Remembrements V, 76 1907-1908 En un lieu libre tendra son pavillon, Et ne voudra en citez prendre place: Aix, Carpen. l'isle volce,
mont Cauaillon, Par tous ses lieux abolira la trasse. Apocope : Carpen. pour Carpentras, ville du Vaucluse. Isle, petite ville située dans une île de la Sorgue, près
de la fontaine de Vaucluse. Volces ou Volques,
ancien peuple celtique, répandu dans la Narbonnaise, et qui a donné son nom
au village et à la fontaine de Vaucluse. Cavaillon : ville du Vaucluse Chanson de geste Guillaume d'Orange,
aussi appelé Guillaume Fièrebrace ou Guillaume de Rodès ou Guillaume au court nez (aussi orthographié
Guillaume au Cornet), est un personnage de la littérature médiévale, qui
apparaît dans plusieurs chansons de gestes rattachées à la matière de France
(Geste de Garin de Monglane), dans lesquelles il est
le fils d'Aymeri de Narbonne. Il a été principalement inspiré par un comte de Toulouse du VIIIe
siècle, Guillaume de Gellone, futur saint Guilhem,
ainsi que par d'autres «Guillaume», comme Guillaume Ier de Provence. Le sud de la France est alors envahi par les Sarrasins.
Guillaume, qui est comte des Marches d'Espagne, les combat victorieusement avec
bravoure. Il bat leur plus grand chef, Desramé.
Charlemagne le nomme duc de Gothie, de Toulouse et
d'Aquitaine. Il prend la ville d'Orange, qui était gouvernée par une princesse
sarrasine, Orable, fille de Desramé.
Par la suite, Orable se convertit et épouse Guillaume
sous le nom chrétien de Guibourg, et la ville devient
la résidence du couple. Guillaume subit cependant une terrible défaite face aux
Sarrasins à la bataille d'Aliscans, mais il finit par
les rejeter définitivement du pays lors d'une seconde bataille au même endroit.
Guillaume de Gellone, peut-être
cousin de Charlemagne, est, à la fin du VIIIe siècle, comte de Toulouse et
conseiller de Louis, fils de Charlemagne, roi d'Aquitaine depuis 781. Après
avoir conquis Barcelone en 801 et été mis à la tête de la marche d'Espagne, Guillaume fonde en 804 un monastère,
l'abbaye de Gellone, où il se retire en 806 et où il
meurt vers 812. Il est canonisé au XIe siècle sous le nom de saint Guilhem
et Gellone devient Saint-Guilhem-le-Désert Guillaume Ier de
Provence dit le Libérateur, né vers 955 et mort devant Avignon en 994,
après le 29 août, est un noble provençal, célèbre
pour avoir vaincu et chassé les Sarrazins de la Provence en 973 après la
bataille de Tourtour (Var) contre les Sarrasins
venant de leur base de Fraxinet à l'actuelle Garde Freinet Cf. quatrain V, 74 : "Hors chassera gent estrange Arabique" appliqué peut-être à un Clovis de
légende. "trasse" «trasse
de pierre» (pic pointu de carrier) Trasse : fossé, cul de
basse-fosse ; ceps, entraves Trasse : Dérivé du latin
populaire tractià re, tirer
droit, tracer. En ancien français la trace désignait la trace ou la haie vive;
plus tard ce mot a également désigné une file de gens. La trasse est, selon cette étymologie, une
ligne tirée droite le long des champs ou des terres, une limite de terrains.
La trasse traduit probablement la clôture des parcellaires; les parcellaires
sont, dès l'époque gallo-romane, des sortes de
lanières de terres dont les limites sont tracées en ligne droite, mais ne sont
pas clôturées, même si elles appartiennent à des propriétaires différents. Ce
type de champ ouvert facilitait l'utilisation de la charrue et permettait de
rationaliser la rotation des cultures. Plus tard l'exploitation collective qui
caractérise les régions de champs ouverts se transforme pour laisser la place Ã
l'individualisme agraire. Avec le développement de l'habitat dispersé
individuel, ces parcelles furent clôturées: les clôtures qui suivaient la ligne
droite tracée par les lanières étaient naturellement des trasses.
Pour former des propriétés d'un seul tenant et placer leurs bornes, comme nous
l'apprend R. Dion, l'arpenteur devait «tracer, pour la culture et l'enlèvement
des récoltes, des chemins en ligne droite, au moyen desquels chaque champ se
trouvera aboutir sur un chemin». Ces chemins étaient bien sûr entourés de
haies, c'étaient les trasses. Ce terme occupe la rive
gauche de la Loire et tout le Bourbonnais où il est en concurrence avec la bouchure et le plant Guillaume de
Provence C'est par la force des armes après tout que «les
puissants» se lancèrent dans la guerre civile et qu'ils réussirent ensuite,
sous la conduite de Guillaume II, Ã chasser les Sarrasins de La Garde Freinet.
De plus, sous la domination de Guillaume II, et surtout après sa mort, ces
«puissants» n'hésitèrent pas à se dresser les uns contre les autres afin
d'assurer leur propre sécurité et si possible d'étendre leurs domaines et leur
autorité. A l'occasion d'un conflit opposant Guillaume de Marseille à Pons de Fos,
on rapporte que «lorsque les païens, ayant été chassés, quittèrent leurs territoires,
c'est-à -dire La Garde Freinet, et que les terres de Toulon commencèrent à être
distribuées aux cultivateurs pour qu'ils les exploitent, chacun de ceux-ci,
selon sa puissance, s'appropria des terres en franchissant les limites prévues.
