Conclave de 1878 V,
46 1885-1886 Par chapeaux rouges
querelles & nouveaux scismes, Quand on aura esleu
le Sabinois : On produira contre luy grands sophismes, Et sera Rome lesee par Albanois. "Sabinois" : Saint Sabine A la suite du quatrain précédent, et de son aspect événementiel, il est possible de considérer un pontife pris dans le conflit de la papauté et de l'empire Hohenstaufen, puisqu'il a été cardinal de Sainte Sabine. GUY DE FOULQUES, ou GUIDO FULCODI, ou GUI-LE-GROS, cardinal-évêque de Sabine, fut un des plus célèbres de la première promotion faite par Urbain IV en 1261. Il naquit à Saint-Gilles-sur-le-Rhône, en Languedoc. D'abord sénéchal de Beaucaire, il se comporta en brave chevalier. Son père, chancelier de Raymond VII, comte de Toulouse, avait fini ses jours au fond d'une chartreuse; sa mère, que le ciel favorisait de grâces particulières, lui fit quitter la carrière des armes pour l'étude des lois. Il devint avocat, et le fameux jurisconsulte Durand le proclama le flambeau du droit. Il eût plusieurs enfants; mais, à la mort de sa vertueuse épouse, il embrassa l'état ecclésiastique et fut successivement chanoine, archidiacre du Puy-en-Velay, évêque de cette ville, archevêque de Narbonne, cardinal de Sainte-Sabine, légat en Angleterre, et pape sous le nom de Clément IV (1265-1268). La protection et l'amitié de Louis IX, qu'il avait servi avec beaucoup d'intelligence et de zèle dans diverses circonstances importantes, lui valurent de passer rapidement de l'épée et de la robe à la pourpre et à la tiare. Les splendeurs du trône pontifical ne changèrent point ses mœurs austères et désintéressées: il ne portait jamais de toile, ne mangeait jamais de viande, dormait sur la dure. Il exigea les mêmes pratiques sévères de ses filles et de ses parents (Etienne Georges, Histoire du pape Urbain IV et de son temps, 1185-1264, 1866 - books.google.fr, Charles Berton, Dictionnaire des cardinaux, contenant des notions générales sur le cardinalat, Tome 5, 1857 - books.google.fr). "scismes" A l'époque de l'élection de Clément IV. Les cardinaux étaient alors rassemblés à Pérouse et depuis six mois. Les bourgeois de la ville, apprenant que leurs hôtes allaient se séparer, faute de pouvoir conclure, s'opposèrent de force au départ, murèrent, selon toute la rigueur du mot, les issues de l'église où délibéraient les PORPORATI, et les forcèrent ainsi à une promotion. Ce fut celle de Guido Fulcadi, ce Clément IV de modeste mémoire (H. J. A. Thabaud de Latouche, Clément XIV et Carlo Bertinazzi. Correspondance inédite, 1840 - books.google.fr, Paul Lesourd, Claude Paillat, Dossier secret des conclaves, 1969 - books.google.fr). Le saint-siége vaqua 2 ans 9 mois et un jour après la mort de Clément IV (Encyclopédie théologique : Dictionnaire de statistique religieuse et de l'art de vérifier les date, 1831 - books.google.fr). "Rome" : la commune A partir de la deuxième moitié du XIIIème siècle, les papes s’absentèrent de Rome presque systématiquement, et parfois même jusqu’à ne jamais y pénétrer. En effet, les souverains pontifes tels que Urbain IV (1261-64) ou Clément IV (1265-68) ne vivèrent par exemple jamais à Rome, pour des raisons entre autre politique, et s’installèrent dans des villes comme Orvieto, Viterbe et Montefiascone (Camille Aubourg, Sur les traces des papes : le rôle des papes dans l’urbanisation de Rome du XIIIe au XVIIe siècle, 2017 - dumas.ccsd.cnrs.fr). Le gouvernement de Rome même fut contesté aux papes par l'aristocratie urbaine et régionale et plus ponctuellement par l'empereur germanique. Mais à partir de 1143, la commune romaine autonome s'avéra un pouvoir temporel rival souvent plus coriace, jusqu'à sa dénaturation par Boniface IX en 1398. Les Romains acceptaient volontiers le rôle de capitale religieuse avec les bénéfices économiques que cela induisait, mais non celui de capitale politique du pape lorsque celui-ci s'ingérait dans leurs affaires internes. Les pontifes furent donc souvent conduits à trouver leur salut dans la fuite ou à rechercher des alliés extérieurs pour se maintenir à Rome, y revenir et la