Accident de cheval et résurrection VII, 38 2026-2027 L'aisné Royal sur
coursier voltigeant, Picquer viendra si rudement courir Gueulle, lipee, pied dans
l'estrein pleignant, Trainé, tiré, horriblement mourir. Accident de cheval Selon Guynaud, citant l’Histoire genealogique
de la maison de France de Sainte-Marthe, Henri II roi de Navarre serait
mort traîné par son cheval. Il note "etrieu"
(étrier) au lieu d'"estrain" Cela n'apparaît pas dans le Livre XIV Mais au Livre VI, on apprend que le fils aîné du roi de
France Louis VI dit le Gros, bien nommé Philippe, est mort d'un accident de
cheval en octobre 1131, deux ans après son couronnement du vivant de son père.
Bernard de Clairvaux aurait prédit cette mort eu égard à l'attitude du roi
Louis envers l'Eglise. Suger lui en fit l'apologue. Il fut inhumé à Saint
Denis. Son frère deviendra Louis VII et se mariera avec Aliénor d'Aquitaine Il y a quelques fils de rois qui décédèrent d'une chute Ã
cheval : Louis IV d'Outremer, Louis V, dernier roi des Francs carolingien
auquel succède Hugues Capet... Mais "aisné Royal"
laisserait supposer qu'il n'a pas encore régné. Le cochon derrière
le cheval Suger traite le cochon qui affole le cheval du prince
Philippe, de retour de la chasse selon certains, de "porcus
diabolicus". L'étude du vocabulaire utilisé au XIIe siècle par les
annales, les histoires et les chroniques pour qualifier la mort du jeune roi
donne une juste idée de ce qu'elle a représenté aux yeux des contemporains et
de la postérité immédiate. Il est difficile de trouver des termes plus
violents, des formules plus superlatives. Le contraste est immense entre les
mots qui décrivent la jeunesse, la douceur ou la noblesse de Philippe et ceux
qui soulignent l'ignominie de sa mort. Celle-ci est qualifiée tour à tour de
misérable (misera), pitoyable (miserabilis),
horrible (horrenda),
effroyable (horribilis), atroce (atrox),
honteuse (turpis), ignoble (ignominiosa),
haïssable (invidiosa), sordide (sordida),
infâme (infamis), immonde (immunda).
[...] Que la mort du jeune roi soit malheureuse, pitoyable, horrible même, tout
le monde en conviendra et ne s'étonnera guère des excès de vocabulaire des
auteurs qui la commentent. Qu'elle soit honteuse, infâme, immonde, appelle en
revanche quelques commentaires. Au moyen âge, la chute de cheval apparaît comme une
punition divine qui réclame conversion et repentance comme pour saint Paul sur
le chemin de Damas. La mort du jeune roi Philippe est considérée comme due Ã
l'intervention divine et elle souille la dynastie capétienne. Son père surnommé le Gros ("gras comme un
cochon") de part son obésité ne pouvait
justement plus monter à cheval. Sa mort a pour conséquence le long règne
(1137-1180) de Louis VII qui fut désastreux : échec de la seconde croisade,
divorce d'avec sa femme qui se remarie au roi d'Angleterre Henri II -
entraînant des guerres stériles -, difficulté d'avoir un héritier, incendie de
l'église de Vitry-en-Perthois qui fait 1500 morts. Pour conjurer ses malheurs,
la France adopte originalement comme emblèmes la couleur bleu, dont Suger avait
fait teinter les vitraux de Saint Denis, et le lys virginal, alors que les
autres Etats portent des motifs animaliers. Le lys pourrait être un motif
