de La Trinxeria (1637-1694): la guerre du sel et les autres, 1997 - books.google.fr).

 

La fin de la révolte

 

Les Français envoient une armĂ©e de 4000 soldats. Évitant d’offrir une cible facile sur la route de la vallĂ©e, ils progressent par les montagnes du Haut Conflent qui sĂ©parent les deux comarques, afin de prendre le Vallespir Ă  revers. La technique de guĂ©rilla ne permet pas de soutenir une bataille rangĂ©e, en terrain dĂ©couvert, face Ă  une armĂ©e complète : le 5 mai, les angelets sont dĂ©faits au coll de la Regina, au pied du pla Guillem11. Certains se rĂ©fugient dans la principautĂ© de Catalogne, d’autres se cachent dans les montagnes. Dernier bastion des angelets avant la dĂ©faite, le village de Py est condamnĂ© Ă  ĂŞtre rasĂ©. Du sel doit ĂŞtre rĂ©pandu sur ses ruines.

 

Les hostilités sont ravivées par la guerre de Hollande (1672-1678), dont la frontière espagnole devient un des théâtres. La lutte de la population prend alors un caractère de soulèvement antifrançais. Les angelets collaborent avec la monarchie espagnole.

 

En 1675, le comte de Schomberg chasse les Espagnols qui occupent une parie du roussillon définitivement. La région est maintenant envahie par les troupes françaises. La répression atteint toute la population : emprisonnements, condamnations aux galères, exécutions, confiscations de biens, lourdes amendes infligées aux communes (fr.wikipedia.org - Angelets).

 

"nuict"

 

Au mois d'avril 1663, les incidents se multiplient autour de Saint-Laurent-de-Cerdans, au point que le brigadier en place démissionne. Il est remplacé par un autre plus zélé, qui, le 23 mai 1663, arrête un groupe de muletiers dont l'un porte effectivement du sel de contrebande. Mais les muletiers réussissent à s'enfuir, alertant les villages alentour ; les gabeleurs doivent leur salut à l'abri des bois où ils restent cachés jusqu'à la nuit Le 29, le Visiteur Général des gabelles donne l'ordre d'arrêter les muletiers de Saint-Laurent. Ce n'est pourtant que le 4 août que l'un d'eux est reconnu et arrêté par le brigadier Gadès et ses hommes qui l'emmènent vers Arles. Pendant ce temps, le tocsin a sonné et de tous les villages descendent des hommes en armes qui traquent les gardes de la gabelle, les obligent à se réfugier dans un cortal où ils les assiègent et finalement les tuent tous, sauf un, blessé et laissé pour mort. Dès lors commencent, à la requête du fermier de la gabelle, une série d'informations qui ouvrent la longue liste de toutes celles qui seront faites jusqu'en 1673 (Alícia Marcet i Juncosa, Du Roussillon et d'ailleurs: images des temps modernes, 1993 - books.google.fr).

 

Il faut que "le fermier général mette deux ou trois brigades desdites gabelles autour de cet étang [de Vilanova] pour empêcher que personne ne puisse enlever desdits sels et comme l'on craint que ne s'assemblent en grand nombre les angelets et autres faux-sauniers pour venir de jour ou de nuit insulter lesdits gardes des gabelles" (Alain Ayats, Les guerres de Josep de La Trinxeria (1637-1694): la guerre du sel et les autres, 1997 - books.google.fr).

 

Un arrêt du Conseil du Roi défend «à tous les sujets du Roi en Roussillon, Conflent et Cerdagne de porter du laques, bayonettes... et d'autres armes... soit de nuit ou de jour, à peine de la vie contre ceux qui s'en trouveront saisis» (Joaquim Albareda i Salvadó, Del patriotisme al catalanisme: societat y política, segles XVI-XIX, 2001 - books.google.fr).

 

Abbayes et Angelets

 

Au début de la guerre de dévolution, un complot pour livrer Collioure aux espagnols est déjoué. L’abbé de Saint-Genis des Fontaines, Mauro de Rea, impliqué dans la conspiration

de Collioure en 1667, est garrotté en place publique (Gérard Rabat, Les Angelets en 1670 à Py, 2019 - pideconflent.free.fr).