Ainsi, ceux qui semblaient les plus puissants (potentiores)
provoquèrent des disputes en se jetant les uns contre les autres et en
s'emparant d'autant de terres qu'ils le pouvaient...». Bien que cette
description en termes bipartites perpétue une image négative de la paysannerie,
c'est-à -dire une représentation des paysans en «démunis» n'ayant ni pouvoir ni
fortune, en d'autres occasions ces mêmes paysans sont présentés dans les chartes
de manière bien plus positive. Ils ne sont plus, comme au début de la période
étudiée, désignés par des termes dénotant le servage. D'autres termes
apparaissent qui mettent en évidence le fait que l'identité du paysan dépend de
son activité et de son habitat rural. Il n'est plus un colonus,
un mancipium ou accola, mais est désigné dans les
chartes comme laborator, rusticus,
villanus et pagensis. Comme
dans le cas des individus «libres» des VIIIe et IXe siècles, l'identité des
paysans ne se fonde plus alors sur leur statut légal mais sur les conditions
matérielles premières de leur existence - leur travail et leur lieu
d'habitation. Dans quelques cas, ce qui permet d'identifier le paysan, c'est
l'identité de ses parents, ce qui semble suggérer que même ceux qui
appartiennent à la couche inférieure du spectre social ont quelque chose qui
ressemble à une histoire familiale Au Xe siècle, Guillaume, comte de Provence, très lié avec
dom Mayeul, le 4e abbé de Cluny, désira fonder un monastère bénédictin pour y
être enseveli. Il choisit une de ses terres, près de Piécard
(Podium Aicardi), dit le Vieux Sarrians, et son vœu fut exaucé après sa mort en 992. Placé sous la
protection de la Sainte-Croix, ce monastère eut le statut de prieuré dépendant
de Saint-Saturnin-du-Port, grand prieuré de Cluny pour toute la basse Provence Il est connu que le comte Guillaume estime beaucoup les
Clunisiens à qui il confie le soin de construire une église à Sarrians où il
désire être enseveli. En 972 le même comte donne son accord à la restauration
du monastère de Saint-Césaire d'Arles par l'archevêque Ithier.
Et en 979 il consent à ce que l'évêque Walcaud de Cavaillon installe des frères dans l'église de Saint-Véran A quel moment l'évêque de Carpentras obtint-il tout ou partie des droits régaliens et comtaux
dans son évêché ? Sans doute quand il reçut de Charles de Provence et du comte Girart de Vienne, en 859 (?), tout ce qui appartenait au
fisc dans la cité de Carpentras et «depuis le bord de la rivière de l'Auzon
jusqu'à celle de la Nesque», et de «Puymarin» jusqu'au grand Palud. Guillaume le Libérateur, marquis de Provence, dut les restituer Ã
l'évêque Ayrard en même temps que sa cathédrale,
avant 982. En tout cas une bulle de 1023 du pape Benoît VIII montre
qu'alors l'évêque de Carpentras percevait déjà des droits de leyde et de sextier dans
certaines localités de son évêché (ici à L'Isle-sur-Sorgue),
et lorsqu'en 1155 (il y a 800 ans) Raymond V comte de Toulouse, duc de Narbonne et marquis de Provence, reconnaît Ã
l'évêque de Carpentras l'entière possession du marché (forum quod ab antiquis temporibus fuit et adhuc est), il semble déjà s'incliner devant une situation
de fait «immémoriale» Documents cadastraux d'Orange Quand Mommsen publia son étude du cadastre d'Orange en
1892, il ne connaissait encore que cinq fragments appartenant à ce document :
le premier avait été publié en 1856, le second en 1886, les trois autres
figuraient au C.I.L. XII 1244, qu'Hirschfeld venait
de faire paraître en 1888. Plusieurs fragments furent encore mis au jour en 1927, 1929 et 1935 ; mais ce sont surtout les
découvertes effectuées par le chanoine Joseph Sautel
de 1949 à 1955 qui ont multiplié le matériel connu et élargi notre information.
Depuis les premières trouvailles de 1949, M. André Piganiol,
membre de l'Institut, a été associé étroitement aux recherches et à l'effort
d'interprétation des documents ; de cette collaboration naquirent diverses
communications ou études particulières, jusqu'au rapport préliminaire qui parut
peu de temps après la mort du chanoine Sautel en
1955. Dès 1953, Ã. Piganiol avait reconnu que nous
avions non pas un seul plan cadastral, comme on croyait jusqu'alors, mais plusieurs Sans doute est-ce en l'année 35 avant notre ère que
l'Empereur Auguste décida la création de la colonie Julia Firma
Arausio Secundanorum,
destinée aux vétérans de la légion II Gallica qui
avaient jadis combattu avec César en Espagne, puis avec Octave contre Sextus
Pompée, pour être finalement licenciés à la suite d'une mutinerie. A leur
intention fut confisqué un vaste territoire, étendu de Montélimar au nord, aux
approches de Vaison et Carpentras à l'est, d'Avignon
au sud et approximativement limité à l'ouest par le Rhône. Ce territoire
englobait une grande partie, sinon la totalité des terres des Tricastins, et peut-être une fraction de celles des Memini de Carpentras, les uns et les autres dépendant de la
nation des Cavares. L'opération fut réalisée avec une brutalité absolue :
confiscation pure et simple. Et si plus tard une partie du sol fut restituée
aux Tricastins, elle n'intéressa que des terres
incultes qui, il est vrai, étaient et sont encore très importantes dans cette
région de garrigues coupées de torrents caillouteux et instables. A cette opération hautement «colonialiste», un cadre
solide et rassurant fut apporté par le carroyage du terrain confisqué. Les lots
ainsi déterminés, disons les centuries, étaient ordonnés selon les deux axes
perpendiculaires : cardo du nord au sud, decumanus de l'est à l'ouest. Le lieu nommé groma tire son nom de l'instrument utilisé par le fondateur
pour observer le soleil à son lever à partir du carrefour des deux axes Les fragments n'appartenaient pas à un seul cadastre,
mais, on le découvrit, à trois différents. Plus tardif encore, le
cadastre C n'a livré que 28
fragments. Assez pour constater qu'il est orienté à l'ouest, qu'il se localise entre Orange, Vaison et Carpentras, et que la groma se situe aux environs de Sarrians.