coufique donc musulman (cf. quatrain X, 79) qui tient le porc comme un animal
impur, comme dans l'Occident chrétien, mais que l'on ne doit pas consommé. Si
l'événement se fût passé au XIIIème siècle, le cochon aurait été traduit en
justice, cela jusqu'au XVIIème siècle, ou s'il se fût échappé, on l'aurait remplacé
par un mannequin, en général en paille, pour le brûler Le sanglier Il arrive aussi que le roi soit touché par
l'intermédiaire d'un de ses proches : "Le fils du roi Dagobert, Sigisbert, chassait le sanglier aux environs de cette
église. Au cours de la chasse, il tomba de cheval, son pied se prit dans
l'étrier, et il fut traîné, ainsi, par la bête. C'est à ce moment qu'arriva un
verrat furieux qui attaqua le malheureux prince et le blessa mortellement. Dès
que le roi apprit cela, il envoya quérir Arbogast; celui-ci vint aussitôt, et
pria jour et nuit, implorant Dieu de prolonger la vie du jeune homme. Dieu
exauça cette prière, et releva le jouvenceau. Pour remercier le Seigneur le roi
Dagobert transforma en couvent l'église et les bâtisses romaines que de pieuses
gens habitaient déjà . Il le nomma Ebersheimmünster,
en souvenir de l'endroit où le verrat avait blessé le jeune homme." Ainsi relate la chronique composée, dans le meilleur des
cas, sous le règne de Frédéric Barberousse, en 1162 (Chronicon
Ebersheimense, éd. L. Weiland,
M.G.H, SS, t. XXIII, Hanovre, 1874) cette résurrection elliptique qui se
traduit tout aussi rapidement par l’offrande à la Vierge, patronne de l’Église
de Strasbourg, de trois grands domaines, le premier à Rouffach, dont la familia est qualifiée de ministerialis,
que etiam militaris directa dicitur, adeo nobilis et bellicosa, le deuxième, censualis
et obediens, permagnifica
et sui iuris contenta, le dernier servilis
et censualis, suivant une tripartition révélatrice,
qui correspond, en outre, à trois anciens comtés. Le monastère dagobertin qui succède à l’ermitage est désigné du nom d’Ebersheimmünster ou Ebersmunster,
du mot Eber, sanglier, associé au suffixe -heim (traduit par domus) et Ã
Münster, formé sur le latin monasterium Arbogast, mort vers 678, était évêque de Strasbourg au
temps de Dagobert II, roi d'Austrasie, et non de Dagobert Ier Vocabulaire Le vocabulaire du quatrain rencontre la mythologie mise
en scène dans le théâtre français des XVIème et XVIIème siècles ayant pour
sujet la mort d'Hippolyte, Ã rapprocher de la chute de saint Paul, autre
épisode mythologique. Voltiger Guérin de La Pinelière
(1615-1643), à vingt ans, écrivit un «Hippolyte» imité de Sénèque, et loué par
Corneille. La Pinelière, en se posant en
partisan des modernes, adopte une attitude qui le situe dans le camp des poètes
baroques, selon Jean Rousset, qui base ses conclusions sur l'analyse d'un
Dialogue du Père Bouhours. Notre auteur angevin ne se vante pas d'être « savant
». Son Hippolyte, dit-il, a « oublié le Grec et le Latin pour apprendre le François
». La Pinelière, d'après un jugement contemporain, «
sans être fort savant aymait les livres et pouvait
enseigner les autres en estudiant », or il est
surtout fier d'avoir modernisé le sujet, et dans son Epître dédicatoire il
présente Hippolyte « avecque un équipage à la
Françoise et un nouveau train que je luy ay donné ».
