La conjuration d’Amboise I, 7 1562-1563 Tard arrivé, l'execution
faicte : Le vent contraire : letres
au chemin prinses : Les conjurés xiiij
d'une secte : Par le Rousseau senez
les entreprinses. 14 1560. Mars. Le roy fait un édit par lequel il donne congé aux luthériens
de sortir de partout. En ung mardy
fut faiste une procession Ă cause d'aulcuns qui voloyent mal au roy. En ce temps
furent exécutés quatorze hérétiques envyron qui voloyent mal au cardinal de Lorrayne,
dont il y avait un gentilhomme auquel le chastiau fut
râsé. En ce moys fut escartelé un capitaine nommé M. de Maziles, son chastiau râsé, à cause qu'il recevoit des luthériens qui portoient
les armes contre le roy. les
aultres disoient contre M.
le cardinal. En ce temps furent appellés huguenots.
Le chastiau estoit Ă trois
lieues près d'Amboise. M. de Mazeres (Maziles) est un des
principaux affidés de la conjuration d'Amboise, dirigée par la Renaudie Amboise En mars 1560, la tentative avortée d'enlèvement du jeune
roi François II, connue sous le nom de «Tumulte d'Amboise», révéla tragiquement
l'exacerbation des tensions entre Catholiques et Protestants français. Soumis
aux dures contraintes de ledit d'Écouen depuis l'année précédente, les Réformés
de France avaient vu avec crainte augmenter la puissance de leurs plus
farouches ennemis, le duc de Guise et son frère le cardinal de Lorraine, oncles
par alliance du nouveau souverain. D'où cette tentative désespérée de
soustraire le royal adolescent à leur tutelle, qui ne déboucha que sur une
répression à grande échelle contre les fidèles calivnistes
[...]. Après la mort d'Henri II, en juillet 1559, le duc François de Guise et
son frère Charles, cardinal de Lorraine, assurèrent la direction effective des
affaires du royaume, profitant de l'influence de leur nièce Marie Stuart sur
son royal époux, le jeune François II. Cette toute-puissance des Guise,
champions de la cause catholique, s'exerça vite aux dépens des Protestants
français. La nomination du modéré Michel de L’Hospital
comme chancelier de France et la promulgation de l'Édit d'Amboise amnistiant
les crimes d'hérésie, le 2 mars 1560, ne purent empêcher une nette montée des
tensions interreligieuses. Quelques Réformés exaltés projetèrent de soustraire
le roi à la pernicieuse tutelle des Guise. À la tête de la conjuration se
trouvait un gentilhomme périgourdin, Godefroy du Barry seigneur de La Renaudie, qui réunit autour de lui un grand nombre de
nobles protestants. Or, dès le 12 février, leur plan avait été dévoilé par un
traître. Installant le roi à Amboise, les Guise préparèrent une nasse et les
conjurés furent arrêtés au fur et à mesure de leur arrivée aux alentours du
château, entre le 10 et le 16 mars 1560. Dès le 17, on exécuta publiquement les
prisonniers, dĂ©capitĂ©s ou pendus aux crĂ©neaux du château. La Renaudie fut capturĂ© deux jours plus tard et condamnĂ© Ă
l'écartèlement. Une répression brutale s'ensuivit, les Guise ayant beau jeu de
présenter l'ensemble des Huguenots du royaume comme des séditieux. On soupçonna
le prince Louis de Condé d'être la véritable âme du complot : condamné à mort,
il ne dut la vie sauve qu'à la mort du roi en décembre 1560, qui marqua la fin
du pouvoir absolu des Guise. Choqué par ces tragiques événements Ronsard avait
composé sur-le-champ une élégie adressée à Guillaume des Autels, un proche des
Guise, qui avait condamné la tentative huguenote dans une Harengue au peuple françois contre la rébellion.
[...] Pour l'heure, Ronsard prône encore la modération à l'égard du Réformé,
souhaitant «par livres l'assaillir, par
livres luy respondre» Le témoignage de Ronsard, fervent partisan des Guises,
hostile Ă la RĂ©forme, en faveur de Nostradamus a sa valeur. Ne suffirait-il pas
de rappeler les louanges de Ronsard en 1560 envers Nostradamus - “Ayt de Nostradamus l’enthousiasme excité” - pour comprendre
que celui-ci ne saurait être soupçonné d’avoir annoncé la défaite des Guises ?
Comme l’écrit Liliane Crété : “Ronsard, toute sa vie,
fut l’homme d’un clan : il avait été tout Châtillon, il était maintenant tout
Guise”. Au vrai, de quel Ronsard s’agit-il ? On tranchera assez vite : ces
louanges apparaissent précisément dans l’Elégie à Guillaume des Autels
consacrée, en son titre, aux troubles d’Amboise "lettres prises en chemin" Quelque temps après, on
découvrit, par des lettres interceptées, ce qu'on avoit
soupçonné jusqu'alors, que le prince de Condé étoit
le chef muet des calvinistes, qu'il avoit été l'ame de la conjuration, et qu'il en tramoit
une nouvelle. Le duc de Guise couvrant du secret le plus profond la découverte
qu'il venoit de faire, attira le prince à Orléans, où
étoient convoqués les états du royaume. Condé, en
arrivant, alla présenter ses respects au roi qui, après avoir entendu son
compliment avec froideur, lui déclara qu'il étoit accusé
d'avoir formé des complots contre l'état et contre sa personne. Condé, sans
laisser apercevoir aucune altération sur son visage, répondit que cette
accusation étoit une calomnie, et que s'il plaisoit à Sa Majesté de lui produire ses dénonciateurs, il
se faisoit fort de les convaincre d'imposture. Il est
juste, répondit le roi, que vous soyez entendu dans vos défenses. A ces mots,
il sortit et donna ordre d'arrêter le prince; ce qui fut exécuté sur-le-champ.
