Prémices de l'Unité italienne

Prémices de l'Unité italienne

 

IV, 87

 

1842

 

Un fils du Roy tant de Lingue apprins,

A son aisné au regne different :

Son pere beau au plus grand fils comprins,

Fera perir principal adherent.

 

Frédéric II

 

Il parlait au moins six langues : le latin, le grec, le sicilien, l'arabe, le normand et l'allemand. Il accueillait des savants du monde entier à sa cour, portait un grand intérêt aux mathématiques et aux beaux-arts, se livrait à des expériences scientifiques (parfois sur des êtres vivants) et édifiait des châteaux dont il traçait parfois les plans. De par ses bonnes relations avec le monde musulman, il mena à bien la sixième croisade - la seule croisade pacifique - et fut le second à reconquérir les lieux saints de la chrétienté, après Godefroy de Bouillon. Dernier empereur de la dynastie des Hohenstaufen, il devint une légende. De ses contemporains, il reçut les surnoms de Stupor Mundi (la «Stupeur du monde») et de «prodigieux transformateur des choses», au point qu'on attendit son retour après sa mort. Dans la conscience collective, il devint «l'Empereur endormi» dans les profondeurs d'une caverne, celui qui ne pouvait avoir disparu, celui qui dormait d'un sommeil magique dans le cratère de l'Etna (fr.wikipedia.org - Frédéric II (empereur du Saint-Empire)).

 

Frédéric avait tout pour être le meilleur des rois. Il est décrit dans la chronique de Salimbene (p. 508) comme un souverain agréable, courtois et joyeux quand il voulait bien montrer ses qualités, un homme qui savait lire, écrire, chanter et composer des chansons, qui savait parler de nombreuses langues différentes, toutes qualités qui furent réduites à néant parce qu'il fut un persécuteur de l'Église de Dieu ; il le verra lui-même et fera tomber le blâme sur lui-même car (Psaumes XXXV, 3-4) «les paroles de sa bouche ne sont qu'iniquité et tromperie et il n 'a pas voulu chercher comment faire le bien. Il a médité l'iniquité dans le secret de son lit ; il s'est anêté dans toutes les voies qui n'étaient pas bonnes et il n'a point eu de haine pour la malice.» C'est pourquoi il fui déposé de l'empire et mourut d'une misérable mort. Mais c'est aussi un homme qui peut se montrer ouvert et patient (p. 516) capable d'écouter les plaisanteries et les insultes des jongleurs, de les supporter avec bonne humeur ou de faire semblant de ne les avoir pas entendues à la différence de ceux qui cherchent aussitôt à tirer vengeance des injures qu'on leur fait. Le destin de l'empereur est également double et rempli d'incohérence. Il a été couronné (p. 47) à Rome ainsi que son épouse et ce avec l'accord de tous les Romains, ce qui est quelque chose d'exceptionnel, mais sa naissance, prétend Salimbene, est douteuse : Jesi est la cité dans laquelle naquit l'empereur Frédéric. Et le bruit se répandit qu'il était le fils d'un boucher de la cité parce que l'impératrice Constance était déjà d'un âge avancé au moment de son mariage et que, dit-on, elle n'a jamais eu d'autre enfant à part celui-ci, ni fils ni fille (Isabelle Weill, Frédéric II de Hohenstaufen, une figure du mauvais roi dans la Cronica de Salimbene de Adam, Bien dire et bien aprandre: bulletin du Centre d'études médiévales et dialectales de l'Université Lille III., Numéro 18, 2000 - books.google.fr).

 

Son beau-père

 

Que sait Grégoire IX pendant que l'empereur va vers la Terre-sainte ? il profite de la négligence de ce prince à se faire absoudre, ou plutôt du mépris qu'il a sait de l'excommunication, & il se ligue avec les Milanais 8c les autres villes confédérées, pour lui ravir le royaume de Naples dont on craignait tant l'incorporation avec l'Empire. Renaud, duc de Spolète & vicaire du royaume, prend au pape la Marche d'Ancône. Alors le pape sait prêcher une croisade en Italie contre ce même Fréderic II qu'il avait envoyé à la croisade de la Terre-sainte. Il envoie un ordre au patriarche titulaire de Jérusalem, qui résidait à Ptolémaïs, de ne point reconnaître l'empereur.