Après avoir manifesté son désir d'être distingué de ses rivaux, ne serait-ce
que parce qu'il est Angevin, après avoir affirmé son indépendance des Anciens
en écrivant une tragédie moderne et dans le goût français, La Pinelière avoue sa dette envers Sénèque. Il le fait de
telle façon qu'il se sert de l'autorité du « grand Romain » pour se protéger
contre la critique des savants: « Il est... assez difficile que j'aye fait
beaucoup de faux pas, en marchant sur les traces d'un grand Romain, qui m'a esclairé dans les destours qui estaient trop sombres, et qui m'a donné la main dans les
passages les plus difficiles : je ne l'abandonne guère en cette pièce, et je
fais comme les Aiglons qui apprennent à voler: ils sortent de l'aire sur le dos
de leur mère, et s'estans hazardez
à se laisser soustenir à leurs plumes, ils voltigent
autour d'elles, et puis retournent incontinent d'où ils estoient
partis, quand ils commencent à se lasser Offrant son Hippolyte à Baudru,
le favori de Richelieu et académicien, La Pinelière
glorifie «Thésée, le grand Legislateur des Atheniens, qui adoucit avecque
tant d'adresse les humeurs sauvages & brutales de ses peuples, & qui
les rendit si sociables». Mais son Thésée reste celui de Sénèque Pour donner une idée de la versification de cette
Tragédie de La Pinelière, j'ai choisi le récit de la
mort d Hyppolite. Si l'on compare celui ci avec celui
de Racine, & que l'on examine en même tems le
même endroit dans la piece de Séneque,
on sera sans doute surpris de voir combien Racine a sçu
embellir & enrichir l'original latin ; & combien au contraire la Pineliere, par une imitation trop servile, l'a rendu foible & ennuyeux : Un grand calme sembloit endormir la nature. / On voyoit
voltiger sur l'eau mille alcyons [...] Les chevaux cependant sans guide &
sans contrainte, / Courent de tous côtés ou les porte la crainte, / Et marquent
leur chemin par des traces de sang, / Rompent sur des rochers où sa tête ou son
flanc, / Des rochers dans le bois, et du bois au rivage, / Ils laissent des
morceaux de son rare visage La paille "estrain"
ou "estrein", au cas où il ne s'agirait pas
d'étrier, vient du latin stramen, avec straminus comme adjectif De grand train sur l'étrain (beggerie) Non loin de la pacifique rue de Sorbonne fréquentée par
les graves théologiens, nous trouvons la bruyante rue de Fouarre.
La Faculté de théologie siégeait dans la paisible rue de
Sorbonne (in vico quietissimo
nominato Sorbonae), la
Faculté de philosophie dans la rue du Fouarre (in vico vocato Straminum)
et la Faculté des décrets et des décrétales au Clos-Bruneau, dans la maison
qu'habita plus tard Robert Estienne, (in vico quem
nominant Clausum Brunelli).
Le Clos Bruneau est représenté par la rue Jean de Beauvais, et quant à la rue
du Fouarre ou du Feurre, son nom est un vieux mot
français qui rappelle peut-être la paille où on faisait asseoir les écoliers; elle
est située entre la rue de la Bûcherie et la rue Galande, à quelques pas de Saint-Julien le Pauvre; des
écoles innombrables en occupaient toutes les maisons : "En celle rue, ce me samble, Veut-on et fain et fuerre ensamble."
(Guillot, Dit des rues de Paris, daté des années 1280-1300) Sénèque était philosophe. Henri Sauval (1623 - 1676),
dans son livre des œuvres royaux, nous apprend que l'intérieur de la grosse
tour, et en particulier l'appartement du roi, n'avait rien de magnifique ; car
un édit fut rendu en 1214, par lequel tout le fouarre
ou la paille qui servait à joncher la chambre royale devait, lorsque le roi la
quittait, appartenir à l'université. On l'employait alors à couvrir les
planchers des écoles, où les élèves étaient assis à terre Coursier et cheval Il y a un deuxième point où Racine et Sénèque sont
complètement d'accord et où ils diffèrent du tout au tout d'Euripide et
d'Ovide. D'après ceux-ci, Hippolyte, à la vue du monstre, ne cherche qu'Ã
maîtriser ses coursiers ; d'après Racine et Sénèque il court l'attaquer. R. v.
40. Hippolyte lui seul, digne fils d'un héros, Arrête ses coursiers, saisit ses
javelots, Pousse au monstre, et d'un dard lancé d'une main sûre. Il lui fait
dans le flanc une large blessure «Coursier», terme de style élevé désignant un cheval
rapide apte à la bataille ou au tournoi, est utilisé lorsque Racine met
l'accent sur la noblesse de l'animal et son compagnonnage avec l'homme. [...]