Il serait de faible intérêt s'il ne livrait, à l'extrémité ouest, un ensemble
de bras fluviaux déterminant ce qu'il nomme les «insulae
Furianae» De nouvelles considérations théoriques et pratiques ont déplacé les Insulae Furianae de Caderousse (Piboulette) vers Sorgues (Barthelasse, Oiselet). Ce qui déplace aussi le locus gromae entre Monteux et Pernes toujours dans le Vaucluse, au sud de sarrians (Lionel R. Decramer, Richard Hilton, Luc Lapierre, Alain Plas, La grande carte de la colonie romaine d'Orange . In: Autour des Libri coloniarum : colonisation et colonies dans le monde romain. Actes du Colloque international (Besançon, 16-18 octobre 2003) Besançon : Institut des Sciences et Techniques de l'Antiquité, 2006 - www.persee.fr). La centuriation, opération
évidemment d'ordre politique et fiscal, matérialisée sur le sol par des fossés
ou des bornes est bien connue en France par les «documents cadastraux» d'Orange ;
cette division de l'espace paraît abolir
le parcellaire celtique On retrouve, dans un exemple un peu tardif de la seconde
moitié du XVIIIème siècle, le terme "abolir" dans le domaine agraire
mais il s'agit de l'abolition du droit de parcours des troupeaux sur le
territoire des communautés voisines, et l'autorisation de clôturer les terres
pour empêcher le parcours Lieu libre : locus liberatus Dans la Rome antique, le pomerium (ou pomœrium) est la limite sacrée qui sépare la ville (urbs) de son territoire alentour (ager). La notion de pomerium ne s’applique qu’à Rome, aux villes anciennes du Latium et aux colonies romaines fondées rituellement. L’urbs et l’ager ont la même condition de loci effati et liberati. L'effatio est la délimitation augurale par la parole ; la liberatio est l'élimination des esprits malfaisants qui l’habitent. Mais l’urbs n'est pas seulement un locus effatus et liberatus. À l'intérieur du pomerium, elle possède une qualité qui la distingue de l’ager qui l'entoure : elle est par surcroît un lieu inauguré. L'inauguration de l’urbs, très fortement attestée, est placée par la légende romuléenne sous le signe miraculeux des douze vautours qui fait de l’urbs, à l'intérieur du pomerium, une zone élue de Jupiter au sein de son territoire. Inaugurer, c’est techniquement exécuter l’acte propre aux augures. Il s’agit ici essentiellement de prendre les auspices, afin de s’assurer que l’ensemble pomérial soit accepté, que sa fonction soit reconnue par les dieux. Le rite augural fait place nette pour permettre l'installation de l'homme dans l’urbs à l'intérieur de limites précises. Ces deux zones ont donc des statuts différents : l’ager Romanus antiquus, s'il est comme l’urbs un locus liberatus et effatus, n'est pas un locus augustus, il n'a pas été inauguré comme elle. Il a été simplement délimité (effatus) et débarrassé des esprits malfaisants (liberatus) qui l'habitaient. C'est tout ce qu'il a de commun avec l’urbs. Elle seule a été dotée de la grâce particulière des auspices romuléens. L'inauguration confère au sol de l’urbs auspicialement privilégié une valeur mystique qui exige une protection de sa pureté. Par conséquent, le droit sacré prescrit des interdits écartant les souillures qui sont rejetées sur l’ager au-delà du périmètre pomérial (fr.wikipedia.org - Pomerium). Le flamine de Jupiter ne peut sans crime monter à cheval ; il ne peut voir classem procinctam, c'est-à -dire l'armée sous les armes, hors de l'enceinte des murs. Aussi fut-il rarement nommé consul, lorsqu'il fallait que le consul prît le commandement des armées. (Aulu-Gelle, Noctes Atticae, X, XV - remacle.org). Cf. le quatrain suivant V, 77. En laissant de côté les variantes de détail, on peut distinguer dans la tradition deux branches principales de la légende de la fondation d'Alexandrie par Alexandre : a) pour Arrien, Strabon et Amrnien Marcellin, le recours à la farine pour remplacer la craie constitue le seul incident notable, et cette et cette utilisation de la farine est à elle seule un présage de la prospérité future d'Alexandrie; b) pour les autres sources, l'intérêt rebondit avec l'intervention des oiseaux et l'impression fâcheuse laissée par ce présage, jusqu'à ce qu'une interprétation correcte en rétablisse le véritable sens : les oiseaux venus de partout sont l'image de la population immense et migrante pour laquelle Alexandrie sera une mère nourricière. Il est cependant impossible de dissocier ces développements de l'événement qui les a rendus possibles : la volonté d'Alexandre, prescrivant de tracer immédiatement le plan de la future cité sur le site choisi. A cette initiative, déjà , nos sources donnent une couleur romanesque (Christian Le Roy, Les oiseaux d'Alexandrie, Bulletin de correspondance hellénique, Volume 105, 1981 - books.google.fr). Ayant commandé aux villes voisines d’aller habiter Alexandrie, il la remplit tout a coup d’une grande multitude de peuple. On dit que lors qu’il traçoit l’enceinte des murs avec de la farine d’orge, selon la coustume des Macedoniens, il survint de grandes troupes d’oiseaux qui mangerent toute la farine, & comme plusieurs en tiroient un mauvais augure pour la ville, les Devins au contraire asseurerent que c’estoit un signe qu’on y aborderoit de toutes parts, & qu’elle nourriroit beaucoup de Provinces & de Nations (Quinte Curce de la vie & des actions d'Alexandre le Grand: De la traduction de monsieur de Vaugelas, 1665 - books.google.fr). La farine, explique Plutarque (Questions romaine 109), représente un stade intermédiaire qui se situe entre la nature du blé encore sur pied, qui est