Réévangélisation catholique du Vivarais

Réévangélisation catholique du Vivarais

 

I, 66

 

1606

 

Celui qui lors portera les nouvelles.

Apres un peu il viendra respirer.

Viviers, Tournon, Montferrent & Pradelles,

Gresle & tempestes les fera souspirer.

 

"porter les nouvelles" : réévangélisation (évangile : du grec "bonne nouvelle")

 

Jean-Baptiste Romillon est né à l'Isle de Venise (aujourd'hui sur Sorgue) en 1553, d'un père calviniste et d'une mère catholique. Pendant les guerres de religion, il prit le parti de son père et combattit dans les rangs des protestants. Conseillé par Madame de Châteauneuf récemment convertie et par César de Bus, chanoine de Cavaillon, en 1579, à l'âge de 26 ans, il abjura l'hérésie publiquement dans la cathédrale de cette ville et entra dans la cléricature. Très vite l'évêque lui donna un canonicat dans la collégiale de l'Isle et il fut ordonné prêtre en 1588. Le 29 novembre 1592, dans la petite communauté créée par Romillon dans notre ville, César de Bus et lui constituent une congrégation  nouvelle : les doctrinaires réformés ou frères de la doctrine chrétienne. En 1593, le père Romillon revient dans sa ville natale pour la doter d'un établissement spécialisé pour l'instruction gratuite des jeunes filles sur le modèle de celui des Ursulines fondé à Milan par Saint Charles Borromée. Françoise de Bermont fournit le local, Cassandre de Bus, parente de César, fut nommée supérieure. La première congrégation des Ursulines de France était née (Albert Ceccarelli, L'histoire de l'Isle sur la Sorgue: De 1274 à 1791, le temps des papes, 1988 - books.google.fr).

 

Romillon avait été dirigé spirituellement, depuis sa conversion en 1579, comme César précédemment, par le Père Péquet. A l'exemple de ce dernier, il avait alors entrepris des études cléricales, était devenu prêtre et chanoine de la Collégiale d'Isle-sur-la-Sorgue. Déjà, avec succès, il avait exercé son ministère en compagnie de César contre les protestants et semblait, par conséquent, tout prêt à collaborer encore à l'évangélisation du Vivarais. César vint le trouver chez lui et le mit au courant de la proposition de Monseigneur Jean de l'Hôtel. Ensemble ils firent une retraite spirituelle à Cavaillon, pour se préparer à la mission qui leur était confiée et, après avoir reçu la bénédiction de l'Evêque, à l'exemple des apôtres, ils partirent, abandonnant tout : parents, amis et biens, afin de porter la bonne nouvelle aux populations du Vivarais bouleversées par l'hérésie calviniste. Arrivés à Viviers ils se séparèrent et s'attribuèrent chacun la moitié du diocèse, afin que tous les habitants puissent bénéficier de l'exercice de leur zèle. César prêcha à Viviers et aux alentours. Il le fit avec tant de succès qu'il en fut lui-même  émerveillé, ramenant les fidèles de l'erreur à la foi et du péché à la grâce. Comme il était complètement désintéressé, il refusait les honoraires offerts en pareil cas et si, parfois, il les acceptait, il les faisait passer de ses mains dans celles des pauvres, qu'il soulageait même de ses propres deniers, au point que certains, qui ignoraient sa charité habituelle, en le voyant distribuer tant d'argent, le suspectèrent de quelque intention politique, car la guerre s'était rallumée dans plusieurs provinces du Royaume. C'est pourquoi, il dit un jour du haut de la chaire, à ses auditeurs : « - Vous mettez en ma bonne volonté et la droiture de mes intentions, mais un jour viendra où vous regretterez, car vous me redemanderez, mais je ne pourrai plus vous revenir ! » Le fait se réalisa l'année suivante, au temps où les habitants de la ville sollicitèrent à nouveau son concours, sans pouvoir l'obtenir. Les fruits de la mission furent abondants et durables dans les villages et les pays environnants. De plus quand César avait quelques instants de trêve, au sein de son ministère apostolique, il tenait des conférences dogmatiques et morales avec les curés des campagnes que l'ascendant de ses vertus avait attirés vers lui. Il en profitait aussi pour réconcilier les ennemis, apaiser les querelles, visiter les malades et les prisonniers, exercer les œuvres corporelles et spirituelles de miséricorde, afin de tout disposer pour le bien des âmes et la gloire de Dieu. Après avoir évangélisé avec beaucoup de profit presque toutes les communes du diocèse de Viviers, les deux zélés prédicateurs, remplis de mérites, rentrèrent à Cavaillon. Ils mirent au courant de leur apostolat Monseigneur Bordini, qui se réjouit avec eux des résultats obtenus. Puis, ils se séparèrent. Jean-Baptiste Romillon retourna à Isle-sur-la-Sorgue et César demeura dans sa ville natale

