Henri V

Henri V

 

V, 40

 

1881-1882

 

Le sang royal sera si très mêlé,

Contraint seront Gaulois de l'Hespérie

On attendra que terme soit coulé,

Et que mémoire de la voix soit périe.

 

Sang mêlé

 

L'Hercule-Ogmios de Lucien et l'Hercule de Libye d'Annius de Viterbe sont contemporains, ils sont tous les deux « nés » dans les dernières années du XVe siècle. Au début, chacun suit sa propre voie, sa propre évolution. Chacun aussi garde sa propre signification. Mais, chemin faisant, les deux Hercules se rencontrent, se prêtent mutuellement leurs traits, se confondent enfin. Dans la deuxième moitié du siècle, il devient malaisé d'assigner à chacun son propre domaine. Ils sont, dans la plupart des cas, devenus un, et la où on ne parle que de l'Hercule gaulois, ou de l'Hercule ancêtre, sans faire de rapprochement exprès, on sent que les deux ne sont plus séparer, que l'un implique l'autre. En 1547, un Jean Bouchet nous présente encore l'Hercule de Libye sans l'identifier à Ogmios : François Ier lui est comparé et les Français sont appelés «nobles Hectoriens, loyaulx François, lybicz Herculiens». Par la suite, les exemples de cet Hercule de Libye se font rares chez les poètes. Chez Ronsard encore, en 1553 :

 

Sus, courage Soudars, sus, sus, montrés vous or'

De la race d'Hercule, et de celle d'Hector :

Hercule, après avoir l'Espagne surmontée

Vint en Gaule épouser la Roine Galatée,

Dont vous estes issus, puis le Troien Francus...

 

...la race Troienne

Mêla cent ans après avec l'Herculéenne.

 

Laumonier, le savant commentateur du grand poète, renvoie à l'Hercule gaulois. Prise à la lettre, on pourrait contester cette indication. Mais le souvenir de l'étymologie d'Arcueil et celui de l'Entrée de 1549 la rendent probable.

 

noz Princes yssus du sang Hectorien,

Meslé jadis en Gaule au sang Herculien.

 

dira encore, quelques années plus tard, Guillaume Des Autels; et Claude de Pontoux reprendra l'idée :

 

Depuis cest âge viel que la trouppe Troyenne

Se vint mesler en Gaule avec l'Herculienne.

 

Ronsard a certainement donné l'exemple. Ce qui nous intéresse davantage, c'est que ces rappels de l'antiquité de la race ne sont que de simples allusions, qu'on n'a pas besoin des qualités propres à l'Hercule de Libye ou à l'Hercule gaulois. Simple ornement, nous avons affaire à Hercule tout court. Il n'a pas de relief : sa seule qualité, c'est d'être français (Marc-René Jung, Hercule dans la littérature française du XVIe siècle, De l’Hercule courtois à l’Hercule baroque, 1966 - books.google.fr).

 

Acrostiche : LCOE

 

Lord Elcho est noté "Elcoe" par Delacroix qui l'a croisé lors de l'Exposition universelle de 1855 de Paris dont ils faisaient partie de l'organisation (Rapport sur l'Exposition universelle de 1855, présenté à l'empereur par le prince Napoléon, 1857 - books.google.fr).

 

Il est le fils aîné et héritier de Francis Wemyss-Charteris (9e comte de Wemyss) et succède à son père en 1883. Auparavant, il est connu sous le nom de Lord Elcho. En tant que Lord Elcho, il est commandant du London Scottish Regiment pendant 17 ans à compter de sa formation en 1859 (fr.wikipedia.org - Francis Charteris (10e comte de Wemyss)).

