Henri III, roi de Pologne

Henri III, roi de Pologne

 

I, 23

 

1574-1575

 

Au mois troisiesme se levant le Soleil,

Sanglier, liepard au champ mars pour combatre :

Liepard lassé au ciel extend son œil :

Un aigle autour du Soleil voyt s'esbatre.

 

"estend son oeil" de Lynx

 

Les premiers Loups-cerviers qui aient été vus à Rome avaient été apportés des Gaules pour les jeux offerts au peuple romain parle grand Pompée. Ces animaux, que les Gaulois appelaient Raphuis ou Rufinus, avaient, selon Pline, la taille du Loup et les taches du Léopard (Pline Hist. natur., lib. VIII). Il faut descendre jusqu'au XIVe siècle pour trouver une autre mention du Lynx de France. Gaston Phœbus dit qu'il est assez commune beste, et que peu de gens sont qui bien n'en ayent veus. (Il faut remarquer qu'il régnait sur une partie des Pyrénées). Il ajoute que les uns appellent ces animaux Lous cerviers, et les autres Chatz lous, ce qui est mal dit. «On les pourroit mieulx appeler Chatz léopards que autrement, quar ils trayent plus près à Liepard (Léopard) que à aultre beste» (Du Chat et de toute sa nature) (M. de Noirmont, Sur quelques mammifères qui ont disparu, Bulletin de la Société impériale zoologique d'acclimatation, Volume 8, 1861 - books.google.fr).

 

Dans l'Egypte et l'Inde anciennes, on dressait, pour la vénerie, des guépards. Le roi de Perse, Chosroés, en possédait dans ses équipages, et, par l'intermédiaire de l'Italie, l'Occident les emprunta à l'Orient. La tapisserie de Boussac (XVe siècle, musée de Cluny) montre un de ces animaux dans un bois, derrière une dame. On les appelait liépards, loup-cerviers, onces [du Pinet], oinces [Rabelais] (Archives Internationales D'histoire Des Sciences, Volume 11, 1958 - books.google.fr).

 

A l'époque, les espèces n'étaient pas rigoureusement définies.

 

Le nom de l'once est problement issu, par aphérèse, de lonce «lynx», le l ayant été pris pour l'art. déf. élidé; lui-même prob. empr. à l'ital. lonza «panthère» (XIIIes) qui semble avoir été formé, au temps des premières croisades, directement sur le gr. "lungx" (v. lynx) prononcé lúnx par les marchands de l'Asie Mineure qui faisaient le commerce de fourrure et de fauves vivants (www.cnrtl.fr).

 

Toute sorte de gibier peuplait les forêts de la Lithuanie, ours, sangliers, cerfs, daims, loups et renards. Il y avait même des martes et des castors, dont la queue était regardée du temps de Cromer comme un mets fort délicat, et des animaux inconnus au reste de l’Europe, le bison, l’urus, le lynx, l'onagre, qui habitaient de préférence les grandes forêts de Radzivil et de Bialowiez. Dans cette dernière forêt ou conserve encore aujourd’hui quelques bisons, comme échantillons d’une race entièrement disparue. Il est défendu de les tuer, sous les peines les plus sévères. «La loi, dit l’auteur de Thadée, protège ces anciens représentants de la Slavie.» On peut ajouter que ce sont les seuls.Avec ses bois impénétrables, son climat rigoureux, ses longs hivers, la Lithuanie avait un caractère particulier qui la distinguait des autres provinces de la République. Sa nature âpre et sauvage avait réagi sur les habitants; les mœurs y étaient plus rudes que dans le reste de la Pologne, la population grossière, le bas peuple plongé dans une épaisse ignorance. La féodalité bâtarde qui s’était implantée dans le grand-duché d’Olgierd et de Gedymin ne s’effaçait que lentement; le paganisme, en Samogitie surtout, avait laissé des traces profondes, et l’on y trouvait encore au XVIe siècle les restes des anciennes superstitions. Les serpents, dit Gvagnin, continuaient d’y avoir des adorateurs.

 

L’introduction du christianisme et l’union de la Lithuanie avec la Pologne avaient cependant portĂ© des fruits. Mais c’était surtout dans les classes supĂ©rieures qu’ils se laissaient apercevoir. Mis frĂ©quemment en contact par la guerre et les affaires publiques avec les gentilshommes polonais, les boiars lithuaniens en eurent bientĂ´t adoptĂ© les mĹ“urs et l’esprit. La cour venait souvent habiter la Lithuanie; la noblesse polonaise l’y suivait, attirĂ©e par les plaisirs de la chasse et ceux de la table, car le grand-duchĂ© Ă©tait renommĂ© pour sa bonne chère, et les dames lithuaniennes passaient, Ă  ce que dit Vigenère, pour les plus aimables du royaume : «et est ce pays si coquin, ajoute-t-il, a ceux qui y sont une fois affriandĂ©s, qu’ils n’en peuvent partir puis après» (Emanuel Henri Victurnien de Noailles, Henri de Valois et la Pologne en 1572, Tome 1, 1867 - books.google.fr).

 

Une histoire de Pologne, suivie d'un tableau de la constitution polonaise, fut dressée à l'intention d'Henri de Valois élu roi de Pologne par Blaise de Vigenère, et publiée à Paris en 1573, Chroniques et annales de Poloigne. La source en est l'ouvrage latin d'Herburt de Fulstyn, un des ambassadeurs envoyés de Pologne à Paris. Vigenère ne prétend pas l'avoir suivi scrupuleusement (Paul Chavy, Vigenère traducteur baroque, Blaise de Vigenère: Poète et mythographe au temps de Henri III, 1994 - books.google.fr).