 

Fréderic, dissimulant encore, conclut avec le soudan d'Egypte Melecsala, que nous appelons Mélédin, maître de la Syrie, un traité par lequel il paraît que l'objet de la croisade est rempli.

Le sultan lui cède Jérusalem, avec quelques petites villes maritimes dont les chrétiens étaient encore en possession; mais c'est à condition qu'il ne réfidera pas à Jérusalem; que les mosquées, bâties dans les saints lieux , subfisteront; qu'il y aura toujours un émir dans la ville. Fréderic passa pour s'être entendu avec le soudan afin de tromper le pape. Il va à Jérusalem avec une très-petite escorte; il s'y couronne lui-même: aucun prélat ne voulut couronner un excommunié. Il retourne bientôt au royaume de Naples qui exigeait sa présence. 1230. Il trouve dans le territoire de Capoue son beau-père Jean de Brienne à la tête de la croisade papale. Les croisés du pape, qu'on appelait Guelfes, portaient le signe des deux clefs sur l'épaule. Les croisés de l'empereur, qu'on appelait Gibelins, portaient la croix. Les clefs s'ensuirent devant la croix. Tout était en combustion en Italie. On avait besoin de la paix; on la fait le 23 juillet à San-Germano. L'empereur n'y gagne que l'absolution. Il consent que désormais les bénéfices se donnent par élection en Sicile; qu'aucun clerc, dans ces deux royaumes, ne puisse être traduit devant un juge laïque; que tous les biens ecclésiastiques soient exempts d'impôts; & enfin il donne de l'argent au pape (Oeuvres complètes de Voltaire, Annales de l'Empire depuis Charlemagne, 1785 - books.google.fr).

 

Jean de Brienne fut fait roi de Jérusalem en 1210. Ce titre illustroit les familles, sans les enrichir. L'empereur Fréderic II épousa la fille du nouveau roi, avec le royaume de Jérusalem pour dot; c'est-à-dire, avec très-peu de chose de réel, & de grandes prétentions. Le beau-pere fut obligé de céder tous ies droits à son gendre qui dédaigna de les exercer. Jean de Brienne eut bientôt un autre Empire, celui de Constantinople, auquel il fut élevé par les Barons François, en 1229. Il défendit sa Capitale contre les Grecs & les Bulgares, ruina leur flotte, les défit une seconde fois, & les épouvanta tellement, qu'ils n'oserent plus reparoître. Il mourut en 1239. Son avarice hâta la ruine de l'Empire, & ternit ses autres qualités, sa bravoure & sa prudence (Louis Mayeul Chaudon, Nouveau dictionnaire historique, Tome 1, 1772 - books.google.fr).

 

Lien avec le quatrain précédent IV, 86

 

Dans la liste des empereurs de ces Annales, Voltaire compte Charles le Gros.

 

En 1231, Frédéric II promulgua les Constitutions de Melfi ou Liber Augustalis, un recueil des lois de son royaume qui devait unifier les lois complexes de l'Empire, soumis aux droits régaliens multiples que possédaient les princes et autres souverains du Saint-Empire. Ce recueil n'avait pour autre but, sous couvert d'une uniformisation des systèmes politico-judiciaires, que d'empêcher la mainmise des petits seigneurs sur les villes et leurs corps de métiers. Le Liber Augustalis, s'ouvre sur l'énumération des titres de Frédéric. Il est Imperator Fridericus secundus, Romanorum Cæsar semper Augustus, Italicus Siculus Hierosolymitanus Arelatensis, Felix victor ac triumphator. À travers la présence des titulatures romaines, on peut voir la volonté d'affirmer le pouvoir impérial. Frédéric fit frapper des monnaies d'or, les « augustales ». Sur l'une des faces, entourée de l'inscription IMP. ROM. CÆSAR AUG, il était représenté, à l'instar des empereurs romains, vêtu du manteau impérial avec une couronne de laurier sur la tête. Sur l'autre face, figurait l'aigle impériale avec l'inscription Fridericus. Frédéric II, comme les empereurs romains, affirmait sa domination sur le monde mais il n'avait pas les moyens de sa prétention. Il se heurtait aussi au pape, qui depuis le XIe siècle voulait imposer à l'Occident son dominium mundi. (fr.wikipedia.org - Frédéric II (empereur du Saint-Empire)).