 

Par trois petits soupirs, le Père de Bus rendit tranquillement sa belle âme à Dieu. On était au 15 avril de l'année 1607. Il avait exactement 63 ans, 2 mois et 1 jour. Cet heureux passage du temps à du temps à l'éternité s'effectua pour le saint Fondateur, non seulement le jour de la résurrection du Sauveur, mais aussi à l'heure où l'on croit que s'accomplît ce merveilleux mystère  (Paulin Giloteaux, Le vénérable César de Bus, fondateur de la Congrégation des prêtres de la doctrine chrétienne, 1544-1607: sa vie, sa survie, son œuvre, 1961 - books.google.fr).

 

63 ans (passés), âge climatérique, comme Nostradamus.

 

Pline, Aulu Gelle et Censorinus forment une triade que les Ă©rudits vont citer sans cesse tout au cours du XVIe siècle, quand ils s’intĂ©ressent aux âges critiques de la vie, Ă  ses stades septĂ©naires et novĂ©naires. Le saut de Censorinus et Julius Firmicus Ă  PĂ©trarque, mais surtout Marsile Ficin ou ThĂ©odore de Bèze semble gigantesque, puisque long de plus d’un millĂ©naire. C’est que le moyen âge ne s’intĂ©ressa pas aux annĂ©es climactĂ©riques : une rĂ©fĂ©rence chez Tertullien, trois chez le pseudo ClĂ©ment de Rome, sans aucun calcul. Il ne s’agit que de quelques coups de griffe contre des superstitions astrologiques, dont ces auteurs ne disent quasi rien. L’absence des nombres soixante-trois et quatre-vingt-un, et l’unique mention de quarante-neuf annĂ©es pour l’annĂ©e jubilaire qui est la cinquantième, non la quarante-neuvième (LĂ©vitique 25, en part. les versets 8 Ă  19) dans la Bible (les sept septĂ©naires de Daniel 9, 25, entraĂ®nent une supputation diffĂ©rente), expliquent en très grande partie le dĂ©sintĂ©rĂŞt du moyen âge pour ces seuils critiques non bibliques. Soixante-dix ans apparaissent bien, mais furtivement avec quatre-vingts ans, comme terme de la longĂ©vitĂ© dans le psaume 90, au verset 10 : «Aux jours de nos ans il y a septante ans ; et, si en puissance, octante ans », pour citer la traduction de Jean Calvin, sans que cela n’amène, Ă  ma connaissance, aucune association avec l’âge climactĂ©rique au Moyen Ă‚ge. Un peu plus de deux siècles après PĂ©trarque, un autre poète Ă©crivait Ă  ses amis Ă  l’approche de son soixante-deuxième anniversaire et confi ait sa crainte d’entrer dans sa grande annĂ©e climactĂ©rique. Que ce fĂ»t un poète n’était guère Ă©tonnant, que ce poète prĂ©sidât aux destinĂ©es de l’Église rĂ©formĂ©e genevoise l’était davantage : ThĂ©odore de Bèze.