 

L'abbé de Saint-Genis-des-Fontaines, Maur de La Rea, tenta de faire livrer au vice-roi de Catalogne la place et le château de Collioure, principal port et une des principales forteresses du Roussillon. La situation de Saint-Genis était très particulière, car elle faisait partie intégrante de celle de Sainte-Marie de Montserrat, dans le Principat, ses moines étaient moines de Montserrat, ses abbés étaient désignés pour trois ans par l'abbé de Montserrat (Alicia I Marcet Juncosa, Le rattachement du Roussillon à la France, 2020 - www.google.fr/books/edition).

 

L'abbaye de Saint-Genis-des-Fontaines et ses deux consœurs roussillonnaises, Sainte Marie d'Arles et Saint André de Sureda sont les premiers monastères carolingiens de cette région, crées par des hispani venus des espaces d'outre-Pyrénées: Castellan à Arles, Sentimir à Saint Genis, Miron à Saint André après l'échec de la première campagne carolingienne contre Al Andalous et l'essai de reconquête. Ces trois monastères, et d'autres après eux, joueront un rôle considérable dans le repeuplement, la réorganisation et la relance économique de la région (L'Abbaye de Saint-Genis-des-Fontaines et l'ASVAC - sites.google.com).

 

"feincte ombre", ou "sainte ombre"

 

Sous ombre de religion ?

 

On désigne sous le nom de miquelets les francs-tireurs de la montagne parce qu'ils se placent sous le patronage de Saint-Michel. On les appelle aussi : Angelets de la terra, petits anges de la terre (Horace Chauvet, Histoire du Roussillon des origines à nos jours, 1962 - books.google.fr).

 

Et Ă  l'ombre de l'abbaye Sainte Marie d'Arles.

 

"inde" 1 : Inda

 

La Règle bénédictine dut être introduite en Catalogne dès les premières armées de la conquête franque en effet, il n'est pas concevable d'imaginer que l'action de Benoît d'Aniane soit restée limitée à la Septimanie, d'autant qu'il fut envoyé à Urgea comme missus. Au lendemain de la crise adoptianiste, la restauration de l'orthodoxie favorisa la diffusion des pratiques bénédictines ; cette précocité explique que les plus anciens manuscrits catalans transmettent une recension par-ticulière de la Règle, probablement d'origine narbonnaise ; pour A. M. Mondé, c'est le texte même qu'aurait apporté Benoît d'Aniane lors de sa mission à Urgell. Toujours est-il que, quel que soit l'attachement des maisons anciennes à la tradi-tion wisigothique, les fondations nouvelles subissent très tôt l'influence béné-dictine. Quant l'abbé Calortus de Tavemoles fonde l'abbaye de La Vedella, il lui donne la règle de saint Benoît, en dépit du régime mixte qui continue de régir sa propre maison (Michel Zimmermann, Ecrire et lire en Catalogne: IXe-XIIe siècle, Volume 2, 2003 - books.google.fr).

 

Né Witiza en Septimanie vers 750, Benoît d'Aniane était le fils du comte de Maguelone (en Gothie alias Septimanie, à 10 km au sud-ouest de Montpellier), est d'origine wisigothe. Une tradition tardive (année 1652) et sans autorité donne à son père le nom d'Aigulfus. Son œuvre de réforme du monachisme est essentielle dans l'essor de l'Ordre bénédictin en Europe, ce qui lui vaut le surnom de second Benoît (après celui de Nursie).

 

Benoît mourut en odeur de sainteté dans le «Monasterium ad Indam» c’est-à-dire dans le «monastère près de la rivière Inda» (l'abbaye de Kornelimünster à Aix-la-Chapelle), fondé par lui, le 11 février 821. Les moines de l'abbaye demandèrent alors au frère Ardon, alias Smaragde, qui connaissait l'abbé depuis longtemps et était mieux placé que personne pour parler de celui-ci, de devenir son hagiographe. Telle est l'origine de la Vita Benedicti abbatis Anianensis et Indensis, qui nous a été transmise à l'intérieur du Cartulaire d'Aniane (XIIe siècle) (fr.wikipedia.org - Kornelimünster).