 

En 1843, Henri de Bourbon réalisa le voyage d'Angleterre, déjà plusieurs fois ajourné; son but était moins d'étudier cette île, où il fut jeté jeune encore, ce colosse industriel, couvert de ses noires fabriques, et qui a pour âme la vapeur, que de voir des Français, et d'apercevoir, des rivages de la Grande-Bretagne, le beau royaume de France, sa patrie, ouvrage de ses aïeux; cette terre chérie où s'écoulèrent ses premières années. C'est au commencement de septembre 1843 que M. le comte de Chambord recevait les embrassements et les bénédictions de ses augustes parents. Il se rendit d'abord en Saxe, où la famille royale lui prodigua tous les témoignages d'une sincère affection. L'accueil qu'on lui fit en Prusse ne fut ni moins empressé ni moins touchant; en lui serrant la main, le roi Guillaume ne put s'empêcher de laisser tomber des larmes d'attendrissement. Hambourg était le port où Son Altesse Royale devait s'embarquer. Elle y arriva le 31 octobre. Toute la journée se passa en explorations. Le soir, à son entrée au théâtre, les sénateurs s'empressèrent de lui offrir leur loge et de l'entourer publiquement des plus grands égards. Le lendemain, 5 octobre, le steamer le Hambourg, fendait les eaux de la mer du Nord. Après 13 heures de traversée, il s'arrêtait à l'embouchure de l'Humber. Le prince et sa suite se dirigerent vers la capitale de l'Ecosse, non sans visiter York, remarquable par son attachement à la cause des Stuarts; Durham, par la beauté de son site; Sunderland, par son port: magnifique et sa marine marchande; Newcastle, par le voisinage du mur d'Adrien; Kelso, où, pour la première fois, des courses excitèrent l'intérêt de l'auguste voyageur, et où il fut l'objet des prévenances les plus gracieuses de la part du duc et de la duchesse de Roxburg et de lord Eglington. Monseigneur eut beaucoup de peine à se loger à Edimbourg; l'affluence extraordinaire, attirée par un festival, y rendait les appartements très-rares; pourtant on en trouva un à l'hôtel Douglas (chez M. Gibb). Quel bonheur pour ces bons et loyaux Ecossais, de revoir dans leur ville celui que la tempête de 1830 avait jeté au milieu d'eux comme un lys, deraciné, comme un ange consolateur, comme une douce providence, celui qui avait conquis toutes leurs sympathies, par la séduction de ses manières, par les charmes naïfs de son esprit, la noblesse de son caractère et la bonté inépuisable de son coeur. Quel bonheur pour le noble proscrit de revoir ces lieux, témoins des jeux d'autrefois, les voûtes majestueuses et abandonnées d'Holyrood ! Au dehors du palais, il ne pouvait faire un pas sans fouler un souvenir : ici c'était la cathédrale; là, le château, vieille demeure des monarques écossais, aujourd'hui converti en une caserne; plus loin l'Université, où le reçut le vénérabic M. Janieson; aillears Horriol's Hospital hospice fondé par Georges Horiol, orfèvre de Jacques VI, et le Jardin Botanique, où il fut reconnu par l'ancien jardinier Mac-Nab. Le 17, il visita le parlement, où se trouvent les tribunaux civils et criminels; la riche bibliothèque des avocats; l'Institut, qui renferme de riches collections d'histoire naturelle, de zoologie et de minéralogie (Henri de Bourbon, propagande de l'étoile du peuple, 1850 - books.google.fr).

 

Il déjeûna le lendemain à Winther-House, chez lord Ruthven, et dîna chez lord Weymiss, à Gosford. Il se sentait comme en famille dans cette dernière résidence, où l'attendaient d'anciens compagnons de jeu, les petits-fils du maître de maison. Il y rechercha la conversation de lord Helphinston, ancien gouverneur d'une province hindoue. Il passa la nuit au château, qu'il en quitta le 19 pour aller voir une nouvelle ferme modèle, appartenant à M. Mitchell, gendre de sir Thomas Dick-Lauder. Le reste de la journée fut consacré à sir John Hope, grand propriétaire de mines, qui lui fit admirer une machine à vapeur de son invention. Le 20, Monsieur le Comte de Chambord fut l'hôte de lady Wedderburn. Le 21, l'amiral sir Philippe Durham lui montra les travaux entrepris pour augmenter le rendement de sa terre de Fordell. Le 22, en revenant de la messe, qu'il avait entendue à la chapelle de Broughton-Street, il reçut avec une complaisance marquée l'hommage que M. Guillerez, professeur de français, lui fit d'un poème de circonstance, relié aux armes de France. "Puisque vous n'êtes pas en France, dit-il à ce compatriote, je vous félicite d'être dans une aussi bonne ville qu'Edimbourg." (Philippe Rocher, La jeunesse du dernier Bourbon, le duc de Bordeaux en exil (1830-1844), 1923 - books.google.fr).