par conséquent cru, et la nature du pain prêt à la consommation, qui lui, est cuit. Moulue, la farine a perdu la puissance germinative des grains, sans pour autant être devenue du pain. De cette manière, on peut effectivement dire qu'elle possède une vocation de limite – de limite entre un dehors «cru» et un dedans «cuit» (John Scheid, Jesper Svenbro, La Tortue et la lyre. Dans l'atelier du mythe antique: Dans l'atelier du mtyhe antique, 2014 - books.google.fr). Précisément un passage des Enfances Guillaume (v. 2635) introduit dans le récit l'abbé de Saint-Denis. Ce personnage n'est guère flatté. La générosité de Guillaume - générosité excessive, il est vrai, car il s'empresse de distribuer des présents qui ne lui appartiennent pas — inquiète terriblement l'abbé. Il tremble pour le trésor de son abbaye. Aussi conseille-t-il à l'empereur d'éloigner au plus vite le jeune et turbulent héros, de l'envoyer avec vingt mille hommes en Pouille ou en Calabre : «S'il restait ici..., il prendrait tout. Nous tomberions dans la misère. Nos abbayes seraient dévastées. Il ne nous laisserait ni calice ni chape, ni or ni argent, pas le moindre denier...». Convenons que la malice anticléricale de ces quelques vers reste discrète ; elle suflit pourtant à rendre très improbable que l'auteur de la chanson soit un moine de Saint-Denis - à moins que ce moine n'ait eu quelque rancune contre son abbé. [...] L'abbé désire tellement le départ de Guillaume qu'il offre pour son adoubement les armes d'Alexandre le Grand conservées dans le trésor de l'abbaye (Jean Frappier, Les chansons de geste du cycle de Guillaume d'Orange: Le couronnement de Louis. Le Charroi de Nîmes. La prise d'Orange, 1965 - books.google.fr). En Aliscans après une terrible bataille Guillaume est battu et seul. Il voudrait revenir à Orange. Mais, après tant de combats, son cheval aura-t-il encore la force de le porter ? Guillaume lui parle affectueusement. Mon cheval, lui dit-il, tu es harassé. Si tu avais eu quatre jours de repos je me serais encore lancé dans la bataille contre les Sarrasins. Je m'en serais vengé car ils m'ont odieusement blessé. Mais maintenant je vois bien que tu ne peux plus m'aider et, par Dieu, on ne doit pas t'en faire le reproche, car, tout le jour, tu m'as très bien servi. Ils ont été courts les moments où tu n'as pas galopé et couru sous la pointe de mes éperons. De ton service je te remercie et je te rends grâce. Si je pouvais te ramener à Orange tu resterais vingt jours sans porter la selle. Tu ne mangerais plus que de l'orge vanné et deux ou trois fois passé ou criblé. Ton fourrage serait du beau foin de prairie, bien choisi et fané à la bonne saison. Tu ne boirais que dans des seaux dorés. Quatre fois par jour tu serais pansé et recouvert d'une étoffe de soie précieuse. Si les païens t'emmènent en Espagne, par Dieu, j'en serai furieux et désespéré. Baucent l'entend et fronce les naseaux. Il le comprend aussi bien que le ferait un homme plein de bon sens, Il secoue la tête, gratte et frappe la terre du pied. Il reprend son souffle et retrouve vite sa vigueur. Le courage lui revient et le voilà (Pierre Jonin, L'Europe en vers au moyen age: essai de thématique, 1996 - books.google.fr). L'orge, comme en Languedoc, existe sous deux formes: l'ordeum, l'orge proprement dite et la palmola, la paumelle. [...] L'orge est un blé de la basse Provence à l'est et à l'ouest : dans la première motié du XIVème siècle elle y occupe entre le tiers et la moitié des terres ensemencées; à mesure que l'on avance vers le centre et vers le nord son importance décroît; elle est totalement absente des terres de la Montagne de Lure. [...] L'orge, encore présente dans la première moitié du XIIIe siècle, a reculé ensuite devant le conségal. En basse Provence, elle a résisté plus longtemps. Des quantités non négligeables d'orge, passent encore sur le Rhône au péage d'Arles en 1420 Mais le déclin, commencé avec le XIIIe siècle, s'accentue pendant le XIVe. [...] Les inventaires confirment ce recul : l'orge n'est que très peu citée. Les grains trouvés en 1405 chez les bladiers de Carpentras ne donnent pas d'autre image, pas plus que les provisions recensées en 1473 dans cette ville (Louis Stouff, Ravitaillement et alimentation en Provence aux XIVe et XVe siècles, 2017 - books.google.fr). Une petite amphore trouvée en juin 1968 dans les fouilles de la Bourse à Marseille porte, peinte sur sa panse, une inscription latine qui en fait un document épigraphique fort rare et un témoin précieux des relations commerciales de Marseille avec son arrière-pays, sous l'Empire romain : Soit, en développant : Massil(iam) ou Massil(iensi) Rubrio ; [...]sino, hord(ei) Cauar(um) ; sicci, mundi ; [. . .]i, m(odii) mille (et quingenti). "A destination de Marseille, pour Rubrius ..sinus, mille cinq cents boisseaux d'orge du pays des Cavares, sec, mondé" Cauar(um), sans doute, génitif de Cauares, plutôt que Cauar(i), de l'adjectif Cauarus, attesté une fois chez Varron. [...] L'explication la plus vraisemblable est, croirions-nous volontiers, un souci d'ordre commercial : la moyenne vallée du Rhône est, à coup sûr, renommée pour sa fertilité et pour la qualité de ses produits (1) ; le nom des Cavares a d'autre part du prestige et s'est étendu fort anciennement, au-delà de la région de Cavaillon-Avignon-Orange, loin au Nord, le long du Rhône et jusqu'à son confluent avec l'Isère. Dirons-nous que ce prestige est peut-être particulièrement sensible pour des clients marseillais, étant donné les très anciennes relations