On instruisit le procès dans les formes, et le crime se trouva si manifeste,
que les juges ne purent se dispenser de prononcer la sentence de mort. Ce
prince coupable alloit finir sa vie par la main du bourreau , lorsque François II, infirme dès l'enfance,
mourut dans la dix-huitième année de son âge, laissant la cour et le royaume en
proie à des factions qui devoient bientôt dégénérer
en guerres cruelles "Tard arrivé" Les conjurés qui avaient mis leurs dernières espérances dans les opérations de La Renaudie, regardèrent sa mort comme le coup le plus affreux d'un sort fatal. Ils n'avaient plus de ressource d'aucune façon ni pour vaincre, ni pour éviter les supplices qu'on leur préparait. Semblant encore animés par l'esprit de leur chef, ils résolurent tout à coup de tenter une dernière entreprise, et de se perdre tout-à -fait ou de triompher. Ils se rallièrent aux capitaines Coqueville, des Champs, Chandieu et surtout La Motte, qu'ils reconnurent pour chef. Leur projet était d'investir le château d'Amboise, et d'y affamer la cour en donnant le temps de s'avancer aux troupes éloignées. Le retard d'un des conjurés empê-cha peut-être seul que ce dernier effort du désespoir ne réussît. Chandieu arriva trop tard et en plein jour; ses soldats qui avaient tous des écharpes blanches furent reconnus. On cria aux armes ; des soldats furent mis aux portes d'Amboise qu'on ferma; beaucoup de conjurés furent pris; beaucoup d'autres se sauvèrent (Hortense Allart de Méritens, Conjuration d'Amboise, 1822 - books.google.fr). C'était la compagnie rassemblée entre Orléans et Blois par le capitaine Bertrand de Chandieu et que sans doute attendait Condé. Elle arrivait en retard d'une heure ou deux. Les jours précédents, tandis qu'on arrêtait les lieutenants de La Renaudie à Noizay et que les troupes royales étaient occupées à rompre les bandes de pauvres piétons cachées dans les bois, un groupe de capitaines, dépendant non plus, semble-t-il, de La Renaudie, mais de Condé lui-même, avait mis sur pied un autre plan. Sous le couvert peut-être de Maligny, guidon du prince, un capitaine La Mothe avait introduit dans la ville quelques mercenaires étrangers pour former, avec les protestants du lieu, une bande de cent à cent vingt hommes prête à surprendre le château au moment voulu , pendant que Chandieu l'attaquerait du côté du pont. Deux autres capitaines, Cocqueville et Des Champs, logés secrètement au faubourg, devaient s'emparer du pont et ouvrir la ville à Chandieu, dans le nuit du 16 au 17. Mais le duc de Guise, se trouvant cette fois en présence d'une attaque militaire, avec des ennemis bien caractérisés, et non plus dans l'atmosphère trouble d'une conspiration menaçante, retrouva toutes ses qualités de chef. Il n'oublia pas de placer Louis de Condé à l'une des portes du château, mais prit la précaution de lui adjoindre son propre frère, François, grand prieur de France. Il divisa les forces dont il disposait en deux groupes. L'un attaqua de front les cavaliers de Chandieu, l'autre, dont il prit la tête, fit un mouvement tournant et prit l'ennemi de flanc. Quoi voyant, les écharpes blanches s'enfuirent. A part quelques tués et deux ou trois prisonniers, toute la troupe de Chandieu s'échappa, grâce à la vitesse de ses chevaux. On ne sut jamais exactement où s'était formée cette troupe ni de quels éléments elle se composait. Dans leur poursuite, les cavaliers du roi ramassèrent un certain nombre de piétons, dont plusieurs avaient été déjà pris et relâchés la veille. Parmi eux se trouva le sieur de Villemongis, de la maison de Bricquemault en Angoumois. La journée fut remplie d'épisodes tragiques. Sur le soir, le comte de La Mirandole, le capitaine Ottavio Fregose, le jeune sieur de Bueil et d'autres cavaliers italiens et français couraient la campagne du côté de Tours. Ils rencontrèrent une troupe de dix conjurés à pied qu'ils emmenèrent au Montil. Ayant appris de ces gens que trente de leurs compagnons se cachaient près d'un village voisin, ils y allèrent, tuèrent une sentinelle et tombèrent à l'improviste sur les malheureux qui dormaient dans une chaumière. Réveillés à coups d'arquebuses, les «rebelles» se défendirent désespérément, puis comme cinq des leurs étaient tués et que l'ennemi mettait le feu à leur abri, ils se rendirent. Mais, au milieu de cette scène nocturne, l'un des plus farouche se jeta de plein gré dans le feu, et y périt à l'effroi de ses compagnons (Lucien Romier, La conjuration d'Amboise : l'aurore sanglante de la liberté de conscience [et] le règne et la mort de François II, 1923 - books.google.fr). "Rousseau"
L'épithète
rousseau (cf. CXXXIV, CXLV, CLVIII), signifie
