La Pierre de Rosette

La Pierre de Rosette

 

IV, 30

 

1800-1801

 

Plus onze fois luna fol ne voudra,

Tous augmentés & baissés de degrés,

Et si bas mis, que peu or on coudra,

Qu'après faim, peste, découvert le secret.

 

"augmenté & baissez"

 

L'Epacte de l'année 1700, & celle des années des deux siecles suivans jusqu’y compris l'année 1899 sont toutes moindres d'un que celles du siecle precedent, qui répondent à un même Nombre d'or, car le cycle des Epactes êtant marqué par un ordre retrograde dans le Calendrier Gregorien, l'Epacte de chaque année doit diminuer d'un, toutes les fois que se fait le retranchement d'un bissexte, parce qu'aprés ce retranchement on compte un jour plus tard chaque nouvelle Lune, si ce n'est lorsque par l'Equation Lunaire les nouvelles Lunes remontent d'un jour vers le commencement des mois, ce qui doit arriver de trois en trois siècles ou environ, & c'est ce qui arrivera l'année 1800, laquelle n'étant point bissextile, son Epacte & celle de toutes les années du 19e siècle devroient être moindres d'un que celles du siecle courant mais comme l’Equation Lunaire qui doit se faire dans ladite année 1800 feroit remonter ou augmenter d'un jour les mêmes Epactes il le fera une compensation de sorte qu'il n'y aura point de changement dans le cycle des Epactes pendant tout ce temps-là (Nicolas Bion, L'Usage des globes celeste et terrestre, et des spheres suivant les differens systemes du monde, 1703 - books.google.fr).

 

"onze"

 

On croyoit au temps du concile de Nicée que l'année solaire étoit composée de 365 jours 5h 55', suivant le sentiment de Ptolomée: mais comme il y a 6 minutes de moins dans la vraie durée de l'année solaire, l'équinoxe arrivoit chaque année 6 minutes plutôt qu'on ne croyoit, et, du temps de Grégoire XIII, en 1577, il se trouvoit arriver le 11 mars. On se servit pour la réformation du calendrier des tables de Copernic et de Reinhold, qui supposoient la durée de l'année de 365 jours 54 49' 16" 22" et demi. Le bref de réformation parut le 24 février 1581, dans lequel Grégoire XIII ordonna : 1° qu'après le 4 octobre 1582 on retrancheroit dix jours du mois, de sorte que le 5 octobre a été appelé le 15 ; 2° les années bissextiles, qui avoient lieu tous les quatre ans, n'auroient plus lieu dans les années séculaires 1700, 1800, et 1900 : en sorte que toutes les années dont le nombre séculaire est divisible par 4 seront bissextiles, de même que les autres années dont les derniers chiffres sont divisibles par 4. Cette suppression de 10 jours, observée seulement dans les états des princes catholiques, a été la cause d'une différence dans la maniere de compter les jours : par exemple, lorsqu'en Angleterre on comptoit le jer janvier, en France on comptoit le 10; ce qui a produit une distinction de style, le style julien ou vieux style, et le style grégorien ou nouveau style. L'Angleterre a adopté le nouveau style en 1752, au mois de septembre; l'église grecque a conservé le style julien : en sorte qu'en 1700 elle étoit en retard de 11 jours, et en 1800 elle le sera de 12.

 

L'ère française a pour époque la fondation de la république, le 22 septembre de l'ere vulgaire 1792, jour de l'équinoxe vrai. Cette époque fut décrétée le 4 frimaire de l'an 2 (5 octobre 1793); d'après ce décret, chaque année commence à minuit avec le jour où tombe l'équinoxe vrai d'automne à Paris : ce décret, qui renvoie à l'astronomie le soin de fixer le premier jour de l’an, maintiendra toujours la correspondance exacte entre le commencement de l'année française et l'époque de l'équinoxe vrai d'automne où la France s'est déclarée en république.