 

Son père

 

Quand il fut question d'élire un pape en 1159, son choix tomba sur ce même cardinal Roland Bandinelli (Alexandre III) dont la parole violente avait donné le signal de la lutte. En vain un anti-pape lui fut suscité par les Gibelins, en vain les armées de l'empereur envahirent-elles les cités libres de l'Italie; ces schismes fréquens, ces guerres civiles, ces déchiremens douloureux n'affaiblissaient pas l'autorité pontificale. L'Italie arracha des mains de Barberousse toutes ses libertés compromises. Enfin, à Venise, au milieu de la place Saint-Marc, une entrevue solennelle eut lieu entre les deux adversaires (1177); entre les deux représentans, d'une part, de la force politique, et de l'autre, du pouvoir spirituel. L'empereur reçut le sacrement de la main du pape, qui lui donna le baiser de paix, et dont il tint l'étrier lorsque Sa Sainteté monta sur son palefroi. Ces deux formidables antagonistes étaient las d'un si long combat. Dix ans après la paix de Venise, Barberousse prit la croix et conduisit son armée en Palestine, en l'an 1190. Il remporta deux victoires sur le sultan d'Iconium, s'empara de sa capitale, franchit le mont Taurus, et mourut le 10 juin 1190, enseveli dans les eaux du Cydnus. Ainsi se perpétuait la gloire romanesque des Hohenstaufen. Elle traversait les âges sans s'affaiblir. Pendant le règne intermédiaire de Henri VI, cette gloire sembla s'éclipser un moment, mais elle reparut plus brillante sous Frédéric II, soldat, poète, législateur; tantôt tenant sa cour dans les vieux donjons féodaux de la Germanie , au milieu de ses chevaliers turbulens ; tantôt dans les palais arabes de la Sicile, sur les rives fécondes et brillantes de l'Europe méridionale ; orphelin délaissé, pupille timide de la cour romaine; puis devenant tout-à-coup son plus mortel ennemi et sa victime : chevalier courtois ; croisé, que les musulmans de Syrie respectèrent et choisirent pour ami; poète brillant, raisonneur audacieux , accusé d'athéisme par l'hostilité des papes, regardé comme un philosophe et un sage par les historiens modernes : homme extraordinaire placé dans des circonstances extraordinaires (La Maison de Souabe, Revue Britannique ou choix d'articles traduits des meilleurs écrits périodiques da la Grande-Bretagne, Troisième série, Tome XI, 1834 - books.google.fr, fr.wikipedia.org - Alexandre III (pape)).

 

Henri VI de Hohenstaufen (1165-1197) n’a régné que huit années. Fils de Frédéric Barberousse et père de Frédéric II qui étonna le monde, Henri n’a trouvé que peu de place dans les livres d’histoire. Au mieux, on se souvient des surnoms qui lui furent attribués lors de sa conquête de la Sicile: Henri le Sévère, Henri le Cruel (www.autour-du-mont-sainte-odile.fr).

 

Son fils

 

Il arrive en revanche de voir désigner le fils aîné par le terme "grand fils" (Jean Dubois, Luce Irigaray, Les structures linguistiques de la parenté, Cahiers de lexicologie, Volumes 8 à 11, Université de Besançon. Centre d'étude du vocabulaire français, 1966 - books.google.fr).

 

Henri II de Souabe (né en 1211- mort à Martirano en février 1242) est élu roi de Germanie en avril 1220 lors de la diète de Francfort, sous le nom de «Henri VII», puis couronné le 8 mai 1222 à Aachen, durant le règne de son père.

