Fakhr Eddine, Ă©mir druze du Liban

Fakhr Eddine, Ă©mir druze du Liban

 

I, 50

 

1594

 

De l'aquatique triplicité naistra

D'un qui fera le jeudy pour sa feste :

Son bruit, loz, regne, sa puissance croistra :

Par terre & mer aux orients tempestes.

 

"aquatique triplicité"

 

La notion de triplicité aquatique dans une conception cyclique de l'histoire se retrouve chez les Ismaéliens, et en particulier chez les Frères de la Pureté.

 

Le passage de la conjonction de Jupiter et de Saturne d'une triplicité à une autre tous les 240 ans (238 ans) était censé déterminer un changement de dynastie et un renversement de situation dans l'imâmat En ces 240 ans se succédaient deux heptades d'imâms correspondant à une double période : renaissance et apogée, la conjonction se produisant alors douze fois dans des signes de terre (Taureau, Vierge, Capricorne), ou dans des signes d'eau (Cancer, Scorpion, Poisson) ; ou au contraire décadence et clandestinité, la conjonction se produisant alors douze fois dans des signes de feu (Bélier, Lion, Sagittaire) ou dans des signes d'air (Gémeaux, Balance ou Verseau) (Yves Marquet) (Lettre à Henry - Jovialistes et Achem).

 

Le 28 août 571, qui répond à la naissance de Mohammed, la conjonction est entrée dans la triplicité aquatique qui comprend Scorpion, Écrevisse et Poissons, et y a évolué dans cet ordre à quatre reprises jusqu'en 789. Le 3 octobre 809, elle est entrée dans la triplicité ignée (Sagittaire, Lion, Bélier). Enfin, le 19 novembre 1047, elle est passée dans la triplicité terrestre (Capricorne, Vierge, Taureau) (Une date astronomique dans les Épîtres des Ikhwân as Safâ, Journal asiatique, 1915 - books.google.fr).

 

La triplicité d'eau de 571 + 952 = 1523 dure donc jusqu'en 1761 qui commence une triplicité de feu (809 + 952). Un quatrain daté de 1761, le III, 77, renvoie à la date du quatrain III, 31, 1727. Ces deux quatrains ont une rapport avec des pays musulmans chiites ou sunnites comme l'Egypte, la Turquie ou la Perse. La différence entre les dates de 1761 et 1727 est 34, pile le septième de 238. En 1594 où se placerait le quatrain I, 50 se situe dans cette période. Remarquons aussi que dans le quatrain III, 77 (1761) il est parlé de tiers climat sous Aries comprins. Or Aries, le Bélier en latin, est un signe de feu.

 

Jean Bodin, dans une lettre qui lui est attribuĂ©e “S’il y a moyen de savoir les changements & ruines des RĂ©publiques Ă  l’advenir”, première Ă©dition non corrigĂ©e, 1576, note :

 

Albumazar, Alcabice & Leopold (d’Autriche) appellent grande conjonction des deux hautes planètes qui se fait de 20 en 20 ans environ (conjunctio magna) et la plus grande est de Saturne & Jupiter au changement de triplicité qui se fait en 240 ans environ (conjunctio major) & la très grande qui se fait de Saturne & Jupiter au signe d’Aries (Bélier) en 960 ans environ (conjunctio maxima)

 

la conjonction de 1524 qui eut un tel retentissement est a priori assez peu significative du point de vue du cycle des grandes conjonctions (cf. infra), à tel point que le phénomène, par son caractère plus visuel que structurel nous semble plus relever de l’astronomie que de l’astrologie, mais il nous semble que les astrologues, pour ne pas être en reste, emboîtèrent le pas à ceux qui avaient ameuté l’opinion, sur des bases plus spécifiquement symboliques (le poisson) et prophétiques (le Déluge). Mal leur en prit. On aurait tort de croire en effet que les relations entre astronomie et astrologie sont nécessairement fructueuses (Jacques Halbronn, Le prophétisme antéchristique, 2002 - ramkat.free.fr).

 

On a une conjonction de Saturne et Jupiter (avec Uranus) le 19 mars 1762 au 12ème degré du Bélier, les conjonctions de Saturne et de Jupiter ayant lieu à peu près tous les vingt ans (Chaulveron, Nostradamus et la fin des temps: 1555-2065, 2017 - books.google.fr).