économiques de leur cité avec les Gavares, dont les ports fluviaux de Cabellio et d'Avennio, considérés comme des «villes de Marseille» (Etienne de Byzance), ont sans aucun doute joué un rôle essentiel dans son approvisionnement, tout particulièrement pour les céréales, que son territoire propre, trop aride, ne produisait pas ? L'« orge des Cavares », ce pourrait être, en somme, un label de qualité, quelque chose comme une «appellation contrôlée». Appellation en tout cas assez vague, qui ne nous permet pas de nous prononcer avec certitude sur le lieu où furent embarqués ces 1500 modii d'orge : nous devons penser naturellement aux ports, déjà mentionnés, du territoire proprement cavare, à Avignon et à Gavaillon; mais ce peut être aussi un embarcadère situé plus en amont sur le Rhône. Nous n'en sommes pas moins en présence d'un témoignage tout à fait exceptionnel sur un commerce qui emprunte la voie fluviale du Rhône (et, peut-être en l'occurrence et pour le début du voyage, de la Durance), avant de gagner Marseille par la mer (Bernard Liou, Myriam Morel, L'orge des Cavares : une amphorette à inscription peinte trouvée dans le port antique de Marseille. In: Revue archéologique de Narbonnaise, tome 10, 1977 - www.persee.fr). Les étapes nécessaires afin de rendre l'orge apte à la réalisation de la bière rendues par Orose au Vème siècle sont : d'abord le processus de germination de l'orge humidifiée et chauffée, ensuite le séchage, pour obtenir du malt, puis la mouture en farine. Les grains doivent en fait être concassés et non réduits en farine fine qui laisserait trop d'amidon dans la bière. L'ajout de sucre doux rappelle l'utilisation du miel qui favorise la fermentation. Les opérations de trempage et de brassage ne sont décrites, pas plus que l'ajout de levure et de plantes aromatiques (Fanette Laubenheimer, Boire en Gaule, 2015 - books.google.fr). Le grec "oulai" désigne les grains d'orge entiers ou grossièrement moulus qu'on répandait sur la tête de la victime au début des sacrifices, Homère en parle déjà (Charles Alexandre, Dictionnaire Grec-Français, composé sur un nouveau plan, 1836 - books.google.fr). Pline parle, dans le chapitre XXII du Livre XVIII de l'Histoire naturelle, d'une source de la Narbonnaise appelée "Orge" dans certains manuscrits, qui serait Sorgua, la source de la Sorgue, entre les deux chapitres XXI et XXIII où il discourt de l'orge (hordeum) (C. Plinij Secundi Historiæ mundi libri 37, 1631 - books.google.fr). Typologie Caligula (31 août 12 à Antium - 24 janvier 41 à Rome) (latin : Caius Julius Caesar Augustus Germanicus) est le troisième empereur romain. Il a régné de 37 à 41, et succédé à Tibère. Selon nos principales sources concernant son règne, principalement les récits du biographe latin Suétone et de l'historien grec Dion Cassius, après un début de règne prometteur, durant lequel il connut une grande faveur auprès du peuple romain, il devint peu à peu un empereur autocratique, délaissant et assassinant ceux qui avaient soutenu son ascension, tout en nourrissant une profonde haine pour le Sénat. Caligula meurt à Rome en 41, assassiné par un groupe de prétoriens (fr.wikipedia.org - Caligula). Dans l'une des centuries du cadastre C affiché à Orange, au contact du decumanus principal, on trouve inscrite, après la référence aux insulae Furianae dont l'archipel confus borde le cours principal du Rhône (fig. 4 et 6), une mention très exceptionnelle, celle d'un nom qui ne peut manquer d'éveiller dans les mémoires un écho précis : Quintus Curtius Rufus. [...] Il est ainsi possible d'identifier - et tout recommande de le faire, sauf à imaginer une bien étrange, et bien improbable coïncidence — le Quintus Curtius Rufus du cadastre avec Quinte Curce, homme d'action et de plume, capable, écrivain, de compiler et de composer, avec tous les ornements de la rhétorique à la mode, Y Histoire d'Alexandre le Grand, et de tirer, ce qui venait à son heure, de la pratique d'Alexandre une idéologie favorable au pouvoir impérial, capable aussi, administrateur, technicien de l'économie (10), de développer l'exploitation des ressources de la nature, ouvrant avec ses légions une mine d'argent dans le pays de Mattium, ou bien — comme on voit ici - aménageant pour la culture les rives et les îles instables du Rhône. Ce personnage remuant, voyant, dont l'ascension s'explique peut-être par un génie intrigant, mais aussi par l'occasion, le vide laissé par la ruine des nobiles, irritait très fort Tacite : l'auteur des Annales parle avec une hypocrite perfidie de sa naissance {De origine Curti Rujî, quem gladiatore genitum quidam prodidere, neque falsa prompserim, et vera exsequi pudet); il le dénonce comme «fâcheusement flatteur à l'égard de ses supérieurs, arrogant pour ses inférieurs, difficile avec ses pairs» ; et il déprécie l'œuvre du légat : le filon d'argent des Mattiaci fut pauvre et vite tari; le soldat-mineur, surmené, renâclait (XI, 21). Mais Curtius Rufus eut une sorte de légende, qu'il avait forgée lui-même : comment aurait-on su, s'il n'en avait soufflé mot, cette vision qu'il eut, à Adrumète, et que rapportent Pline et Tacite, d'une femme de taille surnaturelle prédisant à lui, «tenuis adhuc et obscurus», qu'il irait à Rome (il n'y était donc pas allé avant), aurait de hautes charges, et obtiendrait enfin le proconsulat d'Afrique. Fils de ses œuvres certes; mais avec de l'envergure, et il est manifeste qu'on doit le ranger parmi ceux qui firent honneur à la Narbonnaise. Reconnaître aujourd'hui ses attaches éclaire sa personnalité, et