 

Les Arabes et les Turks ont pris pour mesure de leurs années les mouvements de la lune, sans avoir aucun égard aux mouvements du soleil; comme leur année est plus courte de 11 jours que l'année solaire, il s'ensuit qu'ils ont une année vague, dont le commencement parcourt successivement par un mouvement rétrograde toutes les saisons (Memoires sur l'Egypte, publ. dans les annees (1798-1801) (par l'institut d'Egypte), 1800 - books.google.fr).

 

Comput ecclésiastique

 

Pour l'année 1801 : Nombre d'or (quantième du mois solaire (1 à 19 : cycle de Méthon) où la Lune est nouvelle) 15 ; epacte (l'âge de la dernière nouvelle Lune au premier de l'an précédent jour de l'an) XV ; cycle solaire 18 ; indiction romaine 54 ; lettre dominicale D (Antoine Augustin Renouard, Manuel pour la concordance des calendriers républicain et grégorien, 1822 - books.google.fr).

 

Ces éléments sont ceux du comput ecclésiastique dont le but est de déterminer à quelle date tombe Pâques et de là les autres fêtes chrétiennes mobiles.

 

On retrouve l'"or" du vers 3 dans le nombre d'or.

 

"coudra" et "or" : le fil du temps

 

Ourdir, employé par Malherbe, se retrouve chez La Fontaine : La Parque à filets d'or n'ourdira point ma vie, Fables, XI, 4 :

 

La parque à filets d'or n'ourdira point ma vie :

Je ne dormirai point sous de riches lambris,

Mais voit-on que le somme en perde de son prix ?

En est-il moins profond et moins plein de délices ? (Racan (1589-1670) Historie Anecdotique Et Critique de Sa Vie Et de Ses Oeuvres, 1970 - books.google.fr).

 

Le fil d'or de la destinée apparaît chez Dickens, dans le conte des deux villes qui se déroule pendant la Révolution française (Sylvie Ballestra-Puech, Des Parques des Lumières aux Parques romantiques, Mythologies de la mort, Numéro 5 de Cahiers romantiques, 2000 - books.google.fr, Mireille Piarotas, Des Contes et des femmes, 1996 - books.google.fr).

 

Le calendrier républicain

 

À partir de l'an VII, les quotidiens sont datés uniquement dans le calendrier républicain. Lalande, qui a tenté jusqu'en 1799 de le réformer, y renonce tout à fait en 1801. À la rentrée du Collège de France, il déclare :

 

Le premier jour du dix-neuvième siècle a été marqué par la découverte d'une neuvième planète. Je me sers du calendrier de toutes les nations, persuadé que le Gouvernement français renoncera bientôt à un calendrier qui n'est entendu et ne peut être adopté ni de nos voisins ni de la grande majorité des Français. Cette découverte, si remarquable en astronomie, nous inspire d'autant plus d'intérêt que c'est parmi nous que l'astronome de Palerme est venu se préparer à cueillir, sous un plus beau ciel, de nouveaux fruits pour l'astronomie. On a dû cette découverte au hasard, comme celle de la planète de Herschel en 1781; mais ce hasard ne pouvait favoriser qu'un astronome habile et assidu: c'est ce que Plutarque appelle travail heureux (1er janvier 1801 au soir, M. Piazzi, astronome de Palerme, occupé d'un catalogue de 7000 étoiles) (Jérôme de La Lande, Bibliographie astronomique, avec l'histoire de l'astronomie depuis 1781 jusqu'a 1802, 1803 - books.google.fr).