 

Roussat et Trithème se sont inspirés d'Ibn Ezra dans leurs conceptions des chronocraties et ont inspiré à leur tour Nostradamus.

 

L'examen de la liste d'auteurs et d'ouvrages cités dans la section philosophique de la Hadîqa montre que les sources juives sont numériquement supérieures aux emprunts gréco-arabes et islamiques. Cependant, vu le parti considérable qu'Ibn Ezra tira de l'Encyclopédie des Frères de la Pureté (pas moins de vingt-six citations), les emprunts aux auteurs arabes peuvent être considérés comme plus importants sous le rapport de leur étendue. Bien qu'Ibn 'Ezra cite nommément les Frères dans la Muhadara ils ne sont jamais mentionnés ouvertement dans la Hadîqa. Les nombreuses citations de leurs épîtres sur les mathématiques, l'astronomie, le ciel et le monde, la génération et la corruption, les plantes, les animaux, le composé humain, le microcosme, etc. sont introduites par des artifices variés. Lorsque l'auteur ne les fait pas passer pour ses propres paroles, comme ce fut souvent le cas au Moyen Age, il les cite au nom d'un "certain philosophe", ou "un des sages" (Paul Fenton, Philosophie et exégèse dans le Jardin de la méthaphore [sic] de Moïse Ibn Ezra, philosophe et poète andalou du XIIe siècle, 1997 - books.boogle.fr

 

"Ieudi" : les Druzes

 

