Claude de Savoie

Claude de Savoie

 

IV, 92

 

1846

 

Teste tranchee du vaillant capitaine,

Sera gettee devant son adversaire:

Son corps pendu de la classe a l'antenne

Confus fuira par rames a vent contraire.

 

Le sens premier du quatrain pourrait être qu'un capitaine d'une galère ("rames"), décapité et dont la tête est offerte à son ennemi, aura le reste de son corps pendu à une vergue, alors qu'il naviguait perdu contre le vent.

 

On retrouve le ou un "vaillant capitaine". Est-ce le même que celui du quatrain IV, 83 ? Si oui, cela pose un problème. Claude de Savoie, comte de Tende, n'a pas eu la tête tranchée. Essayons de tordre un peu ce quatrain.

 

C'est parce que Nostradamus considérait Claude de Savoie comme son ami, quelque part comme son égal, qu'il a écrit pour l’almanach de 1560 la plus énigmatique des préfaces insérées dans un opuscule de ce type. Le gouverneur de Provence était de trois ans son cadet, et il est décédé moins de trois mois avant lui.

 

Claude était le fils de René de Savoie (1488-1525) dit le Grand Bâtard, et d'Anne Lascaris (1487-1554), la fille du comte de Tende Jean-Antoine de Lascaris-Vintimille. Il est né le 27 mars 1507 (cf. Panisse-Passis, p.55, qui cite le document 1039 du Cabinet des titres de la BnF, p.150). Après le décès de sa première femme, Marie de Chabannes de la Palisse, il se remarie le 19 août 1539 à Françoise de Foix-Candale, fille de Jean, comte de Gurson et de Fleix. Claude est décédé à Caderache (Cadarache près de Saint-Paul-lès-Durance) le 23 avril 1566 : "son corps fut porté en l'église de la Commanderie de Saint-Jean et enterré, couvert d'une caisse de plomb, sous la porte de l'ancien choeur. Son cercueil fut marqué d'une inscription, qu'on lit maintenant attachée contre un des et murs en dedans de la chapelle du grand-maistre de Villeneuve. On y lit que Claude de Savoie était "capitaine de cinquante hommes d'armes" (Patrice Guinard, L'épître inédite à Claude de Savoie dans l'Almanach pour l'an 1560, 2016 - cura.free.fr).

 

Tête coupée

 

Non loin de Tende, au pied du mont Bego, site sur lequel nos lointains ancêtres des âges du cuivre et du bronze sacrifiaient au culte du couple primordial Dieu-taureau/Déesse-terre, s'étend une vallée. On y a retrouvé, dès le 15e siècle, de multiples gravures rupestres, d'où le nom de la vallée des Merveilles donné au 17e siècle (Connaissance des arts, Volumes 531 à 534, 1996 - books.google.fr).

 

Jean-Marie Blanc voit dans Méduse un mythe méditerranéen mais il l'annexe à la Provence où l'on retrouve un peu partout la tête grimaçante et échevelée de la Gorgone sculptée ou gravée dans la pierre. On en a découvert une dans une grotte des gorges d'Olioules, dans le Var ; une à Roquepertuse dans les Alpilles et l'on a cru en reconnaître une autre sur l'une des dalles de schiste du Mont-Bégo dans cette Vallée des Merveilles voisine du col de Tende (Revue de la Méditerranée, Numéros 83 à 88, Université d'Alger, 1958 - books.google.fr).

 

L'une des têtes du col de Tende, le « Sorcier du lac des Merveilles », est surmontée de deux mains qui tiennent deux poignards triangulaires de l'âge du Bronze, dans un geste de menace ou de puissance (Bulletin et mémóires de la Société nationale des antiquaires de France, 1943 - books.google.fr).

 

Tranchée

 

Question vocabulaire, tête et tranchée sont des termes de génie militaire.

 

Sommerive reprit le dessein d'assiéger une seconde fois la ville de Cisteron. Pour cela il rassembla cent deux enseignes, & une nombreuse cavalerie. Il se posta, comme la première fois, & fit conduire une tranchée très-profonde depuis son camp jusqu'aux deux collines, dont nous avons parlé; en sorte qu'étant à couvert du feu des assiégés, on pouvoit aller & venir en sureté (Histoire Universelle de Jacque Auguste De Thou, Depuis 1543 Jusqu'en 1607, 1734 - books.google.fr).

 

Comme la Sape fait une partie considérable de la Tranchée, je crois qu'il est à-propos d'expliquer la manière de la conduire. Nous entendons par la Sape, la tête d'une Tranchée poussée pied-à-pied, qui va jour & nuit également. Quoiqu'elle avance peu en apparence, elle fait beaucoup de chemin en effet, parce qu'elle marche toujours. C'est un métier qui demande une espèce d'apprentissage pour se rendre habile, auquel on est bientôt fait quand le courage & le désir du gain sont de la partie (Sébastien Le Prestre de Vauban, De l'attaque et de la defense des places, 1737 - books.google.fr).

 

"confus"

 

"confus" est un terme appliqué par César de Nostredame, fils de Nostradamus, au siège de Sisteron : "Le comte de Sommerive fait monstre de cinquante enseignes, & de quelques cornettes de cavalerie, pour aller planter en furieux siège à Sisteron, où plusieurs familles Luthériennes se sont mises à couvert, sous les ailes d'onze compagnies que le Seigneur de Beaujeu, neveu du Comte de tende y commande : tant les cartes sont meslees & les affaires confus (César de Nostredame, L'histoire et chronique de Provence, 1614 - books.google.fr).

 

classe, antenne, rames : ceux de la marine

 

Les marins savoyards au service du Roi de France sont fort peu nombreux d'Henri IV à Louis XVI. Pourtant, Honorat de Savoie, né en Savoie vers 1510, mourut à Paris en 1580 après avoir été Amiral de France. Il le fut à partir de 1569, lorsque Charles IX voulut l'opposer - en sa qualité de catholique - à Coligny, huguenot, Amiral de France qui refusa d'abandonner son office de 1569 à 1572. Honorat, comte puis marquis de Villars, ne put entrer dans ses fonctions que le 24 août 1572, à la faveur de la Saint-Barthélemy. Maréchal de France du même jour, il se démit de l'Amirauté en 1578. Fils de René de Savoie, lui-même fils naturel de Philippe, duc de Savoie, Honorat est le neveu de Louise de Savoie, la mère de François Ier. Il peut sembler légitime que les Valois l'aient fait Amiral de France - sinon marin - dans un contexte particulièrement difficile. D'autres princes de la Maison de Savoie furent du reste amiraux dans le royaume de France durant le XVIe siècle : René de Savoie, comte souverain de Tende, gouverneur de Provence, fut amiral en cette province jusqu'en 1520, l'Amirauté de Provence étant indissociable de son gouvernement. Claude de Savoie, son fils, comte de Tende, lui succéda en son Amirauté en 1520, à l'âge de quatorze ans. Henri II le confirma dans ses fonctions en 1547, au lendemain de la mort de François Ier. En conflit avec le général des galères, Grand-Prieur de Lorraine, Claude conserva néanmoins son Amirauté près d'un demi-siècle ! En 1566, son propre fils, nouveau comte de Tende, lui succéda à Toulon et à Marseille comme gouverneur et amiral de Provence, jusqu'à sa propre mort, en 1572 (Christian Sorrel, Les Savoyards dans le monde: recherches sur l'émigration : actes du colloque d'Annecy, 13 et 14 décembre 1991, 1992 - books.google.fr).

 

Les glossaires de termes de marine se servent de l'inventaire fait à l'occasion de la vente du navire La Grande Maîtresse de la mère de Claude de Savoie à la France (Augustin Jal, Glossaire nautique: Répertoire polyglotte de termes de marine anciens et modernes, Tome 1, 1848 - books.google.fr).

 

L'achat de la galère la Grande Maîtresse par François Ier à sa tante la comtesse de Villars et de Tende, veuve de René de Savoie mort à Pavie en 1525, se situe entre le 10 juillet et le 5 septembre. Le 5 septembre 1526, délivrance de la nef et de son contenu à Antoine d’Ancienville, seigneur de Villiers, par Mgr de Sisteron (évêque et homme de confiance de René de Savoie, défunt mari de la comtesse). Inventaire signé de Charton le 5 septembre 1526 (Max Guérout, Bernard Liou, La Grande Maîtresse, nef de François Ier: recherches et documents d'archives, 2001 - books.google.fr).