 

Alors que les villes Lombardes reconstituent leur ligue en 1231; Henri et son père ont une entrevue à Aquilée au début 1232. Le jeune prince retourne ensuite en Germanie où il mène de plus en plus une politique personnelle notamment envers les villes libres malmenées par son père. En 1231 il veut rompre son union avec Marguerite dont la dot n'a jamais été versée, et épouser son ancienne fiancée Agnès de Bohême dont il aurait été sincèrement épris1. Frédéric II qui veut maintenir de bonnes relations avec le duc Frédéric II le Batailleur frère de Marguerite s'y oppose. Le projet de mariage échoue mais Marguerite est de facto répudiée et elle se retire dans un couvent de Trèves. Henri sollicité par un parti de nobles allemands entre en révolte ouverte contre son père notamment en concluant une alliance formelle avec les Lombards en septembre 1234. Frédéric II obtient l'appui du pape Grégoire IX qui lance un appel aux allemands le 13 mars 1235 les invitant à abandonner le rebelle. Frédéric II vient en personne en Allemagne en mai 1235. La faction «Henricienne» s'effondre le jeune prince doit se soumettre sans conditions à Worms il est déshérité et exilé d'abord à Rocca San Felice en Campanie puis en Calabre. il serait mort d'une chute de cheval en février 1242 près de Martirano. Selon une tradition il s'agirait d'un suicide (fr.wikipedia.org - Henri II de Souabe).

 

Typologie

 

Le report de la date de 1842 sur une date pivot entre 1212 (accession de Frédéric II à l'empire) et 1250 (sa mort) donne une large fourchette 582 - 658.

 

Les Lombards (Longobardi), peuple venu de la Scandinavie et de l’embouchure de l’Elbe, descendent vers l’Italie en 568 et installent leur capitale à Pavie. La capitulation des Byzantins ôte tout prestige à l’Etat, et dans chaque ville menacée, c’est vers l’évêque que se retourne la population pour sa sauvegarde et la défense du droit. À Rome c’est Grégoire Ier le Grand, devenu pape en 590, qui assure la survie de la ville contre les Lombards et contre la peste qui s’est déclarée (www.italie-infos.fr).

 

L'objectif final, la conversion des Lombards au catholicisme, est difficile à atteindre du fait de l'existence du schisme des Trois Chapitres. Celui-ci crée deux partis entre lesquels les Lombards peuvent jouer, au grand embarras de la papauté et des Byzantins. L'une des conséquences de l'invasion lombarde en 568-569 a été le transfert de l'un des plus importants évêques d'Italie, le patriarche d'Aquilée, à Grado, dans la lagune de Venise où il se trouve encore au VIIe siècle. Il est fidèle à la doctrine des doctrine des Trois Chapitres jusqu'en 607, date à laquelle il se rallie à Rome. À cette occasion, l'évêque d'Aquilée, soutenu par le duc lombard du Frioul, Gisulf, prend le titre de métropolitain et rompt avec Grado et donc avec Rome. De ce fait, l'Église tri-capitoline peut apparaître, d'une certaine façon, comme le premier élément d'une église nationale lombarde dont la métropole religieuse serait Aquilée et non Rome.  Elle est, de toutes manières, un enjeu entre Rome, Byzance et les Lombards. [...]

 

La conversion des Lombards est acquise dans le dernier tiers du VIIe siècle, en même temps d'ailleurs que la liquidation du schisme de Trois Chapitres, effective lors d'un synode réuni à Pavie auquel le pape Serge Ier (687-689) donna sa sanction et dont il fit parvenir les Actes à Byzance. Dès lors, l'empereur reconnaît officiellement l'existence politique des Lombards, en même temps qu'il prend acte de leur conversion et de la fin du schisme. Le royaume lombard, toutefois, est une menace pour la papauté jusqu'à l'intervention franque. Le pape demeure fidèle à Byzance tant que l'empereur demeure la seule puissance en mesure d'offrir une protection efficace contre lui. Dès lors que ce n'est plus le cas, et à partir du moment où les souverains Francs sont en mesure de se substituer à l'empereur, il ne peut faire autrement que de se rallier à eux (Laurent Feller, Église et société en Occident: VIIe-XIe siècle, 2009 - books.google.fr, www.guichetdusavoir.org).

 

Dans une page de l'Histoire de l'Europe médiévale d'Henri Pirenne (1936) - admirable par la puissance de sa synthèse - les éléments du mythe de Frédéric II (laïcité, modernité, absolutisme éclairé) se retrouvaient quasiment tous. On peut y ajouter celui, cher à la tradition de l'Unité italienne, du souverain qui, comme les rois lombards cinq ou six siècles plus tôt, était sur le point de fonder un État national unitaire, mais qui en avait été empêché par l'Église (adversaire de la laïcité, de la modernité et de la nation) ; cette dernière, comme aux temps de Charlemagne, avait fini par faire appel à un prince français contre les Souabes, retardant ainsi pour des siècles l'unité nationale (Giuseppe Galasso, Naples médiévale: Du duché au royaume, 2019 - books.google.fr).