apporte aussi du nouveau pour l'histoire sociale et culturelle de cette province. A une date qu'on ne peut exactement définir, mais plutôt quand sa faveur éclatait, peut-être vers le temps où il fut légat en Germanie (47), il a été le bienfaiteur et le duumvir du municipe dont dépendaient les insulae Furianae, qui était son municipe d'origine. [...] Dans le cas des insulae Furianae, l'initiative de Q. Curtius Rufus ne doit pas être jugée mineure. On voit par les inscriptions reportées sur le plan que ces «îles» désignées par une dénomination particulière étaient en partie hors du domaine colonial primitif; du moins les nova jugera ne sont-ils pas décomptés directement au bénéfice de la colonie. Curtius a donc accru le sol vectigalien de terrains jusque-là inondables et hors limites; mais son action n'a pas concerné seulement la centurie où son nom est inscrit : celle qui, par exemple, est contiguë à l'Ouest (SD I, VK XXIII) comporte sept jugères qui sont venus s'ajouter (et nova) aux vingt jugères recensés de l'ager vectigalis ancien. Et il semble bien aussi que cet ager lui-même, jusque là marginal et sans doute peu attrayant (c'est pourquoi il avait échappé à la sortitio) ait été alors amélioré, pour être offert à la location (François Salviat, Quinte Curce, les insulae Furianae, la fossa Augusta et la localisation du cadastre C d'Orange. In: Revue archéologique de Narbonnaise, tome 19, 1986 - www.persee.fr). Le remembrement ou remembrement rural a pour but la
constitution d'exploitations agricoles d’un seul tenant sur de plus grandes
parcelles afin de faciliter l'exploitation des terres. L'organisation
d'échanges collectifs débute au XXe siècle. À l'issue de la Première Guerre
mondiale sont adoptées les lois du 27 novembre 1918 dites «Chauveau» sur le
remembrement de la propriété rurale ainsi que la loi du 4 mai 1919 sur la
délimitation, le lotissement et le remembrement des propriétés foncières dans
les régions dévastées par la guerre. Sous le régime de l'autorité de fait de
Vichy, la «loi» du 9 mars 1941 veut mettre en place un outil juridique plus
rapide et facile à utiliser. Après la Libération, l’ordonnance du 7 juillet
1945 reprend l'objectif de simplification de la «loi» de 1941 Contre les abus du partage, tel qu'il est établi par le
Code civil, une réaction s'est opérée dans ces derniers temps, qui n'est
peut-être encore qu'à ses débuts. Nous ne parlons que pour mémoire de la loi du
23 octobre 1884, qui a diminué les frais pour les ventes judiciaires
inférieures à 2000 francs. La première
étape a été marquée plutôt par la loi du 10 avril 1908 «relative à la
petite propriété et aux habitations à bon marché». Bien que cette loi, malgré
son titre, malgré les intentions de ses
inspirateurs, MM. Siegfried et Ribot, ait dû avoir une portée générale, en
fait, elle ne favorise guère la constitution de la propriété rurale. Elle tend
surtout à faciliter l'acquisition des maisons et paraît s'inquiéter des
travailleurs urbains, plutôt que des petits cultivateurs, du jardin ouvrier,
plutôt que de la petite propriété rurale. D'ailleurs, le maximum de 1200 francs
et d'un hectare qu'elle fixe pour le bien à acquérir, ne pouvait assurer le
bénéfice de ses avantages à de véritables exploitations rurales, si modestes
qu'on les suppose. De ces innovations, la plus importante à nos yeux, c'est
l'extension aux biens ruraux, dans la limite des valeurs et contenances
indiquées, des dispositions de la loi du 12 avril 1906, sur les habitations Ã
bon marché, dérogeant, en matière d'indivision et de partage, aux règles du
droit commun, en faveur du conjoint survivant et des descendants, et permettant
l'attribution héréditaire du foyer. Le principe, si funeste, de l'article 815,
aggravé, dans son application, par l'article 832, a reçu là une atteinte qui
l'a fortement ébranlé. Ce premier pas dans une voie nouvelle a été bientôt
suivi d'un second, beaucoup plus considérable. Nous voulons parler de la loi du
12 juillet 1909, qui a institué le bien de famille insaisissable, et porté Ã
8.000 francs sa valeur maximum, sans limitation de contenance. Si nous devons
faire mention de cette loi, puisqu'elle tend à limiter les cas de partage et Ã
prévenir le morcellement, nous ne pouvons-nous arrêter à son examen détaillé La transformation capitale du réseau des communications
fut contemporaine de la politique libérale en matière commerciale sous Napoléon
III puis de la dépression des années 1870-1880, qui vit l'effondrement des prix
et/ou des cultures dans des domaines vitaux pour les Provençaux. Ceux-ci ne
purent soutenir la concurrence russe et américaine (céréales), méditerranéenne
(liège, huile), coloniale (huile), algérienne (vins après la crise
phylloxérique). Le salut vint de l'État, qui commença à se mêler activement de
la vie agricole. Citons les lois Méline de 1884 et 1887, les lois relatives au remembrement (1908,
1919), la loi Plissonnier sur les cours agricoles
postscolaires (1918), Â la mise en place
de l'INRA et des offices départementaux agricoles (1921), la réglementation des
assurances mutuelles agricoles (1928-1930). À la veille de la Révolution les terroirs provençaux
étaient généralement fortement parcellisés, du point de vue de la propriété
comme du point de vue de l'exploitation. Cela n'excluait pas la présence
occasionnelle de la grande propriété (pas toujours gérée dans l'optique d'un
profit maximal) et d'un grand nombre de salariés agricoles (les «travailleurs»
des cadastres anciens), authentiques prolétaires ou micropropriétaires.
