La conjuration d'Amboise

La conjuration d’Amboise

 

I, 7

 

1562-1563

 

Tard arrivĂ©, l'execution faicte :

Le vent contraire : letres au chemin prinses :

Les conjurĂ©s xiiij d'une secte :

Par le Rousseau senez les entreprinses.

 

14

 

1560. Mars. Le roy fait un édit par lequel il donne congé aux luthériens de sortir de partout. En ung mardy fut faiste une procession à cause d'aulcuns qui voloyent mal au roy. En ce temps furent exécutés quatorze hérétiques envyron qui voloyent mal au cardinal de Lorrayne, dont il y avait un gentilhomme auquel le chastiau fut râsé. En ce moys fut escartelé un capitaine nommé M. de Maziles, son chastiau râsé, à cause qu'il recevoit des luthériens qui portoient les armes contre le roy. les aultres disoient contre M. le cardinal. En ce temps furent appellés huguenots. Le chastiau estoit à trois lieues près d'Amboise.

 

M. de Mazeres (Maziles) est un des principaux affidés de la conjuration d'Amboise, dirigée par la Renaudie (Journal d'un curé ligueur de Paris sous les trois derniers Valois (abbé Jean de la Fosse), 1865 - books.google.fr).

 

Amboise

 

En mars 1560, la tentative avortĂ©e d'enlèvement du jeune roi François II, connue sous le nom de «Tumulte d'Amboise», rĂ©vĂ©la tragiquement l'exacerbation des tensions entre Catholiques et Protestants français. Soumis aux dures contraintes de ledit d'Écouen depuis l'annĂ©e prĂ©cĂ©dente, les RĂ©formĂ©s de France avaient vu avec crainte augmenter la puissance de leurs plus farouches ennemis, le duc de Guise et son frère le cardinal de Lorraine, oncles par alliance du nouveau souverain. D'oĂą cette tentative dĂ©sespĂ©rĂ©e de soustraire le royal adolescent Ă  leur tutelle, qui ne dĂ©boucha que sur une rĂ©pression Ă  grande Ă©chelle contre les fidèles calivnistes [...]. Après la mort d'Henri II, en juillet 1559, le duc François de Guise et son frère Charles, cardinal de Lorraine, assurèrent la direction effective des affaires du royaume, profitant de l'influence de leur nièce Marie Stuart sur son royal Ă©poux, le jeune François II. Cette toute-puissance des Guise, champions de la cause catholique, s'exerça vite aux dĂ©pens des Protestants français. La nomination du modĂ©rĂ© Michel de L’Hospital comme chancelier de France et la promulgation de l'Édit d'Amboise amnistiant les crimes d'hĂ©rĂ©sie, le 2 mars 1560, ne purent empĂŞcher une nette montĂ©e des tensions interreligieuses. Quelques RĂ©formĂ©s exaltĂ©s projetèrent de soustraire le roi Ă  la pernicieuse tutelle des Guise. Ă€ la tĂŞte de la conjuration se trouvait un gentilhomme pĂ©rigourdin, Godefroy du Barry seigneur de La Renaudie, qui rĂ©unit autour de lui un grand nombre de nobles protestants. Or, dès le 12 fĂ©vrier, leur plan avait Ă©tĂ© dĂ©voilĂ© par un traĂ®tre. Installant le roi Ă  Amboise, les Guise prĂ©parèrent une nasse et les conjurĂ©s furent arrĂŞtĂ©s au fur et Ă  mesure de leur arrivĂ©e aux alentours du château, entre le 10 et le 16 mars 1560. Dès le 17, on exĂ©cuta publiquement les prisonniers, dĂ©capitĂ©s ou pendus aux crĂ©neaux du château. La Renaudie fut capturĂ© deux jours plus tard et condamnĂ© Ă  l'Ă©cartèlement. Une rĂ©pression brutale s'ensuivit, les Guise ayant beau jeu de prĂ©senter l'ensemble des Huguenots du royaume comme des sĂ©ditieux. On soupçonna le prince Louis de CondĂ© d'ĂŞtre la vĂ©ritable âme du complot : condamnĂ© Ă  mort, il ne dut la vie sauve qu'Ă  la mort du roi en dĂ©cembre 1560, qui marqua la fin du pouvoir absolu des Guise. ChoquĂ© par ces tragiques Ă©vĂ©nements Ronsard avait composĂ© sur-le-champ une Ă©lĂ©gie adressĂ©e Ă  Guillaume des Autels, un proche des Guise, qui avait condamnĂ© la tentative huguenote dans une Harengue au peuple françois contre la rĂ©bellion. [...] Pour l'heure, Ronsard prĂ´ne encore la modĂ©ration Ă  l'Ă©gard du RĂ©formĂ©, souhaitant «par livres l'assaillir, par livres luy respondre» (Pierre de Ronsard, ElĂ©gie sur les troubles d'Amboise, Mignonne, allons voir: fleurons de la bibliothèque poĂ©tique Jean Paul Barbier-Mueller, 2007 - books.google.fr).

 

Le tĂ©moignage de Ronsard, fervent partisan des Guises, hostile Ă  la RĂ©forme, en faveur de Nostradamus a sa valeur. Ne suffirait-il pas de rappeler les louanges de Ronsard en 1560 envers Nostradamus - “Ayt de Nostradamus l’enthousiasme excité” - pour comprendre que celui-ci ne saurait ĂŞtre soupçonnĂ© d’avoir annoncĂ© la dĂ©faite des Guises ? Comme l’écrit Liliane CrĂ©tĂ© : “Ronsard, toute sa vie, fut l’homme d’un clan : il avait Ă©tĂ© tout Châtillon, il Ă©tait maintenant tout Guise”. Au vrai, de quel Ronsard s’agit-il ? On tranchera assez vite : ces louanges apparaissent prĂ©cisĂ©ment dans l’ElĂ©gie Ă  Guillaume des Autels consacrĂ©e, en son titre, aux troubles d’Amboise (Jacques Halbronn, Avatars du centurocentrisme et du nostradamocentrisme, 2004 - michel.nostradamus.free.fr).