Fils d'al-'AzĂ®z et d'une mère chrĂ©tienne, le calife Hâkem naquit dans un château du Caire le jeudi 13 aoĂ»t 985. Il fut le premier prince de cette dynastie Ă  voir le jour en Égypte. Il succĂ©da, Ă  l'âge de 11 ans Ă  son père mort dans la ville de Bilbays oĂą il s'Ă©tait rendu pour organiser une campagne contre les Byzantins. L'installation de Hâkem, au Caire, le jeudi 16 octobre 996, donna lieu Ă  un cĂ©rĂ©monial majestueux oĂą se dĂ©ploya le faste de l'Empire fatimide. Les hauts fonctionnaires de la Cour, les officiers de l'armĂ©e et la foule se prosternèrent devant le nouveau Calife qui prit le titre d'al-Hâkem bi'amr Allâh : “Celui qui juge et qui gouverne par l'ordre de Dieu". Hâkem grandit et s'efforça de conquĂ©rir un pouvoir sans partage. Les historiens rapportent que le Calife Ă©tait jaloux de son tuteur Barjawân et lui garda rancune parce qu'il l'appelait 'lĂ©zard' lorsqu'il Ă©tait enfant. L'esclave Raydân entretint cette rancune en comparant Barjawân Ă  l'esclave Kâfour qui avait ravi la royautĂ© aux princes Ikhchides, ses pupilles. Hâkem se rĂ©solut alors Ă  faire pĂ©rir Barjawân. Il lui fit parvenir un message disant : “Le petit lĂ©- zard est devenu grand dragon et vous demande”. Or, au cours d'une promenade, le Calife avait suggĂ©rĂ© Ă  Raydân d'assassiner Barjawân. Celui-ci se prĂ©senta donc auprès de Hâkem et pĂ©rit le 4 avril de l'an 1000. Ce fut la première d'une sĂ©rie d'exĂ©cutions qui emporta la majoritĂ© des fonctionnaires de l'État. Les historiens anciens et modernes soulignent la cruautĂ© exercĂ©e contre les ChrĂ©tiens, leurs biens et leur culte durant le règne du calife Hâkem. MaqrĂ®zĂ®, pro-fatimide, s'apitoie sur leur sort et dĂ©clare qu'ils n'avaient jamais Ă©tĂ© autant persĂ©cutĂ©s auparavant. La violence n'Ă©pargna pas d'autres sectes. Les Sunnites devaient adopter le droit et la jurisprudence ismaĂ©liens. Le Prophète Mahomet et les quatre Califes, ses compagnons, furent anathĂ©matisĂ©s. Des formules de malĂ©diction furent Ă©crites sur les murs des mosquĂ©es, des boutiques et dans les endroits publics. Ces pratiques suscitèrent l'opposition des Sunnites d'Égypte. Le Calife leva l'ana- thème le 28 avril 1009 et rĂ©tablit la prière du duha, abolie depuis 980. Hâkem ordonna une sĂ©rie de dĂ©cisions Ă©thico-sociales. ConformĂ©ment aux principes de l'Islam, il interdit le vin, la culture des vignobles, la bière (fuqâ') et la plantation de l'orge. Il proscrit Ă©galement la consommation de certaines salades : la muloukhiya, espèce de cresson mucilagineux fort apprĂ©ciĂ© en Égypte, sous prĂ©texte que les premiers Califes en Ă©taient friands . La salade de roquette (muwakkaliya), les poissons sans Ă©cailles Ă©taient sur la liste des aliments interdits. Le Calife supprima les mauvais lieux, prescrivit aux musiciens et aux chanteurs d'abandonner leur mĂ©tier et interdit la fabrication d'instruments de musique. Les femmes subirent un traitement particulier. Elles ne pouvaient pas se parer, aller aux bains visiter les cimetières ni mĂŞme sortir de leur maison. Les cordonniers ne pouvaient pas leur fabriquer des chaussures. Cette mesure fut appliquĂ©e pendant sept ans. Les femmes qui osèrent se rendre aux bains furent emmurĂ©es. Le Calife interdit en outre les rassemblements et les promenades au bord du Nil. Il proscrivit Ă©galement d'Ă©clairer les rues, les boutiques, de circuler et de faire du commerce la nuit, et d'organiser des 'orgies'. Notons que ces activitĂ©s Ă©taient autorisĂ©es auparavant et qu'il lui plaisait d'y prendre part. Ordre fut donnĂ© d'Ă©liminer les chiens. Toute infraction Ă  ces dĂ©crets entraĂ®nait une sanction immĂ©diate. Contrairement Ă  ce que pensent les historiens contemporains, les mesures prises durant le califat de Hâkem ne sont ni gratuites, ni absurdes. Elles reflètent une situation socio-Ă©conomique problĂ©matique digne d'ĂŞtre Ă©lucidĂ©e. Des crises sĂ©rieuses Ă©branlèrent le règne de Hâkem. Des rĂ©voltes Ă©clatèrent au Caire entre maghrĂ©bins et orientaux; d'autres en Syrie et Ă  Tyr. Mais la sĂ©dition la plus dangereuse fut dirigĂ©e par Abou Rakwa. Celui-ci rĂ©unit au- tour de lui plus de vingt mille hommes et conduisit entre 1004 et 1006 une sĂ©rie d'attaques contre l'Égypte dont la plupart furent rĂ©ussies. Il menaça le Caire, obligea le Calife Ă  assouplir sa position Ă  l'Ă©gard des Sunnites et Ă  entretenir une armĂ©e très coĂ»teuse. La rĂ©pression de Abou Rakwa greva le TrĂ©sor de plus d'un million de dinars. Une autre rĂ©volte dirigĂ©e par Mufarrij ibn Daghfal secoua la Palestine entre 1011 et 1013. Pour la mater, Hâkem dut recourir Ă  un subterfuge