La grande armée catholique

La grande armée catholique

 

IV, 22

 

1794-1795

 

La grand copie qui sera deschassée

Dans un moment fera besoing au roy :

La foy promise de loing sera fauscée :

Nud se verra, en piteux desarroy.

 

"grande copie"

 

Trois Armées : l'Armée d'Anjou, l'Armée du haut Poitou, l'Armée du Centre, formaient la Grande Armée. La première obéissait à Cathelineau, d'Elbée, Bonchamps et Stofflet ; la seconde, à Lescure et La Rochejaquelein ; l'Armée du Centre, à Royrand et Sapinaud de La Verrie. L'Armée du bas Poitou, l'Armée de Charette, vivait à part, dans un isolement qui sera préjudiciable à la victoire commune. En tête des Armées s'avançaient les drapeaux. Celui de La Rochejaquelein a été conservé. Il porte écrit : Vive Louis XVII ! (Emile Gabory, Les grandes heures de Vendée: les convulsions de l'ouest, 1963 - books.google.fr).

 

A dater du 13 avril 1793, les chefs poitevins se réunirent, et les divisions d'Elbée, Stofflet, Cathelineau, Bérard, formèrent la grande armée catholique et royale d'Anjou et Haut-Poitou (Edouard Ourliac, Mademoiselle de La Charnaye, Revue des deux mondes, 1841 - books.google.fr).

 

Lorsque la VendĂ©e se soulève, Ă  la mi-mars 1793, les bandes angevines qui se placent sous les ordres de Bonchamps se baptisent «armĂ©e chrĂ©tienne». Dès la fin du mois, cependant, d'autres noms apparaissent : «armĂ©e catholique et romaine» et «armĂ©e catholique et royale». DĂ©jĂ , en 1792, alors qu'il prĂ©pare le troisième camp de Jalès dans la Bas-Languedoc, le comte de Saillans avait pris le titre de «gĂ©nĂ©ral de l'ArmĂ©e chrĂ©tienne et royale de l'Orient» (fr.wikipedia.org - ArmĂ©e catholique et royale (VendĂ©e), fr.wikipedia.org - Guerre de VendĂ©e).

 

Au début de l'année 1794, la Vendée militaire est définitivement vaincue. Cependant, la guerre ne s'arrête pas. Charette, qui n'a pas pris part à la virée de Galerne, poursuit les combats depuis octobre contre le général Nicolas Haxo. Ce dernier s'empare notamment, avec 6000 hommes, de Noirmoutier le 3 janvier. Le général d'Elbée et les 2000 défenseurs de l'île se rendent sous promesse de vie sauve mais sont tous fusillés. La guerre reprend véritablement le 21 janvier lorsque le général Turreau passe à l'offensive. De janvier à mai, ses colonnes infernales incendient tout sur leurs passages et commettent de nombreuses atrocités, certaines exterminent même des villages entiers. Plusieurs chefs rescapés - Stofflet, Sapinaud de La Rairie, puis Marigny - parviennent au bout de quelques mois à reformer des troupes. En revanche, Henri de La Rochejaquelein, après avoir rassemblé 800 à 1200 hommes, est tué dans une escarmouche le 28 janvier 1794 à Nuaillé. Dans les premiers mois de l'année 1794, des insurrections royalistes sont signalées dans les zones traversées par les Chouans et les Vendéens rescapés de la virée de Galerne et réfugiés au nord de la Loire61. Les premières bandes, fortes de quelques centaines d'hommes, se forment dans les environs de Fougères, menés par Aimé Picquet du Boisguy et à l'Ouest de Laval avec Jean Chouan et Jambe d'Argent. Rapidement, l'insurrection s'étend à la Bretagne et au Maine. En mars, elle atteint le Morbihan à la suite du combat de Mangolérian. En juin, sur les limites de la Loire-Inférieure et du Maine-et-Loire, Marie Paul de Scépeaux rassemble 700 hommes originaires des environs mais dont la plupart ont combattu plusieurs mois dans l'armée vendéenne, avant même la virée de Galerne. Scépeaux forme l'armée catholique et royale du Bas-Anjou et de la Haute-Bretagne et remporte plusieurs succès, marquant ainsi le début de la Chouannerie (fr.wikipedia.org - Virée de Galerne).

 

"dechassée"

 

DĂ©chasser : Vx. Chasser, expulser quelqu'un (www.cnrtl.fr).

 

Les Vendéens ont été plus que déchassés.

