Loi du 17 mai 1819

Loi du 17 mai 1819

 

IV, 56

 

1819-1820

 

Apres victoire de rabieuse langue,

L'esprit tempté en tranquil & repos,

Victeur sanguin par conflict faict harangue,

Roustir la langue & la chair & les os.

 

La liberté de la presse

 

La Restauration commença par proclamer la libertĂ© de la presse, en garantissant aux Français, par l'article 8 de la Charte de 1814, le droit de publier et faire imprimer leurs opinions ; mais la loi du 21 octobre 1814 vint bientĂ´t mĂ©connaĂ®tre la libertĂ© promise; par son titre 1er, qui, il est vrai, Ă©tait prĂ©sentĂ© comme purement transitoire, elle soumit Ă  la censure prĂ©alable tous les ouvrages ayant moins de 20 feuilles d'impression et maintint la presse pĂ©riodique dans un Ă©tat de complet asservissement; par son titre deuxième (qui est restĂ© en vigueur jusqu'en ces derniers temps), elle reproduisit la plupart des dispositions du dĂ©cret impĂ©rial du 5 fĂ©vrier 1810 contre les imprimeurs et les libraires, en soumettant l'exercice de ces professions Ă  l'autorisation prĂ©alable du gouvernement et en les rĂ©glementant d'une façon sĂ©vère et rigoureuse. Citons seulement pour mĂ©moire les lois du 9 novembre 1815, des 28 fĂ©vrier et 30 dĂ©cembre 1817, qui furent bientĂ´t abrogĂ©es, en mĂŞme temps que le titre 1er de la loi du 21 octobre 1814, par les cĂ©lèbres lois des 17 mai, 26 mai et 9 juin 1819. M. de Serres, dont le nom reste Ă  juste titre attachĂ© Ă  cette lĂ©gislation, a formulĂ© dans un langage plein de prĂ©cision les vĂ©ritables principes en matière de presse. «Il s'agit uniquement (disait l'exposĂ© des motifs) de recueillir dans les lois pĂ©nales les actes dĂ©jĂ  incriminĂ©s auxquels la presse peut servir d'instrument et d'appliquer Ă  ces actes, lorsqu'ils auront Ă©tĂ© commis ou tentĂ©s par la voie de la presse, la pĂ©nalitĂ© qui leur convient; et comme la presse n'est pas le seul instrument par lequel de tels actes puissent avoir lieu, elle ne sera pas mĂŞme sous ce point de vue l'objet d'une lĂ©gislation particulière; on lui assimilera tous les autres moyens de publication, par lesquels un homme peut agir sur l'esprit des hommes, car, ici encore, c'est dans le fait de la publication et non dans le moyen que rĂ©side le dĂ©lit.»

 

Ainsi, point de lĂ©gislation pĂ©nale distincte Ă  instituer pour la presse ; lĂ©gislation rĂ©pressive et non prĂ©ventive : c'Ă©tait bien lĂ  un vĂ©ritable programme de libertĂ©. C'est en s'inspirant de ces idĂ©es libĂ©rales que la loi du 17 mai 1819 supprima la censure, et que celle du 26 mai fit du jury la juridiction de droit commun en matière de dĂ©lits commis par la voie de la presse ou tous autres moyens de publication. Mais le lĂ©gislateur de 1819 s'Ă©carta du programme tracĂ© par l'exposĂ© des motifs, en crĂ©ant des dĂ©lits spĂ©ciaux Ă  la presse, vĂ©ritables delits d'opinion, comme les attaques dirigĂ©es contre la charte constitutionnelle et les outrages Ă  la morale publique et religieuse ; il s'en Ă©carta encore, quand, par la loi du 9 juin, il introduisit contre les propriĂ©taires ou Ă©diteurs de journaux ou Ă©crits pĂ©riodiques consacrĂ©s en tout ou en partie aux matières politiques une mesure preventive nouvelle, en les soumettant au cautionnement. Quoi qu'il en soit, les lois de 1819 rĂ©alisaient un sĂ©rieux progrès ; l'abolition de la censure et la compĂ©tence du jury donnaient Ă  la libertĂ© de la presse de prĂ©cieuses garanties.