 

Le corps d'une nef est le bateau sans mât, sans armement, sans agrès, sans lest. « Premièrement, le Corps de la nef nommĂ©e Saincte Marie, dite la Grand-Maitresse, en tonte bontĂ©, fresche hors de carenne, emplombĂ©e jusques au premier redon et au-dessus de leue de plomb, clou de doux de bronze, fort et reforcĂ©e de corbatons de clouaisons et d'autres choses nĂ©cessaires, jusques et par tous les chasteaux et oeuvres mortes d'icelluy... » (Ce que M. de Sisteron a dĂ©liurĂ© par command., etc.). L'antenne est le nom de la vergue sur laquelle est attachĂ©e, par son plus grand cĂ´tĂ©, nommĂ© Antenal, la voile triangulaire appelĂ©e : Voile latine, ou A la latine.

 

C'est ainsi que se rendirent La Bréole après une longue résistance, une quinzaine d'autres et Chorges qui résista aussi assez longtemps. On était alors entré dans l'hiver, qui s'annonçait rude, et les soldats, mal vêtus, mouraient en quantité. Le duc d'Epernon demanda qu'on licenciât les Suisses et consentit à une capitulation généreuse, n'exigeant que le démantèlement de la cité rebelle. Il avait pacifié la province et s'y était montré partout avec ses troupes. Il avait à cela d'autant plus de mérite que, malgré la bonne volonté du roi, il n'avait reçu ni l'argent promis, ni les pionniers qu'il avait réclamés, si bien qu'il dût en lever à Marseille qui avait toujours été fidèle au roi. La correspondance montre à la fois le chef de guerre qui fait, à Sisteron, hisser son artillerie par des marins au moyen d'un système de poulies (en 1586) et l'administrateur avisé imposant à Marseille des droits de douane sur les marchandises étrangères et y rétablissant la police. Il méritait bien le repos qu'il allait prendre à Aix (Jean-Luc A. Chartier, Le duc d'Epernon, 1554-1642: L'archimignon, 1999 - books.google.fr).

 

Le corps pendu pourrait ĂŞtre le corps (de l'astrolabe : en domaine maritime) suspendu (Johann Stoeffler, Traite de la composition et fabrique de l'Astrolabe, & de son usage, 1560 - books.google.fr, Jacques Focard, Paraphrase de l'astrolabe, contenant les principes de geometrie. La sphere. L'astrolabe, 1555 - books.google.fr).

 

Après les Grecs, puis les Arabes, ce sont les Portugais qui aboutissent à partir de 1485 à des progrès décisifs en adaptant l'astrolabe à la navigation maritime et en dressant des tables (regimientos) permettant de calculer la déclinaison magnétique (fr.wikipedia.org - Astrolabe).

 

Charles III de Savoie épousa Dona Béatrice de Portugal (1504-1538), fille de Manuel Ier, roi de Portugal, et de Marie d'Aragon. Par ce mariage, il devenait beau-frère de Charles Quint, qui avait épousé Isabelle de Portugal. Charles III est le fils de Philippe II qui eut comme enfant illégitime de Libéra Portoneri René, dit le « Grand Bâtard de Savoie », père de Claude de Savoie (fr.wikipedia.org - Charles II (duc de Savoie)).

 

Le mathématicien Joannes Stadius (Loenhout entre Anvers, Bois le Duc et Bréda, Belgique, province d'Anvers, 1er mai 1527 - Paris, 17 juin 1579), professa l'histoire et les mathématiques à l'Université de Louvain. On a de lui des commentaires sur Florus; il passa à la cour de Liège, de là à celle de Savoie, revint en Flandre, s'arrêta à Bruxelles, et y travailla aux fastes des Romains. Henri III l'appella à Paris, pour enseigner les mathématiques; il mourut dans cette ville, âgé de 52 ans, l'an 1579. Il donna dans les rêves de l'astrologie judiciaire, et fut obsédé par les conditions de réalisation de la fin du monde. Il est connu par ses Ephemerides novae et par ses Tabulae Bergenses, Cologne, 1560 (Notices biographiques sur les hommes illustres des Pays-Bas: composant la collection exécutée par le chevalier Simon, 1827 - books.google.fr).

 

Au sujet de "rames", notons que Balthazar de Rames fut nommé capitaine et viguier de Sisteron en 1549  en remplacement de feu Louis de Villeneuve, marquis de Trans (Inventaire-sommaire des archives départementales, Bouches-du-Rhône, 1919 - books.google.fr).

 

Un Mathieu de Rames est sieur des Crottes, baron de Mizon, mari de Lucrèce de Villeneuve au XVIème-XVIIème siècle. En 1588, le capitaine Mathieu de Rames combat au côtés du futur maréchal de France d'Ornano, nommé lieutenant général en Dauphiné l'année suivante. Jean-Jacques d'Espagne, seigneur de Gariscan, gouverneur de Sisteron en 1621, épousa Isabeau de Rames, fille de Mathieu (Louis D. Bézégher, Claix et Pont-de-Claix à travers les siècles (suite chronologique), 1968 - books.google.fr).

 

Autrement

 

TĂŞtes de marbre

 

En parcourant ces lettres, dont la plupart sont datĂ©es de Rome et adressĂ©es au connĂ©table Anne de Montmorency, j'en rencontrai plusieurs fort curieuses oĂą se trouvent mentionnĂ©s des marbres antiques qui ont Ă©tĂ© envoyĂ©s au connĂ©table. [...] Dans une lettre du 20 novembre 1554, le cardinal George d'Armagnac propose d'envoyer Ă  Montmorency "deux bien grandes et belles testes de marbre, l'une de Severus et l'autre de Caracalla". Deux mois après, les deux tĂŞtes en question n'Ă©taient pas encore parties pour Marseille. Le cardinal les annonce de nouveau dans une lettre du 16 janvier 1555. [...] Au mois d'avril suivant, il n'est plus seulement question des deux tètes citĂ©es prĂ©cĂ©demment, mais aussi d'un certain nombre de marbres antiques qui sont offerts au connĂ©table par plusieurs personnages importants d'Italie. Le cardinal d'Armagnac, après lui avoir recommandĂ© trèsparticulièrement le sieur de Montluc, lui dit en post-scriptum, Ă  la date du dernier avril 1555, c'est-Ă -dire le jour de la mort du pape Marcel II (Gaign., 321, p. 57). L'inventaire des marbres dit : "Les marbres envoyez Ă  Civita-Vecchia pour mettre en la gallère que portera M. de Montluc Ă  Marceille en huict caysses clouĂ©es et cordĂ©es ayans dessus ung grand C faict avec un fer chault, pour faire tenir Ă  monseigneur le connĂ©table : Une teste de Septimius Severus avec son buste de mesquio ; Une teste d'Antonius Caracalla. Ces deux tètes ont estĂ© donnĂ©es par monseigneur l'evesque de Pavie. Une teste de Geta, frère dudict Caracalla. Ceste teste est envoyĂ©e pour accompagner les susdicts par le sieur Jehan Biauguat Bolognoys. Une grande teste de femme avec le buste d'alebastre. Une teste de Marc Aurellio jeune. Ces deux ont estĂ© donnĂ©es par monseigneur le cardinal Sermonetta. Une teste de Vitellius. Par monseigneur l'evesque de Montdenis, il y a deux ans. Une teste d'un jeune Hercules. Une teste d'Oto. Par le sieur evesque de Montdenis. Faict Ă  Rome le dernier jour d'avril 1555." Nous voyons enfin, par une lettre du 28 novembre de la mĂŞme annĂ©e, qu'Ă  cette date les marbres n'Ă©taient pas encore partis. UltĂ©rieurement nous ne trouvons plus trace de l'envoi, d'oĂą il est Ă  supposer qu'il a eu lieu peu de temps après et de la manière indiquĂ©e en dernier lieu par le cardinal d'Armagnac : "Au surplus, monseigneur, j'ay priĂ© M. le baron de La Garde qui est venu veoir ceste court qu'il voullust faire mettre sur les gallères les marbres que de si long temps le capitaine Moret n'avoit mandĂ© avoir prins pour porter Ă  Marceille. Il me l'a promis très-volontiers et j'ay escript Ă  M. le comte de Tende vous les faire porter. Ils sont dignes de parvenir entre vos mains. L'ung des miens qui s'en retourne en France en aura la charge tant qu'ilz seront sur la mer, et après le dict seigneur conte y fera son debvoir. Si M. le cardinal de Monte, evesque de Marceille, eust estĂ© en ceste ville, etc." (E. Miller, De quelques marbres antiques envoyĂ©s au connĂ©table de Montmorency en 1555, Gazette des beaux-arts, Tome 1, 1861 - books.google.fr).