 

Un examen plus approfondi de cette question par la Lande, La Place, mais surtout par de Lambre, a fait sentir la nécessité de faire toutes les années égales, et de soumettre toutes les intercalations à une règle fixe. En effet, lorque l'équinoxe vrai tombera, près de minuit, comme en 144, où il doit arriver à 1h 59' 40" du soir, suivant les tables actuelles, ne pouvant répondre de cette détermination qu'à 3 ou 4 près, il peut aussi bien tomber en-deçà qu'au delà de minuit, c'est à dire, le lendemain ou le surlendemain du 5e complémentaire de l'année, ce que l'observation seule ne pourra pas même décider, en supposant que le temps ne s'y opposât pas. Jusques-là on seroit incertain si l'année doit ou ne doit pas être sextile. Cette incertitude auroit des suites fâcheuses pour la chronologie, le commerce, les actes civils ; il faut donc l'éviter. En supposant même qu'on puisse déter?niner exactemement, et d'avance, le jour de l'équinoxe vrai, il résulteroit de l'exécution rigoureuse de l'article une distribution très-irrégulière des jours intercalaires. Le plus souvent ils arriveroient de quatre en quatre ans, mais quelques-uns n'arriveroient qu'après cinq ans, et cela a des intervalles inégaux ; il en résulteroit de plus que les sextiles tomberoient, tantôt sur des années paires, tantôt sur des années impaires. Cette singularité ne pourroit être soumise à aucune régle facile, une règle d'intercalation levera tous les inconvéniens; celle que vous proposent les astronomes conduit à trois corrections indispensables. Voici le projet de décret.

 

La convention nationale, après avoir entendu son comité d'instruction publique, sur la proposition faite par les géomètres et les astronomes nommés au rapport, d'adopter une règle d'intercalation pour maintenir les saisons aux mêmes époques de l'année, décrète :

 

Art. Ier. La quatrième année de l'ère de la république, sera la première sextile ; elle recevra un sixième jour coinpléinentaire, et terminera la première franciade.

II. Les années sextiles se succéderont de quatre en quatre ans, et marqueront la fin de chaque franciade.

III. Sur quatre années séculaires consécutives, sont exceptées de l'article précédent, la première, la deuxième, la troisièine années séculaires, 100, 200, 300, qui seront communes, la quatrième sera sextile.

IV. Il en sera ainsi de quatre en quatre siècles, jusqu'au 40e, qui se terminera par une année commune l'an 4000.

 

Après la mort de Romme, Grégoire, qui lui avoit succédé, n'osa pas proposer le décret, parce qu'il craignoit qu'on n'ajournât le calendrier auquel on n'étoit pas favorable. Le changement de gouvernement amena des idées très-différentes, au point que le 3 avril 1798, le directoire défendit aux journalistes d'accoler le calendrier grégorien au nouveau calendrier, et que pour comble d'absurdité, on défendit de mettre le calendrier grégorien dans la Connaissance des Temps de l'an 9 (1801), qui parut le 16 janvier 1799, et le bureau des longitudes fut obligé d'en détacher la partie la plus importante, parce qu'on y avoit fait usage du calendrier grégorien. Mais en 1795, cette fureur de calendrier nouveau n'existoit pas, on disputoit seulement sur sa forme. [...] Le 30 septembre 1799, le cit. de la Lande s'adressa à l'assemblée : on nomma une commission; mais la révolution du 18 brumaire an 8, 9 novembre 1799, empêcha la conclusion. Ainsi, le calendrier républicain reste toujours affecté de cette erreur, et le cit. de la Lande paroît plus occupé de le faire rejeter que de le perfectionner, parce qu'il voit l'impossibilité de le faire adopter, quoique plus simple et plus commode. Quoi qu'il en soit, voici le commencement des 25 premières années républicaines; on les trouve pour 400 ans dans la Connoissance des Temps de l'an, 7 1799 (Histoire des mathématiques, dans laquelle on rend compte de leurs progrès depuis leur origine jusqu'à nos jours, 1802 - books.google.fr).