contrôler : les Normands de Sicile, parfois les empereurs germaniques, puis la dynastie angevine, etc. Ces aléas perturbèrent jusqu'au XVe siècle les liens qui auraient pu s'établir par l'intermédiaire du pape entre la cité, capitale putative, et l'Etat d'Italie centrale que le Saint-Siège se constituait à grand peine. De son côté, la Rome communale, périodiquement muselée par la papauté, ne réussit pas à se hisser au rang des grandes communes italiennes dominant un contado toujours plus élargi au point de former un État à la fin du Moyen Âge, comme pour Florence, Milan ou Venise. Elle échoua à s'imposer militairement sur une grande région, à défendre la valeur de sa monnaie, à imposer sa fiscalité, etc., car elle se heurta constamment à la construction de l'État papal dans le Latium. L'affirmation d'un gouvernement communal de 1143 à 1398 constitua un obstacle majeur au développement de Rome comme capitale pontificale. Depuis la fin du XIe siècle, une nouvelle aristocratie se développait à Rome, dans le sillage de la papauté réformatrice qu'elle avait souvent soutenue (Pierleoni, Frangipani, etc.). Cette élite sociale récente, alliée à la petite noblesse et à la population, profita de l'affaiblissement et des absences de la papauté, qui luttait contre l'empereur, pour revendiquer une participation à l'administration de la ville et contester le pouvoir temporel de son évêque, tout en écartant la grande noblesse latiale, dans un contexte d'affirmation des communes face au pouvoir episcopal en Italie. En 1116-1117, une émeute imposait à Pascal II le choix du préfet. En 1143, la capitulation honorable accordée par Innocent II à la ville de Tivoli, qui avait militairement humilié les Romains l'année précédente, provoqua la révolte de la population qui mit en place un gouvernement communal sur le Capitole. On institua un sénat (l'antique collège ayant disparu vers 600), un conseil et une assemblée populaire ; un patrice se substituait au préfet papal. L'agitation se poursuivit dans un sens anticlérical dans les années suivantes à l'instigation d'Arnaud de Brescia. La commune rivalisa avec la papauté pour récupérer le passé antique légitimant : construction du palais communal (1151) sur le Capitole, création d'un ordre équestre, réparation de la muraille aurélienne (1157), protection de la colonne trajanne (1162), etc. Elle étendit progressivement ses compétences au détriment de la souveraineté papale en matière de police, de justice, de travaux publics, de fiscalité, de monnaie 8, etc. En trois quarts de siècle, sa nouvelle administration se substitua aux officiers pontificaux, non sans une certaine continuité formelle parfois (juges, bibliothécaire, préfet, etc.). Les papes luttèrent immédiatement contre le régime communal : en 1145, Lucius II fut tué lors d'un assaut du Capitole. Ils ne ménagèrent jamais leurs efforts pour contenir ce pouvoir concurrent dans leur cité et essayer de lui faire reconnaître leur souveraineté, sans parvenir à le détruire avant 1398. Les conflits aboutirent à une série de compromis de 1145 à 1188 : le pape admettait la nouvelle institution communale et participait aux dépenses urbaines, mais elle lui prêtait le serment de fidélité et lui restituait ses biens. Malgré des accrochages sous Innocent III et Grégoire IX, la paix de 1 188 permit à la curie de résider tranquillement à Rome jusqu'en 1241. La réduction du nombre de sénateurs de 56 à 1 ou 2 à partir de 1204 traduit l'alliance tactique conclue entre Innocent III et l'aristocratie romaine qui monopolisait ces plus éminentes charges communales. Grégoire IX réussit à imposer à la commune l'organisation de l'inquisition contre les hérétiques en 1231. L'excommunication et l'interdit fournissaient au pontife un moyen de pression non négligeable, tout comme le départ de la curie aux conséquences négatives sur la vie économique de la ville. Mais l'instauration de régimes populaires se révélait généralement défavorable à l'autorité papale, comme ceux de Brancaleone degli Andalo de Bologne (1252-1257), puis de son oncle Castellano (1257-1258). Débarrassé