 

En Pologne nous ne connaissons que la ménagerie de Jean Sobiesky pour avoir eu des animaux sauvages. Ce prince conserva quelque temps, à son palais de Willanow, près de Varsovie : un casoar, un lynx et une loutre apprivoisée que lui avait donnée le maréchal Passek (Gustave Loisel, Histoire Des Ménageries de L'antiquité à Nos Jours, Tome 2, 1912 - books.google.fr).

 

Jean III Sobieski, né le 17 août 1629 au château d’Olesko, près de Lviv (alors en Pologne), et mort le 17 juin 1696 à Varsovie, roi de Pologne de 1674 à 1696 et grand-duc de Lituanie, est un héros national polonais, notamment en raison de sa victoire sur les Turcs devant Vienne en 1683. La constellation de l'Écu de Sobieski a été appelée ainsi en son honneur en 1690 par l’astronome polonais Johannes Hevelius

fr.wikipedia.org - Jean III Sobieski).

 

Le futur Maximilien II (qui règne de 1564 à 1576), père du candidat au trône de Pologne en 1573 Ernest d'Autriche, fait construire les premières ménageries des empereurs germaniques à Ebersdorf [le village du sanglier] en 1552 pour loger un éléphant et des léopards de chasse rapportés d'Espagne, où il a passé son enfance. Il réitère cela au château de Neugebäu, qui qui ne prend toute son ampleur qu'à la fin du XVIIe siècle et reste en service jusqu'en 1781, alors que le sérail d'Ebersdorf disparaît au XVIIe siècle (Éric Baratay, Élisabeth Hardouin-Fugier, Zoos: Histoire des jardins zoologiques en Occident (XVIe-XXe siècles), 2013 - books.google.fr).

 

Henri IV avait fait aménager une ménagerie pour les «bêtes farouches» afin de remplacer celle du Louvre qu'Henri III avait fait détruire en 1583 après en avoir tué les lions (Geneviève Bresc-Bautier, Denis Caget, Emmanuel Jacquin, Jardins du Carrousel et des Tuileries, 1996 - books.google.fr).

 

Le lynx ou loup-cervier, dont il est ici question, ne se trouve point dans les contrĂ©es mĂ©ridionales, mais seulement dans les pays  septentrionaux de l'ancien et du nouveau continent. OlaĂĽs (1490 - 1557) dit qu'il est commun dans les forĂŞts du nord de l'Europe : OlĂ©arius (1603 - 1671) assure la mĂŞme chose en parlant de la Moscovie ; Rosinus Lentilius (1657 - 1733) dit que les lynx sont communs en Curlande, en Lithuanie, et que ceux de la Cassubie (province de la PomĂ©ranie) sont plus petits et moins tachĂ©s que ceux de Pologne et de Lithuanie; enfin, Paul Jove ajoute Ă  ces tĂ©moignages que les plus belles peaux de loup-cervier viennent de la SibĂ©rie et qu'on en fait un grand commerce Ă  Ustivaga, ville distante de six cents milles de Moscou. Cet animal qui, comme l'on voit, habite les climats froids plus volontiers que les pays tempĂ©rĂ©s, est du nombre de ceux qui ont pu passer d'un continent Ă  l'autre par les terres du nord; aussi l'a-t-on trouvĂ© dans l'AmĂ©rique septentrionale (Georges Louis Leclerc de Buffon, Ĺ’uvres complètes de Buffon avec la nomenclature linnĂ©enne et la classification de Cuvier, Tome III : Les quadrupèdes, 1853 - books.google.fr).

 

Sanglier

 

Des ongulés de plus grande taille, tels que le cerf, l'élan ou le sanglier sont sporadiquement la proie des lynx. [...] Chaque fois que les lynx s'attaquent aux ongulés de grande taille (cerf, sanglier), ils choisissent les individus les plus jeunes. Certaines études ont révélé un pourcentage assez élevé de proies en mauvaise santé (Christine Breitenmoser-Würsten, Plan d'action pour la conservation du lynx eurasien en Europe, 2003 - books.google.fr).

 

Soleil

 

A l'avers d'une médaille d'argent datée de 1573, profil d'Henri III et légende qui mentionne le titre de roi de Pologne. Au revers, une tentative d'espoir pour le souverain qui vient juste d'accéder au trône. Le soleil, déjà évoqué dans quelques représentations sous Charles IX, est repris ici en tant qu'astre pourvoyeur des rayons qui donnent la vie mais aussi, très symboliquement, porteur des lumières de la raison civilisatrice. En se levant, il dissipe les ténèbres et les nuages. La légende en dit long sur le peu d'illusions que nourrissait Henri III «Il apporte ses lumières au monde hostile». Le roi périra victime de l'obscurantisme qu'il redoutait tant (Muriel Vigié, Le portrait officiel en France du Ve au XXe siècle, 2000 - books.google.fr).

 

"champ de Mars"

 

Les Romains entr'autres dans le champ de Mars, & nous savons qu'en Pologne, ils tiennent leurs assemblées & leurs diettes, ou ils élisent leur Roy, en des campagnes pres de Varsovie (David de Constant De Rebecque, Abrégé de politique, 1687 - books.google.fr).

 

La date d'édition de ce précédent ouvrage est celle de la définition par le polonais Hévélius de la constellation du Lynx. Ce pourrait indiquer la date basse de la rédaction du quatrain.

 

La constellation du Lynx

 

Cette constellation du Lynx fut introduite par Johannes Hevelius en 1687 pour remplir le vide entre la Grande Ourse et le Cocher. Son nom proviendrait du fait qu'il faudrait des très bons yeux pour voir les étoiles de cette constellation (fr.wikipedia.org - Lynx (constellation)).

