Vicky, fille aînée de la reine Victoria

Vicky, fille aînée de la reine Victoria

 

IV, 96

 

1848-1849

 

La sœur aisnée de l’isle Britannique

Quinze ans devant le frère aura naissance :

Par son promis moyennent verrifique,

Succedera au regne de balance.

 

La reine Victoria (1819-1901), sur le trĂ´ne britannique depuis 1837, a eu 9 enfants du Prince Albert de Saxe-Cobourg-Gotha. Victoria, l’aĂ®nĂ©e surnommĂ©e Vicky, est nĂ©e en 1840, près de quinze ans avant son dernier frère LĂ©opold, nĂ© en fait en 1853. La fille aĂ®nĂ©e de la reine Ă©pousera le prince hĂ©ritier de Prusse (« promis Â» : fiancĂ©) en 1858. L’idĂ©e du mariage « semble ĂŞtre nĂ©e en 1851, lorsque le Prince hĂ©ritier FrĂ©dĂ©ric-Guillaume, grand jeune homme blond Ă  l’anglais plus qu’hĂ©sitant, visite la grande exposition et rencontre Ă  cette occasion la princesse Victoria âgĂ©e alors de 10 ans[1] Â». Le Parlement, sollicitĂ© par la reine, accordera par 328 voix contre 14 la somme de 40 000 livres et une rente annuelle de 8000 (« verrifique Â» : acte de vĂ©rification rendu par une cour de justice [2]).

 

En Allemagne, le prince Guillaume de Prusse et son épouse, la princesse Augusta de Saxe-Weimar-Eisenach, font partie des personnalités avec lesquelles la reine Victoria et le prince Albert sont alliés. La souveraine britannique est d'ailleurs en contact épistolaire régulier avec sa cousine depuis 1846. La révolution qui éclate à Berlin en 1848 renforce les liens entre les deux couples princiers en obligeant l'héritier du trône de Prusse à trouver refuge durant trois mois auprès de la cour britannique. En 1851, Guillaume revient à Londres avec sa femme et leurs deux enfants (Frédéric et Louise), à l'occasion de l'Exposition universelle (fr.wikipedia.org - Victoria du Royaume-Uni (1840-1901)).

 

Le terme « succedera Â» est Ă  prendre selon un des sens latin de « succedo Â» : s’élever [3]. Ainsi Vicky s’élèvera jusqu’au règne, au titre, d’impĂ©ratrice d’Allemagne, par son mari le Kaiser FrĂ©dric-Guillaume III, nĂ© le 18 octobre 1831, et donc du signe de la Balance.

 

Léopold Georges Duncan Albert de Saxe-Cobourg-Gotha est né le 7 avril 1853, donc treize ans après Vicky, au Palais de Buckingham en Londres et mort le 28 mars 1884 à Cannes. Il est le huitième enfant et le quatrième fils de la reine Victoria du Royaume-Uni et du prince consort Albert de Saxe-Cobourg-Gotha. Il est le premier descendant de la reine Victoria atteint d'hémophilie qui causa sa mort prématurée et celle de plusieurs membres de sa famille (Maison de Hesse, de Prusse, de Russie, d'Espagne) (fr.wikipedia.org - Leopold d'Albany).

 

L'hémophilie est une maladie connue depuis des millénaires. Les Hébreux de l'Antiquité la connaissaient déjà et ne pratiquaient jamais la circoncision des garçons dont la mère était issue d'une famille ayant perdu un enfant par hémorragie lors d'une circoncision (fr.wikipedia.org - Hémophilie).

 

Le Talmud connaît la transmission des qualités physiques et psychiques et celle des maladies. Aussi conseille-t-il aux futurs époux de bien se renseigner sur les antécédents physiques et des familles dans lesquelles ils comptent rentrer pour éviter le mariage avec un épileptique et avec un lépreux (Yeb. 64b), ou avec un maldade atteint d'hémophilie (Berakhot 10a) :

 

Lorsque deux enfants de la même mère, mais pas forcément du même père, ou si l'enfant de chacune des deux sœurs (mais non des frères) est mort après une circoncision (par hémorragie) l'enfant suivant de la même mère ou d'une autre sœur ne devra pas être circoncis, de peur qu'il ne meure d'hémorragie (Yebamoth 42b) (Isidore Simon, La gynécologie dans la Bible et le Talmud, Mélanges d'histoire de la médecine hébraïque: études choisies de la Revue d'histoire de la médecine hébraïque (1948-1985), 2003 - books.google.fr).

 

Dans son Homélie sur le Ps 6, Grégoire de Nysse critique une interprétation judaïsante du titre, selon laquelle le chiffre 8 signifie la circoncision</b>, ainsi que la purification qui suit l'accouchement. Le Talmud de Babylone, Menahot 43b, présente David entrant nu dans les thermes et récitant le psaume 6 relatif à la circoncision: la récitation de ce psaume remplace pour lui les phylactères et les mezuzôt. De plus, dans le Midrash, il est dit que “pensant à la circoncision, David a dit: “Je composerai un psaume à son sujet” (ce psaume est le psaume 6)”. Selon un amora, le titre du psaume se réfère à la circoncision qui est obligatoire le huitième jour après la naissance. Si l'on récapitule ces données, «la huitième» du titre est le huitième jour, celui de la circoncision et de certains rites purificatoires. Dans le christianisme ancien, le huitième jour est évidemment le jour de la résurrection de Jésus, qui a eu lieu le lendemain du sabbat. Cette interprétation était inacceptable aux yeux des Sages. Pour la rendre impossible, le titre est transformé en indication musicale dès l'époque du Targum (Gilles Dorival, Titres hébreux et titres grecs des psaumes, Recherches Textuelles Sur Les Psaumes Et Les Évangiles, 2011 - books.google.fr).