souvent utilisĂ© par les Fatimides : corrompre par l'argent les chefs de la rĂ©bellion. Quant Ă  la politique extĂ©rieure, Hâkem entĂ©rina les efforts de Barjawân en vue d'une trĂŞve avec les Byzantins. Cependant, les persĂ©cutions systĂ©matiques des ChrĂ©tiens et la volontĂ© de Hâkem de contrĂ´ler Alep et ses environs amenèrent Basile II Ă  interrompre en 1016 le commerce avec le territoire Ă©gyptien. L'historien sĂ©rieux admet avec Canard qu'il y eut beaucoup d'atrocitĂ©s commises Ă  l'Ă©poque de Hâkem. Mais il ne peut les imputer Ă  sa seule irresponsabilitĂ©. Davantage, il doit chercher les causes du malaise. En effet, Hâkem se heurta Ă  de graves problèmes. La croissance dĂ©mographique Ă©tait galopante chez les BĂ©douins nomades qui attaquaient les paysans, pillaient les rĂ©serves de grains et abĂ®maient l'agriculture. Aucun calife ne chercha Ă  rĂ©soudre le problème du nomadisme que la conquĂŞte musulmane avait aggravĂ©. Ils ne s'occupèrent que des villes, nĂ©gligèrent la campagne et les sĂ©quelles de ce dĂ©sintĂ©ressement subsistent jusqu'Ă  ce jour. Sur un fond politique et social troublĂ©, le climat aussi agissait nĂ©gativement. L'insuffisance des pluies et des crues perturbait les activitĂ©s agricoles, provoquait des pĂ©nuries de cĂ©rĂ©ales et rendait les paysans impuissants Ă  satisfaire leurs besoins comme ceux des nomades. Le changement de climat et la poussĂ©e dĂ©mographique, enregistrĂ©s depuis 989, inaugurèrent une pĂ©riode difficile qui dura plus de 70 ans. La flambĂ©e des prix du grain suscita des troubles sociaux. Alors surgirent des hommes obscurs tels qu'Abou Rakwa qui parvinrent Ă  mobiliser une vingtaine de milliers d'hommes ruinĂ©s en l'espace de quelques semaines, et Ă  entreprendre des guerres contre le pouvoir fatimide. Ce fut Ă©galement le cas de Mufarrij ibn Daghfal ibn l-Jarrâh. Certes, les mesures entreprises par le Calife pour remĂ©dier Ă  ces difficultĂ©s Ă©conomiques n'Ă©taient pas des plus adĂ©quates. Il entreprit de destituer, puis de liquider les hauts dignitaires, d'abolir les pensions viagères et de diminuer le nombre des soldats pour arrĂŞter l'hĂ©morragie de la rente de l'État. Il confisqua les biens ecclĂ©siastiques et paralysa les mouvements d'Ă©changes en semant la terreur. Tout cela aggrava encore la crise et amena le Calife Ă  devenir plus autoritaire, irascible et mĂ©lancolique, et Ă  sĂ©vir contre les minoritĂ©s. Le blocus commercial dĂ©crĂ©tĂ© par Basile II en 1016 contre l'Ă©change des cĂ©rĂ©ales amena toutefois Hâkem Ă  assouplir sa position envers les ChrĂ©tiens et les Sunnites. Hâkem ne s'attela pas seulement Ă  rĂ©soudre la crise Ă©conomique mais il accorda beaucoup d'importance aux phĂ©nomènes culturels. Il fonda une 'maison de la sagesse', sorte d'universitĂ© qu'il dota d'une bibliothèque. Il rĂ©tribua les savants et les chercheurs en privilĂ©giant le courant ismaĂ©lite. Le Caire attira alors les philosophes et les savants de tout le monde arabe. Hâkem avait aussi un sens aigu de la vĂ©ritĂ© et de la justice et aimait Ă©couter personnellement les plaintes de ses sujets. Il exerça la charge de hisba c'est-Ă -dire du contrĂ´le du marchĂ©. Il confisqua les biens du grand cadi, Muhammad ibn al-Nu'mân car une enquĂŞte rĂ©vĂ©la qu'il avait dĂ©robĂ© entre vingt et trente six mille dinars Ă  la caisse des orphelins. Le Calife Hâkem fit bâtir les mosquĂ©es al-Râchida, al-Maqs et acheva al-Azhar (la Prestigieuse) qu'avaient commencĂ©e ses prĂ©dĂ©cesseurs. Il supprima certaines taxes illĂ©gales non Ă©dictĂ©es par la Chari'a : les taxes sur les transports et les transactions commerciales, appelĂ©es mukous, ainsi que le quint ou le najwa que le nĂ©ophyte devait verser quand il adhĂ©rait Ă  la doctrine ismaĂ©lite. La personnalitĂ© mystĂ©rieuse du Calife intrigua les historiens. Certains le considèrent comme un dĂ©pravĂ© et soulignent ses excentricitĂ©s. Ils lui attribuent des joutes obscènes et violentes provoquĂ©es au Caire entre ses esclaves et ses Ă©cuyers. D'autres voient en lui une figure mystique exceptionnelle. En effet, vers la fin de son règne, le Calife se dĂ©sintĂ©ressa des divertissements mondains et versa dans un mysticisme profond. Il laissa pousser barbe et ongles et revĂŞtit durant sept ans la mĂŞme tunique de laine noire. Il ne se lavait plus. Il renonça aux titres et formules de salut dus au Calife et interdit que l'on se prosternât devant lui. La nuit venue, il se rendait Ă  dos d'âne, dans la montagne al-Muqattam oĂą il contemplait les Ă©toiles. C'est au cours de l'une de ces retraites qu'il disparut (Marie Dupont, Les Druzes, 1994 - books.google.fr).