 

"noir, blanc"

 

Si, par ces termes, entendez les calumniateurs de mes escrits, plus aptement les pourrez vous nommer diables; car, en grec, calumnie est dite diabole. Voyez combien detestable est devant Dieu et les anges ce vice dit calumnie (c'est quand on impugne le bien fait, quand on mesdit des choses bonnes) que, par iceluy, non par autre, quoy que plusieurs sembleroient plus enormes, sont les diables d'enfer nommés et appellés. Ceux cy ne sont, proprement parlant, diables d'enfer, ilz en sont appariteurs, et ministres. Je les nomme diables noirs, blancs, diables privés, diables domesticques. Et ce que ont fait envers mes livres, ilz feront, si on les laisse faire, envers tous autres. Mais ce n'est de leur invention. Je le dis, afin que tant desormais ne se glorifient au surnom du vieux Caton le censorin (Livre IV, ancien prologie).

 

Diables noirs, blancs : ce sont, dit l'abbé Morellet, dans ses notes, les principales couleurs des vêtements des moines : minimes, cordeliers, bernardins, augustins, bénédictins sont les noirs : les blancs sont tous les chanoines réguliers, les jacobins sont pies (Jean Henri Burgaud des Marets, Oeuvres de Rabelais, Tome 2, 1873 - www.google.fr/books/edition).

 

Les «diables noirs et blancs», c'est-Ă -dire les religieux des divers ordres, avaient eu facilement l'avantage en 1548, moment d'Ă©clipse passagère pour la fortune de Rabelais; ils Ă©taient devenus moins arrogants en voyant le nouveau roi protĂ©ger leur ennemi comme son prĂ©dĂ©cesseur : mais quel ne dut pas ĂŞtre leur scandale quand, le 18 janvier 1550, l'auteur de Pantagruel fut nommĂ© curĂ© de Meudon ! (Paul Stapfer, Rabelais: sa personne, son gĂ©nie, son oeuvre, 1889 - books.google.fr).

 

Pour Caton cf. quatrain de la mĂŞme Centurie VIII, 26 - Incunables espagnols et politique - 2049. Pour Rabelais voir VIII, 1.

 

"inde" 2

 

Le 20 juillet 1670, sur le territoire de Reynès, près de la forge «scituée sur le grand chemin d'arles a ceret», trois soldats en garnison aux Bains sont attaqués par «trois paysans ou angelets» «a coups de xispes». Deux sont tués, l'autre blessé. Le soldat blessé est conduit dans la forge de don Francesc Ros et explique que lui et ses amis «estoyent la en cet endroit pour amasser des mongettes, Et qu'ilz avoyent pris au paravant un coq dinde a une metairie ou estoit loge [leur lieutenant] priant luy deposant de dire aud[it] [lieutenant] de payer led[it] coq dinde». Peu après le soldat meurt. A côté des deux premiers cadavres «deux coqs d'inde mortz et plumez ayant esté plumes au mesme endroit parce quil y a trouve la plume, il y a trouve de mesme quatre abrisacz dans lun desquels il y avoit un desd[its] coqs dindes  et dans les autres du [sic] mongettes des choux et deux ou trois petites carabasses , lesdits ] deux hommes mortz estoyent despouillez nayant que leurs chemises et lun deux ses solliers , nayant veu aucune espes auprez deux ny autres armes».

 

Il apparaĂ®t que les soldats ont Ă©tĂ© tuĂ©s par des armes Ă  feu et des coups d'Ă©pĂ©e. Nous pourrions penser que les trois hommes ont Ă©tĂ© tuĂ©s par des paysans mĂ©contents. Mais un tĂ©moin fait savoir que le puisatier d'Agullana, petit village situĂ© derrière la frontière, lui a dit : «Je vis passer par ici trois hommes qui portaient les habits et les Ă©pĂ©es courtes des soldats que l'on avait (qu'ils avaient ?) tuĂ©s et ils passèrent ensuite par le lieu d'Agullana en Catalogne oĂą les gens (...) les avaient disputĂ©s leur disant que cela ne pouvait que causer du mal puisqu'ils tuaient des soldats du Roi» (Alain Ayats, Les guerres de Josep de La Trinxeria (1637-1694): la guerre du sel et les autres, 1997 - books.google.fr).