 

L'influence du système calendaire égyptien sur le calendrier révolutionnaire semble indéniable. En effet, ce dernier est un système de 365 jours auxquels on ajoute six jours tous les quatre ans, les mois étant divisés en trente jours. Il rappelle donc nettement le calendrier égyptien. Or c'est peu de temps avant l'expédition des Français en Égypte et l'intérêt porté à l'Égypte que fut établi le calendrier révolutionnaire ; l'égyptomanie s'affirme dès les années 1770-1780 . La référence au calendrier égyptien est d'ailleurs explicitée dans le rapport de Romme. Ainsi dans les «Instructions sur l'ère de la République et sur la division de l'année, décrétées par la Convention Nationale, pour être mises à la suite du décret», on relève dans le Titre III, De la longueur de l'année : «Les Égyptiens 1 500 ans et les Babyloniens 746 ans avant l'ère vulgaire se rapprochèrent des vrais principes en faisant leur année de 365 jours, distribués en 12 mois égaux de 30 jours et 5 épagomènes» (Les calendriers: leurs enjeux dans l'espace et dans le temps : colloque de Cerisy, du 1er au 8 juillet 2000, 2002 - books.google.fr).

 

Peste et famine en Egypte

 

Du 8 au 12 mars 1801, le général Abercromby débarque à Aboukir, un corps de 16 000 hommes auxquels le général Menou, arrivé le 19 à Alexandrie, ne pourra opposer qu'environ 9500 hommes. Renforcés par 6000 Turcs, les Anglais envahissent alors le delta et isolent Menou dans Alexandrie, cependant que le général Belliard commande l'armée du Caire. C'est Belliard qui capitulera le premier, après avoir appris que les Anglais remontent le Nil et lui coupent la retraite vers le nord tandis que 10000 cipayes débarqués à Kosseïr arrivent par le sud. Le 27 juin, il signera une convention lui accordant les honneurs de la guerre et le rapatriement de ses troupes aux frais de l'Angleterre. Après la chute du Caire, Menou assiégé dans Alexandrie où le scorbut, la peste et la famine font des ravages, ne tiendra pas longtemps. Le 2 septembre 1801, il se résignera à signer la capitulation aux mêmes conditions que celles du Caire (Robert Cornevin, Marianne Cornevin, La France et les Français outre-mer: de la première Croisade à la fin du Second Empire : cartes et tableau chronologique 1990 - books.google.fr).

 

"le secret"

 

La pierre de Rosette est un fragment de stèle gravée de l'Égypte antique portant trois versions d'un même texte qui a permis le déchiffrement des hiéroglyphes au XIXe siècle. L'inscription qu'elle comporte est un décret promulgué à Memphis par le pharaon Ptolémée V en 196 av. J.-C. Le décret est écrit en deux langues (égyptien ancien et grec ancien) et trois écritures : égyptien en hiéroglyphes, égyptien démotique et alphabet grec.

 

Exposée à l'origine dans un temple, la stèle est probablement déplacée au début de l'ère chrétienne ou durant le Moyen Âge, et par la suite utilisée comme matériau de construction pour des fortifications dans la ville de Rosette, dans le delta du Nil, fort rebaptisé par Bonaparte Fort Jullien, en souvenir de son aide de camp Thomas Prosper Jullien mort durant la campagne. Elle est redécouverte, dans ce fort, le 15 juillet 1799 par un soldat français, Pierre-François-Xavier Bouchard, lors de la campagne d'Égypte de Bonaparte. Premier texte égyptien bilingue connu, la pierre de Rosette éveille rapidement l'intérêt du public en raison de son potentiel pour la traduction des langues de l'Égypte ancienne jusque-là indéchiffrées. Des copies et moulages circulent parmi les musées et les savants européens. Pendant ce temps, Bonaparte est défait en Égypte et la pierre originale devient possession britannique en 1801. Transportée à Londres et exposée au British Museum dès 1802, elle est l'un des objets phares de ce musée.

 

La première traduction du texte en grec est réalisée dès 1803. Il faut cependant attendre près de vingt ans avant que le déchiffrage des hiéroglyphes ne soit annoncé par Jean-François Champollion, à Paris, en 1822, et plus encore avant que les érudits ne soient capables de lire les inscriptions égyptiennes antiques avec assurance. Les principales étapes de déchiffrement ont été : la reconnaissance que la pierre comporte trois versions du même texte (en 1799) ; le fait que le texte en démotique retranscrit phonétiquement des noms étrangers (1802) et que le texte en hiéroglyphes fait de même et comporte d'importantes ressemblances avec le démotique (Thomas Young, 1802) ; enfin, la compréhension que le texte en hiéroglyphes utilise des caractères phonétiques également pour écrire des mots égyptiens (Champollion, 1822-1824) (fr.wikipedia.org - Pierre de Rosette).