 

Celui qui est à l’origine du savoir moderne et du renouveau de l’intérêt : Marsile Ficin. Marsile Ficin consacre le dernier chapitre du deuxième livre («De la vie longue » ) du De triplici vita (1482, 1489) au moyen d’éviter «les dangers qui nous menacent à chascun septenaire de la vie». Il s’agit déjà, tout au long du livre, de régler sa vie en vue de la prolonger. Sous l’influence des planètes, de Saturne surtout… et des astrologues, les années climactériques sont reconnues dangereuses. […]

 

À la fin du XVIIe siècle, la superstition était de moins en moins partagée et elle entrait dans les dictionnaires (Richelet avant, ou Trévoux, après celui de l’Académie) et les encyclopédies comme une donnée historique dépassée. D’une certaine manière, Claude Saumaise (1588-1653), avec les mille pages érudites de son De climactericis annis, avait asséné un coup décisif aux calculs superstitieux liés à l’année climactérique. Le grand philologue avait, en effet, publié en 1648, l’année de ses soixante ans, chez Elzevier à Leyde, des De annis climactericis et antiqua astrologia diatribæ. C’est un traité très polémique, puisque Saumaise critique tout le monde, de Censorinus à Rantzau, de Cardan à Scaliger. Il redéfinit l’année climactérique, d’un point de vue astrologique surtout, et reprend des questions touchant à la longévité. [...] La thèse de Saumaise devient in fine tout à fait moderne, puisque les années climactériques ne sont pas constituées par la force des nombres, qu’ils soient multiples de sept ou de neuf ou de leur composition. Les nombres n’ont pas une vertu physique ou cachée en ce qui concerne la naissance, la vie ou la mort. Ce sont le climat, le lieu de vie, les mœurs, les habitudes, la nourriture, la santé, on pourrait même oser l’expression hygiène de vie, qui influencent de manière beaucoup plus prégnante la longévité des hommes. Les forces naturelles dominent ainsi les forces supranaturelles, divines ou surnaturelles, l’homme ayant les moyens en lui-même de prolonger sa vie. Si la profession est bien déterminée par les astres, et la longévité par la profession, la longueur de la vie ne découle pas directement des astres. Boire de l’eau et manger des fruits font plus pour la longévité que les astres et… l’ivrognerie (Max Engammarre, Soixante-trois, nombre fossoyeur de Pétrarque à Claude Saumaise. Brève histoire de la grande année climactérique à la Renaissance. In: Comptes rendus des séances de l'Académie des Inscriptions et Belles-Lettres, 152e année, N. 1, 2008 - www.persee.fr).

 

César de Bus (Cavaillon, 3 février 1544 - Avignon, 15 avril 1607) est un prêtre catholique fondateur des prêtres de la doctrine chrétienne et des ursulines de France et reconnu bienheureux par l'Église catholique puis canonisé en 2022.  Ce n'est qu'en 1575 qu'il choisit la voie religieuse. En 1582, Monseigneur Scotti, évêque de Cavaillon le fait chanoine de la cathédrale Saint-Véran. Il est ordonné prêtre en août 1582. C'est alors que commence sa mission de catéchiste, il instruit les enfants puis les adultes. De 1586 à 1592, il se retire à Ermitage Saint-Jacques de Cavaillon. Le 29 septembre 1592 il fonde à L'Isle-sur-la-Sorgue la congrégation des pères de la doctrine chrétienne dont le rayonnement s'étend très rapidement dans toute la région et qui est approuvée par Clément VIII en 1597. En 1594, il devient aveugle, et meurt le 15 avril 1607. En 1821, le Pape Pie VII le déclare Vénérable. Le 27 avril 1975, le Pape Paul VI, le proclame Bienheureux (fr.wikipedia.org - César de Bus).

 

Respiration, conspiration

 

Anne de Lévis, duc de Ventadour, lui présentant une magnifique aumône, après qu'il eut prêché fort longtemps dans ses terres, il la refusa constamment sans jamais se laisser vaincre. Ce noble désintéressement édifia le gentilhomme et toute sa maison qui avait conçu la plus grande estime pour le P. de Bus (Joseph Joachim Chamoux, Vie du vénérable César de Bus, Fondateur de la Congrégation des Prêtres Séculiers de la Doctrine Chrétienne et de l'Institut des Ursulines de France, 1867 - books.google.fr).