 

Johannes Hevelius (dans la plupart des langues), ou Jan Heweliusz (en polonais), né et mort à Danzig (28 janvier 1611 – 28 janvier 1687), est un astronome qui, dans l'histoire de sa discipline, se place entre Galilée et Newton.

 

En 1639, Peter Crüger, mourant, l'implore de ne pas laisser inemployés ses dons scientifiques, et avant tout d'observer l'éclipse solaire du 1er juin ; Hevelius, à qui Crüger a enseigné l'usage de la chambre obscure, promet ce que Crüger demande. Il observe l'éclipse - Crüger meurt cinq jours après - et consacre désormais son temps et sa fortune à l’observation du ciel. Le rôle de sa femme est alors essentiel : en s'occupant des affaires, Catherina Rebeschke permet à son mari de se consacrer à ses études. En 1641, Hevelius construit un observatoire sur le toit de sa maison. Il construira aussi, en dehors de la ville, une «lunette sans tuyau», de sa fabrication, d’une longueur focale de 45 mètres, qui oscille à la moindre brise. De 1642 à 1645 il observe les taches solaires, observations encore importantes aujourd'hui, car elles contribuent à établir le minimum de Maunder. Il consacre quatre années à faire la topographie de la Lune, aboutissant en 1647 à Selenographia, atlas de trois cartes dans lequel, d'une part, il choisit les noms du relief lunaire selon des noms géographiques terrestres20 (cela évite les querelles) et, d'autre part, publie sa découverte de la libration en longitude de la Lune. La postérité a toutefois plutôt retenu la nomenclature lunaire (honorant divers personnages) de Riccioli (1598–1671), avec qui Hevelius correspondait ; mais les sept constellations qu'il a découvertes portent toujours les noms qu'il leur a donnés. Il découvre quatre comètes, en 1652, 1661, 1672 et 1677. Dans sa Cometographia (1668), dit François Arago, «on trouve l'idée, tout à fait neuve, pour l'époque, que les comètes se meuvent dans des paraboles».

 

Le 26 septembre 1679, un feu détruit la plus grande partie de son observatoire, de ses instruments et de ses livres. Il répare les dommages suffisamment rapidement pour observer la grande comète de décembre 1680. Mais cette catastrophe, qu'il décrit en 1685 dans la préface de son Annus climactericus, affecte sa santé. Hevelius meurt en 1687, l'année même où Newton publie ses Principia. Sa tombe est dans l'église - luthérienne à l'époque - de Sainte-Catherine de Gdansk (fr.wikipedia.org - Johannes Hevelius).

 

"Un aigle"

 

On a frapé deux médailles à l'honneur d'Hevelius : dans l'une, on voit d'un côté son portrait & son nom ; de l'autre un aigle portant son vol vers le soleil, avec ces mots : In summis cernit acutè, & dans l'exergue, né en 1611 le 28 de janvier, mort le même jour de 1687 (Le Grand dictionnaire historique, Moreri, Tome V, 1759 - books.google.fr).

 

Les armes de la Pologne portent un aigle couronné.

 

Comme l'indique Hervé Pinoteau (Héraldique capétienne, t. I, Cahiers nobles, 1934), Henri III porte comme Louis XII deux écus accolés couronnés ou non sous une grande couronne. A dextre de France, à sénestre parti de Pologne qui est : de gueules à l'aigle d'argent becquée, membrées et couronnée d'or ; et de Lituanie : de gueules au cavalier brandissant uné épée, d'argent, tenant au bras sénestre un écu d'azur chargé d'une croix patriarcale d'or, bordé du même, monté sur un cheval cabré d'argent, houssé d'azur, cloué et bridé d'or (Patrick van Kerrebrouck, Les Valois, Tome 3 de Nouvelle histoire généalogique de l'auguste maison de France, 1990 - books.google.fr).

 

Au rapport de quelques historiens, lorsque Henri III, frère de Charles IX, roi de France, eut Ă©tĂ© Ă©lu roi de Pologne, et qu'il fit son entrĂ©e Ă  Cracovie, les Polonais s'empressèrent de lui tĂ©moigner leur joie par des fĂŞtes magnifiques, dans lesquelles se fit remarquer un chef-d'Ĺ“uvre de mĂ©canique. Partout oĂą le roi passa, il fut suivi et pour ainsi dire escortĂ© par un aigle blanc fait avec tant d'art, qu'il ne cessa de voler en battant des ailes audessus de la tĂŞte du jeune monarque. Certes, il y avait quelque chose de merveilleux dans cette machine volante ; et pourtant, qui pourrait nous dire aujourd'hui le nom de celui qui l'avait conçue et fabriquĂ©e avec tant d'habiletĂ© ? (Edouard Foucaud, Les artisans illustres, 1841 - books.google.fr).

 

En Pologne en 1573

 