 

Les termes coq d'Inde et poule d'Inde sont abrégés en dinde, l'emploi de ce mot étant attesté en 1600 dans le traité Théâtre d’Agriculture et mesnage des champs de l'agronome Olivier de Serres, qui parle de «l'importun piaulement des dindes», le nom étant à cette époque aussi bien masculin que féminin, usage qui perdure dans bon nombre de parlers populaires.

 

Le substantif féminin dinde est issu de coq d'Inde, poule d'Inde et poulet d'Inde (respectivement «dindon», «dinde» et «dindonneau»), désignant - comme le latin médiéval gallina de India - la pintade originaire d'Abyssine appliqué ensuite au dindon - introduit du Mexique, pays des Indes occidentales espagnoles - puis à sa femelle (fr.wikipedia.org - Dinde).

 

Le dindon ne nous est guère utile qu'à la manière du cochon, parce que sa chair est délicieuse; c'est en mourant qu'il paye les soins qu'on a pris de lui. C'est le plus gros oiseau de nos basses-cours. [...] La couleur des plumes varie du noir au blanc (Cours élémentaire d'histoire naturelle. Le Buffon de la jeunesse: Zoologie - Botanique - Minéralogie, 1859 - books.google.fr).

 

A partir de François Ier, le dindon reçoit en France le nom de «coq des jésuites», ce qui autorise la supposition que les Pères Jésuites développaient leur importation toujours des iles d'Inde découvertes au siècle précédent (Henri Pensa, Sorcellerie et religion: du désordre dans les esprits et dans les moeurs aux XVIIe et XVIIIe siècles, 1933 - books.google.fr).

 

Voir le "donra" du vers 1 (de donner) avec dindon (cf. "digne d'un don").

 

Le Moine espagnol de Dryden présente un moine comparé à un coq d'Inde (Alphonse Royer, Histoire universelle du théâtre, Tome 4, 1870 - books.google.fr).

 

Le curé et le moine sont, dans les fabliaux et les farces, des protagonistes des burlesques trompeurs et trompés. On leur reconnaît en toute affection une sexualité à problèmes (par excès), la capacité d'utiliser leur rhétorique et leur autorité à des fins dévoyées (tromper le mari, convaincre la femme, extorquer des finances). Sexualité, simonie, gourmandise, mensonge, on en passe (Thierry Wanegffelen, L'humaniste, le protestant et le clerc: de l'anticléricalisme croyant au XVIe siècle, 2004 - books.google.fr).

 

Dans la farce Le Savetier, le Moine et la Femme, le moine, [dindon de la farce] revĂŞtu des habits du mari, se fera rosser par la femme ; mais il se fera aussi rosser devant le public en tant que moine paillard, et lĂ  par le mari dĂ©guisĂ© en femme ! (AndrĂ© Tissier, Recueil de farces (1450-1550), 1986 - books.google.fr).

 

Autre passage du Col d'Arès

 

Avec la guerre de la Ligue d'Augsbourg, dite aussi des neuf ans (1688-1697) et pendant que Montclar et Mélac s'illustrent dans le Palatinat, c'est le gouverneur du Roussillon, Anne-Jules de Noailles qui prend le commandement de l'armée française en Roussillon pendant qu'au Principat a lieu la révolte populaire des barretines. Du fait de la dure répression du Vice-roi, le Duc de Leganès, aidé des miquelets de Trinxeria, les révoltés se tournent vers la France qui ne manque pas de les soutenir. Entre autre chose, Trobat les intègre dans des compagnies de miquelets de l'armée française dont certaines seront uniquement composés de barretines.      Le 17 mai 1689, Noailles passe avec difficultés le col d'Ares avec quelques pièces d'artillerie et s'en va faire le siège de Camprodon et son château qu'il prend le 25 mai. Trinxeria qui a été promu colonel de l'armée espagnole est présent lors de cette défaite. Continuant sa campagne, Noailles après avoir détruit Camprodon, s'en prend à Sant Joan de les Abadesses, à Ribes et à Ripoll qu'il détruit en 1690. Ensuite, passant par Castellfollit de la Roca qu'il détruit, il se dirige vers l'Empourdan et la Selva qu'il occupe durablement. Il est élevé à la dignité de Maréchal de France le 27 mars 1693. Des combats sanglants ont lieu sur les rives du Ter pendant que Trincheria meurt de maladie à Barcelone et le 28 juin 1694, c'est Gérone qui tombe entre les mains de Noailles. Il est nommé Vice-roi  de Catalogne et prend effectivement possession de cette dignité dans la ville de Gérone, le 9 juillet 1694 mais malade de la variole, il est obligé de laisser son titre de Vice-roi et de commandant des troupes au Duc de Vendôme qui continuera les combats jusqu'à la prise de Barcelone. Le Traité de Ryswick signé le 20 septembre 1697 met fin à la guerre de la Ligue d'Augsbourg et, entre autres choses, il prévoit la restitution à l'Espagne de Barcelone et de toute la partie du Principat occupé (Gérard Rabat, Les Angelets en 1670 à Py, 2019 - pideconflent.free.fr).