 

On doit prêter grande attention au sens de l'argumentation de l'Apôtre (Epitre aux Romains II, Versets 28-29) ; en effet, tandis qu'en raison de la variété de ses interlocuteurs il semblerait s'adresser tantôt à ceux-ci, tantôt à ceux-là, il serait à craindre que l'ordre de la discussion soit soit perturbé et égaré hors du droit chemin ; si bien que la compréhension du lecteur ne puisse atteindre le but où veut le conduire la volonté de l'auteur. Et ce but c'est la Grâce ou la recommandation de la Grâce, pour le dire brièvement. Donc, pour revenir un peu en arrière, Paul entoure d'une même affection paternelle à la fois les Juifs et les païens. Il embrasse les Juifs selon la chair et selon l'esprit, et les païens en vertu de la grâce de l'Evangile et pour l'honneur de son ministère. A ceux qui étaient dans la révolte, aussi bien ceux-ci que ceux-là, il promet la colère et ses conséquences infinies ; par contre, à ceux qui auront bien agi, aux uns comme aux autres, il promet la gloire et l'honneur. Enfin, abaissant et relevant tour à tour, tantôt ceux-ci, tantôt ceux-là, ou les mettant sur un pied d'égalité, il s'efforce de tout modérer et diriger pour qu'aucun n'ait plus de gloire ou de jalousie que l'autre. Bientôt, en effet, il dit, en parlant des païens : «Ceux qui ont péché sans loi, périront sans loi. » Et aussitôt, après au sujet des circoncis : «Ceux qui ont péché sous la loi, seront jugés par la loi. » Revenant au secours des païens il dit : «Alors que les païens n'avaient pas de loi», etc. Se retournant de nouveau vers les Juifs, il dit : «Si toi qui t'appelles Juif », et la suite. Et de peur qu'il ne paraisse trop excessif contre les Juifs, il poursuit en disant : «La circoncision est utile,  si tu respectes la loi. » Mais bientôt, limitant les louanges de la circoncision, en faveur des païens, il ajoute : «Si tu es traitre à la loi ta circoncision deviendra incirconcision. » Puis, relevant un peu les païens, il dit : «Si l'incirconcis observe les justices de la loi», etc. Et exaltant encore un peu plus leurs âmes, il dit : « L'incirconcis naturel qui accomplit la loi te jugera toi, qui es traitre à la loi par la lettre et la circoncision. » En réalité il y avait beaucoup de promesses dans la loi et les prophètes qui semblaient ne concerner que la circoncision, cependant pour ouvrir aux païens une voie d'accès à ces mêmes promesses, il précise : «Le Juif n'est pas celui qui l'est au-dehors, et la circoncision n'est pas au-dehors dans la chair ; mais le vrai Juif l'est au-dedans», etc. (Expositio in Epistolam ad Romanos) (Guillaume de Saint-Thierry, Exposé sur l'épître aux Romains, traduit par Antoine Bru, 1986 - books.google.fr).

 

Guillaume de Saint-Thierry (né vers 1085 à Liège et mort le 8 septembre 1148 à l'abbaye de Signy) est un moine, théologien, et mystique cistercien du XIIe siècle. Il fut l'ami de Saint Bernard et un adversaire de la philosophie rationaliste médiévale (fr.wikipedia.org - Guillaume de Saint-Thierry).

 

Selon le concile de Trente en débat avec la Réforme protestante, "s'il est acquis que la foi seule en la promesse peut sauver, il ne faut cependant pas négliger les « critères de vérification » d'une « foi vivante (et non pas morte) » que sont les « œuvres de justice ». Plus fondamentalement, l'Eglise ne cesse de proposer son expérience séculaire que l'Evangile est vraiment un levain capable de soulever toute la pâte du monde. Ce qui explique sa résistance à toute interprétation spiritualisante du message ou à tout extrinsécisme qui ferait abstraction de la présence transformante de l'Esprit du Christ au cœur du monde" (Etudes, Volume 374, 1991 - books.google.fr).

 

Verrifique

 

Si "verrifique" avec deux "r" pourrait avoir un rapport avec Crystal Palace, palais de verre construit pour l'Exposition de 1851,  occasion de la rencontre de Vicky et de Frédéric, on s'en tiendra à "vérifique" mot rare que l'on trouve chez Marcile Ficin.