 

"lettres prises en chemin"

 

Quelque temps après, on découvrit, par des lettres interceptées, ce qu'on avoit soupçonné jusqu'alors, que le prince de Condé étoit le chef muet des calvinistes, qu'il avoit été l'ame de la conjuration, et qu'il en tramoit une nouvelle. Le duc de Guise couvrant du secret le plus profond la découverte qu'il venoit de faire, attira le prince à Orléans, où étoient convoqués les états du royaume. Condé, en arrivant, alla présenter ses respects au roi qui, après avoir entendu son compliment avec froideur, lui déclara qu'il étoit accusé d'avoir formé des complots contre l'état et contre sa personne. Condé, sans laisser apercevoir aucune altération sur son visage, répondit que cette accusation étoit une calomnie, et que s'il plaisoit à Sa Majesté de lui produire ses dénonciateurs, il se faisoit fort de les convaincre d'imposture. Il est juste, répondit le roi, que vous soyez entendu dans vos défenses. A ces mots, il sortit et donna ordre d'arrêter le prince; ce qui fut exécuté sur-le-champ. On instruisit le procès dans les formes, et le crime se trouva si manifeste, que les juges ne purent se dispenser de prononcer la sentence de mort. Ce prince coupable alloit finir sa vie par la main du bourreau , lorsque François II, infirme dès l'enfance, mourut dans la dix-huitième année de son âge, laissant la cour et le royaume en proie à des factions qui devoient bientôt dégénérer en guerres cruelles (Jean Nicolas Loriquet, Histoire de France, à l'usage de la jeunesse, Tome 1, 1831 - books.google.fr).

 

"Tard arrivé"

 

Les conjurĂ©s qui avaient mis leurs dernières espĂ©rances dans les opĂ©rations de La Renaudie, regardèrent sa mort comme le coup le plus affreux d'un sort fatal. Ils n'avaient plus de ressource d'aucune façon ni pour vaincre, ni pour Ă©viter les supplices qu'on leur prĂ©parait. Semblant encore animĂ©s par l'esprit de leur chef, ils rĂ©solurent tout Ă  coup de tenter une dernière entreprise, et de se perdre tout-Ă -fait ou de triompher. Ils se rallièrent aux capitaines Coqueville, des Champs, Chandieu et surtout La Motte, qu'ils reconnurent pour chef. Leur projet Ă©tait d'investir le château d'Amboise, et d'y affamer la cour en donnant le temps de s'avancer aux troupes Ă©loignĂ©es. Le retard d'un des conjurĂ©s empĂŞ-cha peut-ĂŞtre seul que ce dernier effort du dĂ©sespoir ne rĂ©ussĂ®t. Chandieu arriva trop tard et en plein jour; ses soldats qui avaient tous des Ă©charpes blanches furent reconnus. On cria aux armes ; des soldats furent mis aux portes d'Amboise qu'on ferma; beaucoup de conjurĂ©s furent pris; beaucoup d'autres se sauvèrent (Hortense Allart de MĂ©ritens, Conjuration d'Amboise, 1822 - books.google.fr).

 

C'Ă©tait la compagnie rassemblĂ©e entre OrlĂ©ans et Blois par le capitaine Bertrand de Chandieu et que sans doute attendait CondĂ©. Elle arrivait en retard d'une heure ou deux. Les jours prĂ©cĂ©dents, tandis qu'on arrĂŞtait les lieutenants de La Renaudie Ă  Noizay et que les troupes royales Ă©taient occupĂ©es Ă  rompre les bandes de pauvres piĂ©tons cachĂ©es dans les bois, un groupe de capitaines, dĂ©pendant non plus, semble-t-il, de La Renaudie, mais de CondĂ© lui-mĂŞme, avait mis sur pied un autre plan. Sous le couvert peut-ĂŞtre de Maligny, guidon du prince, un capitaine La Mothe avait introduit dans la ville quelques mercenaires Ă©trangers pour former, avec les protestants du lieu, une bande de cent Ă  cent vingt hommes prĂŞte Ă  surprendre le château au moment voulu , pendant que Chandieu l'attaquerait du cĂ´tĂ© du pont. Deux autres capitaines, Cocqueville et Des Champs, logĂ©s secrètement au faubourg, devaient s'emparer du pont et ouvrir la ville Ă  Chandieu, dans le nuit du 16 au 17. Mais le duc de Guise, se trouvant cette fois en prĂ©sence d'une attaque militaire, avec des ennemis bien caractĂ©risĂ©s, et non plus dans l'atmosphère trouble d'une conspiration menaçante, retrouva toutes ses qualitĂ©s de chef. Il n'oublia pas de placer Louis de CondĂ© Ă  l'une des portes du château, mais prit la prĂ©caution de lui adjoindre son propre frère, François, grand prieur de France. Il divisa les forces dont il disposait en deux groupes. L'un attaqua de front les cavaliers de Chandieu, l'autre, dont il prit la tĂŞte, fit un mouvement tournant et prit l'ennemi de flanc. Quoi voyant, les Ă©charpes blanches s'enfuirent. A part quelques tuĂ©s et deux ou trois prisonniers, toute la troupe de Chandieu s'Ă©chappa, grâce Ă  la vitesse de ses chevaux. On ne sut jamais exactement oĂą s'Ă©tait formĂ©e cette troupe ni de quels Ă©lĂ©ments elle se composait. Dans leur poursuite, les cavaliers du roi ramassèrent un certain nombre de piĂ©tons, dont plusieurs avaient Ă©tĂ© dĂ©jĂ  pris et relâchĂ©s la veille. Parmi eux se trouva le sieur de Villemongis, de la maison de Bricquemault en Angoumois. La journĂ©e fut remplie d'Ă©pisodes tragiques. Sur le soir, le comte de La Mirandole, le capitaine Ottavio Fregose, le jeune sieur de Bueil et d'autres cavaliers italiens et français couraient la campagne du cĂ´tĂ© de Tours. Ils rencontrèrent une troupe de dix conjurĂ©s Ă  pied qu'ils emmenèrent au Montil. Ayant appris de ces gens que trente de leurs compagnons se cachaient près d'un village voisin, ils y allèrent, tuèrent une sentinelle et tombèrent Ă  l'improviste sur les malheureux qui dormaient dans une chaumière. RĂ©veillĂ©s Ă  coups d'arquebuses, les «rebelles» se dĂ©fendirent dĂ©sespĂ©rĂ©ment, puis comme cinq des leurs Ă©taient tuĂ©s et que l'ennemi mettait le feu Ă  leur abri, ils se rendirent. Mais, au milieu de cette scène nocturne, l'un des plus farouche se jeta de plein grĂ© dans le feu, et y pĂ©rit Ă  l'effroi de ses compagnons (Lucien Romier, La conjuration d'Amboise : l'aurore sanglante de la libertĂ© de conscience [et] le règne et la mort de François II, 1923 - books.google.fr).