traître, comme le dit Brantôme (Œuvres complètes, éd. L. Lalanne, Paris, 1 864- 1 882, IV, p. 288). Mais le sort qui
attend ceux qui, comme Renart, sont rousseaux, est proverbial Renard(e) n. Also reniarde, renaud(e), reinard(e), rainard. [OF renart, renarde, regnart & renaut, renaud] Il semble que le rousseau de Magny soit Carlo Carafa (ou Carlo Caraffa), né le 29 mars 1517 à Naples et mort le 6 mars 1561 à Rome, est un cardinal italien, neveu du pape Paul IV, et le fils de Jean Alphonse Carafa, comte de Montorio. Son oncle le cardinal Gian Pietro Carafa fut élu pape en 1555 sous le nom de Paul IV. Celui-ci combla sa famille d'honneurs et de biens : il éleva Carlo, qui n'était pourtant pas un religieux, à la pourpre cardinalice et il dépouilla pour l'enrichir lui et son frère les puissantes familles Colonna et Guidi; le pape soutint même à cause d'eux une guerre contre Naples et l'Espagne, mais en 1559, peu avant sa mort, les plaintes concernant leur rapacité et leurs injustices le forcèrent à les exiler de Rome ainsi qu'à leur ôter leurs dignités. Son successeur, Pie IV, ennemi personnel des Carafa, poussa plus loin le châtiment : en 1560, le cardinal Carlo Caraffa fut condamné à mort et étranglé dans sa prison; son frère, Giovanni Carafa, soupçonné d'avoir fait assassiner sa femme, eut la tête tranchée; le cardinal Alfonso Carafa, fils d'Antoine, fut soumis à une amende de 100000 écus; enfin le sénat romain abolit par décret la mémoire des Carafa. En 1566 Pie V fit réviser leurs procès et les réintégra dans leurs titres et honneurs (fr.wikipedia.org - Carlo Carafa (1517-1561)). Signalons seulement que Renart est installé dans la longue galerie des traîtres, aux côtés de Judas, prototype de tous les félons et évidemment porteur de cheveux roux; Renart lui-même est une fois qualifié de nouveau Judas, à propos du baiser de paix qu'il voulait échanger avec la mésange dans la branche V.a du Roman de Renart (1174-1177), 761 : Quant il au baisier l'asaili Comme Judas qui Deu traï. A l'article "rousseau" du dictionnaire de Furetière (édition de 1690) : "Qui a le poil roux. On tient que Judas était rousseau : c'est pourquoi on hait beaucoup les rousseaux". On le voit, Furetière installe franchement le préjugé en certitude (Roger Bellon, Renart li rous : remarques sur un point de l’onomastique renardienne. Les couleurs au Moyen Âge, Presses universitaires de Provence, 1988 - books.openedition.org). Ici on prendra le rousseau pour un renard traître. Pierre des Avenelles Le chef apparent
de la conjuration d'Amboise, dont le prince de Condé, malgré ses désaveux constans, passa pour être le chef réel, La Renaudie (Jean
ou Godefroid de Barry, gentilhomme périgourdin) jouissait de la réputation d'un
brave capitaine: Belleforest le cite comme l'un des
hommes les plus éloquens du royaume. Un procès qu'il'eut à soutenir relativement à la possession d'un
bénéfice, et dans le cours duquel il commit un faux, compromit son honneur et
sa vie. Le duc de Guise ayant favorisé son évasion, La Renaudie
s'enfuit à Genève, où il embrassa le calvinisme. Ensuite il parcourut
l'Allemagne et les Pays-Bas pour établir des rapports entre les notabilités du
parti protestant. Mais voyant qu'au zèle religieux il fallait joindre des
motifs d'intérêt et d'ambition pour imprimer un mouvement actif à leur cause,
il voulut rentrer en France, et le duc de Guise lui en rouvrit
l'accès en lui procurant des lettres de révision. Au lieu de songer à son
procès, La Renaudie ne s'occupa que d'abattre la
puissance des Guises, persécuteurs du calvinisme. Quand il crut pouvoir compter
sur le dévoûment et la discrétion d'un certain nombre
d'hommes influens, il leur développa un plan de
conspiration, qu'ils adoptèrent. Une consultation rédigée à Genève décida que,
sans blesser sa conscience, ni manquer à la majesté royale, il était loisible
de recourir Ă la force pour soustraire le roi Ă la domination des Guises. Les
conjurés se réunirent à Nantes le 1er février 1560 : La Renaudie
les harangua dans un discours que de Thou nous a conservĂ© : puis il vint Ă
Paris, avec l'autorisation de lever cinq cents cavaliers et quinze cents
fantassins. Il logea chez un avocat nommé Avenelles,
auquel il se confia, et qui le trahit par timidité. La cour, avertie du
complot, quitte Blois, ville sans défense, pour se rendre à Amboise. Les
conjurés s'y rendent aussi par détachemens, afin
d'exciter moins de soupçons; mais à mesure qu'ils arrivent, on s'empare de leur
personne ; le duc de Nemours les fait jeter dans les
prisons de la ville, ou pendre aux créneaux du château, selon qu'il en attend