de la concurrence Staufen (1250/1268), le Saint-Siège chercha à reprendre le contrôle de la commune, mais connut bien des déboires. Charles d'Anjou se révéla un allié encombrant qui cumulait le sénat (1263-1265, 1268-1278, 1281-1284) avec la couronne sicilienne. Clément IV (1265-1268) et Clément V (1305-1314) se résignèrent à accepter des régimes populaires, alors que d'autres pontifes comme Nicolas III Orsini (1277-1280) et Boniface VIII Caetani (1294-1303) s'ingéniaient à tenir la commune en s'appuyant sur le népotisme baronnial. À partir de la bulle Fundamenta militantis Ecclesiae de Nicolas III en 1278, la charge sénatoriale fut réservée à un ressortissant romain et généralement conférée à vie au pontife régnant, qui la déléguait à un tiers de son choix (Pascal Montaubin, De l'an mil à la Renaissance : de qui donc Rome fut-elle la capitale ?, Les villes capitales au Moyen Age, 2005 - www.persee.fr). Au XIIIe siècle, Clément IV déplorait les illusions de la société romaine, incapable d’admettre la fin de son imperium («Mundi dominium subiectum sibi potius, quam ad alios translatum» (cité par Pietro FEDELE, dans «Aspetti di Roma nel Trecento», Roma, 4 (1923), p. 116)) (Cécile Troadec, Roma crescit. Une histoire économique et sociale de Rome au XVe siècle, 2018 - theses.hal.science). La plus haute noblesse, la fleur du patriciat, les Frangipani, les Colonna, les Orsini, les Cenci, les Annibaldeschi, les Gaetani, les Conti, les Crescenzi, les Pier Leoni, montés sur des chevaux richement caparaçonnés, accompagnés d'une foule innombrable de clients; enfin tout le peuple, jusqu'aux vieillards et aux infirmes, jusqu'aux enfants et aux femmes, criaient : «Vive notre sénateur ! vive le roi de Sicile! Meure Mainfroy l'hérétique, le mécréant, le sarrasin !» Ils chantaient, ils dansaient, et cette troupe, moitié procession, moitié bacchanale, vint chercher ainsi Charles d'Anjou. [...] Ensuite on lui fit revêtir la toge sénatoriale à l'église des frères mineurs d'Ara-Cœli, sur le Capitole. De là , il alla prendre ses quartiers au palais de Latran. En s'établissant dans cette demeure pontificale, il croyait faire une chose très-simple. Défenseur de l'Église, il se logeait comme un fils dans la maison paternelle. Mais Clément IV n'en fut pas moins irrité d'une prise de possession qui lui semblait un attentat. Un sénateur de Rome n'était qu'un intrus aux yeux d'un pape. Le saint-siége ne pouvait avouer son titre ni reconnaître son pouvoir. Comment admettre dans les palais pontificaux le représentant de la commune de Rome, quel qu'il fût, prince ou particulier, national ou étranger, révolté ou fidèle ? C'était admettre les droits de la république; c'était abdiquer. Clément IV reprocha vivement à Charles d'Anjou d'avoir osé occuper la patriarchie de Latran. «Il lui écrivit qu'en agissant ainsi, il avait violé les droits les plus sacrés du souverain pontificat.» Le pape n'en accusait pas la volonté du prince, mais son ignorance, et lui demandait avec une ironie hautaine s'il n'y avait pas à Rome, dans cette patrie de toutes les grandeurs et de toutes les gloires, une demeure digne de recevoir un comte d'Anjou, Il terminait en lui ordonnant de quitter sur-le-champ le palais pontifical, et d'aller s'établir ailleurs (Alexis de Saint-Priest, Histoire de la conquête de Naples par Charles d'Anjou frère de Saint Louis, Tome : 2, 1847 - books.google.fr). Sans intention blessante, il venait de faire une double offense à Clément IV, qui, oubliant une amitié ancienne, lui reprocha, d'abord l'acceptation du titre républicain de Sénateur, ensuite l'entrée avec son armure de guerre dans le palais de Latran, que profanait surtout la présence d'un représentant de la commune séditieuse de Rome. A la grande surprise de ceux qui connaissaient son caractère emporté, le prince, en fils obéissant, quitta aussitôt la résidence dont le séjour lui était interdit avec rudesse. Clément IV ne voulut pas moins le punir, et, comme preuve frappante de son ressentiment, ne consentit pas à le sacrer de sa main dans la basilique de Saint-Pierre, le 6 janvier 1266. Voulant