La colonisation en Amérique
La colonisation en Amérique

 

I, 63

 

1603-1604

 

Les fleaux passĂ©s diminuĂ© le monde :

Long temps la paix terres inhabitĂ©es :

Seur marchera par ciel, terre, mer & onde :

Puis de nouveau les guerres suscitées.

 

"inhabitées"

 

« marchera par...mer & onde Â» et « terres inhabitĂ©es Â» font penser aux territoires encore vierges des AmĂ©riques que les Ă©migrants europĂ©ens viendront peupler en traversant les ocĂ©ans et les mers. En 1604, les premiers colons français s’installent dans l’île de Sainte-Croix aujourd’hui aux Etats-Unis. Ils fondent Port-Royal en Acadie en 1605 et Samuel de Champlain QuĂ©bec en 1608. S’ils ont maille Ă  partir avec les Indiens, il faudra attendre 1629 pour que le Canada soit rattrapĂ© par les guerres europĂ©ennes, Champlain capitulant devant une flotte anglaise.

 

En 1603, alors que la France était gouvernée par le Roi Henri IV et que l'Édit de Nantes, proclamé cinq ans auparavant, avait ramené la paix et la prospérité dans le royaume, Champlain partait pour l'Amérique. Il était alors au service d'une des compagnies privées qui se créaient en assez grand nombre pour commercer et exploiter les richesses de nouvelles terres et dont l'ultime but était de trouver la route pour le Cathay et ses trésors en passant par l'Ouest. Champlain recherchait, pour le compte d'Aymar de Chaste, gouverneur de Dieppe, un site idéal pour le premier établissement de colonisation. Ayant exploré le Saguenay et le Saint-Laurent, il mouilla l'ancre à Québec le 22 juin 1603. Il n'eut pas l'intention à cette époque de s'installer à Québec et fut plus attiré par le site de Trois-Rivières. Toutefois, il nota dans ses mémoires: «Il y a le long de la côte dudit Québec, des diamants dans les rochers d'ardoise, qui sont meilleurs que ceux d'Alençon.» Ce premier séjour fut suivi de deux autres. Ce fut dans le cadre du troisième, dans les années 1608 et 1609, que Champlain choisit finalement d'installer le premier établissement humain de Nouvelle-France à Québec. Sous la houlette du sieur protestant Pierre du Gua De Monts, successeur de De Chaste, Champlain remonta le fleuve Saint-Laurent avec vingt-huit hommes d'équipage. Le 3 juillet 1608, il décida de s'installer à "la pointe de Québec" sur le futur emplacement de la basse ville et fit construire une abitation. La définition donnée par le dictionnaire Furetière à l'époque au terme d'Abitation est : "petite colonie ou un établissement qu'on va faire en des lieux déserts et inhabitez". Ce n'est donc pas une ville qui est créée mais un comptoir de traite. Le choix du lieu semblerait avoir été déterminé pour des motifs d'ordre stratégique. En effet la compagnie se heurtait au commerce illégal des fourrures pratiqué à Tadoussac par les Basques. Aussi Champlain s'installant au détroit de Québec, les marchands clandestins ne pouvaient plus remonter le fleuve. On comprend alors pourquoi Champlain dut mater une rébellion et semblerait avoir échappé à une tentative de meurtre. L'Abitation, lieu fortifié, formé de trois édifices et un entrepôt reliés par une seule galerie extérieure et entourés par une palissade, aurait pu jouer un rôle défensif non seulement, face aux Indiens, mais également, face aux Européen (Martine Geronimi, Québec et la Nouvelle-Orléans: paysages imaginaires français en Amérique du Nord, 2003 - books.google.fr).

 

La première «Abitation» de Québec, dite «de Champlain», était en fait la propriété du commanditaire de l'expédition de 1608, Pierre Dugua de Mons (Mickaël Augeron, Dominique Guillemet, Champlain ou les portes du nouveau-monde: cinq siècles d'échanges entre le centre-ouest français et l'Amérique du nord, XVIe-XXe siècles, 2004 - books.google.fr).

 

Fléaux climatiques et des guerres de religion et dépeuplement

 

Il existe un inquiétant déséquilibre entre l'offre et la demande. Les bouches à nourrir sont fort nombreuses, car une démographie galopante a doublé la population française entre 1450 et 1560, à une époque où, après la guerre de Cent Ans et pendant le «beau XVIe siècle» de la Renaissance, mariage et natalité ont pu se donner libre cours. La France est donc, dès le début des guerres de religion, paradoxalement menacée sur son territoire par un trop riche potentiel humain. Même si, par la suite, de 1560 à 1630 et plus particulièrement à partir de 1580 où commence la grande phase destructrice de la Ligue, le nombre des Français tend à régresser de 10 à 20 %. On constate, pendant toute la durée des troubles, une forte demande de nourriture de base, due à une population résiduelle excédentaire. Or, dans le même temps, l'offre des biens de consommation régresse. Les deux mouvements en sens contraire, il se produit une rupture dans les capacités de survie, due à une raréfaction, durable, des denrées alimentaires. Un déséquilibre vital s'installe pendant une quarantaine d'années dans la France déjà déchirée et meurtrie. La rareté des subsistances est d'abord imputable au climat. Dans les années 1560-1580 s'instaure pour longtemps «un petit âge glaciaire», qui modifie les données traditionnelles des échanges naturels. A une première moitié du XVIe siècle dominée par une période de réchauffement et de ciel clément, malgré quelques crises cycliques graves, succède une période de refroidissement et de mauvais temps. Les hivers, plus rigoureux au milieu des neiges et des glaces, font geler les semences d'automne ; les printemps, trop frais ou trop froids, les étés pourris, noyés dans les pluies, empêchent la levée et le mûrissement normal des grains qui noircissent et s'abîment avant la récolte. Ce qui peut être sauvé est généralement récolté au cours de moissons faites à la main, sous les intempéries, ce qui achève de détruire les derniers espoirs de récolte. Il s'agit là d'une tendance générale qui ne se reproduit pas forcément année après année, de bonnes rentrées de blés pouvant succéder à des catastrophes. Il n'empêche que ce mouvement néfaste de longue durée a dominé et qu'il a été durement ressenti par les Français de l'époque (Philippe Tourault, Les Angevins au temps des Guerres de religion: D'après le Journal de Louvet, 1987 - books.google.fr).

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