 

"Rousseau"

 

L'épithète rousseau (cf. CXXXIV, CXLV, CLVIII), signifie traître, comme le dit Brantôme (Œuvres complètes, éd. L. Lalanne, Paris, 1 864- 1 882, IV, p. 288). Mais le sort qui attend ceux qui, comme Renart, sont rousseaux, est proverbial (David Wilkin, Les souspirs d'Olivier de Magny, 1978 - books.google.fr).

 

Renard(e) n. Also reniarde, renaud(e), reinard(e), rainard. [OF renart, renarde, regnart & renaut, renaud] (Robert E. Lewis, Middle English Dictionary, Volume 7, 1985 - books.google.fr).

 

Il semble que le rousseau de Magny soit Carlo Carafa (ou Carlo Caraffa), né le 29 mars 1517 à Naples et mort le 6 mars 1561 à Rome, est un cardinal italien, neveu du pape Paul IV, et le fils de Jean Alphonse Carafa, comte de Montorio.

 

Son oncle le cardinal Gian Pietro Carafa fut Ă©lu pape en 1555 sous le nom de Paul IV. Celui-ci combla sa famille d'honneurs et de biens : il Ă©leva Carlo, qui n'Ă©tait pourtant pas un religieux, Ă  la pourpre cardinalice et il dĂ©pouilla pour l'enrichir lui et son frère les puissantes familles Colonna et Guidi; le pape soutint mĂŞme Ă  cause d'eux une guerre contre Naples et l'Espagne, mais en 1559, peu avant sa mort, les plaintes concernant leur rapacitĂ© et leurs injustices le forcèrent Ă  les exiler de Rome ainsi qu'Ă  leur Ă´ter leurs dignitĂ©s. Son successeur, Pie IV, ennemi personnel des Carafa, poussa plus loin le châtiment : en 1560, le cardinal Carlo Caraffa fut condamnĂ© Ă  mort et Ă©tranglĂ© dans sa prison; son frère, Giovanni Carafa, soupçonnĂ© d'avoir fait assassiner sa femme, eut la tĂŞte tranchĂ©e; le cardinal Alfonso Carafa, fils d'Antoine, fut soumis Ă  une amende de 100000 Ă©cus; enfin le sĂ©nat romain abolit par dĂ©cret la mĂ©moire des Carafa. En 1566 Pie V fit rĂ©viser leurs procès et les rĂ©intĂ©gra dans leurs titres et honneurs (fr.wikipedia.org - Carlo Carafa (1517-1561)).

 

Signalons seulement que Renart est installĂ© dans la longue galerie des traĂ®tres, aux cĂ´tĂ©s de Judas, prototype de tous les fĂ©lons et Ă©videmment porteur de cheveux roux; Renart lui-mĂŞme est une fois qualifiĂ© de nouveau Judas, Ă  propos du baiser de paix qu'il voulait Ă©changer avec la mĂ©sange dans la branche V.a du Roman de Renart (1174-1177), 761 :

 

Quant il au baisier l'asaili

Comme Judas qui Deu traĂŻ.

 

A l'article "rousseau" du dictionnaire de Furetière (Ă©dition de 1690) : "Qui a le poil roux. On tient que Judas Ă©tait rousseau : c'est pourquoi on hait beaucoup les rousseaux". On le voit, Furetière installe franchement le prĂ©jugĂ© en certitude (Roger Bellon, Renart li rous : remarques sur un point de l’onomastique renardienne. Les couleurs au Moyen Ă‚ge, Presses universitaires de Provence, 1988 - books.openedition.org).

 

Ici on prendra le rousseau pour un renard traître.

 

Pierre des Avenelles

 