 

Maguelonne

 

Il y aurait un rapport entre les saints patrons d'Arles, Abdon et Sennen, avec les noeuds lunaires qui commandent les éclipses de soleil appelés Rahu et Ketu en Inde. Rahu et Ketu sont comptés comme planètes dans l'astrologie indienne portant leur nombre à 9. La légende des Simiots (singes) dans la région est à associer dans le lien entre cynocéphales et éclipses (nonagones.info - Autour de Rennes : Le Dragon et le Pôle de l’écliptique : Arles sur Tech, Abdon, Sennen, Râhu et Ketu).

 

Parmi ces planètes, Saturne et Vénus dont la rencontre tous les 7 ans est symbolisée par les amours de Pierre et de Maguelonne.

 

Or Pierre de Provence, qui fonda l'église de Maguelonne - et l'évêché du Sel dont les évêques frappaient, jusqu'au XIIIe siècle, monnaies à l'image de Mahomet - avait pour son saint patron une telle dévotion qu'il se cachait sous le nom de Chevalier aux clefs, et fit couvrir ses armes et son cheval des clefs croisées de l'apôtre. Maguelonne, Madeleine, Margot, fille Antonomasique de la reine Magoncia est pour les Provençaux, si nous en croyons le roman du XIVe siècle, l'étoile matutinière, Vénus. Pierre de Provence (car en Provence dans le Delta plurent les pierres tombées du Ciel au secours d'Héraclès) est Saturne (Mistral, Tré-sor...). Le long narré de leur séparation et de leurs poursuites est celui de la difficile et rare conjonction d'une planète rapide (Vénus, 224 jours) et d'une lente (Saturne, 30 ans) (Claude Gaignebet, Les jeux des clefs de Clavilègne, La Leyenda: antropología, historia, literatura : actas del coloquio celebrado en la Casa de Velázquez, 10/11-XI-1986, 1989 - books.google.fr).

 

Typologie

 

Le report de 2001 sur la date pivot 1670 donne 1339.

 

La situation particulière des îles Baléares, sous les rapports géographique et politique, explique l'exception dont elles ont été l'objet. Elles participent à la fois par leur voisinage et leur population de l'Afrique et de l'Europe, et elles ont formé successivement un royaume musulman et un royaume chrétien. [...] Trois traités de 1278, 1313 et 1339, furent conclus par les rois de Majorque, seigneurs du Roussillon et de Montpellier, avec les rois du Magreb, et publiés par MM. Champollion et Reinaud, d'après les originaux de la Bibliothèque impériale de Paris. L'un de ces traités, celui de 1339, arrêté à Tlemcen entre Jacques II et Aboul-Hassan, offre une disposition paléographique sans analogue, hors de l'Espagne, à ma connaissance, quoique les avantages en aient dû être toujours bien sensibles. Les deux textes, chrétien et arabe, y sont écrits sur la même feuille de parchemin, et disposés sur deux colonnes parallèles, se servant réciproquement de contrôle et de commentaire, validées chacune par les signatures et les sceaux des plénipotentiaires respectifs des parties contractantes (L. de Mas Latrie, Traités de paix et de commerce entre les chrétiens et les Arabes de l'Afrique septentrionale au moyen âge, Bibliothèque de l'Ecole des Chartes, Volume 27, 1866 - books.google.fr).