 

Philippe IV de Lévis s'est marié en 1395 avec Antoinette d'Anduze, vicomtesse de Rémond, dame de La Voulte, de Pierregourde, de Chomeirac et de Rochemaure. Son petit-fils, Louis de Lévis, baron de la Roche-en-Régnier (avec Jaujac, les Boutières et Meyras) et baron d'Annonay, épouse en 1472 Blanche de Ventadour, héritière du château de Ventadour, en bas Limousin dans l'actuelle Corrèze. Cette branche de la famille de Lévis prend alors le nom de Lévis-Ventadour (www.ventadour.org).

 

Henri de LĂ©vis (1596-1651), 3e duc de Ventadour, sera l'un des fondateurs de la Compagnie du Saint-Sacrement.

 

Louis-Charles de LĂ©vis-Ventadour voulait vendre en 1673 Rochemaure au comte d'Antraigues; l'affaire Ă©choua, et sa fille Anne-Geneviève Ă©pousa en secondes noces le 15 fĂ©vrier 1694 Hercule MĂ©riadec de Rohan. Leur petit-fils fut le fameux marĂ©chal de Soubise, qui n'avait rien Ă  faire de Rochemaure : il vendit la toiture vers 1730 pour couvrir une grange dans les Ă®les du RhĂ´ne. La ruine des bâtiments ne se fit pas attendre ; le marĂ©chal finit par vendre tout Rochemaure, le droit de bac, les dĂ©laissĂ©es du RhĂ´ne, plus les seigneuries de Meysse et de Sceautres, Ă  Claude Louis de Garnier des Hières, baron de Miraval, le 24 juin 1784, pour 120000 livres (Michel Riou, Ardèche, terre de châteaux, 2002 - books.google.fr).

 