 

Encore que l'on peut être "du tout dechassé par la mort qui subitement arrive" (Martin Fumée, Histoire générale des troubles de Hongrie et Transilvanie. Contenant la pitoyable perte et ruyne de ces Royaumes, et des guerres advenues de ce temps en iceux entre les Chrestiens et les Turcs, 1608 - books.google.fr).

 

Au septieme liure d'Eusebe, l'epistre de Hierax contient ces mots : Comme les martyrs dechassés de tous fussent mis à mort, nous ne laissasmes d'en solenniser la memoire (Jean Caluin, Traitté des reliques: ou, Advertissement tres-vtile du grand profit qui reuiendroit à la Chrestienté, s'il se faisoit inuentaire de tous les Corps Saincts et Reliques, qui sont tant en Italie, qu'en France, Alemagne, Espagne, & autres Royaumes et pays, 1599 - books.google.fr).

 

En 1987, Jean-Clément Martin a repris la question du bilan humain. Il a tenté d'établir un bilan du déficit humain subi par la région en se basant sur une analyse des recensements de 1790 et de 1801, dont il a corrigé les inexactitudes à partir de ce que l'étude des sources de l'époque moderne a pu nous révéler de la démographie du XVIIIe siècle (avec un accroissement naturel annuel évalué à 1 %). Il trouve qu’en 1801, il manque 200000 à 250000 personnes, par rapport à ce que l’accroissement naturel aurait dû permettre, si l'équilibre des naissances et des décès n'avait pas été bouleversé par la guerre. Ce creux démographique est imputable essentiellement aux tueries des combats, touchant aussi bien les républicains que les royalistes et imputables aux deux camps. Par ailleurs, il précise que ces chiffres ne doivent pas faire oublier qu'une évaluation exacte des pertes républicaines est pratiquement impossible, les combattants venant de l'ensemble de la France, «voire des colonies antillaises». En outre, il ne faut pas négliger les déplacements de population, analysés par Guy-Marie Lenne en 2003 (Les Réfugiés de la guerre de Vendée, 1793-1796, Éditions Geste, La Crèche, collection «Pays d’histoire», 2003) (fr.wikipedia.org - Guerre de Vendée).

 

Sans soutien

 

Au troisième vers, des étrangers, ayant promis leur aide, ne respecteront pas leurs engagements vis à vis du roi, qui se verra découvert (Pierre Brind'Amour, Les premières centuries, ou, Propheties de Nostradamus (édition Macé Bonhomme de 1555), 1996 - books.google.fr).

 

On date généralement le début de la guerre de Vendée du 10 mars 1793. À l'annonce de la conscription, la région vendéenne accueille les tirages au sort avec des fourches. Des Bleus sont lynchés. C'est le cas le 12 mars, à Saint-Florent-le-Vieil. Une émeute éclate, des coups de feu sont tirés ; les gardes nationaux ripostent d'un coup de canon. Mais des incidents l'ont précédée près d'un an plus tôt dans la Mayenne. C'est déjà la question de la conscription qui provoque la révolte de Jean Cottereau, dit Jean Chouan. De mars à juin 1793, les victoires des Blancs se succèdent. L'armée vendéenne s'est emparée de Saumur, traverse la Loire, Angers tombe sans difficulté, mais Nantes résiste. La progression des Vendéens marque une pause. En juillet, blessé à Nantes, Cathelineau meurt à Saint-Florent-le-Vieil. L'armée de l'Ouest est créée par le Comité de salut public et, en octobre 1793, c'est la victoire décisive des républicains à la bataille de Cholet, à laquelle Kléber participe, et où Bonchamps est tué le 8 novembre 1793, la Convention nationale avait décrété «Le département ci-devant appelé de la Vendée se nommera désormais le département Vengé.» En décembre 1793, espérant un renfort anglais, les restes de l'armée vendéenne traversent la Loire c'est la «virée de Galerne». Elle échoue les Vendéens ne reçoivent pas le soutien qu'ils étaient allés chercher sur les rives de la Manche. Affaiblis, désorganisés, contraints de se replier, ils sont massacrés par milliers sur la route entre Le Mans et Laval, et ensuite dans la ville elle-même et ensuite à Savenay. Westermann écrit au Comité de salut public une lettre restée célèbre «Il n'y a plus de Vendée, citoyens républicains. Elle est morte sous notre sabre libre, avec ses femmes et ses enfants. Je viens de l'enterrer dans les marais et les bois de Savenay. [...] Je n'ai pas un prisonnier à me reprocher. J'ai tout exterminé. [...] On fusille sans cesse à Savenay, car à chaque instant il arrive des brigands qui prétendent se rendre prisonniers. Nous ne faisons pas de prisonniers, il faudrait leur donner le pain de la liberté, et la pitié n'est pas révolutionnaire.» (Danièle Sallenave, Dictionnaire amoureux de la Loire, 2014 - books.google.fr).