ou non de nouvelles lumières. Instruit de ce désastre, La Renaudie
se dispose Ă attaquer Amboise et Ă l'enlever de vive force. Il traversait la
forêt de Château-Renaud, lorsqu'il est rencontré par le jeune Pardaillan, son cousin, qui court sur lui le pistolet à la
main. La Renaudie saute Ă bas de son cheval, et
renverse le jeune homme de deux coups d'épée; mais Un page de Pardaillan l'étend mort d'un coup
d'arquebuse sur le corps de son maître. Le cadavre de La Renaudie,
rapporté à Amboise, fut attaché à une potence, avec cette inscription : La Renaudie, dit Laforêt, chef des
Rebelles Mézerai prétend que des Avenelles ne découvrit la conjuration que dans l'espoir d'en tirer une grande récompense. Je dois faire observer que les historiens les plus estimés, tant catholiques que calvinistes, et que Mézerai a dû lire, n'attribuent point à un pareil motif la révélation du complot. Cependant il est vrai de dire que les écrivains huguenots ont dit beaucoup de mal de des Avenelles, et l'ont accusé de trahison envers le Calvinisme qu'il professait. Régnier de la Planche prétend qu'il était pauvre, avare et ambitieux. Mais de Thou en donne une idée bien différente; il dit que c'était un avocat assez habile dans sa profession, et qu'ayant horreur d'une entreprise qui lui parut inouïe et d'un dangereux exemple, il découvrit la conjuration plutôt par des motifs de conscience que dans la vue d'un vil intérêt (Roisselet de Sauclières, Histoire du protestantisme en France, et principalement a Nismes et dans le Bas-Languedoc, Tome 4, 1839 - books.google.fr, Charles Paillard, Additions critiques à l'histoire de la conjuration d'Amboise, 1880 - books.google.fr). On connaît un Des Avenelles avocat à Paris. Calviniste, il fut emprisonné lors de la conjuration d'Amboise. Est-ce le même que le traducteur ? L'identification n'est pas certaine (DBF). Philippe des Avenelles a mis en français : PLUTARQUE, Abregé des vies de LIV notables et excellens personnaiges, tant grecs que romains, 1558 et APPIEN, Deux livres «l'Espagnole et l'Annibale» ajoutés aux onze livres jadis traduits par Claude de Seyssel, 1560 (Paul Chavy, Traducteurs d'autrefois, Moyen Age et Renaissance: dictionnaire des traducteurs et de la littérature traduite en ancien et moyen français (842-1600), Tome 1, 1988 - books.google.fr). Les réformés de Paris appartenaient à plusieurs tendances. Le jurisconculte Du Moulin devait se distinguer par sa résistance à la discipline ecclésiastique «à la genevoise». Il se déclara luthérien et, dans «Défense... contre les calomnies» (1565) il leur reprocha d'avoir retranché maître Pierre Perrucelli «seulement pour avoir dit que la confession d'Auguste estoit bonne et sainte». En outre, il blâmait leur indépendance vis-à -vis de l'Etat, qu'ils risquaient de ruiner. Peut-être Pierre des Avenelles partageait-il les opinions de Du Moulin et voulut-il préserver l'Etat. En outre, le cardinal de Lorraine tentait un rapprochement avec les luthériens, ce qui a pu l'inciter à lui révéler ce qu'il savait. Au colloque de Poissy, ce cardinal se servit de la Confession d'Augsbourg pour mettre Théodore de Bèze en difficulté. Aux conférences de Saverne (14-18 février 1562), il chercha un terrain d'entente avec le duc Christophe de Würtemberg à partir de cette Confession. Néanmoins il y eut aussi chez les Des Avenelles une attirance pour le service de l'Etat, conforme à leurs intérêts. Dans la clientèle du cardinal de Lorraine, on trouve un autre membre de cette famille un peu plus tard, Philippe des Avenelles, lettré lui aussi, ayant publié en 1560 une traduction d'Appien, «Des guerres des Romains», qui faisait sa cour à ce puissant personnage. Le 7 juillet 1569, il lui écrivit une lettre flatteuse, vantant sa bonté et sa libéralité et il plaidait sa propre cause, qu'il aurait voulu voir recommander par l'archevêque de Sens, c'est-à -dire par Nicolas de Pellevé, plus tard ardent ligueur. En octobre de la même année, Charles IX lui attribua un office de conseiller au parlement de Rennes, dont Jean de Grosmenil venait d'être privé pour fait de religion. Louis des Avenelles, qui fut peut-être frère, ou du moins proche parent de Pierre et de Philippe, s'orienta aussi vers le service de l'Etat. Il fut député du tiers état pour le bailliage de Valois aux premiers états généraux de Blois. A partir de 1578, il appartint aux gens de conseil de Catherine de Médicis, avec 10 livres de gages, ce qui était symbolique, mais qui lui donnait de l'influence, et il y était encore en 1585. Il côtoya là des avocats et surtout des magistrats des cours souveraines de Paris (E. Molé, N. de Verdun, B. Brisson, A. de Harlay, etc.). A ce