 

Vitellius et Fabius Valens

 

Le corps de Galba n'a toutefois pas subi tous les outrages de celui de Vitellius, même si sa tête a été coupée. Dans ce dernier cas, l'empereur déchu ayant été conduit aux Gémonies, sa tête coupée et son corps jeté – ce qui rappelle également le sort qui fut infligé à Séjan dont on nous dit que le corps était resté exposé trois jours avant d'être jeté au Tibre –, plus aucune autre information sur son sort n'est disponible (Stéphane Benoist, Rome, le prince et la Cité: Pouvoir impérial et cérémonies publiques (Ier siècle av. - début du IVe siècle ap. J.-C.), 2015 - books.google.fr).

 

Aussi cĂ©lèbre que la mort de NĂ©ron, le supplice de Vitellius est rĂ©alisĂ© par des acteurs extĂ©rieurs. Après s'ĂŞtre transportĂ© avec son boulanger et son cuisinier sur l'Aventin dans l'intention de fuir, Vitellius revient au Palatin et son supplice se jouera au centre de Rome, devant tous les citoyens. Au dĂ©but du drame le vide et le silence se font autour de Vitellius qui se terre, Ă©pouvantĂ©, dans un rĂ©duit ignoble. Les soldats flaviens le tirent de cette cachette, le reconnaissent, lui lient les mains derrière le dos, dĂ©chirent ses vĂŞtements et, la corde au cou, le traĂ®nent par la voie sacrĂ©e au forum. On le contraint Ă  lever la tĂŞte et le cortège s'avance au milieu des outrages de toute sorte. Enfin c'est près des GĂ©monies que Vitellius est dĂ©chiquetĂ© Ă  tout petits coups et achevĂ© : puis il est traĂ®nĂ© avec un croc dans le Tibre. [...]

 

Le règne Ă©phĂ©mère de Vitellius est dĂ©crit par tous les auteurs comme une Ă©norme dĂ©bauche, un banquet sans fin, un relâchement gĂ©nĂ©ral des mĹ“urs, de la discipline, de l'ordre. L'empereur lui-mĂŞme est surtout occupĂ© Ă  cĂ©lĂ©brer des banquets. Ivre en permanence, apathique comme un animal qu'on engraisse, il est le chef qui convient Ă  une armĂ©e de fĂŞtards, de bouffons et d'histrions. Ces traits peuvent Ă©videmment ĂŞtre mis au compte du topos du tyran, mais au cours du dernier acte de cette farce sinistre nous relevons certains indices qui suggèrent une autre interprĂ©tation. La folie qui frappe Rome toute entière au cours des derniers jours de ce règne est portĂ©e au paroxysme quand les colonnes flaviennes investissent la ville. Le peuple assiste en spectateur aux combats de rue, applaudit, encourage et fait mettre Ă  mort les vaincus de chaque engagement tout en pillant les demeures avoisinan- tes. C'est un mĂ©lange haut en couleurs de combattants, de buveurs, de courtisanes et de fĂŞtards. Or tout cela a un sens. Pour faire apparaĂ®tre la trame de cette description, il suffit de lire le commentaire que donne Tacite et de consulter les fastes : nous sommes le 20 dĂ©cembre, en plein milieu des Saturnales, et Tacite dĂ©crit ce dĂ©chaĂ®nement comme un nouveau divertissement venant animer les jours de fĂŞte. Les soldats fla- viens, qui avaient commencĂ© Ă  fĂŞter tranquillement les Saturnales Ă  quelque distance de Rome, sont attirĂ©s dans ce carnaval sanglant dont ils cĂ©lèbrent le dernier acte, après leur victoire, en communion avec le peuple de Rome. Ils capturent Vitellius et après un dĂ©filĂ© ignominieux sur la voie sacrĂ©e, au centre mĂŞme de Rome, ils l'achèvent près des GĂ©monies - Ă  peu de distance du temple de Saturne - avant de l'expĂ©dier dans le Tibre : bref, Ă  la fin des Saturnales ils exĂ©cutent le roi des fous, peut-ĂŞtre dans le cadre des nouvelles coutumes introduites dans cette fĂŞte par l'armĂ©e d'Orient. Peut-ĂŞtre. Il est toutefois plus sage de considĂ©rer qu'il s'agit simplement du dernier excès d'une fĂŞte dĂ©voyĂ©e, d'un carnaval monstreux. Quoi qu'il en soit, il ne fait aucun doute que tout le comportement, tout le règne de Vitellius - tels qu'ils nous sont prĂ©sentĂ©s - fassent corps avec la licence des Saturnales. Tout l'ĂŞtre de ce tyran se rĂ©sume Ă  cette fonction de rex bibendi, de prince bouffon, mais aussi, le thème Ă©tant cĂ©lèbre, de piaculum, d'une sorte de pharmakos ignoble promenant ses dĂ©bordements Ă  travers l'Italie, avant de mourir aux Saturnales et de drainer en quelque sorte les souillures du monde. Une fois d'ailleurs qu'il a Ă©tĂ© expulsĂ© (comme un monstre prodigieux par le Tibre, c'est-Ă -dire vers la mer), les dĂ©sordres tombent rapidement pour cĂ©der la place Ă  l'allĂ©gresse. Et Tacite de conclure, Ă  l'ouverture de son livre IV des Histoires: «La guerre civile, dĂ©clarĂ©e dans les Gaules et dans les Espagnes, suivie du soulèvement des Germanies, puis de l'Illyricum, cette guerre qui avait fait le tour (lustrauerant) de l'Egypte, de la JudĂ©e, de la Syrie et de toutes les provinces, semblait, après avoir purifiĂ© l'univers de ses souillures, ĂŞtre enfin arrivĂ©e Ă  son terme» (John Scheid, La mort du tyran. Chronique de quelques morts programmĂ©es, Du châtiment dans la citĂ©: supplices corporels et peine de mort dans le monde antique, 1984 - www.persee.fr).

 

En 69 après J.-C., le Vitellien Fabius Valens est exĂ©cutĂ© dans sa prison Ă  Urbinum. «On montra sa tĂŞte aux cohortes vitelliennes, afin de leur enlever pour toujours l'espoir qu'elles caressaient; (...) la vue de sa tĂŞte sanglante les jeta dans le dĂ©sespoir. Quant Ă  l'armĂ©e flavienne, ce fut pour elle un encouragement prodigieux : elle accueillit le trĂ©pas de Valens comme la fin de la guerre» (Tacite Hist. 62 2-3). Envers l'adversaire, la publicitĂ© de la tĂŞte coupĂ©e remplit plusieurs fonctions. D'abord lui mettre sous les yeux la preuve indiscutable de la mort de son chef et par la mĂŞme occasion le dĂ©moraliser, saper sa volontĂ© de rĂ©sistance.

 

La tĂŞte coupĂ©e cristallise sur elle les ressentiments, attire les sarcasmes. Elle fait l'objet d'injures verbales et physiques d'autant plus violentes que le mort a Ă©tĂ© craint, de son vivant : «La foule prenait un plaisir Ă©trange Ă  fouler aux pieds la terreur qu'il lui avait inspirĂ©e pendant sa vie, en insultant Ă  sa mort» observe Nazarius en Ă©voquant les rĂ©actions provoquĂ©es par la tĂŞte de Maxence. L'humilitĂ© laisse place Ă  l'effronterie: «La populace outrageait (Vitellius) mort avec la mĂŞme bassesse qu'elle l'avait adorĂ© vivant» (Tacite Hist. 3,85). Avec la tĂŞte de Galba et les rĂ©actions qu'elle dĂ©chaĂ®ne, nous sommes en prĂ©sence de mouvements irrationnels (Jean-Louis Voisin, Les Romains, chasseurs de tĂŞtes. Du châtiment dans la citĂ©. Supplices corporels et peine de mort dans le monde antique, 1984 - www.persee.fr).

 

Valens fut decapité à Vrbin, d'où on apporta sa teste à Antonius ["adversaire"] (F. N. Coeffeteau, Histoire Romaine, 1646 - books.google.fr).

 

Antonius Primus surnommé Beccus (Bec de coq) gagne la victoire de Bédriac, et entre dans Rome qui n'avait pas accepté l'abdication de Vitellius (fr.wikipedia.org - Marcus Antonius Primus).