Le terme est utilisé dans Phèdre pour souligner le compagnonnage entre
Hippolyte et ses chevaux; Théramène résente le jeune
homme en train de : «Tantôt faire voler
un char sur le rivage. / Tantôt, savant dans l'art par Neptune inventé, /
Rendre docile au frein un coursier indompté ». L'ambiguïté de l'animal est
ici notée par l'opposition entre l'épithète de nature « indompté » qui renvoie
à la sauvagerie originelle de l'animal, et la séquence verbale «rendre docile au frein» ainsi que la
référence à «l'art par Neptune inventé», qui témoigne d'une maîtrise de l'homme
sur la bête, concédée par un dieu mais toujours menacée. Hippolyte le
soulignera dans son aveu à Aricie : «Je
ne me souviens plus des leçons de Neptune ; / Mes seuls gémissements font
retentir les bois. / Et mes coursiers oisifs ont oublié ma voix». Les
coursiers, compagnons emblématiques d'Hippolyte. semblent
encore au début du récit de Théramène refléter la tristesse de leur maître : «Sa main sur ses chevaux laissait flotter
les rênes ; / Ses superbes coursiers, qu'on voyait autrefois / Pleins d'une
ardeur si noble obéir à sa voix. / L'œil morne maintenant et la tête baissée, /
Semblaient se conformer à sa triste pensée». L'apparition du terme « chevaux »
est ici l'indice d'une dégradation qui va se poursuivre avec le surgissement du
monstre ; le terme «coursiers» sera utilisé tant qu'Hippolyte maîtrisera les
animaux ; mais ce sont des «chevaux» redevenus sauvages et insensibles à sa
voix qui le déchiquèteront : «Des coursiers attentifs le crin s'est hérissé». «Hippolyte lui seul, digne fils d'un héros,
Arrête ses coursiers, saisit ses javelots (...)» «De rage et de douleur le monstre bondissant Vient aux pieds des
chevaux tomber en mugissant (...)» «J'ai vu, seigneur, j'ai vu votre malheureux
fils / Traîné par les chevaux que sa main a nourris.» (Phèdre V) Chez Robert Garnier (1573), Hippolyte "les cheuaux ardans le trainent contre
terre / A trauers les halliers et les buissons
touffus" Les buissons épineux font face à la paille qui sert de
litière aux chevaux. La paille appelle aussi le paillard en opposition avec le
chaste (cf. "caste hyppolite" du quatrain V, 52). Le latin "lippus" (cf. "lipee")
peut signifier chassieux (yeux) suite à la débauche. "lippe"
du néerlandais signifie "lèvre" ou "bouchée", dans le
contexte de la bouche ("gueule") blessée par le frottement sur le
sol. On peut voir aussi Ména-lippé, tante d'Hippolyte
et soeur d'Hippolytè. Cette légende provient de son nom Hippolyte qui, traduit
du grec, signifie "traîné par des chevaux". "Gueulle" Dans un rêve, un animal animé d'une puissance surnaturelle
"jette un grand cri « de sa gueule béante » ; cette image est encore
revenue sous la plume de Robert Garnier, obsédé par la gueule de l'Enfer. Hippolyte
s'adosse à une souche et menace le lion de son épieu; mais le lion brise
l'épieu comme un fétu de paille, renverse Hippolyte, le « traînace
», le « boule », et lui déchire l'estomac de ses griffes, « comme un poulet
menu ». L'impression produite par ce songe n'est justifiable que par tout le
côté surnaturel qu'Hippolyte y découvre, sinon que voudrait dire l'épouvante
extrême du chasseur qui s'éveille en criant, glacé de terreur"./ [...] Ne nous laissons pas égarer par l'image d'une
chasse, le lion représente souvent le démon dans la Bible. Cette métaphore
donne tout son sens au monologue d'Hippolyte. La description du lion évoque
singulièrement la «gueule d'Enfer» des Mystères. [...] Si nous nous souvenons
du décor des mystères du Moyen Age, qu'on joue encore au XVIe siècle en
province et dont le décor à mansions demeure jusqu'au milieu du XVIIe siècle
utilisable à l'Hôtel de Bourgogne, si nous nous souvenons de ce décor, nous
nous rappelerons qu'Ã droite pour le spectateur
s'ouvrait une sorte de caverne: la gueule de l'Enfer, d'où sortaient les démons
Chez Racine, Procris apprend de
la "bouche" de la reine, Phèdre, le secret de son amour pour
Hippolyte Nerf et voltige Pour ce corps, Alberti demande mieux que la santé ; il ne
le veut pas seulement exempt de maladies mais robuste, mais maintenu jeune,
beau et fort par l'exercice et le jeu, la propreté, la diète. Au sens morphologique : la forme du corps dépend des
gestes que l'on fait pas moins que du développement de