Jean Crasoski (ou Jan Krassowski), de voyage en France, suggère à Catherine de Médicis qu'il pourrait succéder au roi de Pologne malade et sans enfants. Henri épouserait la sœur du roi ou se ferait élire par la diète. L'évêque de Valence, Jean de Montluc, propose l'envoi d'un émissaire, Gui de saint Gelais, sieur de Lanssac le jeune, ou le sieur de Renthy. Mais l'affaire est reportée. 1572. Catherine de Médicis apprend que la santé du souverain polonais se dégrade. Elle demande à Jean de Montluc de s'occuper du projet de la succession. L'émissaire choisi est le fils naturel et légitimé de Jean de Montluc, appelé le sieur de Balagny, alors étudiant à Venise. Il sera accompagné de Jean Choisnin, qui est le secrétaire de Montluc, ainsi que d'un gentilhomme du Dauphiné nommé Charbonneau, et du bailli de Valence qui s'appelle du Belle. Balagny et Choisnin arrive en Pologne qui est touchée par une peste. Près de Cracovie, ils visitent une mine de sel. Ils suivent le roi qui part se reposer au château de Knichin en Lithuanie. Ils sympathisent avec le seigneur Sarnikoskri qui est chevalier de Malte et frère du capitaine-général de la grande Pologne. Finalement ils sont reçus à la cour de Pologne, et y sont bien accueillis. Ils trouvent des seigneurs qui sont très cordiaux, dont certains parlent français. Mais ils trouvent aussi l'ambassadeur de l'Empereur d'Allemagne qui a passé ses six dernières années à la cour pour promouvoir l'idée de la succession par l'archiduc Ernest. 7 juillet 1572. Mort du roi de Pologne-Lithuanie, Sigismund II Augustus Jagiello. Balagny fait publier des informations favorables au duc d'Anjou. Il assiste aux funérailles et retourne en France fin juillet pour se faire remplacer par un ambassadeur de plus grand prestige. Choisnin reste sur place, sans argent, mais les fils du chancelier, Erasme et Gaspard de Binski, prennent soin de lui. 5 août 1572. Balagny arrive à Gdansk après avoir rencontré plusieurs notables lithuaniens et polonais, dont l'évêque de Plosko. Il revient en France sur un navire français, appelé l'Ange, de Fécamp. 17 août 1572. Le choix de l'ambassade se porte d'abord sur un homme de robe, Gui Du Faur de Pibrac, ou M. Truchon, premier président du parlement de Grenoble. Mais finalement Catherine de Medicis préfère envoyer Jean de Montluc, car il a déjà voyagé en Pologne et il est bon diplomate. Il est le frère du capitaine Blaise de Montluc. Jean de Montluc quitte Paris le 17 août 1572, huit jours avant la saint Barthélémy. Il est malade d'une dissenterie et doit s'arrêter plusieurs jours à Saint Disier, où il entend parler de la saint Barthélémy. Il décide de partir au plus vite craigrant que des protestants allemands n'exercent des représailles contre lui quand ils apprendront la nouvelle. Mais c'est en fait un catholique de Verdun qui se montre le plus menaçant, en le poursuivant avec un lieutenant et une trentaine de soldats pour le tuer. Montluc se réfugie dans la ville Saint Mihiel. Mais Montluc est contraint d'accepte de revenir en prisonnier à Verdun. Heureusement des lettres du roi et de Catherine de Medicis permettent sa libération. A Francfort, il est menacé par des militaires voulant le rançonner. Mais il n'a que peu d'argent sur lui, et il réussit à faire appel au sénat de la ville qui ordonne de le laisser libre. 6 octobre 1572. Montluc arrive à Leipzig, où il apprend que la peste sévit en Pologne, et que l'élection est prévue pour le 10 octobre. Mais Montluc parvient tout de même en Pologne avant la diète car celle-ci a dû être reportée plusieurs fois, à cause de la peste. Montluc écrit une lette en latin qui sera lue devant la diete par le français Bazin. Il y est dit que le prétendant suédois est trop jeune car il n'a que huit ans, que l'archiduc Ernest est lui aussi trop jeune, que le tsar Ivan IV est orthodoxe. La candidature du duc d'Anjou est présentée comme celle d'un pays riche, civilisé, et qui n'a jamais été en guerre contre la Pologne. Par ailleurs la diète apprend que les ambassadeurs allemands ont tenter de les court-circuiter en négociant directement avec l'infante polonaise. L'élection ne se fait pas lors de cette diète. Les adversaires de la France font publier des libelles montrant les horreurs de la saint Barthélemy et les exagérant. Montluc consacre beaucoup de temps à donner des réponses, et à solliciter l'aide de tous les polonais qui connaissent un peu la France. Montluc est secondé par Choisnin, Bazin, d'Elbenne, du Belle, et Martin. 6 janvier 1573. Nouvelle diète. Elle a lieu à Varsovie. Les Lithuaniens n'y sont pas présents à cause du mauvais temps et de la peur des russes qui pourraient profiter de leur absence pour les envahir. Il est décidé de réunir une nouvelle diète le 5 avril à Varsovie. Le bruit court que les français ont cherché ont offert 100.000 ecus pour corrompre quelques nobles. Choisnin répond que Montluc n'est arrivé en Pologne qu'avec trois méchants coches qui ne pourraient contenir que 4.000 ecus au maximum, et qu'il lui était impossible de trouver des marchands qui puissent lui prêter plus de 10.000 ecus. Catherine de Medicis, apprenant le problème de Francfort, envoie un second ambassadeur, l'abbé de L'Isle en le faisant passer par Venise. Puis apprenant que Montluc s'en est sorti, demande à l'abbé de revenir. Mais celui-ci est déjà arrivé en Pologne où Montluc le convainc de rester en lui faisant remarquer que les ambassadeurs allemands sont deux, et que les ambassadeurs suédois sont quatre. Le sieur de Lansac arrive aussi en Pologne, au début du mois de mars 1573. 3 avril 1573 Peu avant la Diète, Montluc fait traduire son oraison en polonais et la fait imprimer à 1500 exemplaires par un imprimeur de Cracovie, pour la diffuser à tous les votants. Montluc arrive à Varsovie le 3 avril 1573, accompagné par M. l'abbé de L'Isle et M. de Lansac. Choisnin estime qu'environ 30.000 électeurs étaient prêts à voter. Une grande tente circulaire était de recevoir cinq à six milles personnes. 5 avril 1573.  Diète d'élection. Les candidats sont : l'archiduc Ernest d'Autriche, Henri de Valois, le tsar Ivan IV, et le roi de Suède Jean III. A l'ouverture, le cardinal Commendoni, légat du pape Grégoire XIII, réclame l'élection d'un catholique. Puis, la parole est donnée aux ambassadeurs de l'archiduc, Guillaume de Rosenberg et Wladislas Perstein, qui annoncent le programme de leur candidat : respecter les anciennes lois et privilèges, reprise des pays détachés du royaume, résolution des problèmes polono-germanique à propos de la Prusse et de la Livonie, libre importation des vins de Hongrie, fondation d'une école en Allemagne pour cent jeunes polonais. Puis, le représentant français, Jean de Montluc, s'exprime à son tour. Il promet que le roi obéira aux Etats, que les dettes seront effacées, que tous les ans, la France versera 450.000 florins à la Pologne, que la France renforcera l'armée polonaise par quatre mille hommes et une flotte en mer Baltique pour reprendre le port de Narwa, que cent jeune polonais seront admis gratuitement aux écoles de Paris. L'ambassadeur d'Espagne, Don Pedro Fassardo, qui devait parler ensuite en faveur de l'archiduc Ernest, ne le fait pas et se retire. 11 mai 1573. Henri de Valois, duc d'Anjou, est élu roi de Pologne par la diète polonaise. 10 septembre 1573. Après après la messe, Henri prête serment à Notre-Dame, devant l'autel, en présence de treize ambassadeurs qui étoient venus de Pologne à Paris lui apporter le décret de son élection. 27 septembre 1573. Henri part de Paris avec sa suite. Il est accompagné par son frère, Charles IX jusqu'à Vitry ; et par sa mère, Catherine de Médicis, jusqu'à Blamont. 18 février 1574. Henri arrive à Cracovie, la capitale de la Pologne. 21 février 1574. Henri est sacré roi de Pologne (gw.geneanet.org).