 

L'astrologie, la moins religieuse des superstitions, était celle qui dominait le plus. Comme le fatalisme était leur dogme, l'astrologie était leur culte. Néron avait étudié cette science comme toutes les autres sciences occultes. Poppée, son intrigante épouse, moitié juive, moitié superstitieuse, se partageait entre les rabbins et les astrologues; elle avait fait à ceux-ci un sanctuaire dans sa maison, où elle les gardait précieusement. Othon, premier mari de Poppée, avait hérité de ses astrologues; et ce sera l'un d'eux, Séleucus, qu'il poussera à se faire empereur. Plus tard, Vespasien, héritera des astrologues d'Othon, et le même Séleucus sera son conseiller. Les astrologues, à Rome, sont éternels; le pouvoir les chasse, mais le pouvoir les consulte. Vitellius les expulse de Rome, mais il en garde quelques-uns dans son palais (Suétone In Vitell. 14). Bientôt revenus, Vespasien les chassera encore, mais il n'en aura pas moins foi en eux (Tacite, Hist. II 62,78). Les astrologues sont les grands politiques de ce siècle. Ils commandent les guerres, les trahisons, les complots. Le monde est gouverné par le sceptre et par l'épée, moins que par l'astrolabe. Encore une fois, il en était de Rome comme de Jérusalem. La nuée des faux prophètes s'était abattue sur l'une comme sur l'autre. Dans l'une comme dans l'autre, la superstition s'alliait à la politique, prête à enfanter les ambitions et les tentatives révolutionnaires. Ici, c'était l'espérance trompée du Messie; là, c'était une recrudescence de toutes les superstitions païennes. De part et d'autre les rêves étaient grandioses; il s'agissait, non d'un coin de la terre, mais du monde. Les zélateurs de Jérusalem préméditaient la domination du globe, l'hommage rendu par tous les peuples au temple de Salomon, et toutes les magnificences qu'avaient annoncées les prophètes. A Rome, il n'était si petit génie qui ne rêvât la pourpre. En bien et en mal, rien ne semblait impossible. Othon, disgracié et exilé, rêvait d'être César. Néron, César, rêvait sa propre chute, et, pour son retour, la domination de l'Orient et la royauté de Jérusalem. Tant Jérusalem tenait une grande place dans ces aspirations de l'avenir! Tant il est vrai que le même souffle de révolution soulevait l'Orient et l'Occident, Jérusalem et Rome ! (François de Champagny , Rome et la Judée: au temps de la chute de Néron (ans 66-72 après Jésus-Christ), 1858 - books.google.fr).

 

Henri II et son épouse Catherine de Médicis, ayant entendu parler très-avantageusement de la science médicale et des connaissances astrologiques du célèbre médecin de Salon, écrivirent à Claude de Savoie, comte de Tende, gouverneur de Provence, pour le prier de décider lui-même Nostradamus à venir à la cour.

 

Mais lors de l'affaire des Cabans de Provence (des catholiques extrĂ©mistes portant de longues capes), Nostradamus fut arrĂŞtĂ© sur ordre de Charles IX le 16 dĂ©cembre 1561, et protĂ©gĂ© par son ami le gouverneur dans le château de Marignane. Claude de Tende Ă©crit au roi le 18 dĂ©cembre 1561 : "Au regard de Nostredamus, je l'ay faict saisir et est avecques moy, luy ayant deffendu de faire plus almanacz et pronostications, ce qu'il m'a promis. Il vous plaira me mander ce qu'il vous plaist que j'en fasse." (lettre BnF ms. fr. 15875, f. 421 ; citĂ©e par Panisse-Passis, 1889, p.82, reprise par Brind'Amour, 1993, p.43) (Patrice Guinard, L'Ă©pĂ®tre inĂ©dite Ă  Claude de Savoie dans l'Almanach pour l'an 1560, 2016 - cura.free.fr).

 

Dans sa conquête du pouvoir, Vitellius a le soutien du général Fabius Valens.

 

Les Generaux de l'armĂ©e de Vitellius estoient un Caecinna, & un Fabius Valens; celuy Valens lĂ  estoit extrĂ©mement cruel, & celuy-cy ajoĂ»ta Ă  la cruautĂ©, une auarice insatiable, & venant tout deux d'Allemagne, oĂą Vitellius auoit estĂ© Ă©leu Empereur : celuy-lĂ  passa par les Suisses, pour entrer en Italie, faisant verser le sang par tout oĂą il passoit, Ă  tous ceux qui faisoient semblant de s'opposer Ă  son passage, & celuy-cy prenant le chemin pour l'Italie, par les Alpes Cottiennes, passa par la Lorraine, par la Bourgogne, par le Lyonnois, entra dans le DauphinĂ© oĂą il exerça sur les Allobroges & les Voconces, peuples de la Prouence ancienne, toute sorte de cruautez, d'extorsion, de pillage, & de volerie, quelques supplications Ă  genoux que les habitans des villes & villages luy pussent faire. Et ainsi entr'autes fut traitĂ©e indignement la noble & ancienne ville de Vienne, & le lieu municipe du Luc, prĂ©s de Die en DauphinĂ© dit anciennement Lucus Augusti, qui racheta son incendie & le rauissement de ses femmes, par de grandes sommes de deniers au tĂ©moignage de Tacite au liure I. de son Histoire. D'autre part Othon sçachant que la Prouence tenoit le party de Vitellius son aduersaire, il y dĂ©pĂŞche de grandes armĂ©es, & par mer, & par terre, sous la conduite de ses trois principaux Capitaines, nommez Suedius Clemens, Antonius Nouellus, & AEmilius Pacensis, que, de quelques paroles de Tacite, au liure 2. on collige, qu'ils deuoient estre Prouençaux d'origine. Et comme cette grande armĂ©e s'approchoit de Prouence, venant par les Alpes maritimes long de la cĂ´te de la mer, & par le col de Tende, un certain Marius Maturus, Procureur, ou President de ces Alpes maritimes, comme veut le sieur Joffred en l'Histoire de Nice, qui dit qu'il demeuroit Ă  la CitĂ© de Cimiez prĂ©s de Nice, tenant le party de Vitellius, auec quelques troupes ramassĂ©es des Liguriens Montagnars, veut s'opposer Ă  leur entrĂ©e, & au passage des soldats. [...] A la nouuelle de la victoire des Othoniens, Fabius Valens vouloit enuoyer de nouueau secours en Prouence ; mais la mort d'Othon suruenant, mit fin Ă  cette guerre, qui reprendra bien tĂ´t vigueur par les Partisans de Vespasian, ja ĂŞleu Empereur contre Vitellius (HonorĂ© Bouche, La Chorographie Ou Description De Provence Et L'Histoire Chronologique Du Mesme Pays, Tome I, 1664 - books.google.fr).

 

Les Vocontii, que Pline met au rang des peuples alliés, Vocontiorum civitas fœderata, occupaient au midi des Allobroges, non-seulement les diocèses de Vaison et de Die, mais une partie de ceux de Gap et de Sisteron; Pline (II, 5, et III, 4) leur donne deux villes capitales, Vasio, Vaison, et Lucus Augusti, Luc, et leur attribue dix-neuf autres villes. Luco. Pour Luco Augusti, le Lucus d'Auguste, consacré à Auguste, Luc en Dauphiné, une des deux capitales des Voconces (OEuvres de C.C. Tacite, Tome 4, traduit par Charles Louis Fleury Panckoucke, 1839 - books.google.fr).

 

Il est possible que Valens, dans sa route vers l'Italie, venu de Luc en Diois, passa par le site de Sisteron.

 

Puis, dans la guerre entre Vitellius et Vespasien, Valens reste fidèle au premier.

 

Valens que Vitellius avoit fait partir de Rome peu de jours après Cecinna, se disposoit, mais lentement, à aller joindre ce dernier, lorsqu'aiant appris la rapidité des victoires de Primus, il prit la résolution de ramasser tous les vaisseaux qu'il pourroit trouver, & de passer par mer dans la Narbonnoise pour y assembler les troupes des Gaules & de la Germanie, & y faire diversion en faveur de cet empereur.

 

Le départ de Valens ayant intimidé les troupes qui gardaient Ariminum, Cornélius fit avancer l'armée, envoya les galères le long des rivages voisins et les investit par terre et par mer. On occupa les plaines de l'Ombrie, la partie du Picentin que baigne l'Adriatique, et l'Italie tout entière se trouva partagée entre Vespasien et Vitellius par la chaîne des Apennins. Valens, au sortir du golfe de Pise, fut repoussé par le calme ou les vents contraires ("adversante vento") dans le port d'Hercule Monécus. Non loin de là se trouvait Marius Maturus, procurateur des Alpes maritimes, qui, fidèle à Vitellius, n'avait point encore, quoique entouré d'ennemis, abjuré son serment. Maturus accueillit poliment Valens, et le détourna, par ses avis, du projet qu'il avait d'entrer audacieusement dans la Gaule narbonnaise. La crainte, d'ailleurs, ébranlait la fidélité des compagnons de Valens; car le procurateur Valérius Paullinus, soldat habile et ami de Vespasien avant son élévation, avait engagé dans la cause de ce prince les villes voisines (Cornelius Tacitus, Oeuvres complètes, traduit par Charles Louandre, 1868 - books.google.fr).

