La Maison de Savoie annexant la Toscane et la Vénétie

La Maison de Savoie annexant la Toscane et la Vénétie

 

V, 3

 

1854

 

Le successeur de la duché viendra

Beaucoup plus outre que la mer de Tosquane :

Gauloise Branche, Florence tiendra,

Dans son giron d’accord nautique Rane.

 

"la duché"

 

Officiellement, le duché de Florence est créé en 1532 pour Alexandre de Médicis dit le Maure. Lui succède Cosme de Médicis le Grand qui se désigne par "Illustrissimus & Excellentissimus Princeps Cosmus Medices Florentiæ Dux secundus" (Jean Dumont, Corps universel diplomatique du droit des gens ou recueil des traités de paix, alliance faits en Europe depuis Charlemagne, Tome 9, 1728 - books.google.fr).

 

Mais s'agit-il de "la duchĂ©" de Florence ou de Toscane ?

 

MATHILDE, grande-comtesse de Toscane, fille de Boniface, margrave et duc de Toscane et de Beatrice de Lorraine, née en 1046, morte le 24 juillet 1115. Son père, créé duc et margrave de Toscane par l'empereur Conrad II, en 1027, servit fidèlement ce suzerain, et se montra peu scrupuleux à l'égard des biens de l'Église. Il fut assassiné vers 1052, au moment où, d'après une tradition assez incertaine, sa pieuse épouse l'avait ramené à des sentiments plus favorables au saint-siége. Il laissait, avec des États en bon ordre et un trésor florissant, trois enfants, Frédéric ou Boniface, Béatrice et Mathilde, tous trois en bas âge, et ayant grand besoin de leur mère.

 

Henri III mourut en 1056, et son fils Henri IV, sur l'intercession du pape Victor II, se réconcilia avec Godefroi, et rendit la liberté à Béatrice. Le duc et la duchesse, de retour en Toscane, se montrèrent reconnaissants du bienfait de Victor et protecteurs zélés de l'Église romaine. Ils appelèrent auprès d'eux à Florence le pape, qui donna la pourpre à Frédéric, frère de Godefroi, déjà moine du Mont-Cassin. Frédéric, cardinal de Saint-Chrysogone, fut créé pape après la mort de Victor, en 1057, sous le nom d'Étienne IX. La jeune Mathilde s'habitua donc dès l'enfance à confondre les intérêts de la papauté avec ceux de sa maison. La politique ne fut pas l'unique mobile de son dévouement au saint-siége. La religion dans laquelle sa mère l'avait élevée était fervente et pure. Il semble qu'elle ressentit de bonne heure de la sympathie pour le grand restaurateur de la discipline ecclésiastique, Hildebrand, qui, bien avant son élévation à la dignité pontificale, représentait les intérêts les plus élevés de la papauté. La prompte mort d'Étienne empêcha Godefroi de tirer parli de sa parenté avec le pape pour son agrandissement; mais il continua d'accorder son patronage à la papauté. Nicolas II et Alexandre II ne se montrèrent pas moins dévonés au duc de Toscane qu'Étienne IX, et pendant plusieurs années Florence fut le véritable siége de la papauté (Jean Chrétien Ferdinand Hoefer, Nouvelle biographie générale: depuis les temps les plus reculés jusqu'à nos jours, Tome 34, 1861 - books.google.fr).

 

Godefroid II de Basse-Lotharingie, aussi appelé Godefroid III d'Ardenne, dit Godefroid le Barbu, né vers 997 et mort le 30 décembre 1069, duc de Haute-Lotharingie et de Basse-Lotharingie, margrave d'Anvers, comte de Verdun, ainsi que margrave de Toscane avec sa deuxième épouse, Béatrice de Bar (à compter de 1054).