Le chef apparent de la conjuration d'Amboise, dont le prince de CondĂ©, malgrĂ© ses dĂ©saveux constans, passa pour ĂŞtre le chef rĂ©el, La Renaudie (Jean ou Godefroid de Barry, gentilhomme pĂ©rigourdin) jouissait de la rĂ©putation d'un brave capitaine: Belleforest le cite comme l'un des hommes les plus Ă©loquens du royaume. Un procès qu'il'eut Ă  soutenir relativement Ă  la possession d'un bĂ©nĂ©fice, et dans le cours duquel il commit un faux, compromit son honneur et sa vie. Le duc de Guise ayant favorisĂ© son Ă©vasion, La Renaudie s'enfuit Ă  Genève, oĂą il embrassa le calvinisme. Ensuite il parcourut l'Allemagne et les Pays-Bas pour Ă©tablir des rapports entre les notabilitĂ©s du parti protestant. Mais voyant qu'au zèle religieux il fallait joindre des motifs d'intĂ©rĂŞt et d'ambition pour imprimer un mouvement actif Ă  leur cause, il voulut rentrer en France, et le duc de Guise lui en rouvrit l'accès en lui procurant des lettres de rĂ©vision. Au lieu de songer Ă  son procès, La Renaudie ne s'occupa que d'abattre la puissance des Guises, persĂ©cuteurs du calvinisme. Quand il crut pouvoir compter sur le dĂ©voĂ»ment et la discrĂ©tion d'un certain nombre d'hommes influens, il leur dĂ©veloppa un plan de conspiration, qu'ils adoptèrent. Une consultation rĂ©digĂ©e Ă  Genève dĂ©cida que, sans blesser sa conscience, ni manquer Ă  la majestĂ© royale, il Ă©tait loisible de recourir Ă  la force pour soustraire le roi Ă  la domination des Guises. Les conjurĂ©s se rĂ©unirent Ă  Nantes le 1er fĂ©vrier 1560 : La Renaudie les harangua dans un discours que de Thou nous a conservĂ© : puis il vint Ă  Paris, avec l'autorisation de lever cinq cents cavaliers et quinze cents fantassins. Il logea chez un avocat nommĂ© Avenelles, auquel il se confia, et qui le trahit par timiditĂ©. La cour, avertie du complot, quitte Blois, ville sans dĂ©fense, pour se rendre Ă  Amboise. Les conjurĂ©s s'y rendent aussi par dĂ©tachemens, afin d'exciter moins de soupçons; mais Ă  mesure qu'ils arrivent, on s'empare de leur personne ; le duc de Nemours les fait jeter dans les prisons de la ville, ou pendre aux crĂ©neaux du château, selon qu'il en attend ou non de nouvelles lumières. Instruit de ce dĂ©sastre, La Renaudie se dispose Ă  attaquer Amboise et Ă  l'enlever de vive force. Il traversait la forĂŞt de Château-Renaud, lorsqu'il est rencontrĂ© par le jeune Pardaillan, son cousin, qui court sur lui le pistolet Ă  la main. La Renaudie saute Ă  bas de son cheval, et renverse le jeune homme de deux coups d'Ă©pĂ©e; mais Un page de Pardaillan l'Ă©tend mort d'un coup d'arquebuse sur le corps de son maĂ®tre. Le cadavre de La Renaudie, rapportĂ© Ă  Amboise, fut attachĂ© Ă  une potence, avec cette inscription : La Renaudie, dit LaforĂŞt, chef des Rebelles (ÉphĂ©mĂ©rides universelles, 1835 - books.google.fr).

 

Mézerai prétend que des Avenelles ne découvrit la conjuration que dans l'espoir d'en tirer une grande récompense. Je dois faire observer que les historiens les plus estimés, tant catholiques que calvinistes, et que Mézerai a dû lire, n'attribuent point à un pareil motif la révélation du complot. Cependant il est vrai de dire que les écrivains huguenots ont dit beaucoup de mal de des Avenelles, et l'ont accusé de trahison envers le Calvinisme qu'il professait. Régnier de la Planche prétend qu'il était pauvre, avare et ambitieux. Mais de Thou en donne une idée bien différente; il dit que c'était un avocat assez habile dans sa profession, et qu'ayant horreur d'une entreprise qui lui parut inouïe et d'un dangereux exemple, il découvrit la conjuration plutôt par des motifs de conscience que dans la vue d'un vil intérêt (Roisselet de Sauclières, Histoire du protestantisme en France, et principalement a Nismes et dans le Bas-Languedoc, Tome 4, 1839 - books.google.fr, Charles Paillard, Additions critiques à l'histoire de la conjuration d'Amboise, 1880 - books.google.fr).

 

On connaĂ®t un Des Avenelles avocat Ă  Paris. Calviniste, il fut emprisonnĂ© lors de la conjuration d'Amboise. Est-ce le mĂŞme que le traducteur ? L'identification n'est pas certaine (DBF). Philippe des Avenelles a mis en français : PLUTARQUE, AbregĂ© des vies de LIV notables et excellens personnaiges, tant grecs que romains, 1558 et APPIEN, Deux livres «l'Espagnole et l'Annibale» ajoutĂ©s aux onze livres jadis traduits par Claude de Seyssel, 1560 (Paul Chavy, Traducteurs d'autrefois, Moyen Age et Renaissance: dictionnaire des traducteurs et de la littĂ©rature traduite en ancien et moyen français (842-1600), Tome 1, 1988 - books.google.fr).

 

Les réformés de Paris appartenaient à plusieurs tendances. Le jurisconculte Du Moulin devait se distinguer par sa résistance à la discipline ecclésiastique «à la genevoise». Il se déclara luthérien et, dans «Défense... contre les calomnies» (1565) il leur reprocha d'avoir retranché maître Pierre Perrucelli «seulement pour avoir dit que la confession d'Auguste estoit bonne et sainte». En outre, il blâmait leur indépendance vis-à-vis de l'Etat, qu'ils risquaient de ruiner. Peut-être Pierre des Avenelles partageait-il les opinions de Du Moulin et voulut-il préserver l'Etat. En outre, le cardinal de Lorraine tentait un rapprochement avec les luthériens, ce qui a pu l'inciter à lui révéler ce qu'il savait. Au colloque de Poissy, ce cardinal se servit de la Confession d'Augsbourg pour mettre Théodore de Bèze en difficulté. Aux conférences de Saverne (14-18 février 1562), il chercha un terrain d'entente avec le duc Christophe de Würtemberg à partir de cette Confession. Néanmoins il y eut aussi chez les Des Avenelles une attirance pour le service de l'Etat, conforme à leurs intérêts. Dans la clientèle du cardinal de Lorraine, on trouve un autre membre de cette famille un peu plus tard, Philippe des Avenelles, lettré lui aussi, ayant publié en 1560 une traduction d'Appien, «Des guerres des Romains», qui faisait sa cour à ce puissant personnage. Le 7 juillet 1569, il lui écrivit une lettre flatteuse, vantant sa bonté et sa libéralité et il plaidait sa propre cause, qu'il aurait voulu voir recommander par l'archevêque de Sens, c'est-à-dire par Nicolas de Pellevé, plus tard ardent ligueur. En octobre de la même année, Charles IX lui attribua un office de conseiller au parlement de Rennes, dont Jean de Grosmenil venait d'être privé pour fait de religion. Louis des Avenelles, qui fut peut-être frère, ou du moins proche parent de Pierre et de Philippe, s'orienta aussi vers le service de l'Etat. Il fut député du tiers état pour le bailliage de Valois aux premiers états généraux de Blois. A partir de 1578, il appartint aux gens de conseil de Catherine de Médicis, avec 10 livres de gages, ce qui était symbolique, mais qui lui donnait de l'influence, et il y était encore en 1585. Il côtoya là des avocats et surtout des magistrats des cours souveraines de Paris (E. Molé, N. de Verdun, B. Brisson, A. de Harlay, etc.). A ce titre, il participa à la gestion des biens de la reine mère, qui avait en jouissance le duché de Valois et il obtint d'elle des avantages pour Crespy : siège d'une élection et juridiction du grenier à sel. [...]