 

Thomas Young (13 juin 1773 à Milverton (Somerset) – 10 mai 1829 à Londres), est un physicien, médecin et égyptologue anglais. Young est d'autre part un des premiers à déchiffrer certains hiéroglyphes. En juin 1814, un de ses amis lui apporte un papyrus démotique ; séduit par l'aventure, Young entreprend la traduction du texte démotique ainsi que celui de la pierre de Rosette. Il prend contact avec Johan David Ã…kerblad qui avait abandonné ses propres recherches et qui met son alphabet démotique de seize lettres à la disposition de Young. Ce dernier s'aperçoit que cet alphabet n'est pas viable, et en trois mois, parvient à de meilleurs résultats. Il établit une traduction conjecturale du texte démotique de la pierre de Rosette ; guidé par son instinct mathématique, il instaure un astucieux système de découpage du texte par classement et comparaison des différents signes, lui permettant d'importantes découvertes :

 

- la mise en évidence de la valeur phonétique des signes hiéroglyphiques,

- la parenté entre les graphies cursives (hiératique et démotique) et les signes hiéroglyphiques,

- le marquage des noms de rois et de dieux par des cartouches.

 

À l'automne 1814, il fait part de ses résultats à Silvestre de Sacy qui est emballé et considère Young comme le déchiffreur des hiéroglyphes. Pendant les trois années suivantes Young poursuit ses travaux sur le démotique et fait des progrès dans la compréhension de l'alphabet hiéroglyphique, se rendant compte notamment que les signes n'étaient pas tous alphabétiques. Le 14 septembre 1822, Champollion publie sa lettre à Monsieur Dacier explicitant le système des hiéroglyphes.

 

Quand Jean-François Champollion publie sa traduction complète des hiéroglyphes, Young reconnaît son avancée mais lui demande en même temps de déclarer s'être appuyé sur ses articles antérieurs. Champollion, qui est parvenu à la compréhension fondamentale du système hiéroglyphique grâce à sa maîtrise du copte, refuse d'admettre toute paternité de la traduction à Young, dont les interprétations comportaient des manques et des erreurs (fr.wikipedia.org - Thomas Young).

 

La pierre de Rosette et le calendrier égyptien

 

Ptolémée en se plaçant enfin sur le trône d'Egypte, voyoit autour de lui des héritiers qui pouvoient en perpétuer la possession dans sa descendance. Il avoit épousé en troisièmes noces Eurydice fille d'Antipater, et quelque temps après Bérénice venue en Egypte en même temps qu'Eurydice. Il avoit entre autres enfans un fils d'Eurydice, surnommé Céraunus, et de Bérénice, celui qui lui succéda et qui porta le surnom de Philadelphe : ce sont les seuls dont les noms se rattachent à l'histoire d'Egypte, le sort des autres au nombre de neuf ne l'intéressant point spécialement. Ainsi le fils de Lagus, Ptolémée Soter, réunissoit alors en lui tout ce qui peut assurer le succès d'une entreprise aussi importante que la fondation d'une dynastie souveraine, un nom illustré par de grandes actions militaires, une réputation de sagesse éprouvée par de graves circonstances, vingt ans d'une administration essentiellement bienveillante et protectrice, la confiance des corps de l'Etat, l'amour du peuple, enfin plusieurs héritiers qui ne laissoient aucune incertitude sur la transmission de la couronne royale.