 

Veuf de sa première Ă©pouse, il se remarie sur la fin de 1053 avec BĂ©atrice de Bar, fille de FrĂ©dĂ©ric II de Lorraine, duc de Haute-Lotharingie, et veuve de Boniface III, marquis de Toscane, dont il Ă©tait jusque lĂ  l'administrateur des terres. BĂ©atrice est alors rĂ©gente au nom de son fils mineur FrĂ©dĂ©ric-Boniface IV. Il faut ici rappeler qu'Henri III n'apprĂ©ciait que fort peu le pouvoir excessif dont avait joui le dĂ©funt mari de BĂ©atrice et que la nouvelle union contractĂ©e par BĂ©atrice n'est pas de son goĂ»t : en 1055, il fait arrĂŞter BĂ©atrice et FrĂ©dĂ©ric-Boniface IV sous prĂ©texte que le mariage s’est fait sans son consentement et n'est par consĂ©quent pas valide. Il emmène BĂ©atrice en Allemagne et la sĂ©pare de son fils FrĂ©dĂ©ric-Boniface IV, qui meurt bientĂ´t de maladie. BĂ©atrice devient alors rĂ©gente au nom de sa fille Mathilde, la nouvelle hĂ©ritière, Ă©galement mineure. Godefroid arrive Ă  s'Ă©chapper et fuit par les Alpes.

 

En Basse-Lotharingie, Baudouin V de Flandre s'est rebellé contre l'empereur. Il porte la dévastation jusque sur le territoire de Trèves et de Nimègue. À son tour, Henri III tombe sur la Flandre et ravage Lille et Tournai (1054). De son côté, Godefroid s’en prend à Frédéric de Basse-Lotharingie, allié de l’Empereur, et qui a reçu de celui-ci la Basse-Lotharingie et Anvers. L’an 1055, il vient l’assiéger dans Anvers avec Baudouin V mais Frédéric est délivré par les Lotharingiens, accourus à son secours. Godefroid est forcé de se rendre. En 1056, l’empereur Henri III meurt après avoir fait libérer Béatrice et sa fille, et son fils Henri IV, âgé de 6 ans, lui succède sous la tutelle de sa mère, l'impératrice Agnès. Baudouin jure fidélité au roi allemand et en 1059, par un traité de paix conclu à Andernach, et obtient des terres au Brabant (la marche d'Ename), mais perd la marche de Valenciennes (confisquée en 1045, à la suite de sa rébellion).

 

Godefroid, quant à lui, reste l'un des plus fervents adversaires de l'autorité impériale, maintenant cette position pendant toute la régence d'Agnès. Il s’exile en 1057 dans le duché de Toscane, qu’il administre conjointement avec Béatrice. Il entre en guerre contre le duché de Spolète, propriété du Saint-Siège. La même année, il fait élire pape sous le nom d'Étienne IX son frère Frédéric, qui projette à son tour de faire élire Godefroid empereur. Mais Frédéric meurt un an plus tard, sans avoir pu le couronner. Début 1059, Godefroid se prodigue alors pour faire consacrer Gérard de Bourgogne, qui avait été élu pape quelques mois auparavant sous le nom de Nicolas II. Aidé par le converse Léon di Benedetto, Godefroid était entré à Rome en janvier de la même année et avait pris possession du Trastevere après un assaut contre le Latran, parvenant à expulser l'antipape Benoît X de la ville éternelle. Durant le règne de son frère et celui de ses successeurs, il revêt un rôle fondamental dans la politique de l'Italie centrale et septentrionale, y compris la Sardaigne, où il fait alliance avec Barisone Ier de Torres contre la République de Pise, dans le but d'étendre son pouvoir sur les deux domaines. Après la mort de Nicolas III, Godefroid appuie le pape Alexandre II et, en 1061, s'oppose à la descente sur Rome de Pietro Cadalo. Ne parvenant à la bloquer, il intervient après la féroce bataille du 14 avril comme pacificateur entre les deux factions, leur imposant de quitter la ville.