Parurent, en 1660, deux libelles dĂ©nonçant les agissements de la Compagnie : un MĂ©moire pour faire connoistre l'esprit et la conduite de la Compagnie establie en la ville de Caen, et un Extrait d'une lettre contenant la relation des extravagances que quelques-uns de l'Hermitage ont faites Ă  Argentan et Ă  SĂ©ez. A en croire ces factums, la Basse Normandie Ă©tait depuis plusieurs mois profondĂ©ment troublĂ©e par un groupe de prĂŞtres et de jeunes gens, se rĂ©unissant dans une maison dite l'Hermitage et se rĂ©pandant dans la ville pour y faire des manifestations extravagantes. Un jour on les avait vus disait-on ameuter la populace en criant que tous les curĂ©s de Caen, sauf deux, Ă©taient fauteurs du jansĂ©nisme. Un autre jour, une bande, conduite par un prĂŞtre, aurait poussĂ© des clameurs avec des gestes dĂ©sordonnĂ©s, en invitant tous les fidèles Ă  fuir au Canada, s'ils voulaient conserver le trĂ©sor de la foi, compromis par les jansĂ©nistes. Que quelques extravagances, plus ou moins exagĂ©rĂ©es dans les deux pamphlets, eussent Ă©tĂ© commises par des membres de la Compagnie du Saint-Sacrement, le fait n'a rien que de vraisemblable ; mais chercher Ă  en rendre responsable la Compagnie tout entière Ă©tait une injustice. Or, c'est ce que prĂ©tendaient les Ă©crits dĂ©nonciateurs. L'auteur de l'un des deux n'Ă©tait autre que le jansĂ©niste Nicole. Le nom de la Compagnie du Saint-Sacrement y Ă©tait Ă©crit en toutes lettres. On la dĂ©nonçait comme une sociĂ©tĂ© secrète, agissant Ă  l'encontre du Roi, des Ă©vĂŞques et des magistrats. Le bruit produit par la publication de ces pamphlets fut Ă©norme. Les auteurs les avaient fait tirer Ă  un nombre considĂ©rable d'exemplaires, les avaient envoyĂ©s Ă  toutes les autoritĂ©s civiles et ecclĂ©siastiques, et rĂ©pandus Ă  profusion parmi le peuple. Le 28 septembre 1660, Guy Patin, dans une lettre Ă  son ami Falconnet, parle avec Ă©motion de la dĂ©couverte de cette conspiration et signale cette «congrĂ©gation, qui a des intelligences avec la mĂŞme confrĂ©rie Ă  Rome et qui a dessein d'introduire l'Inquisition en France». La justice fut saisie, et, le 13 dĂ©cembre 1660, un arrĂŞt de la Cour fit «inhibitions et dĂ©fenses Ă  toutes personnes, de quelque qualitĂ© et conditions qu'elles fussent, de faire aucunes assemblĂ©es en cette ville et partout ailleurs, sans l'expresse permission du Roi et lettres patentes vĂ©rifiĂ©es ». Grâce Ă  l'intervention de Lamoignon, sous la prĂ©sidence de qui l'arrĂŞt fut rendu, la Compagnie ne fut pas brusquement dissoute, et, de 1660 Ă  1665, elle put encore avoir des rĂ©unions; mais les assemblĂ©es plĂ©nières, jusque-lĂ  hebdomadaires, furent rares, les relations de la Compagnie de Paris avec les Compagnies de Province cessèrent peu Ă  peu, et, vers la fin de 1665 ou au commencement de 1666, les derniers Ă©lĂ©ments de la SociĂ©tĂ© disparurent tout Ă  fait. D'après le MĂ©moire du comte d'Argenson, les seuls ouvrages solides et permanents de la Compagnie qui auraient survĂ©cu Ă  sa ruine seraient: la Compagnie des Prisons, la Compagnie des nouveaux convertis, la Compagnie pour le secours spirituel des malades et des agonisants de l'HĂ´tel-Dieu, les Compagnies de Dames, les Compagnies des paroisses pour les pauvres honteux, enfin et surtout l'HĂ´pital gĂ©nĂ©ral, et la SociĂ©tĂ© des Missions Ă©trangères. En rĂ©alitĂ©, l'esprit de charitĂ© et de zèle apostolique, qu'elle avait contribuĂ© Ă  rĂ©pandre dans le clergĂ© et parmi le monde, mĂŞme en dehors de ses membres, lui survĂ©cut: nous en rencontrerons plus d'une fois l'influence au cours de l'histoire du XVIIe siècle (Fernand Mourret, Histoire gĂ©nĂ©rale de l'Ă©glise, Tome 6, 1920 - books.google.fr).

 

L'apĂ´tre du Vivarais

 

François Régis est né à Fontcouverte dans l'Aude près de Narbonne, le 31 janvier 1597, dans une famille de nobles ruraux assez aisés et profondément chrétiens. Il commence des études au Collège des Jésuites de Béziers. Il est apprécié pour son travail et son esprit de bonne camaraderie. Il devient membre de la Congrégation de la Sainte Vierge.François Régis entre au noviciat de la Compagnie de Jésus à Toulouse en décembre 1616. Après ses premiers vœux en 1618, il poursuit la longue formation des Jésuites par des périodes où il se rend à Cahors, à Tournon (de 1622 à 1625), au Puy et à Auch.

 

En 1624, les Jésuites du Collège de Tournon l'envoyèrent avec un autre religieux pour aider le curé d'Andance (François Régis (1597-1640), Apôtre du Vivarais et du Velay - medarus.org).

 

Après de premiers essais de son zèle, il entreprit la sanctification du bourg d'Andance, oĂą il fut reçu comme un envoyĂ© du ciel : Dieu bĂ©nit tellement son zèle, que les vices qui y rĂ©gnaient le plus, l'ivrognerie, les jurements, l'impuretĂ©, furent bannis, et le frĂ©quent usage des sacrements rĂ©tabli; l'odeur de saintetĂ© qu'il y laissa, subsiste encore aujourd'hui. […]

 

C'est là qu'il établit, pour la première fois, la confrérie du Saint-Sacrement, pour ranimer parmi les fidèles le culte de la divine Eucharistie. Il dressa lui-même les règlements d'une si sainte pratique, qui depuis s'est répandue partout, mais dont on doit reconnaître pour instituteur Régis, âgé seulement de vingt-deux à vingt-trois ans. La grâce n'attend pas la force de l'âge pour opérer des prodiges; et la sainteté donne à la jeunesse un crédit auquel la sagesse des vieillards ne peut atteindre (Daubenton, La vie de Saint Jean-François Régis S.J., 1853 - books.google.fr).