compenser son absence, ou la rendre plus sensible, le pontife fixa cette solennité au jour de l'Epiphanie, mais en déléguant ses pouvoirs aux cardinaux; et ce fut le cardinal de Chevrières, évêque d'Albano, qui plaça la couronne des Deux-Siciles sur la tête de Charles Ier et de Béatrix de Provence, reine enfin comme ses trois sœurs. Après le couronnement, on ne pensa plus qu'à combattre. L'armée de Charles Ier, ayant franchi la frontière de Naples, fit sa première halte, le 26 février 1266, dans la plaine de Bénévent, en face du camp de Mainfroy, dont les troupes rangées en bataille l'attendaient. L'aigle des Hohenstauffen cessa de planer, les serres ouvertes, sur l'Italie. Les jours des ennemis de la Péninsule étaient comptés. On a comparé, justement, les princes de Souabe aux flots qui, dans leurs fureurs impuissantes pour envahir la terre, ont eux-mêmes amoncelé, sur les grèves de l'Océan, les digues qui doivent les refouler (Jules Gaspard Boucher de Guillerville d'Argis, Heures académiques: discours et conférences, 1876 - books.google.fr). Cf. le quatrain V, 43 : Kulturkampf. "lésée" : finances papales La victoire de Charles d'Anjou sur Manfred (Bénévent, 26 février 1266) allait soulager la papauté des graves problèmes financiers encourus pour soutenir la lutte contre les Staufen. Clément IV s'était endetté auprès des banquiers italiens, allant même jusqu'à donner pour gages à ses créanciers des propriétés foncières d'églises et de monastères romains, ainsi que de la vaisselle d'or et d'argent, joyaux de la chapelle et du trésor, ce qui ne pouvait pas ne pas soulever des problèmes de conscience, comme il l'expliqua lui-même à Charles d'Anjou dans une lettre du 2 août 1265 : «C'est le pape seul qui affronte les difficultés de l'action, qui compromet sa conscience, qui s'expose à l'infamie perpétuelle de passer pour un dissipateur des biens d'Église». Après la prise de possession du royaume de Sicile, les rapports avec Charles d'Anjou furent tout sauf pacifiques. Clément IV exigea sans succès que le nouveau roi de Sicile renonçât au titre de sénateur de Rome, pour éviter de nouveaux conflits dans la ville. Le pape accusa le roi de Sicile de violation des droits du Siège apostolique à Bénévent, d'exactions indues, de violence contre le clergé et de retard dans le paiement du cens. Par l'envoi d'une légation, il tenta d'intervenir directement dans la politique ecclésiastique sicilienne. Un tiers des évêchés du royaume fut occupé par des hommes qui lui étaient fidèles. Vis-à -vis des classes seigneuriales et dirigeantes locales, il prêcha une politique de modération, qu'il conseilla à Charles lui-même. Fort de son expérience provençale, Clément IV promulgua d'importantes constitutions relatives à l'Inquisition, que Bernard Gui contribua à diffuser par son Manuel. Le fait le plus notable concerne la torture, dont l'usage fut autorisé par le pape le 3 novembre 1265 (Histoire du christianisme: Apogée de la papauté et expansion de la chrétienté, Tome 5 : (1054-1274), 1990 - books.google.fr). "sophismes" Un sophisme est un procédé rhétorique, une argumentation, à la logique fallacieuse. C'est un raisonnement qui porte en lui l'apparence de la rigueur, voire de l'évidence, mais qui n'est en réalité pas valide au sens de la logique, quand bien même sa conclusion serait pourtant «vraie» (fr.wikipedia.org - Sophisme). Les maîtres du clergé séculier, dans la faculté de théologie, n'avaient pas désarmé depuis la violente querelle soulevée par Guillaume de Saint-Amour contre les Ordres mendiants, bien qu'elle se fût achevée par la défaite de l'implacable chanoine. Après quelques années d'un assoupissement apparent, les hostilités reprirent avec éclat. Du fond de son exil, Guillaume de Saint-Amour ne devait cesser, jusqu'à la fin de ses jours (1272), de surveiller la marche des événements et d'entretenir des intelligences avec les héritiers de son esprit à l'Université de Paris. L'avènement de Clément IV (1265) permit à Guillaume d'espérer qu'un membre de l'épiscopat français, assis sur le siège de saint Pierre, serait plus accessible