 

L’an 1065, FrĂ©dĂ©ric de Basse-Lotharingie meurt. L’empereur Henri IV, devenu majeur, rappelle alors Godefroid de Toscane et le rĂ©tablit dans le duchĂ© de la Basse-Lotharingie et la marche d’Anvers. En 1066, Godefroid marche avec ses troupes contre les Normands de Robert Guiscard et de Richard de Hauteville, qui menacent Rome : Richard dĂ©vaste les territoires pontificaux mais avant que Godefroid n'ait pu intervenir, il se rĂ©concilie avec le pape Alexandre. Pour des raisons de santĂ© semble-t-il, Godefroid regagne ses terres avec BĂ©atrice et installe sa cour Ă  Bouillon, oĂą il meurt la nuit de NoĂ«l 1069. Il est enterrĂ© dans la cathĂ©drale de Verdun (fr.wikipedia.org - Godefroid II de Basse-Lotharingie).

 

"giron" de l'Eglise

 

L'expression giron de l'Eglise est ancienne (XIIIe s.), mais la locution "revenir/retourner au" n'a pas Ă©tĂ© relevĂ©e antĂ©rieurement Ă  Jean de Vignay (Gdf). Rapprocher de M [Lamentations de Matheolus] IV 703 : mettre qn hors du giron du siecle (pour le faire parvenir Ă  l'autre monde, le sujet Ă©tant Dieu) et M III 2284 : «Je (Dieu) tens mon giron / pour recevoir... / tous ceulx qui veulent repairier au droit fouc»; dans cette dernière phrase (Geneviève Hasenohr, La locution verbale figurĂ©e dans l'Ĺ“uvre de Jean le Fèvre, La Locution, 1984 - books.google.fr).

 

Hildebrand surtout se plaisait Ă  Florence. Il s'y trouvait moins Ă©loignĂ© qu'Ă  Rome de la bourgade natale et des pieuses femmes dont la puissance Ă©tait aux ordres de l'Église. Toscan, il choisissait volontiers parmi les Ă©vĂŞques de Toscane le chef de la chrĂ©tientĂ©. Il lui recommandait de rĂ©sider le plus possible dans cette province, au milieu de ses fidèles et non loin de l'ennemi. C'est ainsi qu'en 1055, Victor II tenait Ă  Florence un concile gĂ©nĂ©ral oĂą fut condamnĂ©e la simonie et interdite l'aliĂ©nation des biens ecclĂ©siastiques. Henri III s'y rendait avec une suite nombreuse. L'affluence de tant de clercs et de laĂŻques faisait couler l'or Ă  flots parmi les Florentins. En 1057, c'est Ă  Florence que mourait Victor II : son corps Ă©tait enseveli Ă  Santa Reparata. En 1058, son successeur Étienne IX, frère de Gothefred le Barbu, terminait aussi dans cette ville son court pontificat. Gerhard de Savoie, Ă©vĂŞque de Florence, pape ensuite sous le nom de Nicolas II, sans se dessaisir de son Ă©vĂŞchĂ©, continuait de vivre parmi ses ouailles. Lui aussi, il mourait au milieu d'elles, et allait rejoindre Victor II sous les dalles de Santa Reparata. C'est alors, et toujours par le choix d'Hildebrand, que montait dans la chaire de l'apĂ´tre cet Anselme de Badagio, Ă©vĂŞque de Lucques et prĂ©cepteur de Mathilde, qui prit le nom d'Alexandre II, et qui continua, le plus souvent, de rĂ©sider auprès de la prĂ©cieuse pupille dont il lui fallait diriger l'impĂ©tueux dĂ©vouement (François-Tommy Perrens, Histoire de Florence, Tome 1, 1877 - books.google.fr).

 

"Gauloise... Florence" : un Allobroge Ă  Florence

 

Gérard/Girard ou Girald/Gérald, dit de Bourgogne, l'Allobroge ou encore de Lorraine, né probablement vers l'extrême fin du Xe siècle et mort le 19 juillet 1061, est pape sous le nom de Nicolas II du 6 décembre 1058 au 19 juillet 1061. Il serait issu de la famille de Chevron, tandis qu'une seconde hypothèse le donne issu de la famille de Miolans, mais originaire de Chevron (Cisvaro, actuelle commune française de Mercury, dans la combe de Savoie). En janvier 1045, il fut élu évêque de Florence (fr.wikipedia.org - Nicolas II (pape)).