 

Pour obtenir toute la précision désirable dans l'ordre des temps historiques de la famille qui la porta, il n'est pas inutile, à présent que des dates ou des supputations égyptiennes ainsi que des nombres inscrits sur des médailles des Lagides vont devenir des élémens importans dans la suite de ces recherches ; il n'est pas inutile, disons-nous, d'examiner de quelle espèce d'année on se servit dans ces indications: et comme Alexandre maître de l'Egypte, après avoir sacrifié à ses dieux, voulut et ordonna que tous ses autres usages fussent respectés, que tout ce qui tenoit au gouvernement du pays, institutions civiles ou religieuses, y demeurât réglé selon ses coutumes et ses lois, on peut déjà inférer de là que le calendrier égyptien continua d'y servir à la division du temps pour les usages soit publics, soit particuliers. Alexandre avoit cependant transporté le calendrier macédonien dans toutes les régions qu'il avoit soumises. Il subsista long-temps encore après lui à Babylone, à Tyr, à Sidon et dans toute la Syrie; en Lycie, à Ephèse, en Chypre et dans d'autres pays qui furent le fruit de ses conquêtes. Il leur avoit fait une obligation de suivre ce calendrier et d'autres règles macédoniennes d'adminisration publique, comme si l'uniformité dans la division du temps, de même que l'uniformité de langage pouvoit servir de lien entre des peuples qui obéissent à la même loi. Mais on a vu que l’Egypte fut exceptée de celles que recevoient tous les peuples vaincus , et la preuve de cette exception pour l’Egypte subsiste encore dans un acte authentique dont l'un des successeurs du premier Ptolémée fut l'occasion et l'objet. Le décret des prêtres de l'Egypte pour l'inauguration religieuse de Ptolémée Epiphane à Memphis, et dont le texte est conservé sur la pierre trouvée à Rosette, est en effet daté selon le calendrier égyptien, le 18e jour du mois de méchir. Il est vrai que le jour correspondant du mois macédonien, le 4 de xanthique, se trouve simultanément relaté dans la date du décret; mais cette circonstance ne peut prouver autre chose, sinon que les Macédoniens qui habitoient l'Egypte, se servoient, dans leurs rapports, de leur calendrier particulier, et l'on remarque encore dans l'Hémérologe. long-temps après les Ptolémées, la distinction qu'on faisoit en Egypte même de ces deux calendriers : car le calendrier égyptien se trouve indiqué comme celui des Alexandrins, et le calendrier macédonien comme en usage parmi les Hollènes qui, pour cette époque, ne sont que les Macédoniens d'Egypte. Mais comme il s'agit dans la discussion présente de connoître le calendrier légalement en usage dans l'Egypte des Ptolemées, afin de l'employer pour le calcul des années inscrites sur les médailles qui avoient aussi un caractère légal e? dont les années étoient nécessairement les mêmes que celles du calendrier officiel, il faut revenir à la date égyptienne de l'inscription de Rosette, en ajoutant que, dans cette inscription, toutes les autres dates qui s'y trouvent sont purement égyptiennes et sans mélange de dates macédoniennes. C'est ainsi, 1° que le jour de la naissance du roi, qui doit être un jour de fête solennelle pour toute l'Egypte, est indiqué selon le calendrier égyptien seulement au 30 du mois de mesori; 2° que l'autre disposition du décret, d'après laquelle une fête qui durera cinq jours est instituée en l'honneur du roi, porte qu'elle commencera à la néoménie du mois de thôth qui étoit le 1er jour de l'année égyptienne; et à ces deux indications on n'a point ajouté de concordance macédonienne. On pourroit dire aussi que le texte égyptien de cette dernière partie du décret est