 

Seuls sont retrouvĂ©s ses vĂŞtements ensanglantĂ©s et dĂ©chirĂ©s Ă  coups de poignard. Chez ses partisans se propage alors la rumeur que le calife rĂ©apparaĂ®tra dans mille ans. Deux de ses disciples rĂ©pandent ses idĂ©es, Hamza et Mohammad el-Darazi – son nom donnera naissance au mot « druze » dĂ©signant la communautĂ© et la religion dont Al-Hakim est Ă  l'origine. Le principal texte sacrĂ© des druzes n'est pas le Coran mais Le Livre de la sagesse qui n'est connu que d'eux. Cette religion fait des emprunts aux philosophes grecs, au judaĂŻsme et au christianisme tout en Ă©cartant certaines règles fondamentales de l'islam sunnite, comme le jeĂ»ne du Ramadan et le pèlerinage Ă  La Mecque. Les druzes s'Ă©loignent ainsi de la secte ismaĂ©lienne Ă  laquelle appartiennent les Fatimides et qui est dĂ©jĂ  un schisme de l'islam chiite. Pour Kamal Joumblatt, chef druze libanais assassinĂ© en 1977, le dogme des druzes est fondĂ© sur l'initiation : «Seuls les initiĂ©s savent lire et comprendre les livres sacrĂ©s qu'on nomme Livres de la sagesse... C'est une religion d'ascètes spirituels, de gnostiques pratiquant la vie; une religion de l'Ă©thique autant que de la connaissance.» Le premier devoir du druze est de croire au caractère divin d'Al-Hakim. Un des points essentiels de la doctrine druze est la croyance en la mĂ©tempsycose – le corps meurt mais l'âme est immĂ©diatement rĂ©incarnĂ©e dans le corps d'un nouveau-nĂ© druze. Ainsi, il y a un nombre dĂ©terminĂ© et invariable de druzes sur terre et un non-druze ne peut pas se convertir. Cette conception d'une communautĂ© close que personne ne peut quitter et dans laquelle nul ne peut entrer ne s'impose qu'en 1043, Ă  l'issue d'une campagne de prosĂ©lytisme menĂ©e principalement dans les montagnes du Liban et en Syrie Ă  la faveur de rĂ©voltes de paysans. Kamal Joumblatt prĂ©cise : "Chez nous, il n'y a pas d'Ă©glises ou de mosquĂ©es Ă  proprement parler. Il y a le majliss, c'est-Ă -dire le conseil, un lieu oĂą se rassemblent les initiĂ©s chaque jeudi soir pour prier ensemble. Ce n'est pas un endroit spĂ©cifiquement consacrĂ© au culte et oĂą il soit obligatoire d'aller ; les druzes peuvent aussi bien prier chez eux. On peut y aller ou ne pas y aller. On est libre. » Après leur installation dans les montagnes du Liban, les druzes manifestent les traits de caractère qui vont ĂŞtre les leurs pendant des siècles : une communautĂ© farouchement attachĂ©e Ă  son particularisme et n'hĂ©sitant pas Ă  manifester ses qualitĂ©s guerrières" (Xavier Baron, Histoire de la Syrie. 1918 Ă  nos jours, 2014 - books.google.fr).

 

1594

 

L'émir Fakhr Eddine, en donnant à son émirat cette dimension unique et en poursuivant non seulement son gouvernement autonome, mais aussi ses conquêtes, comme Beyrouth, se vit accuser par la Sublime Porte d'avoir outrepassé ses pouvoirs, et fut contraint à l'exil. Ainsi alla-t-il à Venise, puis vécut pour un temps à Florence chez les Médicis, où il fut reçu comme un prince. Il avait créé un émirat reconnu internationalement, donc un État indépendant. On ne le nommait pas ainsi en droit mais il l'était de facto. Il a gouverné la Montagne, comme on appelait alors le Mont Liban, de 1595 à 1634, avec une interruption lorsque Fakhr Eddine dut partir en exil à Florence. Il revint au Mont-Liban et reprit une politique adroite à l'égard de la Sublime Porte, jusqu'au moment où, redevenu trop puissant aux yeux des Ottomans, il fut d'abord emprisonné avec ses deux fils, pour être ensuite exécuté. L'émirat du Liban était donc une Nahda avant terme, parce que cette émergence politique s'est accompagnée d'une grande ouverture intellectuelle sur l'Europe, surlesarts, le commerce et surtoutles langues étrangères, non pas exclusivement dansles sérails du pouvoir, mais également au niveau du peuple. De ce moment datent, dans la langue parlée libanaise, les termes italiens qui ont survécu depuis et qui concernaient surtout la vie quotidienne. Sans parler des arts, de la peintureet de l'architecture dont on découvre l'importance aujourd'hui. Il y eut surtout les grands Libanais partis pour Rome et Paris, dès ce moment-là, lefameux Gabriel Sionita (Jebraïl el Sahyouni), et tous ceux qui étaient venus enseigner les langues orientales. Sahyouni était professeur au Collège de France à l'époque où grandissait le rôle de « l'éminence grise » de Richelieu, le célèbre Joseph du Tremblay, dit le père Joseph, dont l'influence s'exerçait entre Paris et Rome, après la fondation du Collège maronite de Rome, en 1584 (Jean Lacouture, Ghassan Tuéni, Gérard D. Khoury, Un siècle pour rien: Le Moyen-Orient arabe de l'Empire ottoman à l'Empire américain, 2014 - books.google.fr