 

En 1634, il est mis à disposition de l'évêque de Viviers, Monseigneur de la Baume de Suze, dans la visite de son diocèse. Il va de village en village, préparant la venue de l'évêque. C'est dans les rudes montagnes des Boutières qu'il montre particulièrement ses qualités. Entre 1636 et 1640, il est nommé au Puy. Désormais, François fera deux parts dans son apostolat. A la belle saison, il travaille au Puy; pendant l'hiver il reprend ses missions dans les montagnes, car, il sait qu'alors, il peut trouver les gens chez eux (François Régis (1597-1640), Apôtre du Vivarais et du Velay - medarus.org).

 

Poussant plus au sud, Régis, une fois au moins, visita Pradelles, qui appartenait alors au diocèse de Viviers. Cette petite ville si pittoresque, où les protestants n'avaient jamais pu pénétrer, où un homonyme des fameux François et Jacques Chambaud avait, au pied des remparts, été tué, se vantait d'être une citadelle du catholicisme. La voie romaine, par laquelle l'apôtre arriva, passait entre Saint-Etienne-du-Vigan et Pradelles, tout proche de l'ancienne église de Saint-Clément aujourd'hui en ruines. Au carrefour du Garay, où aboutissaient les chemins venant de ces trois paroisses, les populations, averties de la venue du saint, s'étaient massées pour entendre sa parole et recevoir sa bénédiction. Ce fut un triomphe. Sur le coin du domaine du Mazigon qui touche à ce carrefour, une croix, dressée et entretenue par la famille de Ribains, en fixe très ferme la tradition. Dans le bas de Pradelles, en un sanctuaire insigne desservi par les Dominicains et centre de nombreux pèlerinages à Notre-Dame, François put longuement prier. Une chapelle à son nom perpétue ce souvenir. Plus haut, dans une des plus belles maisons qui dominent la grande place de Pradelles, on montre encore la chambre, recoin plutôt, où le saint passa la nuit (Georges Guitton, Après les guerres de religion: Saint Jean-François Régis, 1597-1640, 1936 - books.google.fr).

 

Viviers est au sud de Rochemaure et de Montélimar (cf. quatrain précédent I, 65 et ses carabins/scarrabins). Pradelles au sud du Puy qui a à son est Montferrat ("Montferrant" ?) à Saint Etienne Lardeyrol. Lardeyrol est un hameau avec château ruiné à Saint Pierre Eynac un peu à l'est.

 

C'est Anne de Lardeyrol qui, en 1671, fait appel aux frères conventuels ou cordeliers d'Aubenas pour la fondation d'un couvent à Saint-Clément.

 

Louis le quatorzième, roi de France et de Navarre, régnant et par devant moi, notaire royal au bourg de Fay, étaient présents des témoins et Damoiselle Anne de Lardeyrol du lieu de Lardeyrol paroisse de Saint-Clément dans le diocèse de Viviers. Laquelle voulant et désirant effectuer le pieux dessein quelle a toujours eu en faveur de l'ordre des frères mineurs conventuels de Saint-François. Elle fonde à présent un couvent du dit ordre dans le lieu de Lardeyrol, pour y être dit et célébré tous les jours et à perpétuité l'office divin par six religieux conventuels que sont des prêtres pour l'instruction du peuple et pour faire mission aux paroisses voisines. Lesquels seront tenus de dire tous les jours, à la fin de leur oflice, un liberia me à l'intention de son âme et de ses devanciers, lesquels pour cet effet seront tenus de faire leur résidence et de prier Dieu pour l'âme de la fondatrice... (Les Boutières en histoire, Numéro 3, Comité d'études et de recherches historiques des Boutières, 2010 - books.google.fr).