C'était une adaptation à des conditions naturelles très diverses, à un niveau
technique où l'investissement en travail humain était essentiel et peut-être Ã
une finalité sociale qui n'était pas le revenu individuel mais la sécurité
familiale. Tant que l'agriculture provençale put vivre en quasi-autarcie, ces
structures subsistèrent. Lorsque la concurrence extérieure put jouer à plein et
que l'émigration posa la question de la main-d'œuvre (effectifs, salaires), la
survie dut être recherchée dans les mutations culturales et techniques qui ne
pouvaient manquer d'avoir un écho sur l'emprise foncière et les modalités de
l'exploitation. [...] Le faire-valoir direct était aussi important en basse
Provence qu'en montagne. En Vaucluse, trois exploitants sur quatre étaient
propriétaires en 1862 (un peu mieux que la moyenne française), les autres
étaient fermiers (deux tiers, soit 2468 personnes) et métayers (un tiers, 1 583
personnes). Mais un exploitant-propriétaire sur deux était également locataire (4
336 fermiers, 3 055 métayers) ou salarié pur (16 000). Une dizaine d'années
plus tard (1873), le faire-valoir occupait de 45 Ã 65 % des terres agricoles
dans le Var et les Alpes-Maritimes, plus de 65 % dans les Hautes et
Basses-Alpes ; le métayage, au moins 35 % des terres en Vaucluse, de 25 à 35 %
dans les Bouches-du-Rhône. En 1882, la situation se présentait ainsi. Plus de
85 % des exploitants étaient propriétaires dans les Alpes-Maritimes, les Basses
et les Hautes-Alpes ; ils contrôlaient plus de 80 % des terres dans ces deux départements-ci.
Dans le Var, c'était 80 % des exploitants ; dans le Vaucluse et les
Bouches-du-Rhône entre 70 et 79 %. Ils tenaient 40 % des terres dans les
Bouches-du-Rhône, de 60 à 79 % dans le Var, le Vaucluse et les Alpes-Maritimes.
Le pourcentage des fermiers était assez important en Vaucluse, dans le Var, les
Bouches-du-Rhône, les Basses-Alpes (de 7 à 30 % des exploitants) où leur
emprise foncière portait sur 13 à 40 % du sol. Le premier mode n'a cessé de reculer
depuis 1892, au moins en plaine, au profit d'un fermage conquérant. Mal vu par
les paysans mais aussi par les propriétaires pendant la phase de mévente de
1925-1936, le métayage a poursuivi son lent recul. C'est le schéma vauclusien.
Dans les Bouches-du-Rhône, il est en gros valable, sauf que jusqu'à la fin du
siècle fermiers et métayers furent en nombre sensiblement équivalents. En
revanche, dans le Var il présente quelques différences, au moins jusqu'en 1914
: ici pour un fermage en léger progrès (de 22 à 24 % des terres) et un métayage
en léger déclin (de 10,5 à 6,5 %) entre 1873 et 1892 on constate une extension
du faire-valoir direct des terres (de 63 Ã 68 % des terres, de 78 Ã 83 % des
paysans). En 1908 le nombre des propriétaires exploitants a augmenté des deux
tiers, celui des métayers a reculé d'autant, tandis que celui des fermiers est
resté stable Le morcellement persiste surtout au sud de la Loire, et
la loi de 1908 sur le remembrement n'a que peu d'effets avant 1914. L'idéal
républicain de l'époque demeure celui d'une démocratie paysanne égalitaire,
d'une propriété familiale se suffisant à elle-même. La loi de 1910 va dans ce
sens qui octroie des prêts de 3 000 francs à ceux qui veulent accéder à la propriété.