 

Mais le Gouvernement ne se contenta pas longtemps, en matière de presse pĂ©riodique, de la mesure prĂ©ventive du cautionnement; la loi du 31. mars 1820 votĂ©e après l'assassinat du duc de Berry vint rĂ©tablir la censure contre la presse pĂ©riodique politique, et celle du 26 juillet 1821 Ă©tendit les dispositions de la prĂ©cĂ©dente Ă  tous les Ă©crits pĂ©riodiques sans exception. Ces deux lois, qui ne devaient ĂŞtre que temporaires, furent en effet remplacĂ©es par les lois des 17 et 25 mars 1822 ; mais la première soumit Ă  l'autorisation prĂ©alable les journaux politiques et crĂ©a contre tous les Ă©crits pĂ©riodiques la tendance et la censure facultative en attribuant aux Cours Royales le droit de supprimer ceux dont l'esprit Ă©tait de nature Ă  dĂ©plaire au Gouvernement ; quant Ă  la seconde, elle attribua aux tribunaux correctionnels la connaissance de la plupart des dĂ©lits de presse dĂ©fĂ©rĂ©s au jury par la loi de 1819, soumit Ă  l'autorisation prĂ©alable la publication des dessins et gravures, et ajouta aux dĂ©lits d'opinion l'outrage Ă  une religion reconnue par l'État (Georges Barbier, Code expliquĂ© de la presse: traitĂ© gĂ©nĂ©ral de la police de la presse et des dĂ©lits de publication, Tome 1, 1887 - books.google.fr).

 

Cf. quatrain suivant IV, 57.

 

Acrostiche : ALVR, Alvarès

 

Voltaire expose en trois lignes dans la prĂ©face d’Alzire quels sont, selon lui, les attributs de la vraie religion : «regarder les hommes comme ses frères, leur faire du bien et leur pardonner le mal.» Et il ajoute : « On trouvera dans presque tous mes Ă©crits... le dĂ©sir du bonheur des hommes, l'horreur de l'injustice et de l'oppression.» Voltaire adresse presque les mĂŞmes phrases Ă  son ami le roi de Prusse. Il justifie de plus la composition de la tragĂ©die de Mahomet par «l'amour du genre humain qu'il a toujours eu dans le cĹ“ur». Dans ses deux pièces Voltaire propose Ă  ses spectateurs un dĂ©paysement exotique. L’action de la première pièce se dĂ©roule au PĂ©rou. La deuxième se situe dans une terre aussi lointaine que la première, le berceau de l'Islam, La Mecque. L’ancrage temporel d'Alzire paraĂ®t contemporain de la vie de Voltaire Ă  l’inverse de Mahomet qui renvoie mille ans plus tĂ´t. De plus, l'une se prĂ©sente comme le contrepoint de l'autre. La première nous montre comment la tolĂ©rance dans la religion chrĂ©tienne peut adoucir les cĹ“urs les plus durs et les esprits les plus fanatiques, la deuxième met en lumière l'effet pernicieux de l'intolĂ©rance sur la sociĂ©tĂ© et sur l'homme en gĂ©nĂ©ral. Dans Alzire, Alvarès, ancien gouverneur du PĂ©rou, dĂ©fend contre son fils Gusman la cause de la tolĂ©rance religieuse. Gusman, animĂ© par son zèle fanatique, dit Ă  son père en parlant des «sauvages paĂŻens». [...] Dans  la  rĂ©ponse  d’Alvarès  on  reconnaĂ®t  le  message que  Voltaire  veut transmettre au public. [...]

 

Grâce à son esprit charitable et tolérant, Alvarès a converti au Christianisme Montèze, un  prince du Pérou, et sa fille Alzire. Voltaire  attribue  au père une persévérance chrétienne si forte qu'il parvient finalement à vaincre l'intolérance de son fils et à le convertir à une religion de tolérance et de charité. Gusman doit épouser Alzire, mais Zamore, un prince païen, qui aime aussi la jeune fille, frappe son rival d'un coup mortel. Gusman, avant de mourir, adresse à son ennemi ces paroles généreuses et significatives. [...]

 

La pièce finit par le triomphe de l'esprit de bienveillance et de la clémence.