 

L'aïeule paternelle de M. le Baron du Châtelet, morte en 1735, s'appelloit Marie-Hyacinthe de Villette Dame de la Couz, derniere de la branche issue d'Urbain de Villette, qui le premier traita en 1398 & 1405 avec le Duc de Savoie, qui le qualifie dans ces deux actes de consanguineus noster Urbanus de Villette. Ces deux actes sont d'autant plus intéressants, les Baronnies de Villette & de Chevron en Tarentaise ne relevoient d'aucuns Souverains & que, Nicolas II, Pape, vivant en 1061, étoit de la Maison de Villette, ainsi que le prouve le Pere la Chaise dans son Histoire de la Maison de Savoie (François-Alexandre Aubert de La Chesnaye Des Bois, Généalogie de la maison de Mont-d'Or par M. de la Chenaye-Desbois, 1780 - books.google.fr).

 

Les sires de Miolans fournirent au sacerdoce plusieurs hommes Ă©minents: voici ce que disent les mĂ©moires historiques de Lutheranus, au sujet de GĂ©rard de Miolans (Nicolas II pape) : «Messire Gerard, nĂ© Ă  Chevron, est de l'ancienne famille de Miolans; il fut nommĂ© Ă©vĂŞque de Florence et ensuite pape le 9 dĂ©cembre 1058, sous le nom de Nicolas II, sacrĂ© le 31 janvier suivant. Il rĂ©gna deux ans, quatre mois et vingt-six jours, convoqua le concile de Latran en 1059, oĂą il publia le fameux dĂ©cret, que l'on trouve dans Gratien, D. 23, sur l'Ă©lection du souverain pontife, et oĂą il obligea BĂ©renger, archidiacre d'Angers, chef des sacramentaires, et condamnĂ© pour la troisième fois, Ă  se rĂ©tracter» (Cartons de M. MontrĂ©al, 2e brouillard des MĂ©m. Lutheranus) (L. MĂ©nabrĂ©a, Des origines fĂ©odales dans les Alpes occidentales, 1863 - books.google.fr, LĂ©on MĂ©nabrĂ©a, De la marche des Ă©tudes historiques en Savoie et en PiĂ©mont : depuis le XIVe siècle jusqu'Ă  nos jours, 1839 - books.google.fr).

 

Le chevron héraldique a deux branches (Dictionnaire universel françois et latin ou Dictionnaire de Trévoux, Tome 2, 1771 - books.google.fr).

 

Il existe un Brancus roi des Allobroges au temps d'Annibal.

 

Il conste par les antiques Histoires, que le paĂŻs de Sauoye fut iadis erigĂ© en estat de Royaume. Et mesmement du temps que Annibal de Carthage entreprint ce grand passage du paĂŻs d'Aphrique, pour entrer Ă  force d'armes en Italie, & y faire ses grands conquestes. Pour lequel dessein mettre Ă  execution, ayant forcĂ© toute l'Espaigne, & passĂ© tout Ă  trauers, son armee entra en Gaule : en laquelle il fit tant, que de force, que par pratique, moyens, & intelligences, qu'il marcha iusques en Sauoye, en deliberation de Annibal en passer les Alpes, auquel lieu se trouua fort embesongnĂ©, & en grande perplexitĂ© pour le trouble & empeschement que luy faisoient les Gaulois. Et ne luy vint iamais chose mieux Ă  propos, qu'vn different & controuerse, qui sourdit entre deux freres heritiers du Royaume des Allobroges, desquelz Tite Liue au premier liure de la seconde guerre Punique, escrit en ceste maniere, Les Allobroges ne font pas fort loing de lĂ , lesquelz estoiet lors en discord, pour vn different q'ilz auoient pour leur Royaume, & estoient deux freres Royaume des competiteurs, dont l'aynĂ© s'appelloit Brancus: ayant desia regnĂ© quelque temps, estoit troublĂ© & inquietĂ©, par les conspirations de son frere puisnĂ©: lequel auoit fait amas & assemblee de ieunes gentilzhommes du paĂŻs, & grandement entrepris sus le Royaume & estat de son frere, si bien qu'il en auoit quasi desemparĂ©. Neantmoins firent conuenances entre eux d'en estre Annibal, iuge & aquiescer Ă  l'aduis & arbitrage de ce grand Annibal, lequel en prenant la congnoissance, du consentement des parties adiugea & attribua tout le droit du Brancus, roy Royaume Ă  Brancus l'aynĂ©, & le prononça Roy, ce qu'il pouuoit obtenir en iugement. En recognoissance de ce bienfait & merite, fut faite Ă  Annibal toute l'ayde & support qu'il fut possible Ă  ce Roy de faire, en matieres de viures, prouisions, & vestemens, defquelz il conuenoit se pouruoir contre les grandes froidures des Alpes (Guillaume Paradin, Chroniqve de Savoye, 1552 - books.google.fr).