 

A l'inverse de Pierre et de Philippe des Avenelles, mais la Saint-BarthĂ©lemy dissipa certaines illusions, Laurent Bouchel fut un adversaire dĂ©terminĂ© de la maison de Lorraine-Guise. Son beau-père Louis des Avenelles [second mari de sa mère], en prenant du service auprès de Catherine de Medicis, partagea sans doute ses vues politiques : maintenir l'Etat en Ă©vitant qu'il ne fĂ»t dominĂ© par l'un des grands clans nobiliaires, qui s'affrontaient alors, prenant la religion comme prĂ©texte de leurs luttes. Son journal, si discret qu'il soit, traduit ces options. En 1577, il y a insĂ©rĂ© un prĂ©tendu discours fait par Henri III devant les Ă©tats gĂ©nĂ©raux, qui lui sembla un faux, colportĂ© par les guisards : «A la veritĂ© ne ressentant rien de la grandeur et MajestĂ© du Roy de France ny de l'eloquence du Roy Henry III. Je croy que cest escrit a estĂ© dressĂ© par quelque couille de Lorraine en son coing de taverne». La violence de la politique de la maison de Guise lui inspira des notes passionnĂ©es sur le dĂ©cès de certains de ses membres. Comme ses contemporains, il croyait Ă  l'intervention constante de Dieu dans les affaires du monde terrestre. La nature se dĂ©chaĂ®nait quand des personnalitĂ©s, qui avaient engendrĂ© la guerre, venaient Ă  mourir. Relatant la mort du cardinal de Lorraine Ă  Avignon le 23 dĂ©cembre 1574, il affirma que la fièvre dont il mourut avait tournĂ© en frĂ©nĂ©sie. Une terrible tempĂŞte s'Ă©leva quand il rendit l'esprit, enlevant des tuiles sur les toits et arrachant des treillis de fer au couvent des chartreux. Une vingtaine d'annĂ©es plus tard, il dĂ©crivit de mĂŞme la mort de la duchesse de Montpensier, nièce du cardinal, «l'une des mères nourrices de la Ligue. Et encores que la journĂ©e eust estĂ© froide, nĂ©antmoins il se fit de grands vents, esclairs et tonnerres» (6 mai 1596). Jeune, L. Bouchel avait choisi son camp politique : celui de la monarchie, se tenant loin des extrĂ©mistes et ayant un caractère rĂ©solument national. Sans le dire clairement, il a vu d'un bon Ĺ“il les entreprises aux Pays-Bas du duc d'Alençon et d'Anjou et il a insĂ©rĂ© de nombreux documents les concernant dans son journal . Mentionnant son dĂ©cès (10 juin 1584), il a remarquĂ© que la Ligue qui, depuis plusieurs annĂ©es, n'avait pas osĂ© prendre les armes, fit aussitĂ´t courir pasquils et Ă©dits sĂ©ditieux. En fait, Bouchel fut pleinement du cĂ´tĂ© de Henri III quand il s'opposa Ă  la Ligue. Relatant la sĂ©ance au cours de laquelle le roi annonça au parlement la rĂ©vocation des Ă©dits de paix (juillet 1585), il a notĂ© le chagrin qui accompagna cette rĂ©solution : «On dict que le Roy fit ceste action les larmes aux yeux, et qu'il dict deslors a aucuns ces mots : J'ay grand peur qu'en voulant perdre le presche, nous ne hazardions fort la Messe». On sait qu'il fut au nombre des avocats qui suivirent Ă  Tours les membres du parlement, qui acceptèrent d'y ĂŞtre transfĂ©rĂ©s en avril 1589. Il y plaida jusqu'en 1594 oĂą le retour Ă  Paris fut possible. Il se trouva lĂ  partager le sort d'autres avocats, ennemis de la Ligue, Antoine Arnauld, le père de la cĂ©lèbre lignĂ©e, entre autres. Il approuva la rĂ©conciliation avec les anciens ligueurs, qui avaient eu un sursaut national quand il fut question de reconnaĂ®tre l'infante d'Espagne, fille aĂ®nĂ©e de Philippe II, comme reine de France. Notant en 1597 le dĂ©cès de Mr Le Maistre que la Ligue avait fait prĂ©sident au parlement, il estima qu'il avait bien servi le roi, ayant maintenu la loi salique contre les Espagnols et leurs fauteurs. Le rĂ©gicide lui inspira des rĂ©flexions procĂ©dant non d'une quelconque sentimentalitĂ©, mais de la raison. A propos de l'assassinat de Henri III, il insĂ©ra dans son journal des vers l'imputant aux passions religieuses exacerbĂ©es : Saint BarthĂ©lemy avait permis le massacre qui porta son nom. Saint Pierre donna Ă  Jacques ClĂ©ment le couteau dont il se servit :

 

Craignez doresnavant, Ă´ Roys,

De ce cousteau la rude peine ;

Jesus Christ ne va plus en croix

Pour commander qu'on le rengaine.