 

Voltaire dans cette pièce abandonne ses railleries audacieuses. Il est ici d'une inspiration grave et noble. Il intervient en chrétien et veut faire comprendre que la religion du Christ est avant tout celle de la tolérance et de l'amour. A travers la personnalité d'Alvarès, Voltaire gagne la sympathie des spectateurs et leur fait aimer la tolérance.

 

Par contre, si nous laissons la «vérité» historique à part, la personnalité essentielle dans Mahomet le prophète ou Le Fanatisme, ne produit qu’un effet de rejet et d’écœurement. Il n'y a pas de doute qu'en s'attaquant au prophète des musulmans c'est bien avec le fanatisme catholique que Voltaire veut régler ses comptes. La représentation de la pièce a été arrêtée par la censure après trois représentations (Fares Al-Bazaz, La tolérance religieuse chez les hommes de lettres au XVIIIe siècle, 2011 - www.applis.univ-tours.fr).

 

Enragé

 

Au sujet d'un différend entre Voltaire et le président de Brosses au sujet de la terre de Tourney, Sainte-Palaye feignait Voltaire trop honnête pour qu’un démêlé purement d'intérêt privé devînt une querelle académique. Sainte-Palaye, à cette occasion, traite Voltaire de chien enragé qui mord n’importe où, "Quelle pitié, s'écrie-t-il, quelle indignité ! etc., etc." (Voltaire et le président de Brosses, 1858 - books.google.fr).

 

Dans les lettres de Varsovie et surtout dans la Confutazione, l'obsession de Casanova (1725 - 1798) confine au délire : Voltaire, ce 'génie infernal', cet 'enragé, banni de toute l'Europe' (C, II. 207), ce Damiens, au lieu de la statue de Pigalle  (S. p. 8), aurait mérité plutôt 'le sort de Ferrante Pallavicino', décapité au siècle précédent pour ses écrits licencieux (Moszinski, p. 57). Après son Epître à Uranie, ses Lettres philosophiques, sa Pucelle, son Cantique des cantiques, on aurait déjà dû le faire assommer' (Moszinski, p. 53). Malgré tout son esprit 'c'est un imbécile', ou plutôt un 'fou', 'un maître fou', 'échappé des petites maisons' (Lettre à l'acteur Soulé, p. 35, 54). A moins qu'il ne soit devenu gâteux ? Car 'cet auteur est vieux, très vieux', 'il radote' (Voltaire et ses combats: actes du congrès international, Oxford-Paris, 1994, Volume 2, Studies on Voltaire and the Eighteenth Century Series, 1997 - books.google.fr).

 

"tranquil & repos"

 

Tranquillité marque simplement une situation exempte d'agitation; la paix regarde cette situation par rapport aux ennemis qui pourraient la troubler; le calme est le repos qui précède ou qui suit l'agitation. C'est une belle chose que la tranquillité (VOLTAIRE, Lettre à M. de Moncrif, 27 mars 1757) (Edouard Sommer, Petit dictionnaire des synonymes français, etc, 1879 - books.google.fr).

 

L'âme tranquille, ce n'est pas la tranquillité stupide d'un esprit qui n'a jamais pensé, c'est le repos philosophique d'une âme éclairée (Voltaire, Lettre à Mme du Deffand, 12 mars 1766) (Eugène Fallex, Lettres choisies de Voltaire, Tome 6, 1885 - www.google.fr/books/edition).

 

"Victeur sanguin... harangue"

 

Pierre de Serre est considéré comme l'un des plus grands orateurs de la Restauration.

 

Pierre-François-Hercule, comte de Serre, né à Pagny-sur-Moselle le 12 mars 1776, mort à Castellamare di Stabia, près de Naples le 21 juillet 1824, est un homme politique français.

 

Étudiant le droit, il est admis au barreau de Metz, où il se distingue. Lors de la réorganisation judiciaire de 1811, il est nommé par l'Empereur avocat général à Metz le 23 février, puis premier président de la cour impériale de Hambourg le 14 juillet. Partisan de la Restauration, il est nommé par Louis XVIII premier président à Colmar en janvier 1815. Parti à Gand, où il accompagne Louis XVIII, pendant les Cent-jours, il retrouve ensuite son poste. Élu le 22 août 1815 député du Haut-Rhin au grand collège (par 63 voix, sur 125 votants et 199 inscrits), il siège dans les rangs de la minorité ministérielle à la Chambre introuvable, où il combat les excès de la majorité ultra-royaliste.