 

Les Gaulois, sous les divers noms que j'ai marqués, ont peuplé en leur tems la plus grande partie de l'Italie; & que leur postérité, partagée en une infinité de branches, a formé autant de peuples, qui seuls sont le sujet de la premiere moitié de l'histoire Romaine (Jacques Martin, Histoire Des Gaules, Et Des Conquêtes Des Gaulois, Depuis Leur Origine Jusqu'À La Fondation De La Monarchie Françoise, Tome 1, 1752 - books.google.fr, fr.wikipedia.org - Jacques Martin (mauriste)).

 

Branchus

 

Cf. quatrain I, 2.

 

Nicolas II (1059–61) agreed with Leo about the need for a sexually abstinent clergy. But during his Lateran Synod of 1059, he also ignored Damian's demands that he condemn same-sex sex among the clergy. Pope Alexander II (1061–73) went so far as to steal The Book of Gomorrah from Damian. He wanted to lock it up where no one could read it. But he died before he could hide it (Jon Knowles, How Sex Got Screwed Up: The Ghosts that Haunt Our Sexual Pleasure - Book One: From the Stone Age to the Enlightenment, 2019 - books.google.fr).

 

"nautique Rane" : Venise entre Rome et Byzance

 

On trouve la reprĂ©sentation de Venise en grenouille dans l'oeuvre d'Ulrich von Hutten (1488 - 1523), homme de guerre et de lettres allemand, comme De Caesere et Venitis :

 

Une grenouille effrontée, récemment sortie des marais vénitiens

Osa dire du lieu qu'elle toucha : “cette terre est mienne”.

D'aussi loin qu'il la vit, du haut de sa montagne, l'aigle de Jupiter

La saisit dans ses serres et la rejeta dans les eaux fangeuses (Opera omnia III, p. 216 ; traduction personnelle) (Brigitte Gauvin, L'allĂ©gorie et ses fonctions dans l'oeuvre d'Ulrich von Hutten, Le Sens cachĂ©: Usages de l’allĂ©gorie du Moyen Ă‚ge au XVIIe siècle, 2020 - books.google.fr).

 

La chronique de Giovanni Diacono, chroniqueur du XIe siècle, raconte qu'au VIIe siècle, les Vénitiens élurent un doge (dux) pour les gouverner. L'historien Donald M. Nicol a montré que ce fait relève du mythe. En fait, le doge n'était pas un Vénitien élu par ses compatriotes mais un provéditeur romain d'Orient, nommé par l'exarque de Ravenne, dont Venise faisait partie.

 

Un mythe fondateur rĂ©interprète a posteriori l'Ă©mancipation de Venise Ă  l'Ă©gard de Byzance : en 828, saint Marc, dont les reliques venaient d'ĂŞtre ramenĂ©es d'Alexandrie par deux marins, remplaça ThĂ©odore comme patron de la ville. Autrement dit, un saint qu'on pourrait qualifier de «latin» (bien qu'il ait fallu aller le chercher Ă  Alexandrie, en Égypte) remplaçait un saint «grec», Venise devenant dĂ©sormais une des capitales du monde chrĂ©tien, pouvant concurrencer AquilĂ©e et mĂŞme Rome qui disposait quant Ă  elle des reliques de l'apĂ´tre Pierre (fr.wikipedia.org - Histoire de Venise).