 

A la suite de la bataille de Lépante, le pape Paul V souhaitait engager toute l'Europe catholique dans la lutte contre les Turcs. Son successeur Grégoire XIII poursuivit cette politique. La France tenait cependant à son alliance avec la Porte, et soutenait la révolte des Provinces Unies contre l'Espagne qui ne voulait pas combattre sur plusieurs fronts. Rome ne recevait que de vagues promesses. Le candidat de Rome à la succession polonaise était au départ Ernest d’Autriche, principal concurrent à Henri de Valois, afin d'obtenir la participation de l'Empire à la ligue catholique contre les Ottomans. Mais les négociations menées par l'empereur rendaient son fils indésirable et firent que ne fut acceptable que le candidat catholique restant le français Henri duc d'Anjou, Jean III de Suède était protestant et Ivan le Terrible orthodoxe (Pierre de Cenival, VI. La politique du Saint-Siège et l'élection de Pologne (1572-1573). In: Mélanges d'archéologie et d'histoire, tome 36, 1916 - www.persee.fr).

 

Lassitude

 

Henri apprend la mort de son frère, Charles IX. 16 juin 1574. Dans la nuit, Henri sort du château de Wavel, et quitte la Pologne, sans la permission de la Diète polonaise. 23 juin 1574. Henri arrive à Vienne où il rencontre l'empereur Maximilien II. Il est accueilli avec faste. Henri arrive à Venise où il fait la rencontre de la courtisane Veronica Franco avec qui il aura une courte relation. Il passe ensuite à Padoue, Ferrare et Mantoue (cf. quatrain I, XXIV). En août, Il est à Monza où il rencontre Charles Borromée qui l'impressionne vivement. À Turin, Henri retrouve sa tante Marguerite de France, puis, le duc de Savoie vient le chercher pour l'emmener à Chambéry. Il traverse les Alpes à bord d'une litière vitrée. 2 septembre 1574. Henri arrive à Chambéry où il retrouve son frère François d'Alençon et son cousin Henri de Navarre. Le 6 septembre il est accueilli à Lyon par sa mère. Il souhaite l'annulation du mariage de Marie de Clèves afin de l'épouser, mais le 30 octobre, alors qu'il vient d'arriver à Avignon, il apprend sa mort. Cette nouvelle l'anéantit et il refuse de s'alimenter pendant dix jours. 13 février 1575. Henri est sacré roi de France par le cardinal de Guise dans la cathérdrale de Reims (cf. quatrain I, XXVI) (gw.geneanet.org).

 

Lynx et sanglier dans la littérature

 