 

M. C. Vidal, Charles-Albert et le Risorgimento italien (Thèse, Paris, 1927), estime que la politique de Charles-Albert, si souvent méconnue, est déterminée par les deux principes suivants : l'esprit de progrès, la haine de l'Autriche. Si l'on n'a pas toujours compris son attitude, c'est que l'on n'a pas tenu compte du "secret du roi", sa rancune contre Metternich, qui avait voulu en 1821 le priver de sa couronne. Le même auteur a complété sa thèse en démontrant : Metternich, le prince de Carignan et les Bourbons (Académie des Sciences morales et politiques, 1930) que, dans la gravité des périls qui menaçaient le prince de Carignan après les événements de 1821, ce sont les Bourbons, à Vérone et en 1829, qui ont sauvé l'État piémontais d'une annexion déguisée à l'Autriche. «Je mourrais bien heureux, écrivait le roi le 6 août 1840, en bénissant le Seigneur, si je pouvais gagner dix batailles pour une cause que je sais.» (L'Époque contemporaine [1815-1919]: Restaurations et révolutions, 1815-1871, Clio, 1996 - books.google.fr).

 

Empire

 

En effet, le 12 juillet 1S06 on forma à Paris une alliance rhénane, par laquelle les rois de Bavière et de Wurtemberg, l'archichancelier, l'électeur de Bade, le landgrave de Hesse-Darmstadt et le duc de Berg, et d'autres princes se séparèrent de l'alliance impériale et reconnurent l'empereur des Français comme protecteur de leur confédération. L'empereur François II comprit alors la nécessité d'abdiquer de bonne grâce son vain titre d'empereur d'Allemagne. En conséquence, il fit publier à Ratisbonne et à Vienne, le 6 août 1806, un acte formel d'abdication du titre et des prérogatives d'empereur d'Allemagne, se déclarant empereur, lui et sa postérité, de la monarchie autrichienne. Ainsi s'effaça cet empire, 1006 ans après que Charlemagne avait renouvelé l'empire d'Occident, et 844 ans après qu'Otton-le-grand l'avait fixé en Allemagne. [...] Le congrès de Vienne ne revint pas, à l'égard de l'Allemagne, sur la question que Napoléon avait tranchée. L'empire germanique resta détruit , l'unité politique de la nation allemande dissoute , et les nombreux états qui se partageaient le territoire de l'empire furent déclarés souverains (M. Roy, Illustrations de l'histoire d'Allemagne, 1843 - books.google.fr).

 

L'opération de «finition» de la cathédrale de Cologne, promue monument identitaire allemand, court durant presque tout le XIXe siècle. [...] Terminer la cathédrale de Cologne devient une des grandes affaires de la bourgeoisie allemande. En 1842 est fondée une Association pour l'achèvementde la cathédrale, qui compte près de 5000 membres fondateurs. Dans toute Dans toute l'Allemagne et à l'étranger se forment des associations secondaires ayant même finalité. Pour la plupart des donateurs, la cathédrale est perçue comme métaphore de la nation, son achèvement marquant la progression de l'Allemagne vers sa perfection : une nation unie dans un État constitutionnel. Mais l'Association n'a pu être créée que sur autorisation du maître des lieux, le roi de Prusse. Au Congrès de Vienne, les terres rhénanes et sarroises sont échues à la puissance montante. Frédéric-Guillaume IV qui accède au pouvoir en 1840 saisit tout l'intérêt politique, pour la monarchie prussienne, de l'affaire de la cathédrale. «Le romantique sur le trône», certes, adore les vieilles pierres et Boisserée a réussi dès 1814 à l'intéresser à l'affaire. Mais il est aussi versé en Realpolitik et voit tout le parti qu'il peut tirer d'une implication directe de la monarchie prussienne. Car la catholique et libérale Rhénanie pose de sérieux problèmes à son roi protestant et résolument hostile à toute Constitution : le gouvernement prussien a même fait arrêter en 1837 l'évêque catholique de Cologne. Cofinancer la cathédrale paraît un bon moyen et de se concilier les catholiques et de contrôler les patriotes libéraux. Il est donc décidé que le roi de Prusse paiera 50000 Talers par an pour les travaux, à charge pour l'Association de fournir la même somme. Dès 1844, Heinrich Heine, qui avait donné son adhésion à l'Association parisienne pour l'achèvement de la cathédrale, s'en retire, estimant que la réaction catholique et la Prusse autoritaire y prennent la main. 1848 marque la fin de tout espoir d'une unification allemande sur le mode du libéralisme : Frédéric-Guillaume qui ne démord pas de son pouvoir de droit divin refuse avec indignation la couronne de l'Empire allemand que lui offrait l'Assemblée libérale de Francfort. L'Association connaît une sérieuse crise financière et c'est en fait l'argent prussien qui permet la menée à bien des travaux. L'achèvement, en 1880 seulement, donne lieu à des fêtes grandioses. En plein Kulturkampf, le clergé catholique se tient en retrait. La manifestation, à caractère essentiellement politique, célèbre l'unité allemande sous régime impérial. Les bourgeois de Cologne, leurs filles et fils, défilent en costumes médiévaux, précédant un défilé de troupes. L'empereur est tellement content qu'il demande un deuxième passage du cortège (Anne-Marie Thiesse, La Création des identités nationales . Europe, XVIIIe-XXe siècle, 2014 - books.google.fr).