 

En Roussillon et Ă  cette date, la sidĂ©rurgie est une activitĂ© secondaire par rapport au sciage ce qui explique sans doute que le charbonnage ne soit que tardivement spĂ©cifiĂ© dans les textes. Cette remarque s'enrichit d'une constatation : quand les moulines sont Ă©levĂ©es, elles sont, avant 1326, toujours associĂ©es Ă  une scierie. En quelque sorte, la forge est un complĂ©ment du moulin Ă  scier, elle consomme tout ce qu'il ne peut pas utiliser, arbres dont la qualitĂ© est mĂ©diocre, branches, faĂ®te. Si dans le bail d'amodiation de la mouline, l'accès Ă  certaine essence est prohibĂ©, ce n'est jamais le cas pour le moulin Ă  scier qui la jouxte. Ainsi, mouline et moulin Ă  scier ont trouvĂ© une place complĂ©mentaire dans la lĂ©gislation très prĂ©cise mise en place avant leur implantation. Le moulin Ă  scier se voit absolument privilĂ©giĂ© ; le petit artisanat rural est en position de repli et son accès Ă  la forĂŞt peut ĂŞtre rĂ©duit lors de l'implantation d'une scierie ; enfin, Ă  la mouline, est concĂ©dĂ© ce que les autres activitĂ©s dĂ©daignent. Sans doute, ce droit aux dĂ©chets explique-t-il que la mention du charbonnage soit apparue si tard. Elle n'Ă©tait pas indispensable. Cependant, au cours de la première moitiĂ© du XIVe siècle, il semble bien que l'activitĂ© charbonnière soit devenue incontrĂ´lable, ou du moins qu'elle ait dĂ©passĂ© la place que le pouvoir royal lui avait concĂ©dĂ© dans la gestion prĂ©visible de ses forĂŞts. La faim de bois de la mouline a fait Ă©clater de l'intĂ©rieur la rĂ©glementation royale. Elle a crĂ©Ă© le dĂ©sordre. Cela est d'autant plus insupportable pour le pouvoir que son choix Ă©conomique ne privilĂ©gie pas la sidĂ©rurgie. Si la rĂ©action est tardive, elle est très sĂ©vère. A partir de 1326, la question du charbon envahit la documentation sur le bois. C'est vrai pour la zone de Prats-de-Mollo. Or, les sources sont tout Ă  fait originales. Elles se prĂ©sentent comme des complĂ©ments aux baux d'amodiation des moulines, des clauses supplĂ©mentaires en quelque sorte. Elles proposent toutes des conditions restrictives Ă  l'approvisionnement en charbon. Le charbon est limitĂ© en qualitĂ© et en quantitĂ© : on ne peut le faire qu'Ă  partir du bois sec ou mort, absolument pas Ă  partir de bois vert. Il ne peut ĂŞtre fabriquĂ© que dans certaines zones, et la quantitĂ© Ă  livrer Ă  la mouline est contrĂ´lĂ©e puisque le charbon sera exclusivement acheminĂ© en retour des charrois de minerai. De plus, cet approvisionnement devient payant (cinq deniers pour trois sacs de charbon) et de ce paiement un des parsonniers de la mouline est responsable sur ses biens. En outre, tout contrevenant se voit exposĂ© Ă  une forte amende. Le charbonnage est aussi dĂ©signĂ© comme un danger pour la forĂŞt et une zone est assignĂ©e Ă  sa fabrication. Dans un cas, les consuls des communautĂ©s de Prats sont nommĂ©s pour surveiller l'application du texte qui prĂ©voit que le dĂ©tenteur de la mouline rĂ©tribue un garde forestier. AssurĂ©ment, la mouline a dĂ©sorganisĂ© la gestion royale mais Ă©galement les usages communautaires sur la forĂŞt. La sĂ©vĂ©ritĂ© des restrictions appliquĂ©es Ă  la forge est Ă  la mesure des destructions constatĂ©es. Elle ouvre un autre temps de la lĂ©gislation royale. Rien d'Ă©tonnant que ces textes, encore limitĂ©s Ă  l'approvisionnement des usines sidĂ©rurgiques, introduisent, en quelque sorte, les grandes rĂ©formes des forĂŞts de 1339 et 1345. Elles intĂ©ressent d'abord le Conflent puis toutes les zones du Roussillon, Capcir, Cerdagne et Vallespir. Le force croissante de la lĂ©gislation se lit dans la forme des actes : le premier de ces documents est un règlement limitĂ© au Conflent et aux usages respectifs des communautĂ©s ; le second une ordonnance proclamĂ©e pour l'utilitĂ© de la chose publique et la conservation des comtĂ©s de Roussillon et de Cerdagne, un an après l'annexion par Pierre IV d'Aragon du royaume de Majorque. L'acte de 1339 prĂ©cise que le problème est rĂ©cent. Il est aussi le premier Ă  clairement indiquer que les mesures doivent permettre de «conserver et restaurer les dits bois». Cette prise de conscience s'accompagne de mesures et des amendes sont prĂ©vues. La mise en dĂ©fens est totale : dĂ©fense absolue de tailler et de charbonner des arbres verts et secs, ni mĂŞme d'entrer dans certaines parties des bois de la vallĂ©e de Conat, en Conflent. En 1345, ces dĂ©cisions s'Ă©largissent Ă  toutes les  forĂŞts royales : on ne peut ni tailler ni «dĂ©ssoucher», ni faire de charbon, ni faire de cendres Ă  partir des arbres verts, sapins, pins, frĂŞnes et mĂŞme hĂŞtres, l'essence la moins protĂ©gĂ©e au dĂ©but du XIVe siècle. Le charbon ne devra ĂŞtre Ă©laborĂ© qu'avec du bois sec ou Ă  partir d'arbres Ă  terre, et encore devra-t-il ĂŞtre fabriquĂ© dans des lieux prĂ©cis et en fosses, afin que le danger des feux de forĂŞts soit rĂ©duit car le crainte du charbon rĂ©side aussi dans sa capacitĂ© Ă  dĂ©truire accidentellement les forĂŞts, Ă  les incendier. L'Ă©levage est associĂ© Ă  cette rĂ©glementation : il est interdit de tailler des branches pour les bestiaux, Ă  moins qu'il ne s'agisse des branches les plus basses des arbres, ni de faire paĂ®tre les animaux en forĂŞt durant un certain temps, celui nĂ©cessaire pour que les «boschs novels se puxen fer» (Catherine Verna, Fer, bois, houille : forge hydraulique et gestion des combustibles (PyrĂ©nĂ©es-Languedoc, XIVe siècle), Economia e energia, secc. XIII-XVIII: atti della "Trentaquattresima settimana di studi", 15-19 aprile 2002, 2003 - books.google.fr).