 

Previous to ownership by 7th Earl of Wemyss in 1781 or 1784 (depending on the source), the property was held by the Murrays, Douglases, Sinclairs from 1458, by the Achesons from 1561, then by the Auchmutys from 1622 and then by the Wedderburn family in 1659. Gosford was built by the 7th Earl between 1790 and 1800, to plans by the architect Robert Adam (1728–1792), who died before the house was completed. The 7th Earl is buried in the Wemyss Mausoleum on the estate. He is the only member of the family to be buried in this building, a pyramid-style structure (because of his role as Grand Master Mason of the Grand Lodge of Scotland), that is now category A listed. The 8th Earl inherited Gosford House. The property originally included the main block with flanking pavilions and colonnades. In the 1800s, damage from the damp air, aggravated by the use of sea sand, led the 8th Earl to demolish the wings. During 1830–1840, an earlier house on the property was rebuilt beside the stables. It was subsequently demolished. In 1891, 10th Earl, rebuilt the wings to designs by the architect William Young. The south wing contains the marble hall (en.wikipedia.org - Gosford House).

 

Francis Wemyss Charteris Douglas, 8e comte de Wemyss, 4e comte de March (1772 – 1853), était un ancien ami du Roi Charles X. Un de ses petits-fils est Lord Elcho, futur 10e comte de Weymiss (Henri de Bourbon, propagande de l'étoile du peuple, 1850 - books.google.fr, en.wikipedia.org - Francis Douglas, 8th Earl of Wemyss).

 

Dehors !

 

Début 1883, le prince Napoléon (Jérôme) a été arrêté pour avoir fait placarder dans Paris un manifeste politique, avant d'être vite libéré. L'augmentation du nombre de députés conservateurs, royalistes et bonapartistes, passés de quatre-vingt-dix à deux-cents lors des élections législatives de 1885, commence à inquiéter les républicains. après les précédentes «tentatives infructueuses» (de 1883) de mettre au ban les anciens princes, la loi dite «loi d'exil» est adoptée par la Chambre des députés le 11 juin, par 315 voix contre 232 (Albert de Mun, etc.), et le Sénat, par 141 voix (dont celle de Louis Journault) contre 107 (dont celle de Jules Simon), et promulguée le 22 juin 1886 (fr.wikipedia.org - Loi du 22 juin 1886 relative aux membres des familles ayant régné en France).

 

"Gaulois de l'Hespérie"

 

"contraint" : du latin "constringere", resserrer : d'où "corpora constricta vinculis", corps chargés de chaînes (Gaffiot). On pense à Hercule Ogmios et ses fidèles enchaînés par sa parole. Hercule est l'origine des dynasties royales françaises.

 

 

L'Hercule Libyque passe par l'Espagne.

 

Le XVIe siècle représente un âge d'or pour Hercule en France, au point que M.-R. Jung a pu consacrer un livre entier à l'étude des figures sous lesquelles il a connu alors cette fortune singulière. C'est à une supercherie qu'il l'a due, d'abord, à une histoire des premiers temps du monde fallacieusement attribuée à Bérose par Annius de Viterbe. Dans ces compilations parues en 1498, le pseudo-Bérose racontait l'histoire d'Hercule de Libye, fils d'Osiris, lui-même descendant de Noé; ce héros fut l'ancêtre des Troyens et des Gaulois; on doit le distinguer de l'Hercule grec, simple pirate, et d'un «Hercules Alemannus» ancêtre des rois germains. Cette légende rencontra un succès immense parmi nous; n'accordait-elle pas aux Gaulois une ancienneté supérieure à celle des Grecs et des Romains. Lemaire de Belges la transcrit dans ses Illustrations de Gaule, nous apprenant comment Hercule, arrivant de Libye par l'Espagne, épousa chez nous «la belle Geande Galatée, royne de Gaule» dont il eut Galateus, héros éponyme de notre race (Pierre Albouy, Mythes et mythologies dans la littérature française, 2012 - books.google.fr).