 

Henri Pourrat

 

Si le personnage en question dans ce quatrain est un prêtre, son aspect météorologique est expliqué par Henri Pourrat.

 

Quand saint François RĂ©gis Ă©vangĂ©lisa le Velay, il eut affaire Ă  des populations quasi paĂŻennes dans les campagnes, malĂ©voles dans les villes, oĂą il lui arriva d'ĂŞtre tournĂ© en dĂ©rision, voire rouĂ© de coups. En rĂ©alitĂ©, on pourrait Ă©vangĂ©liser toujours. LĂ  mĂŞme oĂą la religion paraĂ®t suivie, qu'est-elle ? Le peuple lui a donnĂ© ses couleurs; l'a imagĂ©e et romancĂ©e et s'est servi d'elle pour imager et romancer la flore, les roches, les fontaines, les Ă©toiles, le calendrier, le monde qui l'entoure et le train de la vie. Il en a fait une sorte de poème d'allure enfantine et incantatoire. Pouvait-il dĂ©plaire Ă  Dieu qu'elle prĂ®t cette figure ? La seule parlante pour des âmes simples ? D'une religion ainsi faite, l'esprit, le grand conseil d'amitiĂ©, pouvait peut-ĂŞtre mieux souffler. Mais soufflait-il toujours ? La plupart Ă©taient moins animĂ©s de l'esprit que confiants en une magie. La religion restait pour eux un ensemble de rites destinĂ© Ă  rendre le monde favorable et Ă  procurer les biens de la terre. [...]

 

L'occupation du laboureur - peut-ĂŞtre la seule lĂ©gitime, parce que la seule selon l'ordonnance de Dieu qui a dit Ă  l'homme de faire pousser son pain Ă  la sueur de son front, - le tient terriblement courbĂ©. Il ne pouvait connaĂ®tre que sa tâche, et la religion qu'en regard de sa tâche. Que les saints, selon leur office, règlent le beau temps et la pluie, et Dieu sauve le bestiau ! C'Ă©tait prendre les choses d'un peu court. Mais Celui qui distribue les talents, condamnera-t-il le laboureur qui prit tant Ă  cĹ“ur son labourage qu'il le prĂ©fĂ©ra Ă  soi-mĂŞme ?

 

Le prĂŞtre devait ĂŞtre un thaumaturge, capable de conjurer la grĂŞle, les incendies, les maladies. Cette idĂ©e demeure dans les tĂŞtes. Il suffit de jeter l'Ĺ“il sur une page de publicitĂ© : tant de produits pharmaceutiques attribuĂ©s Ă  un abbĂ©, Ă  une religieuse. […]

 

Autrefois les prĂŞtres Ă©taient en possession de faire tomber la grĂŞle - songez aux bruits qui coururent, au dĂ©but de la guerre : les curĂ©s l'avaient amenĂ©e Ă  peu près comme ils amenaient la tempĂŞte jadis. […]

 

Tant que M. de Rostaing avait été curé d'Ambert il n'était pas tombé de grêle sur sa paroisse. Mais le jour de son enterrement (juillet 1835), comme si le diable eût voulu se rattraper, il y eut un orage tel qu'il ne resta pas un carreau dans le pays jusqu'à Clermont (Henri Pourrat, Ceux d'Auvergne: types et coutumes, 1928 - books.google.fr).

 

De Bus et la grĂŞle

 

LECON III. Sur le mesme Commandement Vn seul Dieu tu adoreras Et aimeras parfaitement. [...] Comment est-ce qu'on peche touchant l'adoration deue à Dieu. [...] 3. Réponse. On manque touchant l'adoration qui est deüe à Dieu, quand on fait hommage aux démons. Deux sortes de personnes tombent dans ce peché, à sçavoir en premier lieu tous ceux qui s'obligent par pacte à donner quelque chose au Diable en signe de reconnoissance & de tribut; secondement, les sorciers, qui dans leur sabat adorent le Diable sous la forme d'un taureau ou d'un bouc, renonçans à leur Baptéme & à la Religion Chrestienne, & causans mille maux, tant aux hommes, qu'aux fruit de la terre, ainsi qu'on l'a sceu de plusieurs d'entr'eux, lesquels ayant esté pris par la Iustice, ont confessé qu'ils ont souvent excité des orages & de la gréle, qu'ils ont fait mourir les arbres, ou les ont rendus stériles, & qu'ils ont fait des ligatures, & mille autres méchancetés, par le moyen des Diables, Dieu le permettant ainsi à cause de nos pechez.Voila coment quelques-uns sont si aveuglez que de s'abaisser jusqu'à l'extremité, en se rendant sujets au malin esprit (César de Bus, Instructions familières sur les quatre parties du Catéchisme romain, imprimées par les soins du R.P. H. Le Bigot, Tome 2, 1675 - books.google.fr).