 

Valens n'insiste pas et remonte sur sa galère mais pris dans une tempête aux Îles d'Hyères il est fait prisonnier par des barques envoyées par Paulinus.

 

"confus"

 

Le premier mot du quatrième vers du quatrain "Confus" peut s'expliquer par l'organisation des armées romaines fidèles à Vitellius dont bénéficia Valens :

 

Soit pour nuire à un ennemi, soit pour avancer une créature, on confondit tout l’ordre de la milice ("Insuper confusus, pravitate vel ambitu, ordo militiœ"). 0n formait seize cohortes du prétoire et quatre de la ville, chacune de mille hommes. Dans la formation de ces cohortes, Valens s’arrogeait le plus de droits, sous prétexte que Cecina même lui devait son salut. Il est certain que le parti ne s`était rétabli que depuis l`arrivée de Valens. Les premières rumeurs qu`avait excitées la lenteur de sa marche s`étaient dissipées par sa victoire, et tous les soldats de la basse Germanic lui étaient dévoués. C’est de ce moment, on le croit, que la fidélité de Cecina commença à chanceler (Oeuvres complètes de Tacite, Histoires, Tome 2, traduit par Dureau de Lamalle, 1863 - books.google.fr).

 

C'est cette modification de l'organisation des prĂ©toriens et du nombre des cohortes qu'exprime confusus prauitate uel ambitu ordo militiae, mais il s'y ajoute un autre Ă©lĂ©ment que marque surtout prauitate. Les cohortes prĂ©toriennes Ă©taient recrutĂ©es, selon la règle Ă©tablie par Auguste, parmi les Italiens de droit latin, principalement dans le Latium uetus, l'Etrurie, l'Ombrie, ce qui fait dire Ă  Othon, quand il les harangue après leur dĂ©but de rĂ©volte, Ă  la fin du livre I, qu'ils Ă©taient Italiae alumni et Romana uere iuuentus (1, 84, n. 14); Vitellius, au contraire, veut y faire entrer ses lĂ©gionnaires et ses auxiliaires Germains ; il faut dire cependant que, comme indiquĂ© dans la note citĂ©e ci-dessus, NĂ©ron avait dĂ©jĂ  fait appel Ă  des corps venant de Germanie, de Bretagne et d'Illyrie; Galba s'entoura d'une legio Hispana (M. Durry, Les cohortes..., p. 240-243). Ce qui avait conduit Vitellius Ă  prendre ces nouvelles dispositions : augmentation du nombre des cohortes et de leur effectif, modification du recrutement, c'Ă©tait le dĂ©sir de rĂ©compenser ses soldats de l'appui qu'ils lui avaient apportĂ©, par un autre moyen que la distribution d'un argent qu'il n'avait pas (cf. d'ailleurs 94, 2). Dans l'organisation de ce recrutement nouveau, l'influence de ses deux principaux lieutenants, Valens et Caecina, fut importante (ambitu), mais celle du premier fut la plus considĂ©rable (Tacite, Histoires: Livres II & III, Volume 2, prĂ©sentĂ© par Henri Le Bonniec, 1989 - books.google.fr).

 

Durant la première guerre de religion, chaque camp recrute alors des mercenaires, allemands pour les protestants, italiens pour les catholiques (Bescherelle Chronologie de l'histoire de France (édition 2017): des origines à nos jours, 2017 - books.google.fr).

 

Coligny

 

Voltaire rapproche Coligny et Vitellius selon ce qu'en dit l'historiographe jésuite Daniel (1649 - 1728) :

 

Voltaire, dans ses notes de la Henriade, comme dans son Essai sur les guerres civiles, est impitoyable pour Charles IX, jusque-lĂ  qu'il ne craint pas de lui prĂŞter, devant le cadavre de Coligny, Ă  Montfaucon, le mot de de Vitellius Ă  BrĂ©diac : «Le corps d'un ennemi mort sent toujours bon.» Walter Scott l'a bien mis dans la bouche de Louis XI, au chapitre III de Quentin Durward (Charles Buet, L'amiral de Coligny et les guerres de religion au XVIe siècle, 1884 - books.google.fr).

 

Un Italien de la compagnie du duc de Nevers coupa la tête de Coligny et la porta en trophée à la reine Catherine de Médicis, qui l'envoya au pape Grégoire XIII. La populace ayant mutilé le corps de l'amiral, le traîna l'espace de trois jours dans tout Paris, et le pendit ensuite par les pieds au gibet de Montfaucon (L. A. Marchand, Souvenirs historiques sur l'ancienne abbaye de Saint-Benoît-sur-Loire, 1838 - books.google.fr).

 

"vaillant capitaine"

 

Le terme "vaillant" viens en effet du mot latin "valens".

 

D'un autre Valens : "vn vaillant Capitaine nommé VALENS, Proconsul és prouinces d'Achaye ou de Grece" (Jacques Esprinchard, L'histoire des empereurs romains: Depvis Ivles Caesar Ivsqves A Rodolphe II, Tome 1, 1600 - books.google.fr).

 

Fabius Valens, grand Capitaine & grand amy de Vitellius (Honoré Bouche, La chorographie ou description de Prouence et l'histoire chronologique du mesme pays, Tome premier, 1664 - books.google.fr).

 

Pour BrantĂ´me, la plupart des hommes de guerres sont de vaillants capitaines.

 

Or ce M. le grand maistre [RenĂ© comte de Tende] laissa deux filz : l'aisnĂ© M. le comte de Tande, et l'autre M. le marquis de Vilars. M. le conte de Tande fut un brave et vaillant seigneur et capitaine. Il a eu en son temps plusieurs belles charges. Il fut couronnel des Suysses au royaume de Naples, comme il fut ailleurs (comme j'en parle au chapitre des couronnelz) soubs M. de Lautrec, lĂ  oĂą il fit tousjours très-bien, et conserva tousjours très-bien ses gens Ă  l'obĂ©issance et Ă  leur devoir envers le roy. Il a estĂ© long-temps gouverneur de Provance avec beaucoup de rĂ©putation, pour en estre les gens bizarres, fantastiques' etmalaisez Ă  ferrer, mais pourtant très-braves et vaillans; et les a si bien gouvernez, que soubs lui on n'a point veu de remuemens et eslĂ©vations que l'on a veu despuis soubs les autres gouverneurs. Il est vray qu'aux premières guerres ils le soupçonnarent un peu de la religion, Ă  cause de sa femme la contesse de Tande, qui en estoit. Aussi disoient-ils alors en leurs langues, que trois choses gastoient la Provance : le vent, la contesse et la Durance; car les vents, quand ils s'y mettent, sont terriblement grandz et font beaucoup de maux au pays, comme la rivière de Durance, quand elle est grosse et desbordĂ©e, elle se faict si furieuse et impĂ©tueuse qu'elle faict de grands maux. Les Provençaux donc, se dĂ©fians de M. le conte Ă  cause de ceste religion, car ils sont très-bons catholiques, se desgoutarent un peu dudict conte, et en son lieu s'assurarent de M. le conte de Sommerive son filz, lequel ils prindrent en main et l'aymarent bien fort, parce qu'ils le voyoient ennemy passionnĂ© des huguenotz, et qu'il leur fit fort bien la guerre et cruelle, et en tuèrent beaucoup soubs lui (Oeuvres complètes de Pierre de Bourdeille: Grands capitaines françois, 1867 - books.google.fr).

 

Les écrits de Pierre de Bourdeille dit Brantôme (vers 1537 - 1614) ne furent publiés, de manière posthume, qu'en 1655 pour la première fois, dans une édition imparfaite et incorrecte. Il faudra attendre le XVIIIe siècle pour que sa réputation se fasse. Immobilisé par une blessure en 1584, il se retira «perclus et estropié» de la cour et «songe à ses amours et aventures de guerre, pour autant se contenter». Persuadé qu'il allait mourir, il décida d'écrire ses mémoires et dicte ses écrits à son secrétaire Mathaud (ou Mahaud). Pendant les 30 dernières années de sa vie, il se consacra à l'écriture. Ses Mémoires l'ont immortalisé (fr.wikipedia.org - Brantôme (Ecrivain)).