 

Henri de Bourbon meurt en 1883. La branche aîné passe aux Bourbon d'Espagne (Hespérie), aux Carlistes qui sont chassés du pays.

 

Au décès du comte de Chambord en 1883, dernier représentant de la branche aînée des Bourbons issue du duc de Bourgogne, le mouvement légitimiste s'auto-dissout et disparaît de la vie politique. Une majorité de royalistes rallie alors le prétendant orléaniste, tandis qu'une minorité de légitimistes intransigeants reste fidèle à la deuxième branche aînée des Bourbons issue du duc d'Anjou, qu'elle reconnaît comme seule successible à la couronne selon le droit monarchique traditionnel (fr.wikipedia.org - Légitimisme).

 

L'histoire semble se répéter au début de la IIIe République, lorsque la troisième guerre carliste provoque un nouvel exil de réfugiés contre-révolutionnaires vers la France. Les arrivées à la frontière - encore particulièrement perméable - se multiplient au cours de l'année 1876. En mars, Le Monde illustré, un hebdomadaire très tourné vers l'international, reproduit un dessin du dessinateur franco-espagnol Daniel Vierge, qui montre l'arrivée à la frontière du prétendant don Carlos (1898-1909) et de ses troupes dans le département des Basses-Pyrénées. Les soldats carlistes doivent renoncer au port de leurs armes, ce qui illustre selon Alexandre Dupont «le passage métaphorique de la condition de soldat, acteur d'un combat, à celle de l'exilé, objet de nombreuses mesures administratives» (Delphine Diaz, Faire musée d'une histoire commune, 2019 - books.google.fr).

 

Les Ecossais d'Arcueil

 

On connaît l'étymologie fantaisiste d'Arcueil, proposée par Ronsard (Les Bacchanales, 1549) :

 

C'est toy Hercueil, qui encores

Portes ores D'Hercule l'antique nom.

 

Cette idée serait venue à Ronsard d'une ode de Dorat, Ad fontem Arculi sive Herculei pagi in agro Parisino [p. 194-197 de l'édition de 1586]. Dorat évoque aussi l'Hercule gaulois, qui manque chez Ronsard (Marc René Jung, Hercule dans la littérature française du 16e siècle: De l'Hercule courtois à l'Hercule baroque, 1966 - books.google.fr, Geneviève Demerson-Barthelot, L'attitude religieuse de Dorat, Humanistica Lovaniensia, 1974 - books.google.fr).

 

A la date de février 1757, Barbier parle dans son journal, t. IV, p. 196, d'une maison du village d'Arcueil appartenant à la communauté des prêtres écossais : il n'y a point à douter qu'il ne faille entendre le collège de la rue des Fossés-Saint-Victor, qui avait encore d'autres propriétés, dont la plus considérable, comme la première en date, était la terre de Grisy-Suines, près de Brie-Comte-Robert, dans la Brie parisienne (Francisque Michel, Les Écossais en France: Les Français en Écosse, Tome 2, 1862 - books.google.fr, Paul Arthur Nouail de La Villegille, Journal historique et anecdotique du règne de Louis XV de Edmond Jean François Barbier, Tome 4, 1856 - books.google.fr).

 

Il y a eu l'affaire des fusillés d'Arcueil, quelques dominicains soupçonnés de trahir la Commune, en 1871. Louis Adrien Lupicia, envoyé au bagne étant accusé d'y avoir été impliqué, entre dans la franc-maçonnerie en 1888, et atteint le grade de kadosh selon Taxil, grade écossais (André Combes, Commune de Paris - mars-mai 1871 - La Franc-Maçonnerie déchirée, 2016 - books.google.fr).

 

Eric Satie, compositeur français, de sang écossais par sa mère est né à Honfleur en 1866 et mort à Arcueil en 1925 (André Cœuroy, Dictionnaire critique de la musique ancienne et moderne, 1956 - books.google.fr).

 

nostradamus-centuries@laposte.net