encore plus concluant à cet égard; car il dit positivement que cette fête sera célébrée de l'année le premier jusqu'au jour cinq ; et comme le texte grec dit aussi que le 1er thôth est ce premier jour de l'année, que ce même premier thôth n'appartient qu'au calendrier de l'Egypte, il est certain que le décret n'emploie que celui-là, et il en résulte qu'il étoit le seul qui fùt généralement usité dans les actes du gouvernement, dans les décrets comme sur les monnoies. Mais pour ne pas nous engager ici à prouver l'exactitude d'une citation égyptienne qui n'a encore aucune autorité, nous reviendrons aux passages du texte grec, qui sont assez précis pour démontrer que la division du temps pour les usages civils et les acles du gouvernement de l’Egypte sous les Ptolémées, étoit réglée par le calendrier égyptien, et que cette même année servit aussi aux supputations qui sont encore inscrites sur les monnoies des Lagides, puisque le plus fort nombre qui se trouve sur les médailles de ceux de ces princes dont on a les suites complètes et authentiques, est égal au nombre des années de leur règne indiqué par les chronologistes qui comptoient aussi par l'année égyptienne de 365 jours. C'est donc cette même année qui doit servir à reconnoître les années du règne des Lagides qu'on lira sur leurs monnoies. Le collége des prêtres n'avoit pas encore perdu son influence, puisqu'il conserva le droit d'inaugurer les rois, de consacrer et légitimer en quelque sorte leur avènement à la couronne par les cérémonies religieuses, et ils n'oublioient pas alors de les faire engager par un serment solennel à ne déranger par aucune intercalation de jours ni d'années l'ordre établi dans le calendrier. Ptolémée qui posoit sur sa tête l'antique couronne des rois d'Egypte, pouvoit moins encore qu'un autre souverain se hasarder à contrarier, sous ce rapport, des usages revêtus de la sanction du temps, et accrédités par la puissance religieuse qu'il n'avoit pas intérêt d'aliéner de lui. Ainsi, des considérations très-graves et des monumens décisifs prouvent en même temps l'adoption du calendrier égyptien et son usage légal dans l'Egypte sous les rois macédoniens. Il se composoit d'une année vague de 365 jours ; sa différence d'un quart de jour avec la longueur de l'année julienne, est assez insignifiante dans l'appréciation des temps historiques, pour que nous ne devions pas trop nous y arrêter, vu surtout l'impossibilité de porter ordinairement nos indications chronologiques jusqu'à la précision d'un jour. On ne doit ni espérer, ni rechercher ici cet avantage; et le soin avec lequel les dates juliennes, selon le calendrier romain ou selon les consuls, se trouveront, lorsque cela sera devenu possible, rapprochées des dates égyptiennes, suffira pour faire disparoître cette différence qui, pour le règne entier des Lagides, c'est-à-dire pendant près de trois siècles, ne donne entre le calendrier égyptien et le calendrier julien qu'une différence de 74 jours, laquelle doit successivement être absorbée chaque année par le rapprochement et la concordance indiquée des deux calendriers. Il n'en seroit pas ainsi à l'égard du calendrier macédonien : plus court de 11 jours que celui de l'Egypte, il donneroit pour les 294 années de l'existence de la maison des Lagides, 3234 jours de moins, ou près de neuf années macédoniennes de plus. Il n'étoit donc pas inutile d'insister ici sur cette discussion; elle nous fait connoître que les années des médailles des Lagides comme les dates des autres. monumens qui se rapportent à ces princes, étoient comptées selon le calendrier égyptien, représentant une année vague de 365 jours.