Il croit maintenant aux songes... Pourquoi Ronsard raconte-t-il cette histoire fantastique dans le poème Songe (à luy même) (1584) dans le Bocage royal ? Elle a sans aucun doute pour lui et pour Henri III une signification parfaitement claire. On a supposé que le sanglier représente les séditieux, que le poète attaque au nom du roi et en reçoit une récompense pour l'encourager; d'autres croient qu'il représente la pauvreté dont la générosité du roi allait le sauver. Le sanglier semble pourtant plutôt symbole de la brutalité, de la gourmandise, etc. Le choisir comme symbole de la misère serait bizarre. Il est possible que son nom (La Merveille) recèle une allusion identifiable à l'époque, par un lecteur avisé, à une personne ou à un parti hostile au roi ou au poète. Il est possible aussi que le sanglier représente la calomnie, comme la Blatant Beast (monstre pourtant plus ouvertement allégorique) dans les livres V et VI (1596) de l'épopée d'Edmund Spenser, The Faerie Queene. Quoi qu'il en soit, l'intérêt de ce poème réside à mon avis autant dans l'atmosphère hallucinante de l'épisode central que dans les allusions à l'actualité que nous comprenons mal. Cette chasse à laquelle le poète s'acharne et qui n'aboutit jamais; cette scène nocturne dans la forêt où, à bout de forces, il prie la lune; la lune qui entend et qui pour lui répondre descend en se transformant en une de ses voisines qui se qui se trouve être sorcière et lui annonce - élément de conte de fée - qu'il lui faut pour vaincre le sanglier des chiens d'argent; la présence tout à coup visible, sous cet éclairage étrange, dans ce décor invraisemblable, du roi, qui apparaît exactement comme on le voit tous les jours quand il préside son conseil; ce geste, aussi naturel que celui de signer un octroi, par lequel il répond à l'appel du poète, en frappant avec la houssine qu'il tient à la main les échines des chiens qui deviennent effectivement des chiens d'argent de bon aloi, prêts à partir de nouveau à la poursuite de La Merveille... voilà une suite d'événements qui convient mieux au monde du rêve que ne fait le songe littéraire conventionnel. Je remarque de plus que cette apparition du roi n'est pas sans rapport  avec quelques dessins de l'époque, le portrait de Henri III par Antoine Caron par exemple, qui le représente il est vrai à cheval, armé, couronné de lauriers, portant un grand sceptre à la main, mais placé devant un décor mystérieux qui n'est pas sans analogies avec la peinture de Caron, Les astronomes observant une éclipse (Elizabeth Armstrong, Apparition, rêve et cauchemar dans la poésie de Ronsard, Oeuvres complètes de P. de Ronsard: Les quatre premiers livres de La Franciade, 1858 - books.google.fr, Biblioteca dell'"Archivum romanicum.": Storia, letteratura, paleografia, Volumes 198 à 199, 1986 - books.google.fr).

 

Le dĂ©part de ce monde ne s'effectue pas selon les modalitĂ©s apaisĂ©es que l'âge antĂ©rieur dĂ©couvrait dans les philosophies antiques (stoĂŻcienne ou Ă©picurienne). Le baroque dramatise la mort, non sans complaisance parfois, et retrouve le rĂ©alisme macabre du gothique finissant pour dire la dĂ©chĂ©ance du corps vieillissant ou le nĂ©ant du cadavre. Les derniers vers de Ronsard traçaient l'image du poète «dĂ©charnĂ©, dĂ©nervĂ©, dĂ©poulpé» : Chassignet reprend ces Ă©pithètes et les aggrave de l'Ă©vocation du «ventre dĂ©chirĂ© cornant de puanteur» dans le «charnier mortuaire». La crĂ©ature pĂ©rissable est avertie : «Connaissant l'Ă©tat de ta fragilitĂ©/Fonde en Dieu seulement» Le poète baroque cĂ©lèbre en la divinitĂ© la permanence de l'ĂŞtre, seul «roc ferme» (Sponde) dans un univers en proie Ă  l'illusion, au changement, Ă  la mort. La pente est insensible qui conduit de la certitude intellectuelle (La Roque : «C'est ton divin soleil, objet de ma pensĂ©e/Duquel soudainement la terre est traversĂ©e») Ă  la vision mystique : J'ai la vue Ă  le voir plus vive que d'un lynx, Comme l'esprit Ă  l'âme, ainsi Dieu m'est visible. (Fiefmelin) La rĂ©union en Dieu est source de voluptĂ©s extrĂŞmes que cĂ©lèbrent d'AubignĂ© (l'âme «Extatique se pâme au giron de son Dieu») ou Du Bartas : O doux ravissement, saint vol, amour extrĂŞme. Qui fais que nous baisons les lèvres d'amour mĂŞme ! C'est sans doute dans la thĂ©matique amoureuse que s'observe le mieux ce penchant de la sensibilitĂ© baroque pour le passage Ă  la limite, penchant que renforce le spectacle des excès de la guerre. L'hĂ©ritage de la poĂ©sie nĂ©o-pĂ©trarquiste est indĂ©niable mais au lieu de s'en tenir aux feux et aux larmes de convention, le poète explore jusqu'Ă  leur terme les formes et les effets de la cruautĂ© de la dame envers l'amant : Sponde se peint en nouvel «ActĂ©on, de ses chiens dĂ©chiré». Si tous n'atteignent pas Ă  l'intensitĂ© de la rage amoureuse qui s'exprime dans l'HĂ©catombe Ă  Diane et dans les Stances de d'AubignĂ©, beaucoup crient leur douleur de bĂŞte blessĂ©e : L'amour et la fureur m'affolle tellement. Qu'un sanglier Ă©cumeux si transportĂ© n'enrage... (La JessĂ©e) ArrachĂ©, «entamé», mis Ă  nu, le cĹ“ur saigne «d'une plaie incurable». «Vos yeux ont fait le coup», dĂ©nonce Amadis Jamyn, et ce sang «bouillant veut jaillir encontre le coupable» (AndrĂ© Tournon, Histoire de la littĂ©rature française du XVIe siècle, 2004 - books.google.fr).

 

Les animaux féroces ou sauvages dont se plaint André Mage de Fiefmelin, sangliers, daims, chevreuils, existaient anciennement dans l'île d'Oléron (Louis Audiat, Les oubliés: André Mage de Fiefmelin, poète du XVIe siècle, Tome 1, 1970 - books.google.fr).