notre musculature ; les gestes dessinent le corps, ils en découpent la forme
mouvante. Mais aussi au sens médical. Les exercices physiques sont
la condition d'un état du corps sain, d'une robustesse et d'une vigueur que les
seules studia humanitatis
ne sauraient procurer. "On ne saurait affirmer à quel point l'exercice est
utile et très nécessaire en toutes choses. Les médecins, qui ont depuis
longtemps distingué avec soin et qui connaissent tout ce qui dans les corps
humains a de la valeur, disent que l'exercice conserve la vie, augmente la
chaleur et la vigueur naturelle, éliminent les matières superflues et
mauvaises, fortifie toutes les vertus et tous les nerfs" (Alberti, Della Famiglia). C'est d'ailleurs dans le sens cette gymnastique
médicale que les traités de gymnastique se développeront, ravivant une très antique
tradition, et culminant avec le traité de Mercuriale, De arte
gymnastica (1565)Â
Au XVIe siècle, lorsque la figure de l'homme de cour se
substitue définitivement à celle du chevalier, ce moment où se diffusent des
manières spécifiques et inédites, celles dont la possession « rend digne de la conversation et faveur de
chacun grand seigneur », selon l'expression de Balthazar Castiglione en
1528. Le renouvellement des vertus, l'interrogation explicite sur les
comportements qui distinguent, renouvellent aussi les recherches et les mots
sur les choses du corps. L'insistance par les maîtres d'exercice sur la « courtoisie, la civilité, les les bonnes mœurs » ajoute aux valeurs traditionnelles
de l'homme d'armes celles jugées plus subtiles du courtisan. Balthazar
Castiglione, avec son Courtisan lu dans l'ensemble de l'Europe, suggère
clairement des qualités du corps tout en déclinant son long énoncé d'exercices
: la voltige à cheval censée rendre «
l'homme très léger et adroit », la paume censée accroître «la promptitude et
adresse des membres» la course, les sauts, censés apporter «l'agilité» Au XVIe siècle, la France subit l'influence culturelle de
l'Italie. Depuis Charles VIII et Louis XII, les relations sont permanentes.
Nombreux sont les jeunes nobles qui partent faire le voyage transalpin pour
parfaire leur éducation, notamment dans l'art équestre. [...] Au Moyen Age, la
formation se fait auprès d'un Grand, le garçon étant alors placé comme page, ou
elle se fait dans la famille auprès d'un oncle, d'un parrain, ou encore à la
maison, auprès du père. Les méthodes italiennes traversent peu à peu les
frontières et l'idée d'une éducation mieux encadrée, à l'intérieur de collèges,
fait son chemin. [...] Les traités pédagogiques fleurissent durant le XVe
siècle italien à commencer par le De civilitate morum Puerilium d'Erasme. Celui
qui a le plus de succès est sans doute le Courtisan de Balthasar Castiglione.
L'équitation y a une place majeure. [...] Si l'équitation tient une telle place
dans l'éducation noble, c'est parce qu'elle est le moyen par lequel le noble
peut accéder à la désinvolture qui fait de lui l'antithèse du paysan. Ce
naturel travaillé qui exige une maîtrise permanente de soi. L'académie correspond exactement aux désirs de la
noblesse. Il faut une institution qui permette d'encadrer les jeunes nobles, de
les priver de toute oisiveté en leur offrant une occupation digne de leur rang,
de leur ordre. De plus, il s'agit de policer, de les civiliser, en leur faisant
adopter les nouveaux codes de la Renaissance italienne, qui développent une
nouvelle culture du corps, dont force maîtrisée et agilité sont les deux pôles
essentiels Richelieu créera une autre Académie. Les nerfs d'Hippolyte apparaissent dans les Métamorphoses
d'Ovide, lorsqu'il raconte son martyr : Je tombe renversé de mon char : vous eussiez vu mes pieds
embarrassés dans les rênes, mes entrailles palpitantes, éparses çà et là , les
ronces chargées de la dépouille de mes nerf ("nervos"),
mes membres emportés en lambeaux ou suspendus autour de mon tronc, mes os se
briser avec un bruit terrible, et mon âme s'exhaler épuisée. Il ne restait de
moi rien qu'on pût reconnaître : tout mon corps n'était qu'une plaie Inceste Racine et Pradon avaient Ã
tenir compte aussi d'une tradition française, représentée par l'Hippolyte de
Garnier au XVIe siècle, au XVIIe par ceux, très inférieurs, de La Pinelière, de Gilbert et de Bidar.