 

Le 30 décembre 1818, il accepte d'entrer dans le gouvernement formé par Decazes après le départ du duc de Richelieu, avec le portefeuille de la justice. Après s'être entendu avec Royer-Collard et les doctrinaires, le garde des sceaux présente trois lois nouvelles sur la presse, supprimant la censure et l'obligation de l'autorisation préalable, reconnaissant la compétence du jury même pour les délits correctionnels et l'admission de la preuve testimoniale contre les fonctionnaires, en juin 1819 (fr.wikipedia.org - Hercule de Serre).

 

L'adoption des lois de Serre sur la libertĂ© de presse, qui marquait une victoire des libĂ©raux sur les ultras, laissa libre cours Ă  l'opposition – et surtout Ă  l'anticlĂ©ricalisme. Le principal organe de l'opposition libĂ©rale Ă©tait Le Constitutionnel, dirigĂ© depuis 1819 par Étienne, Jouy, Jay et Évariste Dumoulin, et qui tirait Ă  21000 exemplaires Ă  la fin de 1826, soit un tiers de la presse parisienne. Elle comptait aussi le Mercure du XIXe siècle, auquel collaboraient Tissot, Jay et Étienne, Le Pilote de Tissot, Le Miroir, oĂą l'on retrouvait Jouy et Cauchois-Lemaire, et, plus confidentiel, Le Courrier français. Mais son plus prestigieux hebdomadaire littĂ©raire Ă©tait La Minerve française, publiĂ©e entre 1818 et 1820 par une Ă©quipe rĂ©dactionnelle issue du mercure de France et du cercle d'Arnault. Elle Ă©tait composĂ©e d'Étienne Aignan, Benjamin Constant, Évariste Dumoulin, Charles-Guillaume Étienne, Antoine Jay, Pierre-Louis de Lacretelle, Pierre-François Tissot. Ă€ la diffĂ©rence des "doctrinaires" comme Royer-Collard et Guizot engagĂ©s vers 1818-1810 dans l'Ă©tablissement de la monarchie constitutionnelle, le cercle de La Minerve se rangeait dans l'opposition au rĂ©gime. Les livraisons s'ouvraient sur les chansons de BĂ©ranger, qui devint alors une figure de proue très populaire de l'opposition libĂ©rale. L'effervescence touchait aussi les Ă©tudiants Ă  la faveur du mouvement europĂ©en : quelques mois avant la promulgation des lois de Serre, le 4 fĂ©vrier 1819, les Ă©tudiants de la facultĂ© de mĂ©decine de Montpellier s'Ă©taient mis en grève, pratique nouvelle, et avaient envoyĂ© Ă  la Chambre une pĂ©tition protestant contre l'arrĂŞtĂ© qui avait prescrit que leur bibliothèque soit expurgĂ©e des livres mal pensants. Certains professeurs comme le philosophe Victor Cousin assuraient un lien actif entre les Ă©tudiants et les chefs libĂ©raux (La Vie intellectuelle en France, Tome 1 : Des lendemains de la RĂ©volution Ă  1914, 2016 - books.google.fr).

 

Après l'assassinat du duc de Berry et la chute du ministère Decazes, il demeure en place dans le gouvernement formé par le duc de Richelieu, en février 1820, et jusqu'à son départ en décembre 1821, bien que la maladie le mine. Revenu à la fin avril de Nice, où l'état de sa santé l'avait obligé à se rendre, il engage la lutte contre les adversaires du projet gouvernemental sur les élections, en premier lieu le groupe doctrinaire et son chef Royer-Collard. Pierre de Serre n'hésite pas à éliminer du Conseil d'État son ancien ami, en même temps qu'il écarte Guizot, Barante et Camille Jordan. Il recommande aux magistrats la plus grande rigueur à l'égard des « révolutionnaires ». En décembre 1821, il refuse de faire partie du cabinet Villèle. Reprenant alors sa place sur les bancs de la Chambre, où il siège au centre-droit, il se prononce en faveur de la compétence du jury en matière de délits de presse. Louis XVIII le nomme comte et ministre d'État, avant de l'envoyer à Naples, en janvier 1822 comme ambassadeur. Il assiste au congrès de Vérone. S'étant représenté sans succès aux élections législatives de 1824, il meurt à Castellamare, près de Naples, des suites de la maladie de poitrine dont il était atteint (fr.wikipedia.org - Hercule de Serre).