 

"Nud" : le roi est nu

 

Le roi est nu sans ses soldats. Une légende - dont l'origine demeure invérifiée - concerne l'objet même de la création du jeu. Celui-ci était éminemment plus politique puisqu'il s'agissait d'offrir au roi un jeu dans lequel celui-ci s'aperçoit qu'il n'était rien sans les pions. Cette métaphore politique reste aujourd'hui largement répandue. Un récent colloque organisé par l'Association Française de Sciences Politiques sur le thème : «Jeu et politique» soulignait ainsi que l'image échiquéenne représentait la première référence à l'organisation et au fonctionnement du jeu politique (Futuribles, Numéros 227 à 230, 1998 - books.google.fr).

 

Le thème de la bâtardise apparaît en Castille aux XIIIe-XIVe siècles à travers différents supports littéraires : sources normatives et juridiques, exempla, contes moraux et chroniques. Ainsi dans le Conde Lucanor écrit par don Juan Manuel vers 1330, l'exemple du roi maure et des truands – qui préfigure le célèbre conte d'Andersen des vêtements neufs de l'empereur – met en lumière une crainte fondamentale dans une société fondée à la fois sur la filiation lignagère et l'honneur: seuls ceux qui sont véritablement les fils de leur père verront le drap du vêtement royal, les bâtards, eux, resteront aveugles. Et c'est par crainte de perdre leur honneur que le roi, ses courtisans, et tout le peuple, laissent croire qu'ils voient le drap, jusqu'à ce qu'un simple esclave noir leur dise à tous que le roi est nu (Sophie Coussemacker, Mudarra,  parcours littéraire d'un bâtard héroïque en Castille, Bâtards et bâtardises dans l’Europe médiévale et moderne, 2018 - books.google.fr).

 

Le premier manuscrit du Conde Lucanor fut redécouvert à la fin du XVIe siècle, au couvent des frères prêcheurs de Saint-Paul de Pañafiel, par l’écrivain et historien Gonzalo Argote de Molina qui le fit imprimer et redécouvrir aux lecteurs espagnols d’alors. Dans le courant du XIVe, le manuscrit original avait été légué aux dominicains du monastère de l’endroit (détruit depuis) que Don Juan Manuel avait lui-même fondé (www.moyenagepassion.com, fr.wikipedia.org - Don Juan Manuel).

 

Le milieu castillan est à cerner, pour comprendre cette carrière de don Juan Manuel, neveu du roi Alphonse X. C'est d'abord un milieu de princes intellectuels, illustrés par Alphonse X le Savant, mort en 1284 (comme son dernier frère, l'infant Manuel). La production littéraire d'Alphonse X est bien connue, elle est glorieuse. Le roi savant ami de l'Histoire et des sciences, fait rédiger sous sa direction les Tables Astronomiques, la Première Chronique Générale d'Espagne et l'Histoire Générale ; ami du droit, il fait rassembler les Siete Partidas, les lois et coutumes de Castille classées en sept grands livres ; il écrit un Lapidario, livre d'analyse symbolique des pierres précieuses, puis un traité de Jeu d'Echecs (Béatrice Leroy, De l'épée à l'écritoire: en Castille de 1300 à 1480, deux siècles de nobles écrivains, 2007 - books.google.fr).

 

Des rumeurs se sont répandues à la naissance de l'enfant, selon lesquelles il ne serait pas le fils de Louis XVI mais d'Axel de Fersen, gentilhomme suédois qui nourrissait un profond amour pour la reine. Dès mai 1784, Mercy note dans une lettre à l'empereur Joseph II que «les habitudes du roi ne donnent guère d'espérance à lui voir une nombreuse postérité». Et Evelyn Farr remarque que chaque fois que Marie-Antoinette est tombée enceinte, en 1783, 1784 et 1785, Fersen était présent à Versailles. Au baptême de Louis-Charles de France, le comte d'Artois est absent et il n'y a «ni compliment, ni révérences». En novembre 1790, La Fayette et à sa suite l'Assemblée nationale menaceront Marie-Antoinette d'un procès en adultère et de faire déclarer bâtards ses enfants (bien que Fersen ne puisse être impliqué dans la naissance de Madame Royale), ce qui montre la persistance de ces rumeurs. Il n'en sera cependant plus question lors du procès de la reine (fr.wikipedia.org - Louis XVII).

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