 

Fakhr al-Dïn ou Fakhr-al-Din II : «fierté de la religion» est né en 1572 à Baakline et mort 13 avril 1635, période de triplicité d'eau (fr.wikipedia.org - akhreddine II).

 

Autour de 1047 (439 de l'HĂ©gire)

 

Le passage d'une triplicité à l'autre avait, aux yeux des astrologues arabes, une importance capitale. Elle avait pour conséquence un changement du pouvoir sur notre globe. Il est certain, pour Casanova, que Ikhwan al-safa était affilié à la secte batinite, et le texte est une allusion au triomphe attendu des Fatimides. Ce triomphe s'est réalisé le 1 er janvier 1059 (13 Zul-qaida 450), onze ans et quarante deux jours après la conjonction fatidique; et le Khutba fut prononcé au nom du khalife fatimide Al-Muntasir. De tout ce qui précède, il apparaît que le texte des Epîtres a été rédigé peu avant l'année 439 de l'Hégire. La doctrine des fatimides se trouvait en opposition avec celle des chiites (duazdé-imam), parce qu'ils affirment qu'après le douzième imam il n'y a plus eu d'autre. Le dernier Imam qui n'est pas mort est l'imam attendu (al-imam al-muntazar). Il est arrivé, chez les fatimides d'Egypte, un moment (524-526) où l'autorité de l'Imam a été rejetée, et c'est l'imam attendu qui a été proclamé dans le kuthba. Tous ces arguments montrent que la rédaction des Epitres a eu lieu entre 418 et 427 de l'Hégire, sous le règne d'Al-Zâhir. Ibn al-Qiftî et Abu Hayyan Tawhidî donnent des renseignements sur les auteurs et la composition des Epitres. Mais la date fixée par ce dernier (373 de l'hégire) ne correspond pas à la recherche de Casanova (Hilmi Ziya Ülken, La pensée de l'Islam, 1953 - books.google.fr

 

Al Zajir (1021-1036) s'efforça de remettre de l'ordre, de récupérer les sommes gaspillées par al-Hâkim, de rétablir la liberté de culte des dhimmis, de pourchasser les premiers druzes et de destituer les sunnites qui avaient remplacé souvent les chiites. Les druzes (ou hâkimîya, du nom d'al-Hâkim) eurent pour chef au début Darazî et Hamza Bn 'Alî. Chiites septimanains, ils croyaient donc en l'incarnation de l'esprit de Dieu chez al-Hakim. Ils furent hostiles à la loi islamique et abandonnèrent les obligations cultuelles. Ils eurent du succès dans le Chouf syrien (Hervé Bleuchot, Droit musulman: Tome 1 : Histoire. Tome 2 : Fondements, culte, droit public et mixte, 2015 - books.google.fr

 