 

La politique du doge, les positions prises par le patriarche donnent aux Empires voisins de frĂ©quentes occasions d'intervenir. Ainsi, les dĂ©buts de la rĂ©forme grĂ©gorienne, Ă  partir de 1057, opposent le patriarche, soutenu par le pape, Ă  l'empereur d'Occident, cependant que le schisme entre Rome et Constantinople, dĂ©clarĂ© en 1054, dresse l'obĂ©dience romaine, et en particulier le patriarche, contre l'empereur d'Orient : Venise tient toujours sa difficultĂ© d'ĂŞtre de sa situation entre les deux Empires (Robert Delort, Philippe Braunstein, Venise. Portrait historique d'une citĂ©, 2016 - books.google.fr).

 

Puis vint la troisième Saint-Marc, l'actuelle, qu'il faut situer entre le dogat de Domenico Contarini (1042-1071) et celui de Vitale Falier (1086-1096). Sa construction, commencĂ©e aux environs de 1060 (1063 selon la Cronaca Magno), occupa presque entièrement les quarante dernières annĂ©es du XIe siècle. Il ne semble pas qu'il y ait eu des raisons fonctionnelles de force majeure Ă  sa rĂ©novation. Les raisons politiques paraissaient plus importantes, de l'ordre de celles qui accompagnèrent, si elles ne dĂ©terminèrent pas complĂ©tement, comme on l'a vu, la dĂ©position du corps de l'EvangĂ©liste, l'Ă©dification du premier sacellum et la construction de la lĂ©gende de Marc : je veux parler d'un renouveau de la rivalitĂ© avec AquilĂ©e. En effet, Domenico Contarini venait Ă  peine d'ĂŞtre Ă©lu doge lorsqu'en 1042 le patriarche d'AquilĂ©e, Poppone (le plus grand, après Maxence), avec l'accord, semble-t-il, de l'empereur Henri III, occupa de nouveau Grado et mit la ville Ă  feu et Ă  sang. Orso Orseolo, patriarche de Grado, s'en plaignit au Pape, lequel dĂ©clara que l'Ă©glise de Grado revenait Ă  Venise et, en 1044, il confirma tous les droits et prĂ©rogatives propres Ă  ce siège mĂ©tropolitain. Par la suite, le doge Contarini rĂ©cupĂ©ra Grado par les armes et y rĂ©tablit le patriarche, dont la juridiction fut confirmĂ©e solennellement par le concile de Rome en 1053, qui dĂ©crĂ©ta : «totius Venetiae et Histriae caput et metropolis perpetuo haberetur» [qu'il soit pour toujours le chef et le mĂ©tropole de toute la VĂ©nĂ©tie et l'Istrie]. Et il en fut ainsi Ă  l'avenir, malgrĂ© un Ă©dit d'Henri IV, en 1062, qui attribuait au patriarche aquilĂ©en, Godebal, la suprĂ©matie sur Grado et sur les Ă©glises d'Istrie. Il est probable que ce nouvel accès de rivalitĂ© ait favorisĂ©, et mĂŞme dĂ©terminĂ©, l'intention de ceux qui se proclamaient les «fils premiers nĂ©s» de saint Marc, de reconstruire la basilique sous une forme plus grandiose, plus riche, plus digne : la moins «europĂ©enne» possible et la plus «byzantine» qui soit [sur le modèle de l'Apostolion de Constantinople]. [...]

 

Les raisons génériques de ce choix furent politiques (affirmation «contre» Aquilée, c'est-à-dire contre l'empire romain germanique, avec ses composantes également culturelles). Les raisons spécifiques peuvent éventuellement être retrouvées dans les nombreuses analogies de destination, fonctionnelle et même liturgique (les deux églises étaient des martyria, à la fois chapelles et mausolées des princes etc.), en plus du fait que l'Apostolion était, en définitive, de structure plus paléochrétienne que byzantine, et donc plus adapté au «goût» vénitien et dans l'Apostolion était enterré le corps de l'évangéliste Luc (Sergio Bettini, Venise: naissance d'une ville, traduit par Patricia Farazzi, 2006 - books.google.fr, Dictionnaire de l'art de vérifier les dates des faits historiques, Tome 49, 1854 - books.google.fr).