 

Le Toulousain Antonius Primus Bec, qui avait franchi l'Apennin avec les légions d'Illyrie, les battit près de Crémone, à l'endroit où ils avaient quelques mois auparavant défait les troupes d'Othon. La flotte de Vitellius qui était à Misène, s'étant effrayée de ce désastre, embrassa immédiatement le parti de Vespasien et son exemple fut imité par tous les légionnaires. Sabinus, le frère de Vespasien, aurait pu alors soulever Rome contre Vitellius et lui faire expier tous ses crimes. Il aima mieux entrer en négociation avec lui et lui proposer de céder le trône pour une rente viagère de cent millions de sesterces (environ vingt millions de francs). Vitellius y consentit, et le lendemain de ce honteux marché, il sortit de son palais en habit de deuil, avec ses domestiques et son fils, se présenta sur la place publique et lut en pleurant son acte d'abdication qu'il priait d'agréer. Le peuple parut touché de son infortune et le conjura de reprendre son diadème. Il le fit, mais il ne le conserva pas longtemps (Claude-Joseph Drioux, La Bible populaire: hist. illustrée de l'A. et du N. T., 1864 - books.google.fr).

 

Sabinus fut décapité et son tronc pendu à un gibet. Le Capitole fut brûlé et le futur empereur Domitien s'en échappa (Les Oeuvres de C. Corneille Tacite, traduites de latin en François par messire Achilles de Harlay, 1644 - books.google.fr).

 

Bédriac : cf. quatrain IX, 86, où Domitien serait désigné par le "jeune Chaulveron" et apparaît la légion Rapax.

 

Le "corps" de Rome

 

Le "corps pendu" peut être encore interprété comme la traduction d'une expression de Pline l'Ancien décrivant Rome. On serait bien là.

 

Sed tunc senes aggeris vastum spatium, et substructiones insanas Capitolii mirabantur : praeterea cloacas: operum omnium dictu maximum, suffossis montibus, atque, ut paulo ante retulimus, urbe pensili, subterque navigata. (Les vieillards admiraient l’immensité de la terrasse (de Tarquin le Superbe), les fondations exorbitantes du Capitole, et les égouts, de tous les ouvrages le plus grand, puisque des montagnes furent percées, que, à l’instar de cette Thèbes dont nous venons de parler (XXXVI, 20), Rome se trouva suspendue, et qu'on navigua par-dessous) (XXXVI, 24) (Histoire naturelle de Pline, traduit par Emile Littré, Tome 2, 1850 - books.google.fr).

 

La littĂ©rature utilise de manière moins agressivement visible la morphologie du corps corps humain, et particulièrement du corps fĂ©minin. La ville, parfois dotĂ©e de parole, se prĂ©sente (comme la Rome de Lucain) sous l'aspect d'une femme. Du Bellay place les sept collines de Rome sur les sept points essentiels d'un corps de gĂ©ante. Dans la version latine du texte, parue dans les Poemata (1558), c'est Rome elle-mĂŞme, dotĂ©e de parole, qui dĂ©crit son supplice titanesque. La ville comme corps revĂŞt deux aspects complĂ©mentaires : d'une part elle intègre l'imagerie de la terre reprĂ©sentĂ©e elle-mĂŞme sous forme humaine, et d'autre part elle se conforme Ă  l'anatomie du corps humain. Le vocabulaire moderne a gardĂ© trace de cet anthropomorphisme, lorsqu'il parle des «artères», de la «circulation» urbaines, de ses jardins-poumons et de la «tĂŞte» de la citĂ©. La ville se conforme aussi au corps de la terre : elle en Ă©pouse les formes et les reliefs (Claude-Gilbert Dubois, L'imaginaire de la Renaissance, 1985 - books.google.fr).

 

Un Ă©vĂ©nement a fortement marquĂ© l’Europe du XVIe siècle : le sac de Rome le 6 mai 1527. Les troupes de lansquenets de Charles Quint, conduites par le connĂ©table de Bourbon, prennent d’assaut Rome et pillent la ville, dĂ©truisant les documents de la papautĂ©, les Ĺ“uvres d’art, alors que le pape et sa suite se rĂ©fugient au château Saint Ange et assistent, impuissants, au pillage. Selon l’artiste Benvenuto Cellini, «La nuit Ă©tait venue, les ennemis Ă©taient Ă  Rome. Nous, au château, et moi surtout qui ai toujours plaisir Ă  la nouveautĂ©, nous regardions ce spectacle incroyable». Le siège s’était fait par escalade et par des brèches dans la muraille par oĂą pĂ©nĂ©trèrent les enseignes. Guillaume Du Bellay, le protecteur de Rabelais, alors prĂ©sent, n’a pu que regretter la passivitĂ© du pape et de sa suite qui refusèrent de rĂ©sister, alors qu’il tentait vainement de s’opposer Ă  l’inaction. Deux mois après, une Ă©pidĂ©mie de peste ravagea Rome. [...] Rabelais fait allusion dans la Sciomachie au rĂ´le de Guillaume du Bellay lors de cet Ă©vĂ©nement. (Mireille Huchon, Rabelais allĂ©goriste, Revue d'histoire littĂ©raire de la France, Volume 112, 2012 - www.cairn.info).

 

La Sciomachie a été écrite en 1549 à l'occasion de la naissance du duc d'Orléans fils du roi de France Henri II. Dans ce texte apparaît justement Vitellius ordonnant un banquet proposant un grand nombre de poissons. Mais la sciomachie est un spectacle offrant à la fois un combat naval (naumachie) et combat terrestre. A ces spectacles assistent entre autres le cardinal d'Armagnac, celui qui envoie au connétable de Montmorency les têtes de marbre des empereurs romains en 1555, et Robert Strozzi, frère de Pierre à qui Montluc emprunta une galère pour acheminer les statues (Oeuvres de François Rabelais, Ledentu, 1837 - books.google.fr).

 

"pendu" : "pendens"

 

"pendens" : indécis (Gaffiot).

 

Peut-ĂŞtre Ă  mettre en rapport avec la carte du Tarot le Pendu (cf. quatrain II, 2).

 

Il symbolise la contrainte, un obstacle venu de soi-même, des autres, ou d'un fait extérieur. Le Pendu indique souvent des espoirs déçus, un éloignement, le sacrifice ou même la trahison. Peu de Volonté dans le Pendu, qui implique toujours une dislocation, une dissolution. Le seul sens favorable peut venir d'une lame divine : le sacrifice pour un ordre supérieur. La lame suivante est la Mort (Sara Girdom, L'avenir dans les cartes, 1976 - books.google.fr).

 

La PRUDENCE est du nombre des quatre Vertus Cardinales : les Egyptiens purent-ils l'oublier dans cette peinture de la Vie Humaine. Cependant, on ne la trouve pas dans ce Jeu. On voir Ă  sa place sous le N° XII entre la Force & la TempĂ©rance, un homme pendu par les pieds (Antoine Court de GĂ©belin, Monde primitif, analyse et comparĂ© avec le monde moderne: Dissertations mĂ©lĂ©es, Tome 8, 1787 - books.google.fr).

 

an dans antemna ne représente ni ava, ni ante, mais bien amb. De cette façon antemna pour *ambtenna signifierait «ce qui est tendu des deux côtés». Cette étymologie est appuyée par la réduction fréquente de amb en an, am. N’a-t-on pas anceps, ancile, ancisus, anfractus, anfariam, anquiro, anhelo, amsancti, amsegetes, amtermini, amputo, respectivement pour ambceps, ambcile, *ambcisus (comparez amcisus), etc. ? (Joseph van den Gheyn, Essais de mythologie et de philologie comparée, 1885 - books.google.fr).

 

anthenne, du latin antemna, antennes, au pluriel, pour décrire les deux branches d’une vergue perpendiculaire au mat vertical. Sa position transversale rappelle assez bien l’image d’une croix sur une nef (Lucien de Luca, Scholia Nostradamica, 2022 - www.researchgate.net).

 

En termes de marine, on appelle bachia les deux moitiés des antennes; cornua les deux extrémités des mêmes antennes (Virgile, Oeuvres en Latin et en François, Tome 2, 1802 - books.google.fr).