Aussitôt après son accession au trône, quarante jours après la disparition d'al-Hakim az-Zahir viola son serment et se mit à persécuter les Unitaires d'Antioche à Alexandrie, niant tout caractère divin à ses ancêtres. Cette persécution, dont témoigne l'épître n° 35, continua pendant sept années, au cours desquelles d'innombrables Unitaires furent massacrés. Hamza entra lui aussi en occultation , tout comme les autres dignitaires. En 418 (1027) al-Muqtana reçut de Hamza une lettre lui ordonnant de reprendre la prédication, ce qu'il fit avec beaucoup de zèle. Mais il dut lutter à la fois contre des ennemis externes et internes , notamment contre plusieurs apostats (Muhammad b. al-Barbariya, Lahiq b. as-Saraf, Sukayn, Mus'ab at-Taymi) qui pervertirent la doctrine de Hamza, menaçant de l'intérieur. Les nombreuses épîtres d'al-Muqtana témoignent de cette lutte acharnée. Finalement, une fois sa mission accomplie, al-Muqtana entra à son tour en occultation en 434 (1042 - 1043). Selon une “tradition populaire”, Hamza et ses dignitaires auraient quitté Le Caire peu avant, rejoignant la Syrie par la route côtière, pour s'établir finalement en Chine. Par ailleurs, des “manuscrits récemment découverts” (“recently uncovered manuscripts”) établiraient qu'al-Hakim, au moment de sa disparition, se rendit dans l'est de l'Iran, au Sigistan, où Hamza le rejoignit peu après. En 439 (1047), Hamza envoya du Sigistan à al-Muqtana des “méditations mystiques” dictées par al-Hakim : Sigill sara'ir alawwal wa l-ahir, dont les Druzes prétendent détenir des copies. Selon la croyance druze, Hamza et les autres dignitaires, loin d'être assassinés, continuaient donc à diriger la prédication unitaire du fond de leur retraite. Ainsi, al-Muqtana aurait agi sous le commandement de Hamza et soumis tous ses écrits à son approbation. Hamza sortira de son occultation au Jour de la Résurrection, en même temps qu'al-Hakim (D. De Smet, Isma'il ibn Mhammad Tamimi, Hamzah ibn Ali ibn Ahmad, Rasa'il al-Hikma, volumes 1 et 2, 2007 - books.google.fr

 

107 ans et Liban : pour relier aux 107 ans des quatrains précédent I,49 et suivant I, 51

 

Il existe un personnage dit saint, Dorothée de Tyr, qui meurt à 107 ans durant une persécution de Julien dit l'Apostat. Il serait le premier à faire l'histoire du prophète Elie, fondateur selon la légende, de l'ordre du Mont-Carmel (carmélites). (Mathias de Saint-Jean, Histoire panégyrique de l'ordre de Nostre-Dame du Mont-Carmel, 1658 - books.google.fr

 

Dorothée de Tyr est un auteur pseudépigraphique d'un recueil de paroles, de portraits et d'hagiographies d'apôtres, de prophètes et de disciples appelé «Le Synopsis» (fr.wikipedia.org - Dorothée de Tyr

 

Le citron des Carmes est en fait une poire de forme et de couleur citrines. La sainte Dorothée une autre poire de même couleur (Octave Thomas, Guide pratique de l'amateur de fruits, 1876 - books.google.fr

 

1594 + 107 = 1701

 

Le nom de Fachreddin (gloire de la foi) retentit jusqu'aux extrémités de l'Europe. Ce prince habile, entreprenant, audacieux, attachait un grand prix aux sympathies européennes, et pour mieux se les concilier, il inventa aux Druses une origine française qui eut cours pendant quelque temps. Il prétendit qu'au temps des croisades un comte de Dreux avait conduit une colonie française dans le Liban; l'Occident accepta cette fiction, et l'on vit encore en 1701 des ambassadeurs druses demander à Louis XIV la permission de placer des armoiries françaises sur la porte de leurs forts, et l'octroi de la décoration du Saint-Esprit pour leurs émirs. De ces deux faveurs, ils n'obtinrent que la première. Fachreddin se créa des titres plus sérieux à l'amitié de l'Europe par les services qu'il rendit au commerce, par sa constante tolérance, et par la protection qu'il accorda aux sciences et aux arts. [...] Ce fut lui qui rendit à l'antique Sidon, maintenant Saïda, sa prospérité commerciale, qu'elle conserva jusqu'à la fin du dix-huitième siècle, et qui fonda celle de Beyrouth. On voit encore aux environs de ces deux villes des ponts qu'il fit bâtir par des architectes italiens, Fr. Fagni et Fr. Cioli. Sous lui, le port de Saïda offrit aux navires français, presque seuls alors en possession du commerce du Levant, un refuge assuré contre les poursuites de la flotte ottomane (Th. Dubois, Des populations du Liban et principalement des Druzes, Revue germanique, Volume 11, 1860 - books.google.fr

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