 

En 1840, Frédéric-Guillaume IV est couronné roi de Prusse. L’événement majeur de son règne est la révolution de mars à Berlin. Les parlements sont dissous et les nouvelles assemblées proposent au Roi la couronne impériale d’Allemagne. Ce dernier refuse car l’assemblée n’est pas légitime et la révolution est réprimée. À la fin de son règne, le roi est déclaré inapte à régner du fait de l’altération de ses facultés mentales ; c’est son frère Guillaume qui assure la régence jusqu’à la mort du roi. En 1861, Guillaume de Hohenzollern est couronné roi sous le nom de Guillaume Ier. Un an plus tard il choisit le comte Bismarck, un pur junker, comme chancelier. Par sa politique belliqueuse et pragmatique (Realpolitik), ce ministre réalise en l'espace d'une décennie l’unité allemande en évinçant militairement les Habsbourg de l'Allemagne du Nord. La guerre des Duchés, une guerre commune avec l’Autriche contre le Danemark, donne en 1864 conjointement à la Prusse et à l’Autriche la gestion des duchés de Schleswig et de Holstein. Puis, prenant prétexte de la mauvaise gestion autrichienne en Hesse, Bismarck déclare la guerre à l’Autriche en 1866. Ceux qui prévoyaient que la guerre austro-prussienne serait longue et se solderait par la victoire de l’Autriche voient leurs prévisions complètement bouleversées : en moins de trois semaines, par les batailles de Langensalza et Sadowa, l’armée prussienne, bénéficiant d'un armement moderne (canons Krupp et fusils chargés par la culasse et non plus la bouche), ne fait qu’une bouchée de l’armée autrichienne, hétéroclite, mal entraînée et mal commandée. La Prusse annexe ainsi, outre les duchés de Schleswig et du Holstein, le Hanovre, Francfort, la Hesse et le duché de Nassau. Désormais, la Prusse est un territoire d’un seul tenant du Rhin au Niémen. Il ne reste plus à Bismarck qu'à faire reconnaître l'unité allemande grâce à la guerre franco-prussienne de 1870. Habilement trompée par la «dépêche d'Ems», la France déclare la guerre à la Prusse, prenant la responsabilité des hostilités. Là aussi, l’armée prussienne, mais également bavaroise et wurtembergeoise, sous le commandement de Von Moltke, écrase l’armée française en deux semaines. Les Prussiens assiègent Paris et par le traité de Francfort (1871) annexent l’Alsace-Lorraine. Ils obligent la France à payer une indemnité de cinq milliards de francs-or (fr.wikipedia.org - Royaume de Prusse).

 

Le rêve impérial des Bonaparte dont la réalisation était espérée en Napoléon II mort en 1832, en Autriche, sera réalisée en Napoléon III. Sedan terminera tout ça.

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