à ses idées. Il lui envoya un lourd factum que le Pape désapprouva d'ailleurs, mais en des termes et sous une forme d'une modération d'autant plus méritoire qu'il s'adressait à un homme raidi contre la condamnation de 1256 (Pierre Mandonnet, Siger de Brabant et l'averroïsme latin au XIIIème siècle, Partie 2, 1911 - books.google.fr). L'Université invoque la tutelle du pouvoir séculier : les Dominicains obtiennent les faveurs spéciales du pape. Après une assez longue résistance, dans laquelle Guillaume de Saint-Amour fait entendre, au nom de l'Université, des récriminations amères contre le siége pontifical, l'institution privilégiée fait des concessions et admet dans son sein les deux plus hautes têtes du contraire parti : Bonaventure et Thomas d'Aquin (Encyclopédie nouvelle dictionnaire philosophique, scientifique, littéraire et industriel, Tome 8 : SAP-ZOR,, 1842 - books.google.fr). Selon l'avis d'un thomiste : Chez Guillaume de Saint-Amour on sent à chaque page, dans le De Periculis, dans les Collectiones, l'équivoque, l'insinuation méchante, le sophisme; on a peine cependant à trouver le défaut de la cuirasse, et à fournir la réfutation appropriée. Saint Thomas y excelle; et il faut lire en particulier à ce propos ses chapitres 20 et 22 où se trouvent dénoncés et flagellés de main de maître ces procédés déloyaux, si fréquents, hélas, dans les polémiques, qui consistent la plupart du temps à étendre à tous, les défauts et les travers qu'on a pu constater dans des cas particuliers; à affirmer sans hésitation des faits qui en réalité demeurent douteux; à inventer le mal de toutes pièces; à supprimer enfin ou défigurer le bien qu'on pourrait avoir à constater (P. Glorieux, le "contra impugnates" de Thomas d'Aquin, Etudes D'histoire Litteraire Et Doctrinale Du Moyen Age, 1930 - books.google.fr). Innocent IV, élu en 1243, poursuivi par Frédéric, le féodal impitoyable, vint se réfugier à Lyon, ville heureuse et libre sous son archevêque et son chapitre; puis il s'abrita sous les voûtes de l'abbaye de Citeaux, où saint Louis vint le visiter, lui conseillant de satisfaire l'empereur, afin de ramener la paix dans l'Église. Innocent IV répondit en convoquant un concile général à Lyon qui l'excommunia. [...] Innocent IV accorda la couleur pourpre aux cardinaux (Capellos rubros, dit Nicolas Curbiones, de Vita Innocent. IV), comme symbole de la puissance, de la majesté, et surtout comme le constant témoignage qu'on devait être toujours prêt à verser son sang pour l'Église. Au concile de Lyon, les cardinaux parurent sous cette splendide robe de pourpre qu'illustreront dans l'avenir tant de princes de l'Église. Du sein de l'Université jalouse partaient toutes les attaques et les calomnies dirigées contre les ordres prêcheurs, et un des pamphlets universitaires les plus célèbres fut celui de Guillaume Saint-Amour, sous ce titre : les Périls des derniers temps; il repose sur ce sophisme, dirigé contre les ordres mendiants: «Tous ceux qui prêchent sans une mission déterminée sont de faux prédicateurs; or il n'y a dans l'Église de mission légitime que celles des évêques et des curés : les curés tiennent la place des apôtres, les prètres celle des soixante-douze disciples. Le pape blesserait sa propre dignité, s'il accordait le droit de prêcher et d'enseigner à des hommes qui ne dépendent à aucun degré de la hiérarchie régulière. L'attaque était dure et bien injuste contre l'ordre des prêcheurs, et le livre des Périls des derniers temps fut formellement condamné par le souverain pontife Alexandre IV, successeur d'Innocent IV. Le pontificat d'Urbain IV, son successeur, fut marqué par la bulle qui institua la fête du Très-Saint-Sacrement de l'autel L'élection d'Urbain IV est de 1261. La bulle pour la fête du Saint-Sacrement est de 1264, sur sa demande expresse, saint Thomas d'Aquin composa les proses et les hymnes sublimes pour cette fète, tout entière destinée à honorer Dieu dans l'Eucharistie. Son successeur, Clément IV, continua sa protection aux ordres mineurs, et ces religieux si actifs, si savants, méritaient bien cette protection