 

L'ordre du saint Esprit

 

«Per visibilia ad invisibilia, “Par l'intermĂ©diaire des choses visibles vers les choses invisibles”», ainsi se rĂ©sume la dĂ©marche des Pères de l'Église et des thĂ©ologiens mĂ©diĂ©vaux. Loin d'en ĂŞtre les inventeurs, ils se sont contentĂ©s de l'emprunter Ă  Platon et Ă  Plotin. Ils y ont ajoutĂ© le souci, comprĂ©hensible chez des pasteurs, de donner figure concrète aux notions spirituelles et morales. PĂ©rĂ©grin d'Opole (vers 1260 - vers 1330), nommĂ© inquisiteur de Cracovie par le pape Jean XXII en 1318, fut un orfèvre en la matière, aussi bien pour mĂ©nager Ă  ses auditeurs des accès au monde cĂ©leste que pour confĂ©rer au surnaturel une «prĂ©sence rĂ©elle». [...] PĂ©rĂ©grin use peu du bestiaire, du lapidaire et du plantaire; nĂ©glige les possibilitĂ©s offertes par le catĂ©chisme animal, minĂ©ral et vĂ©gĂ©tal. Cette faiblesse du prĂ©dicateur polonais saute aux yeux, si on le compare Ă  la plupart de ses confrères. Il fait peu confiance au savoir zoologique pour concrĂ©tiser des leçons morales et spirituelles. Il connaĂ®t les dĂ©fauts habituellement imputĂ©s Ă  certains animaux : quiconque veut accĂ©der au bercail cĂ©leste, proclame-t-il, doit Ă©viter d'ĂŞtre cruel comme le loup, envieux comme le chien, orgueilleux comme le lion, luxurieux comme le porc et infidèle comme le renard. Il oppose la propretĂ© du lynx Ă  la saletĂ© du renard : «L'Esprit Saint est comparĂ© Ă  cet animal appelĂ© lynx, qui est une bĂŞte très propre, demeurant en un lieu propre. Survient le renard, animal sale, qui macule le terrier du lynx. Celui-ci s'en va aussitĂ´t, parce qu'il est incapable de supporter la puanteur» (Sermones) (HervĂ© Martin, PĂ©rĂ©grin d’Opole: Un prĂ©dicateur dominicain Ă  l'apogĂ©e de la chrĂ©tientĂ© mĂ©diĂ©vale, 2015 - books.google.fr).

 

L'Ordre français du Saint-Esprit fut institué par Henri III, à Paris, tant en mémoire de ce qu'il avait été élu roi de Pologne que de son avénement au trône de France le jour de la Pentecôte.

 

L'Ordre du Saint-Esprit fut créé le 31 décembre 1578. Le roi nous apprend lui-même, dans le préambule des statuts, les motifs qui le portèrent à choisir cette céleste protection. Après avoir remercié Dieu de l'avoir fait naître dans la religion catholique, il ajoute: «Nous devons encore lui témoigner notre reconnaissance en ce qu'il luy a plu, entre tant de contraires et diverses opinions, qui ont exercé leurs plus grandes forces en nostre temps, nous conserver en la connoissance de son saint Nom, avec une profession d'une seule Foy Catholique et en l'union d'une seule Église Apostolique et Romaine, en laquelle nous voulons, s'il luy plaist, vivre et mourir. De ce qu'il lui a plu aussi, par l'inspiration du Benoist Saint Esprit au jour et feste de la Pentecoste unir tous les cœurs et volontez de la Noblesse Polonoise, et ranger tous les Estats de ce puissant et renommé Royaume, et Grand-Duché de Lituanie, à nous élire pour leur Roy, et depuis, à mesme jour et feste, nous appeller au régime et gouvernement de cette couronne très-Chrestienne, par sa volonté et droit successif» (Felix Panhard, L'Ordre du Saint-Esprit aux XVIIIe et XIXe siècles: notes historiques et biographiques sur les membres de cet ordre depuis Louis XV jusqu'a Charles X, 1715-1830, 1868 - books.google.fr).

 

Gilles de Souvré (1540 - 1624) sur un portrait porte dans son coqstume de l'Ordre du saint Esprit un manteau doublé de loup-cervier. Il fut d'abord grandmaître de la garde-robe du duc d'Anjou (depuis Henri III), qu'il avait suivi en Pologne; il devint capitaine du château de Vincennes. Il fut un des premiers à reconnaître les droits de Henri IV, qu'il servit avec fidélité, et quile nomma gouVerneur du Dauphin. Le marquis de Courtanvaux reçut, en 1613, le bâton de maréchal, et mourut en 1624, âgé de 84 ans (P. L. Jacob, Costumes historiques de la France d'après les monuments les plus authentiques, Tome 5, 1852 - books.google.fr).

 

La vision

 

L'idée qui nous est familière selon laquelle les rayons lumineux sont émis par une source extérieure, pénètrent dans l'oeil et entraînent une reponse de la rétine, laquelle chemine jusqu'au cerveau par la voie du nerf optique, a pris de nombreuses années pour être établie. Une première doctrine de la Grèce antique est celle du "rayon visuel". Elle postule que le "feu visuel" jaillit de l'oeil sous l'effet de la lumière et va au contact des choses pour en éprouver la forme, la couleur ou d'autres propriétés. L'optique géométrique (qui intéresse les astronomes et en particulier Ptolémée) s'inspire de la géométrie Euclidienne et postule que la vision est un cône ou pyramide visuelle qui a pour apex l'oeil et se projette sur le monde. Aristote propose un rôle du "milieu intermédiaire", entre voyant et visible, changeant de qualité lorsque la vison se produit. Il pense que la lumière blanche est pure et homogène et les couleurs naissent d'un rapport (énigmatique) entre clarté et lumière. C'est avec Ibn Al Haytam (ou Alhazen), opticien persan du Xème siècle, qu'un progrès capital dans la compréhension de la propagation et de la perception du rayonnement lumineux est réalisé. Il propose que les rayons lumineux se propagent de l'objet à l'œil, ce dernier devenant le récepteur de la lumière. Cependant il commet l'erreur de suggérer que c'est le cristallin (et non la rétine) qui reconstitue l'image point par point, avant son transfert, par le nerf optique, jusqu'au "siège de l'âme" (Françoise Jauzein, Oeil, cerveau, perception visuelle : évolution des concepts jusqu'au siècle des lumières, fevrier 2006 - acces.ens-lyon.fr).