 

Cf. quatrain suivant IV, 57.

 

"sanguin" : phtisie

 

De Serre était donc atteint de phtisie (tuberculose) (René de Castries, Louis XVIII, Portrait d'un roi, 1969 - www.google.fr/books/edition).

 

Castellammare di Stabia est une destination pour le thermalisme car il y a des sources thermales minérales utilisées depuis l'époque des romains, recommandée pour les maladies de poitrine (fr.wikipedia.org - Castellammare di Stabia, Bulletin de la Société médicale de la Suisse romande, Volume 9, 1875 - www.google.fr/books/edition).

 

La tuberculose pulmonaire commune, autrefois appelĂ©e phtisie, provient de la rĂ©activation du foyer de primo-infection pulmonaire ; elle se traduit par une altĂ©ration de l'Ă©tat gĂ©nĂ©ral (fièvre Ă  prĂ©dominance vespĂ©rale, fatigue, amaigrissement), des sueurs nocturnes, une toux plus ou moins grasse, des crachats parfois sanglants (hĂ©moptysies) (www.larousse.fr).

 

La tuberculisation est-elle engendrĂ©e par l'hĂ©moptysie ou l'hĂ©moptysie par la tuberculisation ? Si le meilleur garant d'une doctrine Ă©tait son antiquitĂ© mĂŞme, la doctrine de la phthisis ab hæmoptoe est bien pourvue : elle a de vieilles lettres de noblesse. Hippocrale l'a implicitement formulĂ©e dans son aphorisme 15, liv. VII, en disant : «A sanguinis sputo puris spulum, malum;» puis, dans l'aphorisme qui suit immĂ©diatement, et qui complète sa pensĂ©e : «A puris sputo tabes et fluxus.» Plus loin encore, revenant sur la mĂŞme idĂ©e, il dit dans son aphorisme 78 : «A sanguinis vomitu tabes et puris purgatio sursum (après le vomissement de sang la phthisie et le rejet du pus par en haut).» (Michel Peter, HĂ©moptysie tuberculeuse et phthisis ab haemoptoe, L'Union mĂ©dicale: journal des intĂ©rĂŞts scientifiques et pratiques, moraux et professionels du corps mĂ©dical, 1870 - books.google.fr).

 

L'«anarchie des esprits» que Guizot imputait Ă  des auteurs comme Benjamin Constant est bien ce qui, pour le Groupe de Coppet, fortifie le soubassement social et intellectuel des institutions. De lĂ  le conflit entre Constant et le groupe doctrinaire en 1819, Ă  propos des trois projets de loi libĂ©raux sur la presse examinĂ©s Ă  la Chambre : Constant fait de la presse un moyen Ă  la disposition des individus pour rĂ©clamer, dĂ©battre, proposer – surtout en province, face au pouvoir administratif ; Guizot et Royer-Collard y voient un instrument de promotion des grands intĂ©rĂŞts socio-Ă©conomiques et des partis dominants : un agent en tout de la centralisation française ; d'oĂą chez eux la nĂ©cessitĂ© du cautionnement financier. C'est sans doute dans son article «De l'obĂ©issance Ă  la loi» que Constant a exprimĂ© philosophiquement et a dĂ©veloppĂ© avec le plus de force l'enseignement staĂ«lien. Refusant la thèse pascalienne (qu'il cite) selon laquelle il faudrait obĂ©ir aux lois purement et simplement parce qu'elles sont lois, l'auteur affirme que «le devoir d'obĂ©ir [...] suppose une recherche antĂ©rieure de la source d'oĂą part la loi». Comme chez Madame de StaĂ«l (De l'Allemagne), le rĂ©gime du ComitĂ© de salut public est le type mĂŞme d'une lĂ©galitĂ© invalidĂ©e par sa source (Lucien Jaume, Coppet, creuset du libĂ©ralisme comme «culture morale», Coppet, creuset de l'esprit libĂ©ral: Les idĂ©es politiques et constitutionnelles du Groupe de Madame de StaĂ«l, 2000 - books.google.fr).