 

Ce pouvoir de raisonner comporte deux nécessités, l'une quant à son sujet, l'autre quant à son exercice. La première nécessité consiste en ce que le pouvoir de discuter est tellement implanté dans toute l'espèce humaine qu'il n'en peut être séparé. La seconde nécessité, qui se remarque dans son exercice, est de deux sortes : absolue et relative. La nécessité absolue apparaît dans trois circonstances : dans les axiomes, les définitions et les propriétés. Les axiomes sont les suivants : tout ce qui est existe par soi-même ou par un autre ; les contraires s'excluent naturellement ; le tout est plus grand que la partie ; on doit donner à chacun ce qui lui appartient. Ces axiomes et beaucoup de semblables, comportent une telle nécessité qu'ils sont nécessairement connus, parce qu'ils ne peuvent changer ni être ignorés même du plus ignorant. Il y a aussi une nécessité dans les définitions, comme dans cette définition du cercle : le cercle est une figure dans laquelle toutes les droites menées du centre à la circonférence sont égales. Bien que l'énoncé de cette proposition ou le tracé de cette figure sur le sable soient des choses contingentes, cette vérité est nécessaire et éternelle parce que telle est la nature même du cercle. Une nécessité semblable existe dans les propriétés, par exemple : le cercle est la plus parfaite de toutes les figures. Mais, sans parler du reste, dans les calculs ne passons-nous pas sans cesse d'une vérité nécessaire à une vérité nécessaire ? Deux fois deux, quatre ; trois fois trois, neuf ; deux fois quatre, huit, etc. Nous faisons de même dans la disposition et la comparaison des figures. Si les définitions et les propriétés aboutissent aux principes parce qu'elles découlent des principes et si les principes se trouvent toujours nécessairement dans la puissance rationnelle au moyen de laquelle on raisonne sans cesse, il résulte que ces trois vérités nécessaires, qui sont toutes appelées absolues, sont comprises dans la dialectique naturelle des hommes. Reste la nécessité relative, qui comporte aussi trois parties : l'une est dans l'affirmation, une autre dans la condition, l'autre dans la démonstration. Voici la première : aucune chose ne peut pas ne pas être, aussi longtemps qu'elle est ; l'animal aussi longtemps qu'il vit, vit nécessairement, et autres exemples semblables qu'on affirme du présent et d'où l'on déduit la nécessité du passé et de l'avenir: ce qui a été fait ne peut pas n'avoir pas été fait ; ce qui va être ne peut pas ne pas être sur le point d'être. Voici la seconde: si un corps vit, il existe nécessairement; si l'animal court, il se meut. Voici la troisième : toute partie est plus petite que le tout ; or la tête est une partie du corps humain, donc cette tête est plus petite que le corps humain. Cette conclusion est absolument nécessaire parce que les deux propositions nécessaires précédentes sont unies l'une à l'autre : il est nécessaire que la tête soit plus petite que le corps, premièrement parce que la partie est plus petite que le tout et secondairement parce que la tête est une partie du corps. Donc, dans ces trois choses aussi, l'affirmation, la condition, la démonstration, il y a trois vérités nécessaires. Et si ces trois choses sont dans la raison humaine quand elle discute, ces trois vérités nécessaires y sont aussi. Et parce qu'elle ne cesse pas de discuter même quand nous nous taisons et quand nous dormons (car toute la vie humaine est en quelque sorte un raisonnement perpétuel) ces vérités sont toujours dans la raison. La raison est toujours, si je puis ainsi parler, véridique et « vérifique » : véridique dans les trois premières vérités qui sont nécessaires par elles-mêmes, même quand la raison n'est pas active ; « vérifique » dans les trois autres, parce que la raison leur impose une certaine nécessité par les affirmations, conditions, démonstrations ou par n'importe quels autres modes d'argumentation. C'est un fait contingent que cet être est vivant, mais pendant qu'il vit ce n'est pas une contingence, mais une nécessité. C'est un fait contingent que cet homme se remue, mais s'il court,  ce n'est pas une contingence, c'est une conséquence nécessaire. C'est un fait contingent que cette tête est plus petite que ce corps, mais, les deux propositions précédentes étant posées par l'esprit, cela devient une nécessité, bien que dans le cas particulier de la tête et du corps cela ne soit jamais contingent (Marcile Ficin, Théologie platonicienne de l'immortalité des âmes: Livres IX-XIV, traduit par Raymond Marcel, 1964 - books.google.fr, Marsilij Ficini florentini Platonica theologia de immortalitate animorum, 1525 - books.google.fr).

 