 

L'usage du calendrier égyptien ne cessa pas même en Egypte sous le gouvernement absolu des Romains. L'année, il est vrai, devint fixe, de vague qu'elle étoit; mais le calendrier égyptien et son usage n'éprouvèrent aucune modification fondamentale (Jacques Joseph Champollion-Figiac, Annales des Lagides, ou, Chronologie des rois grecs d'Égypte, Tome 1, 1819 - books.google.fr).

 

Acrostiche : PTEQ, Patèques

 

Herodote attribuë à Menés la fondation du temple de Vulcain qui Temple est à Memphis. Il dit en un endroit, que la Divinité qu'on adore en ce temple de Vulcain, a beaucoup de ressemblance aux Dieux Patéques que les Phéniciens représentent sur la prouë de leurs vaisseaux, & qui ont assez de raport à un Pygmée. On croit avec beaucoup de vraisemblance, que Vulcain est le même que Tubalcaïn dont il est parlé dans la Genése & qui fut inventeur des ouvrages en cuivre & en fer. Quant aux Dieux Patéques, on ignore quels ils étoient : les uns ont cru que c'étoit des Singes nommez en Grec Pithecos, d'un nom fort aprochant de Patæcus; On rendoit un culte superstitieux à cet animal dans la ville de Memphis; Et on dit que Vulcain avoit été nourri, allaité & elevé par des Singes. D'autres dérivent le nom de l'Hébreu Batach, qui signifie avoir confiance, & ils croïent que les Dieux Patéques répresentez sur les Navires des Phéniciens, étoient des Dieux tutélaires des vaisseaux, & en qui les gens de Mer mettoient leur confiance & à qui ils adressoient leurs priéres. Enfin il y en a qui en font des Dieux pénates & fort petits qui présidoient aux festins, & qu'on mettoit sur les tables pour y présider & pour tenir les Convives en respect. Quoi qu'il en foit, il est certain que les Egyptiens regardoient Vulcain comme le premier de leurs Dieux & de leurs Roys, & que ce fut un de ses fils, qui donna à leur pays le nom d'Egypte (Augustin Calmet, Histoire universelle, sacrée et profane: depuis le commencement du monde jusqu'à nos jours, Tome 1, 1735 - books.google.fr).

 

Pour Vulcain : cf. quatrain précédent IV, 29.

 

Or, Vulcain, alias Héphaïstos, est aussi Ptah et Osiris dans la traduction latine de Jamblique par Ficin (de Mysteriis : Les Mystères d'Egypte, VIII, 3 $ 263). Ptha est appelé Héphaïstos pour son habileté d'artisan et Osiris comme producteur de biens (Lucien de Luca, Nostradamus, lorem ipsum...?, Analyse, commentaire et traduction de la Lettre à Bérard, 2020 - books.google.fr).

 

Dans l'Encyclopædia Britannica et le fameux article Égypte, Young donne un long texte de vingt pages suivi de quatre pages d'illustrations, consistant en exposés sur la mythologie, les institutions, l'histoire et la chronologie égyptienne, auxquels s'ajoute une partie consacrée à l'«analyse de la triple inscription de la pierre de Rosette». Scientifique consciencieux, il y donne le nombre de groupes de signes identifiés pour chaque écriture et signale par exemple que le mot «roi» est écrit trente fois en grec, alors qu'un groupe de signes identiques apparaît trente-sept fois en démotique, ou encore que le nom «Ptolémée» est présent onze fois en grec, alors que quatorze cartouches renferment un même assemblage de signes en hiéroglyphes. Cependant, sur les deux-cent-vingt mots que Young prétendait avoir déchiffrés, seuls une moitié étaient justes (fr.wikipedia.org - Thomas Young).

 

Dans l'inscription en grec de la pierre de Rosette figure à plusieurs reprises l'expression «Ptolémée aimé de Ptah» (Robert Solé, La grande aventure de l'égyptologie, 2019 - books.google.fr).

 

Ptah est transcrit Phthas chez les Grecs, mais ce n'est là que la désinence grecque, comme on le voit dans la transcription grecque de ce nom sur la pierre de Rosette (Marc Richir, François Chenet, Philosophie de la mythologie de Friedrich Wilhelm Joseph von Schelling, 1994 - books.google.fr).

 

On note l'inversion respectueuse qui fait que l'écriture hiéroglyphique écrira : «Ptah aimé (de)» pour dire «aimé (de) Ptah» (Jean Leclant, Jean Vercoutter, Hubert Bari, Mémoires d'Égypte : hommage de l'Europe à Champollion, 1989 - books.google.fr).

 

Egypte du grec Aiguptos dérive de hét-ku-ptah, «la demeure de Ptah», qui désigne la capitale Memphis (Histoire de l'art Pour les Nuls, 2012 - books.google.fr).

 

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