 

"langue brûlée" : la mort de Voltaire

 

SacrĂ© Voltaire ! Un jour, il parle de se confesser et le lendemain, il tient des propos enflammĂ©s contre la religion et les curĂ©s. Le 11 mai, après une sĂ©ance Ă  l'AcadĂ©mie des Sciences, il rencontra Mme Denis et lui confia qu'il souffrait de plus en plus des reins et de rĂ©tention d'urine. Sa nièce lui promet d'appeler Tronchin, ce qu'elle se garda bien de faire, car elle ne souhaitait pas vair son oncle guĂ©rir. Deux jours plus tard, l'Ă©tat de l'Ă©crivain ayant empirĂ©, Mme Denis se contenta d'appeler l'apothicaire du coin. Celui-ci proposa un philtre de son invention que Voltaire refusa de prendre, sage dĂ©cision car de Villette, un de ses amis qui Ă©tait prĂ©sent Ă  ses cĂ´tĂ©s, eut la langue brĂ»lĂ©e après y avoir seulement goĂ»tĂ©. Dans la soirĂ©e, Voltaire reçut la visite du marĂ©chal de Richelieu. Voyant que son ami souffrait terriblement, ce dernier proposa d'utiliser un philtre Ă  base d'opium. Comme le marĂ©chal s'en servait de temps Ă  autre pour calmer ses douleurs, il pensait que cela aiderait aussi son ami. L'assistance prĂ©sente fit remarquer que ce remède Ă©tait dangereux et que dans son Ă©tat, Voltaire ne le supporterait pas. Mme Denis pensait bien entendu le contraire et ce fut elle, arguant du fait qu'elle savait ce qui convenait ou non Ă  son oncle, qui emporta la dĂ©cision. Par les bons soins de sa nièce, Voltaire reçut donc une forte dose de ce remède qui n'Ă©tait rien d'autre qu'un concentrĂ© d'opium. La dose Ă©tait hĂ©las beaucoup trop forte pour un homme malade. RĂ©sultat après l'avoir absorbĂ©e, Voltaire sentit tout son corps parcouru d'une trainĂ©e de feu et devint comme fou. Son Ă©tat de dĂ©mence dura deux jours entiers, et Tronchin, appelĂ© d'urgence, dut bien admettre qu'il ne pouvait rien pour soigner le malheureux et abrĂ©ger ses souffrances (Jean-Pierre Van den Abeele, Comment et de quoi sont-ils morts ? EnquĂŞtes journalistiques, 2016 - books.google.fr).

 

Voltaire meurt le 30 mai dans l'hôtel de son ami le marquis de Villette, «dans de grandes douleurs, excepté les quatre derniers jours, où il a fini comme une chandelle», écrit Mme Denis. Le 31 mai, selon sa volonté, M. Try, chirurgien, assisté d’un M. Burard, procède à l'autopsie. Le corps est ensuite embaumé par M. Mitouart, l'apothicaire voisin qui obtient de garder le cerveau, le cœur revenant à Villèle.

 

La conversion de Voltaire, au sommet de sa gloire, aurait constitué une grande victoire de l’Église sur la «secte philosophique». Le curé de Saint-Sulpice et l’archevêque de Paris, désavouant l’abbé Gaultier, font savoir que le mourant doit signer une rétractation franche s’il veut obtenir une inhumation en terre chrétienne. Mais Voltaire refusera de se renier.

 

Comme le corps de Mirabeau fut retiré de ce monument des suites de la découverte de l'armoire de fer, Voltaire est devenu le plus ancien hôte du Panthéon. Le 30 mai 1791, jour anniversaire de sa mort, l’Assemblée, décida le transfert. Le 4 avril, après la mort de Mirabeau survenue le 2, l’Assemblée décrète que «le nouvel édifice de Sainte-Geneviève sera destiné à recevoir les cendres des grands hommes». Mirabeau est le premier « panthéonisé». Voltaire le suit le 11 juillet (fr.wikipedia.org - Voltaire).

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