 

A propos de l'assassinat de Henri IV, il releva ce qui ne lui paraissait pas commun :

 

Henry le Grand, si grand que la paix ny la guerre,

Ne luy ont faict souffrir Maistre ni compaignons.

 

A l'inverse de Pierre de L'Estoile, il ne manifesta pas de chagrin personnel lors de tels événements, mais redouta leur répétition, propre à ruiner l'Etat. Dans cet esprit, il a inséré un étrange récit dans son journal, qui pourrait être un pasquil gallican et hostile à l'ultramontanisme : «Mystère des Peres Jésuistes quand ils veulent persuader quelqu'un de tuer un Roy.» Des cérémonies bizarres y sont décrites et le candidat au régicide est mis enfin devant un autel où est un tableau montrant Jacques Clément emporté au ciel par les anges et conduit devant le trône de Dieu. La régence de Marie de Médicis lui inspira la crainte du retour aux affrontements et à l'influence de l'Espagne sur les affaires de France. Lorsque furent conclus en 1612 les mariages espagnols, il nota qu'il fallait en espérer gloire, honneur et repos de la France, avec un ton qui suggérait le doute. Peu après un incendie survenu au Louvre lui inspira cette réflexion : «Dieu veuille que ce ne soit pas un presage d'un plus grand embrazement de la France» (Jacqueline Boucher, Les opinions d'un émule de L'Estoile : Laurent Bouchel, avocat au Parlement de Paris (1529-1629), Nouvelle revue du XVIe siècle, Volume 12,Numéro 2, 1994 - books.google.fr).

 

L'abbĂ© Lagneau, traducteur français de l'Histoire universelle du jĂ©suite Turselin (Orazio Torsellini, 1545 - 1599), fait ainsi le portrait de Luther : «Il Ă©tait d'un esprit vif, impĂ©tueux, hardi, Ă©loquent, de poil roux, fort adonnĂ© Ă  la dĂ©bauche et Ă  l'incontinence, etc.» Ces platitudes ont Ă©tĂ© rĂ©pĂ©tĂ©es par des Ă©crivains qui n'Ă©taient rien moins que jĂ©suites, mais qui n'en savaient pas davantage (Almanach des rĂ©formes et protestans de l'empire Français, pour l'an, Tome 3, 1810 - books.google.fr, Orazio Torsellini, Histoire universelle, traduite du latin du P. Tursellin, par D. M. L, Tome 3, 1706 - books.google.fr, François-Xavier Feller, Dictionnaire historique, Tome 8, 1818 - books.google.fr).

 

Balzac fait de Pierre Avenelles vieil homme Ă  la barbe rousse :

 

Ce dict Avenelles estoyt une maulvaise barbe rousse, poly comme ung brin de réglisse, pasle en diable, ainsy que sont tous chicquanous enfouis ez ténètres du parlement, brief, le plus meschant garson d'advocat qui iamais ayt vescu, riant aux pendaisons, vendant tout, vray Iudas (Honoré de Balzac, Les contes drolatiques colligez ez abbayes de Touraine, 1855 - books.google.fr).

 

Luther Judas

 

On sait que Rousseau, le grand hérésiarque du Contrat social et de la Révolution française, a mis volontairement fin à ses jours. Il y a de graves motifs de croire que Luther le grand hérésiarque du protestantisme, en a fait autant. L'illustre directeur de la Germania, Mgr Majunke, vient de publier une étude sur cette question. Pour lui, d'après les documents de l'époque, il est démontré que Luther a fini exactement comme Judas (Eglise à Lyon, 1890 - books.google.fr).

 

L'abbĂ© Nicolas Paulus, du clergĂ© de Munich, vient d'offrir, dans l'Ă©tude d'une question très controversĂ©e : la mort de Luther, l'intĂ©ressant exemple d'une experte libertĂ© d'esprit. On rĂ©pĂ©tait volontiers, dans certaines polĂ©miques, la lĂ©gende du suicide de Luther; et M. Majunke, jadis dĂ©putĂ© au Reichstag, s'efforçait rĂ©cemment de confirmer cette lĂ©gende en citant le tĂ©moignage d'un prĂ©tendu domestique de Luther, tĂ©moignage rapportĂ© par le Franciscain Sedulius, en 1606, dans son livre Praescriptiones adversus haereses. Dans l'Historiches Jahrbuch, que publie la Görres Gesellschaft1, M. Paulus a mis en relief un document de tout autre valeur. Ce document raconte la visite de l'apothicaire ap pelĂ© au chevet de Luther. A la suite de trop copieuses libations, le rĂ©formateur s'Ă©tait alitĂ©; brusquement la mort Ă©tait venue; ses amis le croyaient endormi ; l'apothicaire, lui, n'eut aucune illusion. Par des raisons solidement dĂ©duites, M. Paulus croit pouvoir Ă©tablir que ce curieux rĂ©cit est l'Ĺ“uvre de l'apothicaire lui-mĂŞme, Jean Landau; il fut adressĂ©, dès le printemps de 1546, Ă  Georges Wizel, ancien prĂ©tre d'Eisleben, qui voyageait en Bavière avec Cochlaeus, et publiĂ© par ce dernier personnage en 1548. Jean Landau Ă©tait un catholique sĂ©rieux. Son fils Adam, plus tard professeur de mĂ©decine Ă  Ingolstadt, raconte Ă  son tour, en 1564, dans un poème fort malveillant pour Luther, que l'«hĂ©rĂ©siarque» pĂ©rit d'une «mort horrible, encore tout gonflĂ© de vin.» L'absence complète, en ces deux rĂ©cits, de toute allusion, non seulement Ă  un suicide, mais mĂŞme Ă  des bruits de suicide, permet de juger la valeur de ces bruits. C'est dans un livre d'Andreas Hondorf, pasteur protestant en Saxe, le Promptuarium exemplorum, publiĂ© Ă  Leipzig en 1568, que M. l'abbĂ© Paulus a trouvĂ© la première mention de certaines rumeurs relatives au suicide de Luther; le zĂ©lĂ© pasteur y voit une invention commune du diable et des papistes ! Sans s'associer Ă  ces invectives, M. l'abbĂ© Paulus n'hĂ©site point Ă  conclure que le suicide de Luther est une fable, qui doit disparaĂ®tre de l'histoire (Georges Goyau, Bibliographie, Bulletin critique, Volume 2, 1896 - books.google.fr).