 

«Valens, sorti du golfe de Pise, fut contraint par la tempête ou les vents contraires d'entrer dans le port d'Hercule-Monoecus (Monaco). Non loin de ce lieu se trouvait Marius Maturus, procurateur des Alpes-Maritimes fidèle à Vitellius, quoique entouré d'ennemis de toutes parts, il n'avait pas encore abjuré son serment; il fit accueil à Valens, mais il l'effraya sur le projet téméraire d'aborder la Gaule narbonnaise. Au même moment, la crainte ébranlait la foi de ceux qui l'accompagnaient.» (Maturus fournit à Valens et à sa suite les détails concernant les dispositions prises par Paulin). «Dès que ces dispositions très-réelles, et de plus accrues par la renommée, eurent ébranlé de diverses manières les esprits des Vitelliens, Valens, a avec quatre gardes, trois amis et autant de centurions, regagné ses vaisseaux. Maturus et les autres Vitelliens prirent volontairement le parti de rester et de jurer fidélité à Vespasien. Au reste, si la mer offrait plus de sécurité à Valens que les côtes et les villes, il n'en était pas moins incertain de l'avenir, et il savait mieux ce qu'il avait à éviter qu'il ne savait à qui il devait se fier.» L'historien ne dit pas quelle était la force de l'escorte de Fabius Valens, diminuée encore par la défection qu'on vient de voir, ni le nombre de ses navires. D'après les termes du récit, il paraissait tenter un passage audacieux à travers la Narbonnaise et non une expédition sérieuse. contre les côtes de cette province. Par conséquent, il devait plutôt chercher à éviter le port de Fréjus qu'à se commettre avec ceux qui le défendaient. Au reste, quelque fût son dessein, le mauvais temps et l'esprit de décision de Valère Paulin se chargèrent de le faire échouer (Joseph Adolphe Aubenas, Histoire de Fréjus Forum Julii : ses antiquités son port, 1881 - books.google.fr).

 

Alors que Valerius Paullinus est présenté comme "strenius militiae", homme de décision plein d'énergie (Michel Christol, De la colonie provinciale au Sénat romain : les Valerii Paulini de Fréjus, La société romaine et ses élites, 2021 - books.google.fr).

 

A mettre en relation avec le "confus" du vers 4. 

 

Pline attribue Ă  FrĂ©jus les surnoms Classica et Pacensis : «Forum Julii Octavanorum colonia, quae Pacensis appellatur et Classica» (H. N., 1. III, c. v, 5) (A. HĂ©ron de Villefosse, Les inscriptions romaines de FrĂ©jus, Congrès archĂ©ologique de France, Volumes 49 Ă  50, 1883 - books.google.fr).

 

Cf. "classe" du vers 3.

 

"sera gettée"

 

"jactare" «jeter souvent et précipitamment» pris au sens figuré de «faire parade, lancer avec ostentation», fréquentatif de jacere «jeter, lancer» (gésir, jeter) (Alain Rey, Dictionnaire Historique de la langue française, 2011 - books.google.fr).

 

PARADE, subst. fĂ©m. (parade) (du latin parata pour paratus, prĂ©paratif, apprĂŞts), montre, Ă©talage : cela n'est mis que pour parade, ou pour la parade. Ostentation, vanitĂ© faire parade de son esprit, de son savoir, etc. En temps de guerre, Ă©volutions que font sur la place d'armes les troupes qui vont monter la garde (NapolĂ©on Landais, Dictionnaire gĂ©nĂ©ral et grammatical des Dictionnaires Français, Tome 2, 1841 - books.google.fr).

 

La tĂŞte de Fabius Valens, acheminĂ©e depuis Urbinum, fit l'objet d'une parade pour intimider les soldats vitelliens Ă  Narni (Ombrie) :

 

«On montra sa tĂŞte aux cohortes vitelliennes, afin de leur enlever pour toujours l'espoir qu'elles caressaient; (...) la vue de sa tĂŞte sanglante les jeta dans le dĂ©sespoir. Quant Ă  l'armĂ©e flavienne, ce fut pour elle un encouragement prodigieux : elle accueillit le trĂ©pas de Valens comme la fin de la guerre» (Tacite Hist. 62 2-3).

 

Effigie

 

Tacite, Livre III, Chapitre III : Præscriptum Vespasiani nomen, projectas Vitellii effigies. L'enseigne de la lĂ©gion, dit M. Burnouf, d'après Le Beau (quatorzième MĂ©moire sur la lĂ©gion romaine, Acad. des inscript., XXXV, 277), Ă©tait une aigle d'or ou d'argent portĂ©e au haut d'une pique et sans drapeau. L'enseigne de la cohorte Ă©tait un drapeau carrĂ© attachĂ© Ă  une traverse, comme la voile d'un navire Ă  son antenne : ce drapeau s'appelait vexillum, d'oĂą, par contraction, vient velum. Sur le vexillum Ă©tait inscrit par devant, præscriptum, le nom de l'empereur rĂ©gnant, avec celui de la lĂ©gion et le numĂ©ro de la cohorte. L'enseigne de la centurie s'appelait du nom gĂ©nĂ©rique signum. C'Ă©tait une pique surmontĂ©e, tantĂ´t d'une main droite, tantĂ´t d'une figure reprĂ©sentant la Victoire, Hercule ou une autre divinitĂ©, quelquefois d'un fer Ă  cheval. Le bois de la pique Ă©tait garni de mĂ©daillons portant l'image en buste de l'empereur. C'est de lĂ  qu'on arrache les effigies de Vitellius pour les jeter par terre. Ces sortes d'enseignes avaient quelquefois des drapeaux, mais attachĂ©s au dessous des autres ornemens de la pique, ce qui les rendait tout-Ă -fait diffĂ©rens du vexillum. Au reste, la pique du vexillum eut aussi, jusqu'après Trajan, des mĂ©daillons; c'est pourquoi nous disons, supra, 1, 41 : Vexillarius comitatæ Galbam cohortis dereptam Galba imaginem solo adflixit (Charles Louis Fleury Panckoucke, Oeuvres de C.C. Tacite : Histoires, Tome 5, 1831 - books.google.fr).

 

Vitellius, à la tête de l'empire, a été le parti de Fabius Valens jusqu'à la fin et donc "sa" "tête", "son" "chef".

 

Comme s'il était logique qu'il soit à la tête de l'Empire, Vitellius s'inscrit dans une sorte de continuité et ne renie pas le passé (Renée Carré, Vitellius et les dieux, Pouvoir, divination, prédestination dans le monde antique, 1999 - books.google.fr).

 

Acrostiche : TSSC, Tussac

 

Tussac, Ă©cart de la commune de Treschenu (Diois) dans la DrĂ´me.

 

Claude de l'Hère ou de Laire, baron de Luc et Miscon, déclara, le 15 mars 1540, devant le sénéchal du Valentinois, tenir en fiefs de l'évêché de Die la terre et seigneurie de Luc et Miscon, sous le titre de baronnie, la seigneurie de Glandage et celle de Grand-Guisans. Homme de cœur et de résolution, Glandage s'était distingué au siège de Sisteron (1562), au combat de Monfrin et aux bords du Lez, sous le comte de Suze (LONG, p. 246). Nommé gouverneur de Die en remplacement du sieur de Gargas, il justifia la confiance de de Gordes en défendant cette place contre les entreprises réitérées de Montbrun (PÉRUSSIS, p. 163). Il eut un fils, Hugues de l'Hère, qui embrassa en 1572 le parti des réformés et se distingua dans les guerres du Comtat, notamment à la prise d'Orange, le 5 novembre 1573. Hugues, connu sous le nom de Glandage le fils, était en 1574 au siège de la ville de Die, et portait ainsi les armes contre son père. Le siège n'ayant point réussi, les protestants accusèrent ce jeune homme de trahison (ARNAUD, t. I, p. 292). La branche de la famille de l'Hère qui possédait Glandage s'est éteinte avec Marie de l'Hère, dame de Glandage, qui épousa, en 1620, Antoine de la Baume, dit le baron de la Baume (ANSELME, t. IX, p. 72; Chorier, Estat politique, t. III, p. 90) (Mémoires des frères Gay, Bulletin d'histoire ecclésiastique et d'archéologie religieuse des diocèses de Valence, Gap, Grenoble et Viviers, Volume 3, 1883 - books.google.fr).

 

Fabius Valens, dont Tacite trace en peu de mots un portrait peu honorable, faisait la guerre en faveur de Vitellius contre le parti d'Othon; il traversa le pays des Voconces et vint exercer contre Luc toutes sortes de rapines et de brigandages. Voici comment s'exprime l'historien : Lento deindè agmine per fines Allobrogum et Vocontiorum ductus. exercitus, ipsa itinerum spatia, et stativorum mutationes venditante duce, foedis pactionibus adversus possessores agrorum et magistrátus civitatum adeò minaciter, ut Luco (municipium id Vocontiorum est) faces admoverit, donec pecuniâ mitigaretur. Quotiens pecuniæ materia deesset, et stupris et adulterĂŻĂŻs exorabatur (Livre I, chapitre 66) (M. de VĂ©rone, MĂ©moire sur les Voconces, Bulletin de la SociĂ©tĂ© de statistique, des arts utiles et des sciences naturelles du dĂ©partement de la Drome, Volumes 1 Ă  2, 1837 - books.google.fr).