Si sublime que soit la doctrine de Platon, elle reste la préface du Christianisme et si grand qu'ait été son génie, restant soumis aux limites de la raison, il y a des choses qu'il n'a pas pu connaître. Commentant le verset trente du Chapitre troisième de l'Épître aux Romains : « Puisqu'il y a un seul Dieu qui justifiera les les circoncis par la foi (ex fide) et les incirconcis par la foi (per fidem) », Ficin déclare sans équivoque : « Chez les Gentils il n'y eut aucune foi ancienne dans le Christ. C'est uniquement par la prédication des Apôtres qu'ils sont considérés comme justifiés par une foi nouvelle et fortuite ».  Ils ne pouvaient pas avoir la foi qui, comme nous le savons, consiste « à croire Dieu, à croire par Dieu et à croire en Dieu ». Moins favorisés que les Juifs qui, eux, possédaient une certaine lumière par les prophètes, la Loi et les figures, ils n'ont reçu la lumière que des Apôtres. C'est pour cela qu'ils se sont trompés et voilà pourquoi Platon n'a pu avoir qu'un vague pressentiment du Christ et n'a pas connu le mystère de la Trinité ». Sur ce point capital, la « Concordance » a pu nous induire en erreur. Ficin lui-même s'est chargé de dissiper l'équivoque. Écrivant au savant Rondoni, évêque de Rimini, Ficin lui dit : « Le frère Sanctus, professeur insigne de théologie, de l'ordre de saint Dominique, m'a rapporté qu'un frère (je ne sais lequel) avait affirmé avec orgueil dans un discours public que que le mystère de la Sainte Trinité, tel qu'il était admis par les chrétiens, se trouvait dans Platon, et que c'était en lui que les premiers chrétiens avaient trouvé leur patrimoine ». C'est dire que Ficin n'était pas seul à s'enthousiasmer de Platon. Il n'en était cependant pas aveugle pour autant : « Parce que les questions platoniciennes me sont familières, poursuit-il, vous attendez sans doute que je me prononce sur ce problème. Eh bien! j'affirme sans hésitation que le mystère de la Sainte Trinité n'a jamais été dans les livres platoniciens. Tout ce qu'on y peut trouver ce sont des conceptions, jusqu'à un certain point semblables dans les termes, mais non par le sens » (Raymond Marcel, Marsile Ficin (1433-1499), 1958 - books.google.fr).

 

Rabelais

 

La circoncision est abordé au chapitre XVIII du Tiers Livre de Rabelais, qui selon Jacques Chomarat aurait eu une grande influence sur Nostradamus (cf. VII, 1) :

 

Les femmes au commencement du monde, ou peu apres, ensemblement conspirerent escorcher les homes tous vifz, par ce que sus elles maistriser vouloient en tous lieux. Et feut cestuy decret promis, confermé, & iuré entre elles par le sainct sang breguoy. Mais ô vaines entreprinses des femmes, ô grande fragilité du sexe feminin. Elles commencerent escorcher l'home, ou gluber, comme le nomme Catulle, par la partie qui plus leurs hayte, c'est le membre nerueulx, cauerneulx, plus de six mille ans a, & toutesfoys iusques à præsent n'en ont escorché que la teste. Dont par fin despit les Iuifz eulx mesmes en circuncision se le couppent & retaillent, mieulx aymans estre dictz recutitz & retaillatz marranes, que escorchez par femmes (Tiers Livre, chapitre XVIII).

 

Le dépouillement symbolise la renonciation du néophyte à sa vie antérieure, une vie corrompue par le péché. On retrouve ici l'image bien connue du «dépouillement du vieil homme» que nous avons déjà rencontrée chez Augustin. Son origine remonte aux Epîtres de Paul, dont nous citons les passages suivants :

 

C'est en lui que vous avez été circoncis d'une circoncision qui n'est pas de main d'homme, par l'entier dépouillement de votre corps charnel; telle est la circoncision du Christ: ensevelis avec lui lors du baptême, vous en êtes aussi ressuscités avec lui (Colossiens 2 : 11-12).

 

L'image paulinienne qui rapproche, par la métonymie, la vie antérieure du néophyte du «vieil homme», et, par la métaphore, d'un vêtement sale et usé, n'est plus guère vivante à l'époque de Rabelais. Devenue cliché, cette image se prête à merveille au jeu typiquement rabelaisien qui consiste à actualiser le sens littéral de la métaphore morte. Ainsi Panurge, qui, au début du Tiers Livre, se mit littéralement «la puce à l'oreille», prend ici au pied de la lettre le conseil que lui donne telle autorité des Pères de l'Eglise: «Dépouille le vieil homme comme un vêtement souillé». Or, Panurge souille effectivement ses vêtements, pour les ôter après. Tout se passe en effet comme si, ce faisant, il visait à se dépouiller de la façon la plus littérale de son «corps de péché», de son «corps charnel». Le caractère impur et lubrique de cette bure dont il se dévêt est d'ailleurs incontestable. On se rappelle que pour Panurge ce vêtement possède «quelque occulte propriété à peu de gens congneu»: «Je ne l'ay pris qu'à ce matin», explique-t-il «mais desja j'endesve, je deguene, je grezille d'estre marié et labourer en diable bur  dessus ma femme» (Tiers Livre VII, 65-68). Or, en se dépouillant de ce symbole de la lubricité (la référence à l'habit monacal est clair), puis en prenant son bain purificateur, Panurge entre dans la bonne disposition pour atteindre au Mot de la Bouteille (Paul J. Smith, Voyage et écriture, Etude sur le Quart Livre de Rabelais, Etudes rabelaisiennes, Tome XIX, 1987 - books.google.fr).

 

Le vieillard, à l'opposé du parcours de vie du jeune circoncis, a sa prière constituée par le psaume 70. Ce psaume rend grâce à Dieu sur la lyre, en sa vérité : "Toi qui m'as fait tant voir de maux et de détresses, tu reviendras me faire vivre. Tu reviendras me tirer des abîmes de la terre, tu nourriras mon grand âge, tu viendras me consoler" (vers 20-21). Les abîmes sont les abysses en latin, signifiant en grec "sans fond" (www.psaumes.site-catholique.fr - Psaume 71).