 

Cf. quatrain X, 67 avec son "Nonnay" qui pourrait aussi renvoyer à Annonay, sa "gresle" et ses configurations astrologiques des années 1585 et 1606.

 

1606, Agobard et la grĂŞle

 

Rendons toutefois justice à l'humanité de l'évêque de Lyon Agobard; il combattit le duel judiciaire et les épreuves du feu et de l'eau par son écrit contre la loi Gombette; il s'éleva contre les superstitions en réfutant l'opinion populaire qui considérait de prétendus sorciers comme auteurs des inondations du Rhône. Dans son traité De la Grêle et du Tonnerre, il combat cette dangereuse erreur, et ne se montre pas moins bon théologien que physicien assez éclairé, en écartant, dans l'explication des phénomènes de l'atmosphère, toute idée de sorcellerie et de magie. Dans le livre sur les Images, il cherche à purifier le culte de Dieu; il le spiritualise, et fait voir que la véritable adoration ne doit être rendue qu'à Dieu seul. Ses écrits ont été conservés et réunis par Papire Masson en 1606, in-8; on les trouve aussi dans la Bibliothèque des Pères de Lyon (Victor Antoine Charles Riquet de Caraman, Histoire des révolutions de la philosophie en France: pendant le moyen age jusqu'au seizième siècle, Tome 1, 1845 - books.google.fr).

 

Agobard (saint) (mort à saintes en 840), est un homme d'Église du haut Moyen Âge. Il fut évêque de Lyon à deux reprises sous le règne de Louis le Pieux. Il contribua à faire de sa cité épiscopale l'un des centres de la Renaissance carolingienne (fr.wikipedia.org - Agobard de Lyon).

 

Cf. quatrain IX, 69 - Les Soyecourt - 2154-2155 et sa "gresle" dans la région de Lyon et de Vienne.

 

GrĂŞle en Vivarais

 

Dans un registre de la paroisse de Burzet, en Ardèche, Ă  25 km d'Aubenas :

 

Le XV janvier 1605 tonna fort fist de grands esclairs tumba gresle envyron une heure de nuit (Charles Besson, Une paroisse du Vivarais, Burzet: recueil de textes et documents, 1996 - books.google.fr).

 

Burzet serait la patrie de Saint Bénézet qui construisit le pont d'Avignon (fr.wikipedia.org - Burzet).

 

1606 et le Vivarais

 

En 1606, l'étendue du bailliage de Vivarais, dont le siége avait été transféré, en 1564, de Boucieu à Annonay, étant trop considérable pour l'administration de la justice, Henri IV démembra ce bailliage et en créa un second à Villeneuve-de-Berg. Le ressort du bailliage d'Annonay fut restreint au Haut-Vivarais, et le Bas-Vivarais attribué au bailliage de Villeneuve-de-Berg. Ce dernier siége reconquit, à l'exception de Fay, tous les mandements du Vivarais antérieurement rattachés au Velay, et, sauf onze paroisses comprises dans le district du bailliage d'Annonay, il présenta la même étendue et les mêmes limites que le diocèse de Viviers (D'Aubais, Op. cit., Not. du H.- Viv., p. 26 et suiv.) (Augustin Chassaing, Recueil des chroniqueurs du Puy-en-Velay, Tome 2 : Le livre de Podio ou chroniques d'Étienne Médicis bourgeois du Puy, 1874 - books.google.fr).

 

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