titre, il participa à la gestion des biens de la reine mère, qui avait en jouissance le duché de Valois et il obtint d'elle des avantages pour Crespy : siège d'une élection et juridiction du grenier à sel. [...] A l'inverse de Pierre et de Philippe des Avenelles, mais la Saint-Barthélemy dissipa certaines illusions, Laurent Bouchel fut un adversaire déterminé de la maison de Lorraine-Guise. Son beau-père Louis des Avenelles [second mari de sa mère], en prenant du service auprès de Catherine de Medicis, partagea sans doute ses vues politiques : maintenir l'Etat en évitant qu'il ne fût dominé par l'un des grands clans nobiliaires, qui s'affrontaient alors, prenant la religion comme prétexte de leurs luttes. Son journal, si discret qu'il soit, traduit ces options. En 1577, il y a inséré un prétendu discours fait par Henri III devant les états généraux, qui lui sembla un faux, colporté par les guisards : «A la verité ne ressentant rien de la grandeur et Majesté du Roy de France ny de l'eloquence du Roy Henry III. Je croy que cest escrit a esté dressé par quelque couille de Lorraine en son coing de taverne». La violence de la politique de la maison de Guise lui inspira des notes passionnées sur le décès de certains de ses membres. Comme ses contemporains, il croyait à l'intervention constante de Dieu dans les affaires du monde terrestre. La nature se déchaînait quand des personnalités, qui avaient engendré la guerre, venaient à mourir. Relatant la mort du cardinal de Lorraine à Avignon le 23 décembre 1574, il affirma que la fièvre dont il mourut avait tourné en frénésie. Une terrible tempête s'éleva quand il rendit l'esprit, enlevant des tuiles sur les toits et arrachant des treillis de fer au couvent des chartreux. Une vingtaine d'années plus tard, il décrivit de même la mort de la duchesse de Montpensier, nièce du cardinal, «l'une des mères nourrices de la Ligue. Et encores que la journée eust esté froide, néantmoins il se fit de grands vents, esclairs et tonnerres» (6 mai 1596). Jeune, L. Bouchel avait choisi son camp politique : celui de la monarchie, se tenant loin des extrémistes et ayant un caractère résolument national. Sans le dire clairement, il a vu d'un bon œil les entreprises aux Pays-Bas du duc d'Alençon et d'Anjou et il a inséré de nombreux documents les concernant dans son journal . Mentionnant son décès (10 juin 1584), il a remarqué que la Ligue qui, depuis plusieurs années, n'avait pas osé prendre les armes, fit aussitôt courir pasquils et édits séditieux. En fait, Bouchel fut pleinement du côté de Henri III quand il s'opposa à la Ligue. Relatant la séance au cours de laquelle le roi annonça au parlement la révocation des édits de paix (juillet 1585), il a noté le chagrin qui accompagna cette résolution : «On dict que le Roy fit ceste action les larmes aux yeux, et qu'il dict deslors a aucuns ces mots : J'ay grand peur qu'en voulant perdre le presche, nous ne hazardions fort la Messe». On sait qu'il fut au nombre des avocats qui suivirent à Tours les membres du parlement, qui acceptèrent d'y être transférés en avril 1589. Il y plaida jusqu'en 1594 où le retour à Paris fut possible. Il se trouva là partager le sort d'autres avocats, ennemis de la Ligue, Antoine Arnauld, le père de la célèbre lignée, entre autres. Il approuva la réconciliation avec les anciens ligueurs, qui avaient eu un sursaut national quand il fut question de reconnaître l'infante d'Espagne, fille aînée de Philippe II, comme reine de France. Notant en 1597 le décès de Mr Le Maistre que la Ligue avait fait président au parlement, il estima qu'il avait bien servi le roi, ayant maintenu la loi salique contre les Espagnols et leurs fauteurs. Le régicide lui inspira des réflexions procédant non d'une quelconque sentimentalité, mais de la raison. A propos de l'assassinat de Henri III, il inséra dans son journal des vers l'imputant aux passions religieuses exacerbées : Saint Barthélemy avait permis le massacre qui porta son nom. Saint Pierre donna à Jacques Clément le couteau dont il se servit : Craignez doresnavant, ô Roys, De ce cousteau la rude peine ; Jesus Christ ne va plus en croix Pour commander qu'on le rengaine. A propos de l'assassinat de Henri IV, il releva ce qui ne lui paraissait pas commun : Henry le Grand, si grand que la paix ny la guerre, Ne luy ont faict souffrir Maistre ni compaignons. A l'inverse de Pierre de L'Estoile, il ne manifesta pas de chagrin personnel lors de tels événements, mais redouta leur répétition, propre à ruiner l'Etat. Dans cet esprit, il a inséré un étrange récit dans son journal, qui pourrait être un pasquil gallican et hostile à l'ultramontanisme : «Mystère des Peres Jésuistes quand ils veulent persuader quelqu'un de tuer un Roy.» Des cérémonies bizarres y sont décrites et le candidat au régicide est mis enfin devant un autel où est un tableau montrant Jacques Clément emporté au ciel par les anges et conduit devant le trône de Dieu. La régence de Marie de Médicis lui inspira la crainte du retour aux affrontements et à l'influence de l'Espagne sur les affaires de France. Lorsque furent conclus en 1612 les mariages espagnols, il nota qu'il fallait en espérer gloire, honneur et repos de la France, avec un ton qui suggérait le doute. Peu après un incendie survenu au Louvre lui inspira cette réflexion : «Dieu veuille que ce ne soit pas un presage d'un plus grand embrazement de la France» (Jacqueline Boucher, Les opinions d'un émule de L'Estoile : Laurent Bouchel, avocat au Parlement de Paris (1529-1629), Nouvelle revue du XVIe siècle, Volume 12,Numéro 2, 1994 - books.google.fr). L'abbé Lagneau, traducteur français de l'Histoire universelle du jésuite Turselin (Orazio Torsellini, 1545 - 1599), fait ainsi le portrait de Luther : «Il était d'un esprit vif, impétueux, hardi, éloquent, de poil roux, fort adonné à la débauche et à l'incontinence, etc.» Ces platitudes ont été répétées par des écrivains qui n'étaient rien moins que jésuites, mais qui n'en savaient pas davantage (Almanach des réformes et protestans de l'empire Français, pour l'an, Tome 3, 1810 - books.google.fr, Orazio Torsellini, Histoire universelle, traduite du latin du P. Tursellin, par D. M. L, Tome 3, 1706 - books.google.fr, François-Xavier Feller, Dictionnaire historique, Tome 8, 1818 - books.google.fr). Balzac fait de Pierre Avenelles vieil homme à la barbe rousse : Ce dict Avenelles estoyt une maulvaise barbe rousse, poly comme ung brin de réglisse, pasle en diable, ainsy que sont tous chicquanous enfouis ez ténètres du parlement, brief, le plus meschant garson d'advocat qui iamais ayt vescu, riant aux pendaisons, vendant tout, vray Iudas (Honoré de Balzac, Les contes drolatiques colligez ez abbayes de Touraine, 1855 - books.google.fr). Luther Judas On sait que Rousseau, le grand hérésiarque du Contrat social et de la Révolution française, a mis volontairement fin à ses jours. Il y a de graves motifs de croire que Luther le grand hérésiarque du protestantisme, en a fait autant. L'illustre directeur de la Germania, Mgr Majunke, vient de publier une étude sur cette question. Pour lui, d'après les documents de l'époque, il est démontré que Luther a fini exactement comme Judas (Eglise à Lyon, 1890 - books.google.fr). L'abbé Nicolas Paulus, du clergé de Munich, vient d'offrir, dans l'étude d'une question très controversée : la mort de Luther, l'intéressant exemple d'une experte liberté d'esprit. On répétait volontiers, dans certaines polémiques, la légende du suicide de Luther; et M. Majunke, jadis député au Reichstag, s'efforçait récemment de confirmer cette légende en citant le témoignage d'un prétendu domestique de Luther, témoignage rapporté par le Franciscain Sedulius, en 1606, dans son livre Praescriptiones adversus haereses. Dans l'Historiches Jahrbuch, que publie la Görres Gesellschaft1, M. Paulus a mis en relief un document de tout autre valeur. Ce document raconte la visite de l'apothicaire ap pelé au chevet de Luther. A la suite de trop copieuses libations, le réformateur s'était alité; brusquement la mort était venue; ses amis le croyaient endormi ; l'apothicaire, lui, n'eut aucune illusion. Par des raisons solidement déduites, M. Paulus croit pouvoir établir que ce curieux récit est l'œuvre de l'apothicaire lui-même, Jean Landau; il fut adressé, dès le printemps de 1546, à Georges Wizel, ancien prétre d'Eisleben, qui voyageait en Bavière avec Cochlaeus, et publié par ce dernier personnage en 1548. Jean Landau était un catholique sérieux. Son fils Adam, plus tard professeur de médecine à Ingolstadt, raconte à son tour, en 1564, dans un poème fort malveillant pour Luther, que l'«hérésiarque» périt d'une «mort horrible, encore tout gonflé de vin.» L'absence complète, en ces deux récits, de toute allusion, non seulement à un suicide, mais même à des bruits de suicide, permet de juger la valeur de ces bruits. C'est dans un livre d'Andreas Hondorf, pasteur protestant en Saxe, le Promptuarium exemplorum, publié à Leipzig en 1568, que M. l'abbé Paulus a trouvé la première mention de certaines rumeurs relatives au suicide de Luther; le zélé pasteur y voit une invention commune du diable et des papistes ! Sans s'associer à ces invectives, M. l'abbé Paulus n'hésite point à conclure que le suicide de Luther est une fable, qui doit