 

Jérémie connaît, comme le Deutéronome, l'image de la circoncision du cœur (4, 4; 9, 24-25), et on la retrouve en Lv 26, 41 et en Ez 44, 7 et 9. Il connaît aussi l'image du cœur inscrit d'une alliance nouvelle : « Je conclurai avec la maison une alliance nouvelle... Je mettrai ma loi au fond de leur être et je l'écrirai sur leur cœur... (Jr 31, 31-34) » (Morand Kleiber, La Loi dans l'éthique chrétienne, 1981 - books.google.fr).

 

Le byssus est la matière en laquelle était fait des vêtements qui habillait le roi David, (I Chroniques XV, 27, anciennes Paralipomènes) lorsqu'il danse devant l'arche, alors qu'il est présenté nu dans II Samuel 6,15-16 (ancien II Rois). On peut rapprocher la nudité de David chantant le psaume 6 du byssus qui selon saint Basile était tiré d'animaux marins qui leur permettait de s'attacher au fond de la mer : observation ou construction étymologique astucieuse (Sainte Bible expliquée et commentée, contenant le texte de la Vulgate, Sionnet, 1838 - books.google.fr, Augustin Calmet, Le VI. livre des Rois, et les deux livres des Paralipomenes, Tome 6 de Commentaire litteral sur tous les livres de l'ancien et du nouveau testament, 1712 - books.google.fr).

 

Il est une notion qui domine l’herméneutique du jeune Luther, celle de significatio passiva. Le jeune Luther affronte le verset du psaume : In justitia tua libera me. Comment la justice divine, l’aspect de Rigueur opposé à celui de Miséricorde, pourrait-elle être l’instrument de la délivrance ? L’affrontement est sans issue, tant que l’on fait de cette justice un attribut que l’on confère à un Dieu en Soi. Tout change, lorsqu’on la comprend dans sa significatio passiva. C’est à savoir la justice par laquelle nous sommes faits des justes. Ainsi en est-il pour les autres attributs divins, lesquels ne peuvent être compris (modus intelligendi) que par leur relation avec nous (notre modus essendi), et qui devraient toujours être exprimés avec l’adjonction du suffixe « -fique » (l’unifique, le bénéfique, le vérifique, le sanctifique, etc.). C’est cette découverte qui fit du jeune Luther le grand interprète de saint Paul (Entretien de Henri Corbin avec Philippe Nemo, De Heidegger à Sohravardî, 1976 - www.amiscorbin.com, fr.wikipedia.org - Phénoménologie de la vie religieuse).

 

In justitia tua libera me est un verset du psaume 70.

 

Ou qui pourra descendre au fond de la terre (Paul, Romains X, 7). Le mot d'abysme, que Moïse prend en cet endroit pour la mer (Deutéromnome 30, 12-14), se peut prendre aussi pour le fond de la terre, comme David le prend. Ps.70. 22. ce qui convient mieux à la pensée de saint Paul, qui parle de la descente de Jésus Christ aux enfers & de son retour de ces lieux soûterrains. Ainsi on donne encore à ce passage cet autre sens. L'Apôtre voulant prouver que la vraie justice ne s'acquiert que par la foi en Jésus Christ, dit qu'il n'est pas nécessaire pour cela de le faire descendre du ciel pour nous en> instruire, puisqu'il est descendu & qu'il s'est incarné pour nous l'enseigner & nous la donner, ni de le faire remonter des enfers par la resurrection pour nous affermir dans cette justice puisqu'il est aussi ressuscité. Moise dans le Deuteronome, dit qu'il n'est point nécessaire défaire venir quelqu'un du ciel, ou du fond des abysmes, pour enseigner la loi; mais ce que Moise dit de l'observation de la loi, saint Paul l'explique de la foi (Isaac Louis Le Maistre de Sacy, Epistre de Saint Paul aux Romains, 1709 - books.google.fr).

 

Saint Augustin découvre une nouvelle allusion au thème des deux résurrections (celle selon l'esprit et celle selon la chair) dans le verset 20 du Psaume 70 : Tu m'as retiré de nouveau des abîmes de la terre et, pour justifier son interprétation, il fait appel à Rom., 8, 10-11, qu'il commente brièvement : « Nous sommes déjà ressuscités par la foi, l'espérance et la charité, mais il nous reste à ressusciter dans notre corps », En. in Ps. 70, ser. 2, 10 (Saint Augustin, Œuvres, Volume 72, 1936 - books.google.fr).