 

Le patriarche de Grado, Dominique Marengi, de Venise, assista au concile de Verceil, sous Léon IX en 1050, et à celui de Rome, sous Nicolas II, en 1059 (Charles Louis Richard, Bibliothèque sacrée, Toles 11 à 12, 1823 - books.google.fr).

 

La défaite contre les Normands (1053), puis le schisme de 1054 avec Rome et l'alliance de Robert Guiscard avec le pape Nicolas II (1059) affaiblissent encore Byzance en Italie. Les Grecs se retrouvent finalement cantonnés au littoral oriental des Pouilles, de Brindisi à Bari. Cette dernière est prise par les Normands en 1071, la même année que la défaite de Manzikert; Byzance a perdu ses terres italiennes. Les Normands disposent alors d'appuis suffisamment solides pour lancer des raids en Adriatique. Alors que la guerre civile déchire Byzance et qu'Alexis Comnène monte sur le trône, Robert Guiscard prend Corfou en 1081. Son fils Bohémond s'installe en Macédoine. Constantinople est sauvée par la contre-attaque d'Alexis Ier Comnène et par la mort de Robert Guiscard à Céphalonie en 1085. Cependant, ces victoires sont obtenues au prix d'une alliance avec la flotte vénitienne. Alexis Ier Comnène doit concéder en échange des privilèges commerciaux et fiscaux, et autoriser l'installation des marchands italiens dans l'Empire. Ces succès temporaires contre les Normands s'accompagnent ainsi d'une reconfiguration des rapports de force économiques en Adriatique, au profit de Venise. La cité italienne poursuit son expansion vers l'est, et jouera un rôle dans les croisades (Loïc Cazaux, Atlas des guerres au Moyen Âge, 2024 - books.google.fr).

 

L'acte de 1075 de la citĂ© de Split – si l'on admet son authenticitĂ© – prouverait, d'une part, que les citĂ©s dalmates avaient entamĂ© une politique d'alliance avec Venise bien avant la prise de Dyrrachium et, d'autre part, que la papautĂ©, par l'intermĂ©diaire du mĂ©tropolitain de Split, contribua Ă  rĂ©aliser cette alliance contre les «ennemis» normands. Cette interprĂ©tation mettrait en Ă©vidence le double jeu de la papautĂ© qui s'Ă©tait rapprochĂ©e des Normands après la bataille de Civitate lors du premier synode Melfi, en 1059, au cours duquel le pape Nicolas II rĂ©unit les Ă©vĂŞques italiens, en prĂ©sence d'Hildebrand (le futur GrĂ©goire VII), de Robert Guiscard et de Richard Ier d'Aversa. Ce concile, qui joua un rĂ´le essentiel dans la genèse de la rĂ©forme «grĂ©gorienne», reconnut la lĂ©gitimitĂ© du pouvoir normand sur une bonne partie de l'Italie du sud, en confirmant Robert Guiscard dans sa dignitĂ© ducale et dans ses possessions de Pouilles et de Calabre, et en accordant Ă  Richard Ier d'Aversa l'investiture de la principautĂ© de Capoue (StĂ©phane Gioanni, Gouverner le monde par l’écrit : L’autoritĂ© pontificale en Dalmatie de l’AntiquitĂ© tardive Ă  la rĂ©forme «grĂ©gorienne», 2022 - books.google.fr).

 

Acrostiche : LB GD

 

"GD" pour Godefroy, comme pour le parent de Charles le Simple qui le nomme évêque de Strasbourg en 913 (Adrien de Longpérier, Oeuvres de Longpérier, Tome 4, 1883 - books.google.fr).

 

"LB" : Le Barbu.