Gilbert et Bidar avaient modifié la donnée légendaire
sur deux points importants : d'une part, Phèdre n'est plus la femme, mais la
fiancée, de Thésée, ce qui sauve la bienséance en écartant toute idée
d'adultère ou d'inceste; d'autre part, Hippolyte, qui selon la légende était
consacré à Diane et faisait profession de mépriser l'amour - d'où la vengeance
de Vénus -, est désormais amoureux, le ton galant qui régnait au XVIIIe siècle
s'accommodant mal d'un idéal de chasteté virile. Racine et Pradon
adoptèrent à l'égard de ces suggestions des attitudes opposées. Alors que
Racine osait revenir à la tradition antique de Phèdre mariée, Pradon se conforma à la bienséance : son héroïne n'a
pas encore épousé Thésée, évitant de mettre en scène la situation d'inceste et
d'adultère. Toutefois, pour donner plus de consistance à sa culpabilité, il
imagine qu'à défaut de la qualité d'épouse du roi elle possède déjà celle de
reine, et il prend soin de rappeler plusieurs fois dans sa pièce qu'elle porte
le bandeau royal, et même la couronne La chronique scandaleuse du tems prétendoit
que le cardinal de Richelieu avoit plus que l'amitié d'un
oncle pour madame de Combalet. Elle a fini par être
dévote, et a fait, avant sa mort, beaucoup de pieuses fondations. Aiguillon fut érigé en pairie en
1638 en faveur de Marie-Madeleine de Vignerod, fille
de René de Vignerod et de Françoise du Plessis, sœur
du cardinal, veuve d'Antoine de Beauvoir du Marquise Rouze
de Combalet. Elle n'avoit
point d'enfans Selon Pierre Le Noble, Richelieu proposa de marier sa
nièce à Gaston d'Orléans qui refusa en soufletant le
cardinal comme un "valet d'écurie" Richelieu et le théâtre L'art théâtral a fait de grands progrès sous le règne de
Louis XIII. Indépendamment du théâtre l'hôtel de Bourgogne, qui s'était élevé
en rivalité des confrères de la Passion, Paris comptait à cette époque, dans
son sein, la salle des comédiens italiens, le théâtre du Marais et plusieurs
autres petits spectacles populaires. Le cardinal de Richelieu fit construire
une salle de spectacle contiguë au Palais-Royal. C'est sur cette scène que se
jouaient les tragédies et les comédies sérieuses. Corneille s'y essaya avec
Rotrou, Colletet, Boisrobertet, l'abbé Desmarets. Le
cardinal de Richelieu lui-même mettait la main à leurs oeuvres
Richelieu mit la main au Téléphonte de Gilbert (1642). Parallèle
Suger/Richelieu On présentera ces modèles ou émules de Richelieu dans
leur ordre d'apparition historique. Suger est une timide préfiguration de
Richelieu. Suger vient compléter, vers l'amont, la série des ministres-prélats
avec lesquels le Cardinal suscite la comparaison, par pure identité statutaire.