 

Saint Augustin s'égara dans des explications mystérieuses que lui-même ne pouvait entendre. On est étonné qu'un orateur tel que lui, ait dit dans son sermon sur le psaume 6 : « Il est clair et indubitable que le nombre de quatre a rapport au corps humain, à cause des quatre élémens et des quatre qualités dont il est composé ; savoir, le chaud et le froid, le sec et l'humide. C'est pourquoi aussi Dieu a voulu qu'il fût soumis à quatre différentes saisons ; savoir, l'été, le printemps, l'automne, et l'hiver... Comme le nombre de quatre a rapport au corps, le nombre de trois a rapport à l'âme, parce que Dieu nous ordonne de l'aimer d'un triple amour ; savoir, de tout notre cœur, de toute notre âme et de tout notre esprit. Lors donc que les deux nombres de quatre et de trois, dont le premier a rapport au corps, c'est-à-dire, au vieil homme et au vieux Testament, et le second a rapport à l'âme, c'est-à-dire, au nouvel homme et au nouveau Testament, seront écoulés et passés, comme le nombre de sept jours passe et s'écoule, parce qu'il n'y a rien qui ne se fasse dans le temps et par la distribution du nombre quatre au corps, et du nombre trois à l'âme; lors, dis je, que ce nombre de sept sera passé, on verra arriver le huitième qui sera celui du jugement. » (Notes à Le Marseillais et le Lion de M. de Saint Didier) (Voltaire, Oeuvres complètes: Poésie - Poëmes badins, Tome 2, 1817 - books.google.fr).

 

Psaumes 6 et 70 sont associés avec le patriarche Abraham dans une lettre du pape Grégoire VII à l'abbé Hugues de Cluny :

 

La tristesse de Grégoire VII occasionnée par la guerre en Allemagne se fait jour dans une lettre qu'il écrivit sur ces entrefaites, c'est-à-dire le 7 mai 1078, à Hugo abbé de Cluny; prenant une fois de plus et comme il l'avait déjà fait au mois de janvier 1073, le vénérable abbé comme confident de ses douleurs intimes, il lui écrivait : « Grégoire évêque, serviteur des serviteurs de Dieu, à Hugo, abbé de Cluny, salut et bénédiction apostolique. Fatigué par les visites de bien des personnes, par les soins à donner à beaucoup d'affaires, je ne puis écrire que bien peu à celui que j'aime grandement Mais luttez avec confiance; que vos prières implorent la miséricorde de Dieu tout puissant afin qu'il incline nos cœurs à accomplir sa volonté, afin qu'ayant soin de nous au milieu delà tempête, il nous conduise au port que sa pieté nous a ménagé. [...] Je reviens à lui en disant : « Ayez pitié de moi, Seigneur, à cause de ma faiblesse » (Psausme 6,3) ou bien : « Beaucoup me considèrent avec stupéfaction mais toi tu es un aide puissant » (Psaume 70,7) ; je n'oublie pas non plus cette parole : « Dieu est assez puissant pour faire naître de ces pierres des fils d'Abraham. » (Matthieu 3,9). Que le Dieu tout puissant, qui a fait preuve d'une si grande charité envers les pécheurs en confiant à l'un d'eux une si haute mission, l'accorde, en vertu de la puissance du bienheureux Pierre qu'il m'a concédée malgré mon indignité, le pardon de tes péchés, qu'il pardonne également à tes frères et qu'il vous conduise tous dans le sein de noire patriarche Abraham, pour y jouir du bonheur éternel. » (Odon Jean Marie Delarc, Saint Grégoire VII et la réforme de l'église au XIe siècle, Tome III, 1889 - archive.org, August Friedrich Gfrörer, Pabst Gregorius VII und sein Zeitalter, Tome 2, 1859 - books.google.fr).

 

Le Tiers livre des faits et dits Héroïques du noble Pantagruel : composés par M. François Rabelais, Docteur en Médecine, et Calloier des Iles d'Hyeres est une œuvre de François Rabelais parue en 1546. Le Tiers Livre est jugé obscène et censuré par la Sorbonne, à l’égal de Pantagruel et de Gargantua. Pourtant, il sera protégé et publié en 1546. (fr.wikipedia.org - Le Tiers Livre).

 

Rabelais dédia son « Tiers Livre » à Marguerite de Valois, "La Minerve de France" :

 

Esprit abstraict, et estatic

Qui frequentant les cieulx, ton origine,

As delaissé ton hoste et domestic

Ton corps concords, qui tant se morigine

A tes edictz, en vie peregrine

Sans sentement, et comme en Apathie

 

Marguerite de Valois, soeur de François Ier, est elle-même auteur d'un recueil de nouvelles à la manière de Boccace : « l'Heptaméron », du « Miroir de l'âme pécheresse » qui reprenant les thèses de Luther lui valut les foudres de la Sorbonne (et où figurent la traduction du psaume VI de Marot, ainsi que celles du Pater, de l'Ave Maria et du Credo) enfin de poésies regroupées sous un titre gracieux qui ne doit pas tromper : « Les Marguerites de la Marguerite des princesses », recueil dans lequel on retrouve « Le Miroir de l'âme pécheresse » (Simone Domange, Lire encore Marot: essai, 2006 - books.google.fr).

 

Il y eut treize éditions de ce texte au XVIe siècle, qui reçut aussi un autre titre : Le Miroir la très chrétienne princesse Marguerite de France [...] auquel elle voit et son néant et son tout. Dès 1531, sont joints au Miroir deux poèmes, le Discord et l'Oraison, ainsi que deux oraisons en prose. En 1533, s'ajoute aux textes mentionnés le psaume 6 traduit en vers par Marot, des prières versifiées et un traité d'orthographe et de typographie (Delphine Caron, La quenouille ou la plume ? Marguerite de Navarre, la reine "ignorante" écrivant, Boèce, Revue Romande Des Sciences Humaines, JUin 2002 - books.google.fr).