spéciale. Les annales de Baronius ont rapporté que frère Roger Bacon, souvenir scientifique, présenta au pape un plan de réformation de l'ancien calendrier (1267). L'entraînante affection des papes pour les ordres mineurs s'explique par ce noble attrait qu'inspirent les études et les services; les ordres sédentaires et cultivateurs n'offraient rien de comparable à cette activité féconde des frères de saint Dominique et de saint François pour le développement du catholicisme (Jean Baptiste H.R. Capefigue, L'Église au moyen âge du VIIe au XVe siècle, 1852 - books.google.fr). Roger Bacon, né vers 1220 à Ilchester ou Bisley et mort vers 1292 à Oxford, surnommé Doctor mirabilis («Docteur admirable») en raison de sa science hors du commun, est un philosophe, savant et alchimiste anglais. Il est considéré comme l'un des inventeurs de la méthode scientifique. Pour Bacon, «aucun discours ne peut donner la certitude, tout repose sur l'expérience», expérience scientifique ou religieuse. Il est le premier dans le monde occidental à mettre en question des enseignements d'Aristote, observations à l'appui. Il compose sa Summa grammatica et deux traités de logique : Summa de sophismatibus et distinctionibus et Summulae dialectices. En 1265, à l'avènement du pape Clément IV (Guy Foulques), qu'il connaissait bien depuis 1263 et qui l'avait en grande estime, sa recherche s'accéléra. Dès juillet 1266 le pape lui demanda de lui envoyer ses travaux, malgré les interdits des constitutions de Narbonne, et en secret. Roger Bacon rêvait d'une université parisienne fondée sur la connaissance non seulement d'Aristote, d'Avicenne et d'Averroès, mais encore des sciences arabes — auxquelles il se sentait profondément redevable — et des langues arabes. Il envoya au pape une lettre dédicace qui expose son programme (Epistula ad papam Clementem IV ), puis trois projets de somme philosophique et scientifique : Opus minus (1265), Opus majus (1268), Opus tertium (1270), mais aussi le De speculis comburentibus (Sur les miroirs ardents), quelques opuscules sur l'astrologie et l'alchimie. Après la mort de Clément IV (novembre 1268), ses écrits furent en butte à des rétorsions. En mars 1277, l'évêque de Paris, Étienne Tempier, interdit 219 thèses philosophiques ou théologiques, interdiction qui concernait en partie Roger Bacon. Le maître général des franciscains, Jérôme d'Ascoli (futur pape Nicolas IV en 1288), condamna ses travaux vers novembre 1277 et interdit son œuvre chez les franciscains (fr.wikipedia.org - Roger Bacon). La Summa Grammatica est en fait une collection de sophismes grammaticaux, fort proche de celle de R. Kilwardby (Christine Brousseau-Beuermann, Les Quaestiones de Johannes de Wolve et les Sophismata artis grammaticae du MS Paris, Bibl. nat. lat. 15037, Gilbert de Poitiers et ses contemporains: aux origines de la logica modernorum, 1987 - books.google.fr). Cf. pour le pape Urbain IV les quatrains VI, 85 (Institution de la fête dieu); VIII, 20 (Miracle de Bolsène). Typologie Le report de 1886 sur la date pivot 1265 donne 644. Le chartulaire Maurice appuie l'armée stationnée à Rome dans la demande de paiement de sa solde au pape Séverin (mort en 640 ayant régner 2 ans), successeur d'Honorius.
Sans réponse, elle pille le palais du Latran. Maurice soulèvera en 643 l'armée byzantine d'Italie pour usurper le pouvoir impérial
(Jean Le Sueur, Histoire de l'Eglise et de l'Empire: oĂą depuis la naissance de Jesus Christ jusques Ă l'an 326, Tome 6, 1686 - books.google.fr,