 

Cf. quatrain suivant VIII, 3.

 

RĂ©voltes

 

On trouve ça et là en 2001 des révoltes : en Kabylie, en Argentine pour des motifs divers.

 

Les mouvements des «révoltes de la faim» (années 1990) atteindront leur point culminant avec le mouvement de décembre 2001 en Argentine et avec des mouvements de caractéristiques similaires en Bolivie et en Équateur (Hector Mendez, Le pouvoir populaire, La pensée de la transformation sociale en Amérique latine, 2015 - www.google.fr/books/edition).

 

La question tribale est réapparue en Algérie depuis les révoltes survenues en Kabylie en avril 2001. Celles-ci ont mis au devant de la scène publique un nouvel interlocuteur étatique : la coordination des arouch, dairas et communes - le terme arouch étant généralement employé en Algérie pour désigner les tribus (sing. arash) (Yazid Ben Hounet, Aborder la question tribale dans le cadre des Etats contemporains, Terrains et savoirs actuels de l'anthropologie, 2007 - www.google.fr/books/edition).

 

Catalans

 

A l'origine, de 2001, date de création de l'association, à 2009, les Angelets ont coordonné des penyes (groupes de supporters) de l'USAP (puis des Dragons Catalans) dans tous les Pays Catalans, afin de renforcer les liens «transfrontaliers» entre les catalans. A partir de 2006, ils ont organisé de nombreux évènements culturels en catalan (concerts, lectures de poésies, cinéma, théâtre, expositions, débats, randonnées,...). En 2010, ils ont créé un collectif de musiciens pour favoriser la création en catalan en Catalogne Nord (14 disques édités, 280 morceaux enregistrés, des dizaines de concerts organisés dans tous les Pays Catalans) (angeletsdelaterra.com).

nostradamus-centuries@laposte.net