 

15 ans

 

Isaac, circoncis à l'âge de 8 jours, est offert à Dieu en sacrifice par son père, ayant atteint l'âge de 15 ans (La chronographie de Bar Hebraeus (1226 - 1286), Volume 1, traduit par Philippe Talon, 2013 - books.google.fr, fr.wikipedia.org - Bar Hebraeus).

 

Et que l'Escriture est accomplie : Il faut nécessairement que ceux qui veulent prouver par le tesmoignage de sainct Jaques, que les œuvres ont esté imputées à justice à Abrabam, confessent qu'il tire l'Escriture par force, et mal à propos. Car de quelque costé qu'ils se tournent, si ne feront-ils jamais que l'effet précède sa cause. Il allègue le tesmoignage de Moyse du quinzième chapitre de Genèse. Ceste imputation de justice de laquelle Moyse fait là mention, a précédé plus de trente ans ceste œuvre, par laquelle ils disent qu'Abrabam a esté justifié. Tant y a que, comme ainsi soit que quinze ans auparavant qu'Isaac fust nay, la foy eust esté réputée à justice à Abraham, l'immolation qu'il feit de son fils ne luy a peu acquérir ce bien. Ainsi je tien enserrez d'un nœud qu'il n'est pas possible de démesier, tous ceux qui imaginent qu'à Abrabam justice ait esté imputée devant Dieu, pource qu'il immola son lils Isaac : veu qu'il n'estoit pas encore nay, lors que le S. Esprit prononce Abrabam avoir esté juste. Et pourtant il reste nécessairement à dire, qu'yci est touchée quelque chose qui est venue après la justification. Comment donc sainct Jaques dit-il que cela fut lors accompli ? Certes il veut monstrer quelle a esté ceste foy qui a justifié Abrabam : asçavoir que ce n'a point esté une foy oisive, ou qui s'escoulast incontinent: mais telle qu'elle l'a rendu obéissant à Dieu : comme aussi il est monstré en l'Epistre aux Hébrieux, chap. XI, v. 8. La conclusion qui est adjoustée incontinent après, veu qu'elle dépend de là, n'ha point autre sens. L'homme n'est point justifié seulement par la foy, c'est-à-dire, par une cognoissance de Dieu nue et vaine. Il est justifié par les œuvres: c'est-à-dire sa justice est cognue et approuvée par les fruits (Sur l'Epitre de saint Jacques) (Commentaires de Jehan Calvin sur le Nouveau Testament, Tome IV, 1855 - books.google.fr).

 

Balance et succession

 

La balance apparaît au chapitre XXXII du Tiers livre de Rabelais :

 

Si vous examinez studieusement & pesez en la balance de Critolaus leurs propous & raisons, vous trouuerez que & en ceste matiere, & beaucoup d'aultres ilz ont parlé par guayeté de cœur, & affection de reprendre leurs maieurs, plus que par recherchement de Verité (Tiers Livre, chapitre XXXII).

 

Sur la balance de Critolaos, destinée à mettre en comparaison les biens de l'âme avec ceux du corps et à montrer avec éclat la supériorité des premiers, voir par exemple Cicéron, Tusc. 5, 51. Le péripatéticien Critolaos (IIe siècle av. J.-C.) dirigeait l'école d'Athènes quand il fut choisi avec deux autres philosophes pour être envoyé en ambassade à Rome, en 156 - 155 av. J.-C. C'est à la faveur de cette mission politique que des leçons publiques de philosophie furent pour la première fois données à Rome par les trois philosophes grecs (Cicéron, fr. 5) (Jean-François Maillard, La France des Humanistes.: Hellénistes II, 2011 - books.google.fr).

 

La balance est aussi mentionnée dans le psaume 5 - le psaume 6 "succède" au 5 - dont le titre attesté par les Septante est "au sujet de l'héritière" (la "soeur de l'isle britannique" en est une) (Gilles Dorival, Titres hébreux et titres grecs des psaumes, Recherches Textuelles Sur Les Psaumes Et Les Évangiles, 2011 - books.google.fr).

 