 

Claude de L'Hère est le fils de Hugues de Lers qui épousa vers 1510 Marguerite Claret de Truchenu [Treschenu], dame de Glandage, qui testa en 1550 (Bérole, notaire) A l'occasion du mariage de Geneviève, sa fille, avec Louis d'Urre, en 1576, d'Aubaïs, p. 335, le désigne sous le nom du vieux Glandage. Hugues, fils de Claude, est probablement celui qu'on désigne sous le nom de Glandage ou Glandaige le Jeune. En 1574 il combattait sous les ordres de Montbrun (d'Aubaïs, p. 154 et 312). Il quitta le parti protestant et commandait en 1580 une compagnie de cavalerie dans l'armée du duc de Mayenne (Mémoires d'Eustache Piémont, p. 137) (Adolphe de Coston, Histoire de Montélimar et des principales familles qui ont habité cette ville, Tome 2, 1883 - books.google.fr).

 

Typologie

 

Le report de 1846 sur la dat pivot 69 donne -1708.

 

Epoque du début du livre biblique de l'Exode (Nicolas Lenglet Du Fresnoy, Tablettes chronologiques de l'histoire universelle sacrée et prophane, ecclésiastique et civile, depuis la création du monde, jusqu'à l'an 1743, Tome 1, 1744 - books.google.fr).

 

La mort de Joseph [...] est un point remarquable dans l'histoire que nous a laissée Moïse; car c'est là que finit la Genèse, le premier de ses cinq livres. On trouve dans l'Exode, qui est le livre suivant, la naissance d'Amram, père de Moïse, et la mort de Lévi, son bisaïeul et le père de la race sacerdotale (Abbé Borne, Abrégé d'histoire universelle: divisé par siècles depuis la création jusqu'à la fin de l'année 1824, 1825 - books.google.fr).

 

A la naissance de Jésus-Christ, au temps du roi Hérode et de l'Empereur Auguste, la Judée était une province romaine gouvernée par le Consul romain Ponce-Pilate. Auguste mourut en 14. Ses successeurs, Tibère, Caligula, Claude, Néron, puis Gabla, Othon, et Vitellius, se distinguèrent surtout par leurs violences et leurs débauches. Le premier de la dynastie des empereurs Flaviens, Vespasien (69-79), rétablit enfin l'ordre dans l'Etat. Il eut aussi à faire face à une longue révolte des Juifs, la guerre de Judée (66 à 70). Proclamé empereur alors qu'il mettait le siège devant Jérusalem, il laissa à son fils Titus la mission d'emporter la ville d'assaut et d'exercer une violente répression contre les Juifs. Ainsi commença, en 70, après que le Temple eût [a] été brûlé, l'exode des Juifs ou Diaspora - on remarquera, cependant, que la dispersion des Juifs à travers le monde a été un processus historique continu, bien avant la crucifixion de Jésus (Paul Cazayus, Pouvoir et liberté en politique: actualité de Spinoza, 2000 - books.google.fr).

 

Un tableau : La Mort de Vitellius

 

Comme pour le quatrain IV, 88, on s'intéresse à une oeuvre picturale.

 

Jules-Eugène Lenepveu, né à Angers le 12 décembre 1819, est l'élève de Mercier à l'Ecole régionale des Beaux-Arts, puis, en 1838, de Picot, à Paris. Entré à l'Ecole nationale des Beaux-Arts, il exposa son premier tableau, Idylle, en 1843. Il se destinait alors à la peinture de genre. Grand prix de Rome de peinture en 1847 sur le sujet d'histoire de la Mort de Vitellius, en même temps que lauréat du Salon (3e médaille pour Saint Saturnin), il séjourna six années en Italie. Il obtint une 2e médaille à l'Exposition universelle de 1855, un rappel en 1861. Chevalier de la Légion d'honneur du 14 août 1862 ; officier le 11 janvier 1876 ; commandeur de Saint-Grégoire le Grand (1878) et d'Isabelle la Catholique (1893). Directeur de l'Académie de France, à Rome, de 1873 à 1878. Professeur à l'Ecole nationale des Beaux-Arts. Membre du Conseil supérieur de l'Ecole des Beaux-Arts et du Conseil supérieur de l'Instruction publique. Membre de l'Académie de Saint-Luc et de la Congrégation artistique des virtuoses (1877). Président d'honneur de la Société Artistique et Littéraire de l'Ouest (Angevins à Paris), de la Société nationale d'Agriculture, Sciences et Arts d'Angers, etc. Mort subitement à Paris, le 16 octobre 1898, inhumé au cimetière du Père-Lachaise le 20 octobre, dans le caveau funèbre de la famille de M. Lenepveu de Lafont (son frère ainé) (Revue de l'Anjou, 1898 - books.google.fr).

 

In The Death of Vitellius (1847, École Nationale Supérieure des Beaux-Arts, Paris) Lenepveu accentuated the effects created by the action seeming to extend beyond the picture frame with which Bénouville had previously experimented. By means of numerous foreshortenings and contrasts between the well-lit white togas and the dark background of the figures in shadow (white on black), the painter exaggerated the violently sensationalist character of his competition subject, provoking the disapproval of some critics. Of all the extant offerings by the competitors of 1847, Lenepveu's is the only one that, in its rhetorical effects, went beyond the pantomime of David's Horatii or the conventions of the academic tête d'expression. Lenepveu flung his act of butchery in the jury' face (Pierre Serié, Theatricality Versus Anti-Theatricality: Narrative Techniques in French History Painting (1850-1900), "Painting and Narrative in France, from Poussin to Gauguin ", 2017 - books.google.fr).

 

Très curieusement, dès les dernières années de l'Empire, les personnages davidiens cessent d'appartenir à un monde clos sur lui-même et, çà et là, un personnage accessoire, voire l'un des principaux, s'adresse, dans un regard, au spectateur du tableau. La leçon ne saurait être tout à fait la même qu'il s'agisse de l'empereur Vitellius, de Napoléon Ier ou d'un vieillard dont la maison vient de brûler. Il n'est pas question d'inviter le spectateur dans un monde transcendant ou mythique, mais bien plutôt de lui signifier que tout ce qui se passe dans la peinture appartient en fait à son monde et doit être lu comme une leçon en images pour l'homme du XIXe siècle. Dans le cas d'un autre tableau de notre artiste, nous pourrions proposer une autre lecture de ce regard du modèle sur le spectateur : il s'agit du Henri IV et sa famille du Salon de 1850 (n° 176 du catalogue) où la jeune Elisabeth fixe son regard sur nous. On pourrait voir s'instaurer ici le même rapport qui s'établit dans le cas d'un portrait ; le regard d'un des acteurs d'une scène historique (ou prétendue telle) suffirait ainsi à attester de la véracité de l'ensemble de la représentation : si l'une des effigies est un portrait (puisque le modèle se comporte comme le ferait celui d'un portrait, en fixant le peintre), alors l'ensemble de la toile est d'une fidélité totale à l'histoire. Un autre point mérite de retenir notre attention dans la production de notre artiste à cette époque : l'existence de tableaux en pendants. Elle pourrait, certes être due à un rôle accru de la peinture de chevalet dans la décoration intérieure, en ce milieu du XIXe siècle, mais on pourrait aussi, à notre sens, y percevoir une volonté d'établir par contreparties un équilibre analogue à celui qui se développait à l'intérieur de chaque œuvre : ainsi, au bon gouvernant (Titus) s'opposait le tyran (Vitellius) ; ainsi, en regard du malheur des incendiés, on pouvait voir celui des inondés ; après le Napoléon des premières années de l'Empire, venait celui de la chute du régime. Ce goût de la contrepartie se trouvait déjà à l'intérieur même de chaque composition, où se lisaient, opposées ou complémentaires, expressions et attitudes diverses : le vieux soldat confiant protégeant ses enfants, la jeune fille inquiète et le petit garçon dormant du sommeil du juste ; parmi les victimes de l'inondation, l'homme fort protège sa femme, qui, épuisée, s'abandonnait aux flots, pendant que leur jeune enfant reste insouciant. Ce balancement entre plusieurs attitudes possibles est l'écho d'un certain ordre de la société bourgeoise du XIXe siècle où chaque chose a sa place assignée et chaque catégorie, son rôle à jouer dans l'équilibre général du monde (Alain Pougetoux, Georges Rouget: élève de Louis David : 1783-1869, 1995 - books.google.fr).

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