 

"vent contraire"

 

Olivier de Magny, né à Cahors dans le Quercy vers 1529 et mort vers 1561, est un poète français (https://fr.wikipedia.org/wiki/Olivier_de_Magny).

 

Cf. le quatrain VIII, 66 où "l'écriture DM" pourrait désigner De Magny.

 

C'est l'échec de la conjuration d'Amboise. C'est la mort de du Bourg, conseiller au Parlement, pour avoir blâmé les exécutions. C'est la menace contre Condé qui ne doit son salut qu'à l'intervention directe de François II. Le jeune roi meurt à son tour le 5 décembre 1560. A l'avènement de Charles IX, qui n'a que dix ans, la reine-mère Catherine de Médicis prend le pouvoir. Magny, au milieu des troubles sanglants fait entendre des conseils élevés et courageux, dans les 19 sonnets découverts après sa mort "sur l'Institution du Prince". Sa voix s'élève de plus en plus à mesure que la fin approche (Paul Cambon, Olivier de Magny, poete de Cahors, 1527-1561: Conférence donnée à la Société des études du lot le 12 mars 1925, 1925 - books.google.fr).

 

Dans un sonnet oĂą du Bellay chante la gloire de d'Avanson, il reconnaĂ®t très haut le talent de Magny, afin d'attirer l'attention de l'ambassadeur sur son secrĂ©taire mĂ©connu. [...] Enhardi par la dĂ©marche de du Bellay en sa faveur, Magny implorait directement son maĂ®tre dans le sonnet suivant :

 

A toute heure je voy croistre l'ire et l'orgueil

De l'orage cruel qui si fort me tempeste,

A toute heure je voy cent flots dessus ma teste,

Pour me faire en un gouffre un horrible cercueil.

 

Mon bateau n'est chargé que d'angoisse et de dueil,

Et quelque temps qu'il face, il est toujours en queste,

L'anchre, c'est ma raison qui jamais ne l'arreste,

Pour peur d'un vent contraire ou crainte d'un escueil.

 

Toy donc, mon AVANSON, qui vois quel est l'orage,

Et qui peux, si tu veux, me sauver du naufrage,

M'esloingnant du danger, du mal et du soucy,

 

Mets la main au tymon, et me fais faire voile

En plus heureuse mer et sous plus douce estoile,

D'un favorable vent m'enlevant hors d'icy (Jules Favre, Olivier de Magny (1529?-1561): étude biographique et littéraire, 1885 - books.google.fr).

 

"senez"

 

"sener" : du latin signo, dĂ©signer, signifier, annoncer, avertir (Lucien de Luca, SCHOLIA NOSTRADAMICA: Puzzles, Charades, RĂ©bus, Calembours, 2022 - books.google.fr).

 

ou "signaler", "dĂ©voiler", "dĂ©noncer" (dĂ©signer comme coupable des agissements ou des personnes) puisque se sont les "entreprinses" qui sont "senez" ("seneez" ?) et non les conjurĂ©s. Si le "rousseau" est le traĂ®tre, inutile de souligner par "trahies".

 

"designare" se compose de "de" et de "signare"; nous avons plus avant signalé la valeur intensive ou extensive de "de" qui s'agglutine ici à "signare" qui signifie «empreindre; graver; marquer d'un sceau; signaler, désigner, indiquer; remarquer, distinguer», ce dernier comportant le mot signum «marque, signe, empreinte; présage; pronostic, symptôme; cachet, sceau» (Jean-Yves Dugas, L'espace québecois et son expression toponymique, Cahiers de géographie du Québec, Numéros 73 à 75, 1984 - books.google.fr).

 

DĂ©calage de 2 ans

 

C'est pourtant de cette époque que date le premier édit officiel de clémence - nous ne disons pas encore de tolérance - à l'égard des Réformés. L'initiative en revient clairement à la reine-mère, Catherine de Médicis. Pendant les premiers mois de son veuvage, celle-ci était demeurée très effacée. Mais elle observait attentivement la situation. Les excès des Guise l'irritaient. Elle finit par se convaincre qu'elle devait prendre en main la direction des affaires, pour sauvegarder, par-dessus les rivalités des partis, les intérêts essentiels de l'État. L'édit d'Amboise (2 mars 1560), antérieur au complot de La Renaudie fut le premier acte de son intervention. Il rapportait le terrible édit d'Écouen (2 juin 1559) sur la recherche et la punition des hérétiques. Un pardon général fut accordé pour le passé, à condition que les sujets du roi veuillent bien «vivre dorénavant comme bons catholiques». Seuls les prédicants et les conspirateurs auraient affaire avec la justice royale. Une clause additionnelle, datée du 16 mars, reconnaissait en outre aux protestants le droit très important de requête collective. C'était leur permettre équivalemment de s'assembler, sinon pour des réunions cultuelles, du moins pour la discussion de leurs intérêts. Le mois de mars 1560 apparaît ainsi comme un tournant dans l'histoire religieuse de la France. Il marque simultanément, de la part des pouvoirs publics, l'inauguration d'une nouvelle politique religieuse et, de la part des protestants, leur entrée en scène comme faction dans l'État. C'est de ce mois également que date le premier projet royal d'un concile national, «afin que ceux qui seraient offensés de la corruption de ce siècle, se puissent doucement réconcilier à cette union de l'Église». Le Saint-Siège s'en montra très offusqué (Joseph Lecler, Histoire de la tolérance au siècle de la Réforme (1955), 2013 - books.google.fr).