Le psalmiste vient apporter sa confirmation, en proclamant « heureux » — ce mot devant être pris au sens fort; il évoque l'accès aux grâces suprêmes — celui que Dieu a pardonné. Non pas l'homme qui a des œuvres bonnes à offrir, mais celui à qui Dieu pardonne ses œuvres mauvaises. On goûtera la force de l'argument, si l'on se souvient que la mentalité juridique des rabbins — en cela semblables à tous les hommes de tous les temps — considérait les relations du croyant avec Dieu comme un compte de Doit et Avoir. L'important était que l'on pût inscrire au crédit plus d'œuvres bonnes qu'il n'y avait d'œuvres mauvaises au débit. [...] Il faut qu'en tout état de cause les mérites soient en excédent d'au moins une unité sur les démérites : d'où la recommandation de veiller à s'assurer toujours cette balance favorable; c'est cette préoccupation d'équilibrer toute faute par une miswâ qui valut à certains pharisiens leur surnom de calculateurs » (J. Bonsirven, Jud. Palest., II, p. 58-59). Il est vrai qu'à côté de cette arithmétique des mérites, certains pensaient qu'un péché suffit à anéantir tous les mérites. Mais le ton dominant de la piété commune était bien donné par ce souci d'acquérir assez de mérites pour contrebalancer les démérites. [...] Cette conception impliquait à la fois que les péchés ne sont pas à ce point détestables pour Dieu, qu'un seul suffise à entraîner la condamnation; et que les bonnes œuvres sont à ce point agréables par leur nombre et leur qualité, qu'elles méritent le jugement favorable de Dieu. L'apôtre bouscule rudement toute cette conception. L'homme est heureux parce qu'il est pardonné; il n'a point d'oeuvre à faire valoir pour s'attirer la faveur de Dieu, et ses péchés sont, non point équilibrés par des mérites — ce qui serait les minimiser — mais pardonnés purement et simplement. Ni atténuation de la gravité de la faute, ni majoration des bonnes : grâce pour le coupable, qui est, comme tel, introduit dans la béatitude, c'est-à-dire admis à se présenter devant Dieu. En citant le Ps. 32, Paul met en parallèle la justification du pécheur et le pardon des péchés. Ce rapprochement éclaire le développement précédent. [...] C'est cet impie, cet incrédule qui avait les mains vides, que Dieu a justifié parce qu'il crut à la promesse. [...] La tradition juive considérait Abraham comme un prosélyte, car il s'était ainsi nommé ("TJ : étranger, pris au sens religieux) et avait été nommé ainsi (Gen. 23. 4; Ps. 119. 19; 1 Chron. 29. 15; Ps. 39. 13) (Mekhilta Ex. 22. 20). Cette même tradition rattache à la condition de prosélyte (l'apôtre dira : impie) le fait que le patriarche n'a été circoncis qu'à quatre-vingt-dix-neuf ans. Paul argumente, semble-t-il, a partir d'une tradition de ce genre. [...] La foi n'est donc point une œuvre et la justification ne vient pas reconnaître le mérite de l'homme et couronner son œuvre. De même que l'impie (Abraham dans ce cas-ci) est justifié sans avoir pu fournir aucune œuvre bonne, de même David déclare pardonné et bienheureux celui qui n'a présenté à Dieu que ses péchés. La justification du premier et la béatitude du second n'ont demandé de leur part aucune coopération. [...] La foi est bien une action de l'homme, non une œuvre au sens théologique. Dans les deux cas, en effet, Dieu intervient librement, sans qu'aucun droit du côté de l'homme ne l'y oblige en justice (Franz J. Leenhardt, L'épitre de Saint Paul aux Romains, 1995 - books.google.fr).

 

La pensée de saint Jérôme est étroitement parallèle à celle d'Origène : C'est là la première circoncision, celle de la Loi. Mais si, de la Loi et des Prophètes, on en vient à la foi de l'Évangile, on reçoit la seconde circoncision, celle de la « pierre qui est le Christ » (Homélie V,5 sur Josué) (Yvon Bodin, Saint Jérôme et L'Eglise, Théologie historique, Tome VI, 1966 - books.google.fr).

 

Le terme "succéder" (explicitement) en parlant des ancienne et nouvelle lois semble n'apparaître que tardivement. Le mot a un sens apaisé qui ne correspondait peut-être pas aux premiers temps de l'Eglise face au judaïsme. Il a aussi un sens définitif illusoire. On le trouve chez Thomas d'Aquin (XIIIème siècle) :

 

La foi d'Abraham s'est distinguée en ce qu'il a cru à la promesse divine touchant le Messie à venir, dans lequel devaient être bénies toutes les nations. C'est pourquoi tant que ce mystère ne fut pas accompli, on devait faire profession de la foi d'Abraham au moyen de la circoncision. Mais depuis l'accomplissement de ce mystère, on a dû exprimer la même chose par un autre signe ; par le baptême qui a succédé pour ce motif à la circoncision ; suivant ces paroles de saint Paul (Col. II, 11): Comme vous avez été circoncis en lui d'une circoncision qui n'a pas été faite de main d'homme, mais de la circoncision de Notre-Seigneur Jésus-Christ, qui consiste dans le dépouillement du corps de la chair, vous avez été ensevelis avec lui par le baptême. [...] Ainsi à la fête de Pâques a succédé là fête de la passion du Christ et de la résurrection; à la fête de la Pentecôte, qui est l'anniversaire de la loi ancienne, a succédé la fête de la Pentecôte qui est le jour où la loi évangélique nous a été donnée par l'Esprit-Saint (sed postquam jam hoc est perfectum, oportet idem alio signo declarari, scilicet baptismo, qui in hoc circumcisioni succedit [...] Unde festo Phase succedit festum Passionis Christi et Resurrectionis ; festo Pentecostes, in quo fuit data lex vêtus, succedit festum Pentecostes, in quo fuit data lex spiritûs vitae) (Question CIII, Article III) (La Somme théologique de Saint Thomas, Tome VI, traduit par l'abbé Rioux, 1855 - books.google.fr).

 



[1] Roland Marx, « La reine Victoria Â», Fayard, 2000, p. 154

[2] Michel Dufresne, « Dictionnaire Nostradamus Â», JCL Editions, 1989

[3] FĂ©lix Gaffiot, « Dictionnaire abrĂ©gĂ© Latin-Français Â», Hachette, 1936

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