 

Typologie

 

Le report de 1854 sur la date pivot 1054 donne 254.

 

Saint Étienne Ier (en latin, Stephanus) est le 23e évêque de Rome et pape de l'Église catholique. Élu pour succéder à Lucius Ier le 12 mai 254 il est évêque de Rome jusqu'à sa mort, par décapitation, le 2 août 257, durant la persécution ordonnée par l'empereur Valérien. Son pontificat, qui dure jusqu'au 2 août 257, s'insère entre deux vagues de persécutions mais connaît une crise interne à l'Église particulièrement grave, qui mène celle-ci au bord du schisme avec les Églises d'Orient et celle d'Afrique (fr.wikipedia.org - Etienne Ier (pape)).

 

Victor-Emmanuel et Pie IX

 

Selon les papolâtres, le 6 septembre 1832 a lieu la "mort de l'évêque apostat Caputo, d'Ariano, dans le royaume de Naples. Ce malheureux évêque, le seul de l'admirable épiscopat napolitain qui eût trahi son devoir, qui avait consenti à devenir le grand-aumônier du roi Victor-Emmanuel, et qui ne songeait à rien moins qu'à devenir le primat de l'Italie poussée dans le schisme." (Joseph Chantrel, Annales ecclesiastiques, Volumes 1860 à 1866, 1867 - books.google.fr).

 

Le 26 mars 1860, Pie IX lança une bulle d’excommunication contre le spoliateur couronnĂ© et contre tous ses complices. NapolĂ©on, se sentant coupable, empĂŞcha la publication de la bulle en France. Mais il n’a pas pu empĂŞcher l’excommunication de porter ses fruits. Ă€ partir de cette date, NapolĂ©on III commença Ă  descendre du faite de sa grandeur pour aller enfin mourir en exil en passant par SĂ©dan. On a beau dire, Dieu est le plus fort. Confregit in die iræ suæ reges (Jules-Paul Tardivel, Vie du pape Pie-IX : ses Ĺ“uvres et ses douleurs, 1878 - fr.wikisource.org).

 

En 1870, une nouvelle fois, le pape inflige l'excommunication à la Maison de Savoie, à Victor-Emmanuel II et à ses descendants et avec eux à tous ceux qui participent à la vie politique italienne. L'excommunication est retirée seulement au seuil de la mort du souverain (fr.wikipedia.org - Victor-Emmanuel II).

 

Outre-mer

 

La mer de Toscane se trouve entre les côtes de Toscane et la Corse (Denis Martineau Du Plessis, Nouvelle géographie, ou Description exacte de l'univers, Tome 2, 1700 - books.google.fr).

 

Les possessions de la couronne de Sardaigne se divisent en États de terre ferme et États d'outre-mer. Les premiers comprennent les provinces au delĂ  et en deçà des monts, c'est-Ă -dire : 1° le duchĂ© de Savoie, le comtĂ© de Nice, le duchĂ© de Genes; 2° le PiĂ©mont, les duchĂ©s d'Aoste et de Montferrat, le Vercellais, le Novarais, les parties dĂ©tachĂ©es de l'ancien Milanais, etc. Les États d'outre-mer se composent du royaume de Sardaigne, qui comprend la grande Ă®le avec les Ă®lots voisins (GĂ©ographie universelle de Malte-Brun, Tome 3, 1858 - books.google.fr).

 

L'unité italienne

 

La Toscane passera dans le giron de la Maison de Savoie – la Savoie est un ancien pays gaulois (« Gauloise Branche Â») habitĂ© par les Allobroges – en 1860. Elle possĂ©dait aussi la Sardaigne, au sud de la Corse en face de la Toscane dont les cĂ´tes sont baignĂ©es par la mer TyrrhĂ©nienne. En 1866, Venise (« Rane Â», du latin « rana Â», grenouille – la citĂ© vĂ©nitienne Ă©tant amphibie comme l’animal) sera annexĂ©e au Royaume d’Italie dont la capitale restera Florence jusqu’à la prise de Rome en 1870.

 

nostradamus-centuries@laposte.net