 

Les guerres de religion éclatent dès mars 1560, avec la conjuration d'Amboise. Malgré des tentatives de conciliation et le colloque de Poissy (1561), le massacre de Vassy (1er mars 1562) déclenche la première guerre (1562-1563), marquée par la bataille de Dreux. L'édit d'Amboise (mars 1563) suscite une réconciliation provisoire. Mais les hostilités reprennent en 1567, et c'est le début d'une série d'épisodes atroces où nos écrivains verront sombrer à la fois la gloire nationale et le prestige des chefs trop ambitieux. Chaque guerre a ses charniers et ses hontes (Françoise Joukovsky, La gloire dans la poésie française et néolatine du XVIe siècle, 1969 - books.google.fr).

 

Acrostiche : TLLP, tulipe

 

tulipe, tullipe (Antoine Malet, L'Oeconomie spirituelle et temporelle de la vie et maison, noblesse & religion des nobles & des grands du monde, dressée sur la vie, piete et sage, 1619 - books.google.fr).

 

Il y a le médecin néerlandais qui vers 1550-1560 décrivit pour la première fois la tulipe [...]. La tulipa suaveolens est mentionnée dès 1561 par Conrad Gestner dans son De hortis Germaniae liber, témoin sérieux de la passion botanique du Nord. L'énorme succès de la fleur à bulbe fut tel qu'on a pu parler d'une «Tulipomanie» générale après 1600. Elle coïncide avec la mode des «bouquets peints» ou, comme nous disons si gauchement, des «natures mortes de fleurs» (André Chastel, Les jardins et les fleurs, Revue de l'art, Numéros 51 à 54, 1981 - books.google.fr).

 

Ogier Ghiselin de Busbecq, en latin : Augerius Gislenius Busbequius et de temps en temps Augier Ghislain de Busbecq, (nĂ© en 1522 Ă  Comines, Flandre - mort le 28 octobre 1592 Ă  Saint-Germain-sous-Cailly près de Rouen) est un diplomate et botaniste flamand. Il est d'abord au service de l'empereur romain germanique Charles Quint, puis de Ferdinand Ier, Maximilien II et Rodolphe II, comme ambassadeur auprès de l'empire ottoman du sultan Soliman le Magnifique en 1555 puis Ă  nouveau en 1556. EmprisonnĂ©, il ne revient qu’en 1562. Ensuite, il fut gouverneur des fils de Maximilien II. On doit Ă  Busbecq la dĂ©couverte des Res gestae de l'empereur Auguste Ă  Ancyre et l'introduction en Europe de la tulipe, du lilas commun et du marronnier d'Inde. Il est le premier Ă  s’intĂ©resser Ă  la langue gotique de CrimĂ©e. Il meurt en 1592 près de Rouen et son corps est enterrĂ© Ă  Saint-Germain-sous-Cailly, tandis que son cĹ“ur est embaumĂ© et rapatriĂ© dans son fief familial de Bousbecque (fr.wikipedia.org - Ogier Ghislain de Busbecq, Jean-François Solnon, L'Empire ottoman et l'Europe, 2017 - books.google.fr).

 

L'incapacitĂ© des Français Ă  rĂ©gler la question du douaire ennuie d'autant plus Busbecq qu'elle a des consĂ©quences fâcheuses pour Élisabeth d'Autriche, veuve de Charles IX. La malheureuse veuve est en effet si dĂ©munie financièrement qu'il lui est impossible, Ă  sa grande dĂ©solation, d'aller voir Ă  Amboise sa petite fille. On a peine Ă  le croire, mais «elle est si pauvre, affirme Busbecq, que les repas, Ă  son domicile parisien, ne sont plus servis qu'Ă  la seule table oĂą elle est assise. Des rations de pain et de vin sont donnĂ©es au reste de son personnel qui n'a pas d'autre choix que de s'en contenter...» Il n'y a pas qu'Ă  la cour de France que la vie est dure ! Fort heureusement, Élisabeth finit par trouver l'argent du voyage et arrive Ă  la fin du mois de juillet 1575 Ă  Amboise, oĂą sa fille Marie-Élisabeth est Ă©levĂ©e. Elle reste un mois et demi avec elle avant de regagner Paris pour quelques semaines, puis de prendre la route de Vienne. De la petite fille, alors âgĂ©e de trois ans et qui mourra Ă  ans, Busbecq dit qu'elle n'est «certainement pas laide, bien qu'elle ressemble davantage Ă  son père qu'Ă  sa mère». Un compliment pour le moins ambigu. Le problème de la petite Marie-Élisabeth prĂ©occupe Maximilien, qui a toujours aimĂ© avoir près de lui sa descendance. L'empereur pose crĂ»ment la question Ă  Busbecq de savoir si l'enfant sera autorisĂ©e Ă  accompagner sa mère : «Je ne suis pas optimiste, rĂ©pond Busbecq, car il n'y a aucun prĂ©cĂ©dent de cette sorte dans l'histoire de France. Je les vois venir : ils vont d'abord Ă©voquer la longueur du voyage, la fragilitĂ© de l'enfant et sa jeunesse, puis ils diront que cela ne s'est jamais fait et je ne vois pas ce qu'on pourrait rĂ©torquer.» Au cas oĂą Maximilien ferait une ultime tentative, Busbecq lui conseille d'Ă©crire au roi et Ă  Catherine de MĂ©dicis et de leur demander Ă  voir sa petite-fille : «Si cela se faisait, alors la situation serait inversĂ©e, et le retour retour en France de l'enfant dĂ©pendrait de votre bon vouloir» (Ignace Dalle, Un EuropĂ©en chez les Turcs: Auger Ghiselin de Busbecq, 1521-1591, 2008 - books.google.fr).

 

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