Jean Durliat, Dominium et puissance sociale des papes au VIIe siècle, Aux sources de la gestion publique, Tome 3 : Hommes de pouvoir "Sabinois" Au conclave de 1878, à l'issue du premier tour, qui eut lieu le matin du 19 février, trois cardinaux se distinguent : Gioachino Pecci 19 votes, Luigi Bilio 6 votes, Alessandro Franchi 4 votes. Au deuxième tour (après-midi du 19 février) Pecci 26, Bilio 7, Franchi 2. Et enfin au troisième tour Pecci, le futur Léon XIII est élu. Le Sabinois serait alors Luigi Bilio, évêque de Sainte Sabine, né à Alexandrie au Piémont en 1826, élu en effet au premier et deuxième tour, mais qui ne sera pas pape, et mort le 30 juin 1884. Les mauvaises langues de la Curie affirmaient même que le pape vieillissant avait nommé Pecci camerlingue c'est-à -dire en charge de l'organisation du futur conclave - pour la seule raison que, traditionnellement, le camerlingue n'est pas papabiles ! Le vénérable pontife, sentant sa fin venir, avait préparé autrement sa succession. Son poulain était le cardinal Luigi Bilio, le principal rédacteur du Syllabus, qui aurait, à coup sûr, prolongé sa politique ultra-conservatrice. Mais «qui entre pape au conclave en ressort cardinal», dit un célèbre dicton romain pour signifier que l'élu n'est jamais celui auquel on s'attend. Le désir collectif, jusqu'alors refoulé, de sortir l'Église de son superbe isolement, emplit la chapelle Sixtine et balaya très vite l'hypothèse Bilio. Aux yeux des cardinaux électeurs, il était temps de réconcilier la papauté et le reste du monde, et c'est Pecci qui en paraissait le plus capable (Bernard Lecomte, France-Vatican: Deux siècles de guerre secrète, 2024 - books.google.fr). Le Saint-Siège n'a pas voulu qu'il fut permis d'opposer aux doctrines définies par l'Encyclique et le Syllabus le sophisme des distinctions captieuses ni l'opiniâtreté de l'esprit de secte (Etudes religieuses, philosophiques, historiques et littéraires, Volume 4, 1873 - books.google.fr). "scismes" Léon XIII dut faire face au modernisme ("nouveaux scismes") comme son prédécesseur Pie IX sous la forme de l'américanisme. On appelle généralement américanisme un mouvement d’idées qui se développa dans l’Église catholique romaine des États-Unis, à la fin du XIXe siècle. Allant dans un sens libéral et progressiste (liberté de conscience, nouvelles relations avec les autres religions, engagement politique, vertus actives plutôt que passives) il cherchait à adapter l’enseignement de l’Église à la culture et société moderne américaine. Érigé en «doctrine» ce mouvement fut condamné par Léon XIII dans sa lettre apostolique Testem Benevolentiae du 22 janvier 1899, sans que le terme d'américanisme ne soit employé. La condamnation fait peu de bruit aux États-Unis, une grande partie du peuple catholique et même de son clergé n’étant pas même au courant de la controverse. Mais la lettre Testem Benevolentiae est utilisée en France par l’aile conservatrice de l’Église catholique pour renforcer son influence et opposition au "ralliement" à la République (fr.wikipedia.org - Conclave de 1878). "Rome lésée par Albanois" Carlo Luigi Morichini, cardinal-évêque d'Albano ("Albanois"), qui pendant de nombreuses années a été considéré comme l'un des candidats admissibles au pontificat parmi les cardinaux du parti modéré, a été encore considéré ainsi au conclave de 1878, malgré son mauvais état de santé, surtout que l'on recherchait un pape de transition. Les finances pontificales n'ont jamais brillé par une trop grande clarté, non plus que par une éblouissante prospérité. D'après le résumé officiel des recettes et dépenses des années 1814 à 1846, présenté en 1847 par Mgr Morichini, alors ministre des finances, aucun exercice depuis 1828 n'avait clos sans déficit. [...] M. Angelo Galli, le successeur de Morichini, disait dans une «relation» officielle : «Beaucoup de registres ne sont pas arrêtés; les listes des dépenses ne peuvent pas être retrouvées, et les listes des dépôts sont très-mal gardées. En général, les registres sont surchargés de changements, d'additions et de soustractions qui ne permettent pas de vérifier les comptes en les confrontant. D'énormes sommes restent à liquider aux caisses camérales; il n'existe pas de décharge régulière au sujet des livres de caisse; on sait que, depuis 1837, d'importants documents manquent aux administrations du Trésor.» Cette singulière organisation du service financier pouvait bien se continuer sans causer d'embarras trop graves, tant que Rome n'avait pas besoin de compter, parce que l'argent de toute la chrétienté y affluait par un nombre infini de canaux. [...] A mesure que les progrès des lumières ou de l'indifférence dans le