 

Roger Bacon nous assure cependant, dans sa perspective, qu'il donnait une opinion exacte de l'agrandissement apparent du soleil et de la lune. Mercuroclius de Messine commença, en 1574, à dévoiler l'usage du cristallin dans le livre De Lumine et umbra. Dans son œuvre de la Magie naturelle, Porta donne les principes de la chambre obscure, découverte qui conduisit Kepler à celle de la manière dont se fait la vision. Ce dernier reconnut et démontra que l'œil est une chambre obscure et expliqua en détail la manière dont les objets viennent s'y peindre (Dioptrique, 1611) (Encyclopédie du dix-neuvième siècle: répertoire universel des sciences, des lettres et des arts, Tome 16, 1870 - books.google.fr).

 

Les yeux ne peuvent voir qu'à travers l'espace, c'est-à-dire à la condition qu'il y ait un intervalle entre l'œil et son objet; autrement, il est impossible à nos yeux de voir. Supposez que l'objet soit trop éloigné; ils ne pourront le voir, parce que le rayon visuel ne peut s'étendre aussi loin; si, au contraire, cet objet est trop rapproché et qu'il n'y ait aucun intervalle entre les yeux et l'objet qui leur est présenté, il leur est tout à fait impossible de le voir; ainsi, approchez vos yeux de cet objet jusqu'à le leur faire toucher, la vue leur devient impossible, parce qu'il n'y a plus d'espace. J'affirme donc, sans crainte de me tromper, que ces yeux, qui ne peuvent rien voir qu'à travers l'espace et à une certaine distance, ne peuvent maintenant et ne pourront alors voir Dieu, parce que Dieu n'est pas limité par l'espace. Ou bien donc ils seront doués de la faculté de voir ce qui ne se voit point dans un lieu, ou", s'ils ne peuvent voir que dans leurs conditions actuelles, ils ne verront point Celui qui n'occupe aucun point de l'espace (Sermons au peuple, sermon CCLXXVII) (Œuvres complètes de Saint Augustin, Volume 18, 1872 - books.google.fr).

 

Cf. le lynx de Fiefmelin.

 

"troisiesme mois se levant le Soleil" : cinquantième jour de la Pentecôte

 

Afin de relever la grandeur de l'alliance que Dieu a conclue avec Israël, Moise décrit, sous l'image d'un majestueux soleil levant, la glorieuse apparition de Jéhovah au Sinaï, pour donner la loi aux Israélites et devenir leur roi (Deutéronome XXXIII) (La Sainte Bible traduite en français, traduit par Augustin Crampon, 1894 - books.google.fr, Samuel Descombaz, Guide biblique ou harmonie et commentaire pratique et populaire de l'Ancien et du Nouveau Testament, Tome 1, 1856 - books.google.fr).

 

Dans une de ses lettres, Augustin dit que Dieu a parlé à Moïse le premier jour du troisième mois... et que la Loi fut donnée le troisième jour du troisième mois.

 

Lettre LXX. (lb. XIX, 1-11.) Sur les cinquante jours Ă©coulĂ©s entre la Pâque et la publication de la Loi. - « Le troisième jour du troisième mois depuis la sortie de l'Egypte, les enfants d'IsraĂ«l vinrent au dĂ©sert de SinaĂŻ ils Ă©taient partis de Raphidin, et Ă©tant arrivĂ© au dĂ©sert de SinaĂŻ, IsraĂ«l campa au pied de la montagne; et MoĂŻse monta sur la montagne de Dieu, et le Seigneur l'appela du haut de la montagne, et lui dit : Voici ce que tu annonceras aux enfants d'IsraĂ«l etc. Et un peu plus loin : Descends, et parle au peuple, et purifie-le aujourd'hui et demain, qu'ils lavent leurs vĂŞtements, et qu'ils soient prĂŞts pour le troisième jour. Car dans trois jours le Seigneur descendra sur le mont SinaĂŻ, en prĂ©sence de tout le peuple. C'est en ce jour, comme on le voit par la suite du rĂ©cit, que fut donnĂ©e la Loi, Ă©crite du doigt de Dieu sur des tables de pierres. Or, il est constant que ce jour est le troisième du mois depuis la sortie d'Egypte. On compte donc cinquante jours depuis celui oĂą les IsraĂ©lites cĂ©lĂ©brèrent la Pâque par l'immolation et la manducation de l'agneau, c'est-Ă -dire, depuis le quatorzième jour du premier mois, jusqu'Ă  celui oĂą la Loi fut publiĂ©e : savoir dix-sept jours qui restent du premier mois, en partant du quatorzième ; puis les trente jours du second mois, qui, rĂ©unis aux prĂ©cĂ©dents, donnent quarante-sept; et enfin les trois jours du troisième mois : ce qui fait cinquante jours Ă  partir de la solennitĂ© de la Pâque. Ainsi l'ancien Testament Ă©tait comme une ombre de l'avenir: de mĂŞme qu'il s'est Ă©coulĂ© cinquante jours entre la fĂŞte de l'immolation de l'agneau et la promulgation de la Loi par le doigt de Dieu; de mĂŞme dans le nouveau Testament, oĂą la VĂ©ritĂ© mĂŞme est apparue, on compte cinquante jours depuis la fĂŞte de l'immolation de JĂ©sus-Christ, l'agneau immaculĂ©, jusqu'au jour oĂą le Saint-Esprit descendit des cieux. DĂ©jĂ  prĂ©cĂ©demment nous avons dit, sur le tĂ©moignage de l'Evangile, que, par le doigt de Dieu, il faut entendre l'Esprit-Saint (Oeuvres complètes de Saint Augustin, 1866 - books.google.fr).

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