Le salariat agricole et le métayage sont en recul, encore que les métayers
demeurent nombreux dans le Toulousain et dans le Bourbonnais où ils s'agitent,
vers 1900, contre les propriétaires. On ne saurait oublier, enfin, que beaucoup
de cultivateurs pratiquent un artisanat d'appoint et travaillent même, dans le
Nord et le Pas-de-Calais à la mine Dans les années 1880, les viticulteurs se battront contre
le mildew (orthographe d'époque) venu lui aussi
d'outre-Atlantique. Mais le mal est moins grave, les structures existent et la
bouillie bordelaise fera merveille. Pendant la crise, H. Laval montre que la
consommation atteint soixante millions d'hectolitres. Or, production et
importations cumulées ne donnent que quarante millions d'hectolitres. C'est
qu'il y aurait vingt millions qui proviennent de la fraude : les vins espagnols
très alcoolisés sont "baptisés", et des méthodes plus chimiques
encore vont sévir. En 1900, le syndicat agricole vauclusien fait une enquête
sur les vins artificiels consommés dans la capitale : sur six cent huit
échantillons, cent vingt-neuf seulement sont considérés comme corrects. La
réussite des replantations a entraîné une hausse du rendement qui amènera une
situation de surproduction. Les lois ne permettent également plus d'expédier
nos raisins vers le Centre et l'Est où ils allaient, avant le phylloxéra,
améliorer le vin local. Tout ceci
aboutira à la crise viticole de 1906-1907. Le Vaucluse envoie des représentants
aux grandes manifestations de Montpellier À la crise de surproduction, s’ajoute la concurrence
étrangère (l’Espagne et l’Italie ont elles aussi des excédents à écouler), et
celle des vins algériens. Les années 1902 et 1903 avaient connu de faibles
récoltes, dues à la météorologie : 35 à 40 millions d’hectolitres. Les cours
sont alors de 16 francs, puis de 24 francs l’hectolitre. En 1904 et 1905,
toujours à cause de la météorologie, les récoltes sont extrêmement abondantes
dans toute l’Europe : la hausse de production est de 96 % en France, de 48 % en
Espagne, de 16 % en Italie, les trois principaux producteurs européens. Au
Parlement, ni Gaston Doumergue, député du Gard, ni Félix Aldy,
député de l'Aude, ne réussissent à sensibiliser leurs collègues sur la question
viticole et leurs propositions visant à la défense du vin naturel sont rejetées
par les parlementaires. Au cours de 1905, une manifestation rassemble 15000
personnes à Béziers. Un certain Marcelin Albert lance alors sa «pétition de
1905», qui recueille quatre cents signature. La révolte vigneronne reçoit l'aval de toutes les
tendances politiques. Des royalistes aux radicaux, tous soutiennent activement
le mouvement. Tout le Languedoc est ligué contre Clemenceau, président du
Conseil. L'Église catholique ouvre même les portes de sa cathédrale et de ses
églises. Jusqu'alors, les manifestations dominicales s'étaient
déroulées dans le calme et la discipline. Elles se voulaient pacifiques. Mais
Clemenceau jugea que force devait rester à la loi et pour rétablir l'ordre fit
appel à l'armée. La gendarmerie reçut alors ordre d’incarcérer les responsables
des manifestations. Le Midi s'embrase. À Perpignan, la préfecture est pillée et
incendiée. Le préfet Dautresme doit se réfugier sur
le toit. À Montpellier, la foule se heurte aux forces armées. À Narbonne,
l’inspecteur de police Grossot, l'un des auteurs de
l’arrestation de Ferroul, est pris à partie et mis Ã
mal par la foule. Pour le dégager, il est donné ordre à la troupe de tirer sur
les manifestants. Les coups de feu font cinq morts dont une jeune fille. Pourchassé par la police, Marcelin Albert est contraint
de se cacher puis de se sauver à Paris où il arrive le 22 juin. L'Assemblée
nationale, en plein débat sur le projet de loi contre la fraude, refuse de le
recevoir. Informé, Georges Clemenceau, accepte de lui accorder une audience. Le
président du conseil, le reçoit le 23, place Beauveau
en tant que ministre de l'Intérieur. Le chef du gouvernement va en profiter
pour donner sa version aux journalistes de la presse politique en mettant
particulièrement en exergue l'histoire du billet de banque qu'il a donné Ã
Albert pour rentrer chez lui. Les quotidiens nationaux en font leurs choux gras
et Marcellin Albert du statut de rédempteur passe dès lors à celui de vendu. Les
parlementaires promulguent une loi «tendant à prévenir le mouillage des vins et
l'abus du sucrage par une surtaxe sur le sucre et obligation de déclaration par
les commerçants de vente de sucre supérieur à 25 kilos». La loi du 15 juillet
complète celle du 29 juin en réglementant la circulation des vins et des
alcools. Le 31 août, le gouvernement accepte d'exonérer d'impôts les
viticulteurs sur leurs récoltes de 1904, 1905 et 1906. Le 3 septembre, parait
un nouveau décret spécifiant que : «Aucune boisson ne peut être détenue ou
transportée en vue de la vente ou vendue sous le nom de vin que si elle
provient exclusivement de la fermentation alcoolique du raisin frais ou du jus
de raisin». Ainsi, la fraude devient quasiment impossible. Le 21 octobre, un
autre décret institue le «service de la répression des fraudes» et définit ses
fonctions, son autorité et ses moyens. Tous les dirigeants emprisonnés, membres du comité d’Argeliers, avaient été libérés en signe d'apaisement. Le 5
octobre, les personnes considérées comme les responsables des manifestations et
des émeutes sont déclarées passibles de la cour d’assise. Mais de recours en
appels, le procès n’aura jamais lieu et tous furent graciés en 1908. Cette surproduction chronique allait d'abord être
absorbée par les poilus de la Première Guerre mondiale La loi Ribot du 30 juin 1916 sur la réglementation du régime des
alcools, qui concurrençaient le vin participe à cette résorption |