dix-neuvième siècle firent tarir de plus en plus les ressources jadis inépuisables que le Trésor pontifical avait trouvées dans la piété de l'Europe, l'anarchie qui continuait de plus belle dans la gestion financière devait avoir des effets plus sensibles, plus graves; la permanence du déficit, telle que nous venons de la constater pour l'époque qui précédait l'avénement de Pie IX, n'a alors rien que de très-naturel. L'exercice 1847 laissait encore un déficit de 1,341,168 scudi, et on s'attendait à pour le déficit pour le moins aussi fort pour 1848. Ce fait seul suffirait pour réfuter à priori l'hypothèse qui voudrait rejeter sur le gouvernement républicain des années 1848-49 toute la responsabilité du désordre et des embarras dont souffrent encore les finances pontificales (J.-E. Horn, Finances pontificales, Journal des économistes: revue mensuelle de la science économique et de la statistique, Volume 35, 1859 - books.google.fr). Acrostiche : PQOE, P. QOE P. : Petrus et QOE : questione (Alphonse-Antoine-Louis Chassant, Dictionnaire des abreviations latines et francaises, 1846 - books.google.fr). Si Pierre fut à Rome... Le fait que pape soit le successeur de Pierre n'en fait pas le tuteur du pouvoir politique. Dante réfute un à un comme autant de sophismes les raisonnements spécieux employés par la papauté. Si le fondement de l'Église est la parole divine, le fondement de l'empire est le droit humain. L'Église n'est nullement habilitée à recevoir des biens temporels et Dante réfute comme une usurpation la donation de Constantin. L'argumentation de Dante est à la fois logique et théologique et c'est sur cette seule base qu'il montre que cette donation est impossible - ne serait-ce que parce que l'empereur est le gardien et le ministre de l'Empire et nullement son propriétaire qui en pourrait disposer comme d'un bien lui appartenant. Conclusion radicale : Nous ne disons pas en effet : «l'Empereur et le Pape» ni l'inverse. Et l'on ne peut pas dire qu'ils communiquent au sein de l'espèce puisque autre est la définition du Pape, autre est la définition de l'Empereur en tant que tels (De monarchia, Livre III) (Denis Collin, Comprendre Machiavel, 2008 - books.google.fr). Abordons enfin la question, qui pourrait au besoin suppléer toutes les autres. Demandons-nous si le Syllabus est une définition infaillible du Vicaire de Jésus-Christ (Etudes religieuses, philosophiques, historiques et littéraires, Volume 7, 1875 - books.google.fr). Comment ! Un prince se croira non pas le sujet, mais l'égal du Pape, alors même qu'il s'agit d'intérêts religieux ! Et ce sera le souverain temporel qui, en face du Pape, garantira leurs droits aux catholiques ! Mais, où en sommes-nous donc arrivés ? Ce n'est donc pas à Pierre seul, mais à Pierre et à Tibère que Jésus-Christ a confié le soin de paître ses agneaux! Et c'est Tibère tout aussi bien que Pierre qu'il a chargé de pourvoir aux intérêts religieux du peuple catholique ! Tous deux jugeront, et au même titre, ce qu'il faudra entreprendre pour le salut des âmes; et tous deux seront les interprètes de la loi évangélique ! (Maurice de Bonald, Deux questions sur le concordat de 1801, 1871 - books.google.fr). Le Syllabus de Pie IX ou Syllabus des erreurs est un syllabus publié par le Saint-Siège en 1864. Il porte le sous-titre «complectens præcipuos nostræ ætatis errores» («renfermant les principales erreurs de notre temps») et forme un recueil de 80 questions exposées et tranchées par le pape Pie IX. Il est rédigé pour accompagner son encyclique Quanta Cura, et publié le 8 décembre 1864. Face à l'émergence du catholicisme libéral au début des années 1860, et en réaction au positivisme comme à l'évolutionnisme, le Syllabus fait un le catalogue des 80 propositions qu'il juge fautives. Il y condamne le socialisme, l'indifférentisme, le libéralisme, le rationalisme, la liberté de conscience et la liberté des cultes, notamment, tout en réaffirmant le pouvoir temporel du pape. Il est notamment considéré comme une condamnation de la séparation de l'Église et de l'État (fr.wikipedia.org - Syllabus de Pie IX). |