Certes, l'abbé de Saint-Denis, conseiller de Louis VI le Gros, « roi policier »
réprimant les vassaux brigands de l'Île-de-France, puis, après sa mort en 1137,
de son fils Louis VII le Jeune, ouvre pertinemment la lignée des ministres de
cette monarchie fille de la féodalité, mais qui refuse désormais de s'en
laisser compter par elle Au XVIe siècle, un lointain successeur de Suger, le
cardinal de Lorraine avait été suspecté de prétendre au titre de régent en
raison de son abbatiat sandionysien. Le cardinal Du
Perron invoquait aussi Suger, pour montrer que les ecclésiastiques administrent
mieux l'État que les laïcs. En 1640 était paru un ouvrage intitulé Le MINISTRE
FIDÈLE représenté en la personne de Suger, abbé de SAINT-DENYS en France,
régent du royaume... Cet opuscule s'inscrit dans toute la littérature
politique, définissant l'idéal ministériel, produite à des fins spéculaires par
les serviteurs du cardinal de Richelieu. Le privilège avait été accordé Ã
l'auteur par Conrart. Dédié par Jean Baudouin au cardinal, ce livre établit des
analogies entre la fondation de la Sorbonne par Richelieu et l'action de Suger
à Saint-Denis. Dans la galerie des hommes illustres de son palais cardinal,
Richelieu a aussi fait peindre le célèbre abbé, et ce tableau est disposé juste
en face de celui du cardinal ministre. Certes Richelieu n'était pas abbé de
Saint-Denis. Mais Mazarin le fut, puis Retz Alsace C'est à l'issue de la guerre de Trente ans, dans laquelle
la France fut lancée par Richelieu, qu'une grande partie de l'Alsace passe sous
le contrôle français. Les traités de Westphalie entrainent le rattachement
d'une partie de l’Alsace, les possessions des Habsbourg regroupant
principalement le sud de la région, à la France. Cependant au milieu de ces
territoires, la République de Mulhouse (Stadtrepublik
Mülhausen) conserve son statut de ville indépendante
et Strasbourg demeure ville libre impériale. Épargnée par la guerre, la ville
de Strasbourg est néanmoins isolée, financièrement affaiblie, et n’a rien Ã
attendre du Saint-Empire vaincu Résurrection Qu'on a toujours
ressuscité des morts depuis Hippolyte, et qu'on n'en ressuscite plus On raconte qu'Hippolyte, lorsque la perfidie de sa
belle-mère l'eut tué et que, mis en pièce par ses chevaux épouvantés, il eut
satisfait de son sang à la vengeance paternelle, revint au monde, revit les
étoiles et le ciel éthéré, grâce aux herbes de Péon et à l'amour de Diane (qui
avait demandé à Esculape la résurrection du jeune homme) qui l'avaient rappelé
à la vie. Alors le Père tout puissant, indigné de voir un mortel sortir des
ténèbres infernales et renaître à la clarté du jour, plongea lui-même, d'un
coup de foudre, dans les eaux stygiennes Esculape, l'inventeur de ce remède, le
découvreur de cet art Pindare assure qu'Esculape fut porté à ressusciter
Hippolyte, par une grande somme qu'on lui promit; ce qui a fait dire à quelques-uns,
qu'Esculape aimoit l'argent Longtemps victorieux, l'empereur et l'Espagne trouvèrent
un jour devant eux un adversaire à leur taille dans la France ressuscitée de
Richelieu. Le cardinal s'était juré d'abaisser la Maison d'Autriche. Il s'allia
à tous les ennemis des Habsbourg auxquels, après une période de revers, il
arracha l'Alsace, l'Artois, le Roussillon. Son disciple et successeur, Mazarin,
put achever son œuvre grâce aux victoires de Condé et de Turenne. L'empereur
reconnut sa défaite en signant le traité de Westphalie. L'Espagne lutta dix ans
encore en s'appuyant sur des Français rebelles, puis dut capituler à son tour.
Le traité des Pyrénées, que scella le mariage du jeune Louis XIV et de
l'infante Marie-Thérèse d'Autriche, termina cette longue suite de guerres et en
prépara beaucoup d'autres Qu'aten-tu, Passant ? la vie de
Richelieu est morte, non pas sa Sagesse, Il remue encore l'Europe mort ; &
ressuscité, la France. Il gist dans la Sorbonne que
gisante il avoit relevée. Il a reparé l'anciène, & y en à adiousté une nouvelle, & ainsi il en est doublement
restaurateur, Mais la Sagesse est plus obligée a Richelieu que la Sorbonne. Il
a restauré la Sorbonne à Paris, & la Sagesse par tout. Va-t'en, Passant,
& appren du mort a estre
sage. Revien, Passant : Richelieu vit dans la
Sorbonne : pource que dans la Sorbonne rien ne meur |