disparaître de l'histoire (Georges Goyau, Bibliographie, Bulletin critique, Volume 2, 1896 - books.google.fr). "vent contraire" Olivier de Magny, né à Cahors dans le Quercy vers 1529 et mort vers 1561, est un poète français (https://fr.wikipedia.org/wiki/Olivier_de_Magny). Cf. le quatrain VIII, 66 où "l'écriture DM" pourrait désigner De Magny. C'est l'échec de la conjuration d'Amboise. C'est la mort de du Bourg, conseiller au Parlement, pour avoir blâmé les exécutions. C'est la menace contre Condé qui ne doit son salut qu'à l'intervention directe de François II. Le jeune roi meurt à son tour le 5 décembre 1560. A l'avènement de Charles IX, qui n'a que dix ans, la reine-mère Catherine de Médicis prend le pouvoir. Magny, au milieu des troubles sanglants fait entendre des conseils élevés et courageux, dans les 19 sonnets découverts après sa mort "sur l'Institution du Prince". Sa voix s'élève de plus en plus à mesure que la fin approche (Paul Cambon, Olivier de Magny, poete de Cahors, 1527-1561: Conférence donnée à la Société des études du lot le 12 mars 1925, 1925 - books.google.fr). Dans un sonnet où du Bellay chante la gloire de d'Avanson, il reconnaît très haut le talent de Magny, afin d'attirer l'attention de l'ambassadeur sur son secrétaire méconnu. [...] Enhardi par la démarche de du Bellay en sa faveur, Magny implorait directement son maître dans le sonnet suivant : A toute heure je voy croistre l'ire et l'orgueil De l'orage cruel qui si fort me tempeste, A toute heure je voy cent flots dessus ma teste, Pour me faire en un gouffre un horrible cercueil. Mon bateau n'est chargé que d'angoisse et de dueil, Et quelque temps qu'il face, il est toujours en queste, L'anchre, c'est ma raison qui jamais ne l'arreste, Pour peur d'un vent contraire ou crainte d'un escueil. Toy donc, mon AVANSON, qui vois quel est l'orage, Et qui peux, si tu veux, me sauver du naufrage, M'esloingnant du danger, du mal et du soucy, Mets la main au tymon, et me fais faire voile En plus heureuse mer et sous plus douce estoile, D'un favorable vent m'enlevant hors d'icy (Jules Favre, Olivier de Magny (1529?-1561): étude biographique et littéraire, 1885 - books.google.fr). "senez" "sener" : du latin signo, désigner, signifier, annoncer, avertir (Lucien de Luca, SCHOLIA NOSTRADAMICA: Puzzles, Charades, Rébus, Calembours, 2022 - books.google.fr). ou "signaler", "dévoiler", "dénoncer" (désigner comme coupable des agissements ou des personnes) puisque se sont les "entreprinses" qui sont "senez" ("seneez" ?) et non les conjurés. Si le "rousseau" est le traître, inutile de souligner par "trahies". "designare" se compose de "de" et de "signare"; nous avons plus avant signalé la valeur intensive ou extensive de "de" qui s'agglutine ici à "signare" qui signifie «empreindre; graver; marquer d'un sceau; signaler, désigner, indiquer; remarquer, distinguer», ce dernier comportant le mot signum «marque, signe, empreinte; présage; pronostic, symptôme; cachet, sceau» (Jean-Yves Dugas, L'espace québecois et son expression toponymique, Cahiers de géographie du Québec, Numéros 73 à 75, 1984 - books.google.fr). Décalage de 2 ans C'est pourtant de cette époque que date le premier édit
officiel de clémence - nous ne disons pas encore de tolérance - à l'égard des
Réformés. L'initiative en revient clairement à la reine-mère, Catherine de
Médicis. Pendant les premiers mois de son veuvage, celle-ci était demeurée très
effacée. Mais elle observait attentivement la situation. Les excès des Guise
l'irritaient. Elle finit par se convaincre qu'elle devait prendre en main la
direction des affaires, pour sauvegarder, par-dessus les rivalités des partis,
les intérêts essentiels de l'État. L'édit
d'Amboise (2 mars 1560), antérieur au complot de La Renaudie
fut le premier acte de son intervention. Il rapportait le terrible Ă©dit
d'Écouen (2 juin 1559) sur la recherche et la punition des hérétiques. Un
pardon général fut accordé pour le passé, à condition que les sujets du roi
veuillent bien «vivre dorénavant comme bons catholiques». Seuls les prédicants
et les conspirateurs auraient affaire avec la justice royale. Une clause
additionnelle, datée du 16 mars, reconnaissait en outre aux protestants le
droit très important de requête collective. C'était leur permettre
équivalemment de s'assembler, sinon pour des réunions cultuelles, du moins pour
la discussion de leurs intérêts. Le mois de mars 1560 apparaît ainsi comme un
tournant dans l'histoire religieuse de la France. Il marque simultanément, de
la part des pouvoirs publics, l'inauguration d'une nouvelle politique
religieuse et, de la part des protestants, leur entrée en scène comme faction
dans l'État. C'est de ce mois également que date le premier projet royal d'un
concile national, «afin que ceux qui seraient offensés de la corruption de ce
siècle, se puissent doucement réconcilier à cette union de l'Église». Le Saint-Siège
s'en montra très offusqué Les guerres de religion éclatent dès mars 1560, avec la
conjuration d'Amboise. Malgré des tentatives de conciliation et le colloque de
Poissy (1561), le massacre de Vassy (1er mars 1562) déclenche la première
guerre (1562-1563), marquée par la bataille de Dreux. L'édit d'Amboise (mars 1563) suscite une réconciliation provisoire. Mais les hostilités reprennent en 1567, et
c'est le début d'une série d'épisodes atroces où nos écrivains verront sombrer
Ă la fois la gloire nationale et le prestige des chefs trop ambitieux. Chaque
guerre a ses charniers et ses hontes Acrostiche : TLLP, tulipe Il y a le médecin néerlandais qui vers 1550-1560 décrivit pour la première fois la tulipe [...]. La tulipa suaveolens est mentionnée dès 1561 par Conrad Gestner dans son De hortis Germaniae liber, témoin sérieux de la passion botanique du Nord. L'énorme succès de la fleur à bulbe fut tel qu'on a pu parler d'une «Tulipomanie» générale après 1600. Elle coïncide avec la mode des «bouquets peints» ou, comme nous disons si gauchement, des «natures mortes de fleurs» (André Chastel, Les jardins et les fleurs, Revue de l'art, Numéros 51 à 54, 1981 - books.google.fr). Ogier Ghiselin de Busbecq, en latin : Augerius Gislenius Busbequius et de temps en temps Augier Ghislain de Busbecq, (né en 1522 à Comines, Flandre - mort le 28 octobre 1592 à Saint-Germain-sous-Cailly près de Rouen) est un diplomate et botaniste flamand. Il est d'abord au service de l'empereur romain germanique Charles Quint, puis de Ferdinand Ier, Maximilien II et Rodolphe II, comme ambassadeur auprès de l'empire ottoman du sultan Soliman le Magnifique en 1555 puis à nouveau en 1556. Emprisonné, il ne revient qu’en 1562. Ensuite, il fut gouverneur des fils de Maximilien II. On doit à Busbecq la découverte des Res gestae de l'empereur Auguste à Ancyre et l'introduction en Europe de la tulipe, du lilas commun et du marronnier d'Inde. Il est le premier à s’intéresser à la langue gotique de Crimée. Il meurt en 1592 près de Rouen et son corps est enterré à Saint-Germain-sous-Cailly, tandis que son cœur est embaumé et rapatrié dans son fief familial de Bousbecque (fr.wikipedia.org - Ogier Ghislain de Busbecq, Jean-François Solnon, L'Empire ottoman et l'Europe, 2017 - books.google.fr). L'incapacité des Français à régler la question du douaire ennuie d'autant plus Busbecq qu'elle a des conséquences fâcheuses pour Élisabeth d'Autriche, veuve de Charles IX. La malheureuse veuve est en effet si démunie financièrement qu'il lui est impossible, à sa grande désolation, d'aller voir à Amboise sa petite fille. On a peine à le croire, mais «elle est si pauvre, affirme Busbecq, que les repas, à son domicile parisien, ne sont plus servis qu'à la seule table où elle est assise. Des rations de pain et de vin sont données au reste de son personnel qui n'a pas d'autre choix que de s'en contenter...» Il n'y a pas qu'à la cour de France que la vie est dure ! Fort heureusement, Élisabeth finit par trouver l'argent du voyage et arrive à la fin du mois de juillet 1575 à Amboise, où sa fille Marie-Élisabeth est élevée. Elle reste un mois et demi avec elle avant de regagner Paris pour quelques semaines, puis de prendre la route de Vienne. De la petite fille, alors âgée de trois ans et qui mourra à ans, Busbecq dit qu'elle n'est «certainement pas laide, bien qu'elle ressemble davantage à son père qu'à sa mère». Un compliment pour le moins ambigu. Le problème de la petite Marie-Élisabeth préoccupe Maximilien, qui a toujours aimé avoir près de lui sa descendance. L'empereur pose crûment la question à Busbecq de savoir si l'enfant sera autorisée à accompagner sa mère : «Je ne suis pas optimiste, répond Busbecq, car il n'y a aucun précédent de cette sorte dans l'histoire de France. Je les vois venir : ils vont d'abord évoquer la longueur du voyage, la fragilité de l'enfant et sa jeunesse, puis ils diront que cela ne s'est jamais fait et je ne vois pas ce qu'on pourrait rétorquer.» Au cas où Maximilien ferait une ultime tentative, Busbecq lui conseille d'écrire au roi et à Catherine de Médicis et de leur demander à voir sa petite-fille : «Si cela se faisait, alors la situation serait inversée, et le retour retour en France de l'enfant dépendrait de votre bon vouloir» (Ignace Dalle, Un Européen chez les Turcs: Auger Ghiselin de Busbecq, 1521-1591, 2008 - books.google.fr). |