Sixte Quint et Domenico Fontana

Sixte Quint et Domenico Fontana

 

I, 45

 

1590-1591

 

Secteur de sectes grand peine au delateur,

Beste en theare dresse le jeu scenique

Du fait antique annobly l'inventeur.

Par secte monde confus & schismatique.

 

"secteur de sectes" : brigands, outre sectes religieuses

 

"secteur" de "sector" entre autres "coupeur (zonarius : de bourses)" (Plaute, Trinummus - Les trois pièces d'argent, Acte IV, scène II) et "sectes" de "secta" entre autres humoristiquement "bande de brigands" (Apulée, Métamorphoses, 115, 10) (Gaffiot).

 

À partir de l'idée de : «ligne de conduite», secta peut, dans le domaine politique, désigner les principes d'action, la «position», d'un individu, et par suite, non sans une nuance ambiguë, le groupe ou le clan de ceux («clients» ou «amis», dans le jargon politique romain) qui se rallient comme sectatores à cette position et se placent dans le sillage de l'individu en question, dès lors leur chef ou leader. Le mot, même dans sa seconde acception, ne se confond pas avec ceux qui signifient «parti politique» (pars, factio). Il ne désigne pas davantage une réalité officielle et permanente, mais dessine le parcours d'un personnage entreprenant, les, options d'un particulier qui pourrait se révéler un aventurier: ou un condottiere. L'aboutissement de cette tendance est le sens de «bande de brigands» que prend le mot secta chez Apulée, lequel inflige le même sort au terme factio. Apulée, Metamorphoseon libri, IV, 18 («compagnie», «confrérie»), 23 («métier»), 24 («compagnie»); V, 15 («milieu»), 31 («principes»); VII, 4 («condition»), 10 («gent», «sexe»); IX, 11 («compagnie»), 27 («précepte»); X, 11 («profession», «art»), 33 («doctrine»). Les trois premiers passages concernent la bande de brigands qui a emmené Lucius transformé en âne (Pascal Boulhol, Secta : de la ligne de conduite au groupe hétérodoxe. In: Revue de l'histoire des religions, tome 219, n°1, 2002 - www.persee.fr).

 

Les talens de Félix Peretti l'ayant conduit au Généralat de l'ordre des Franciscains, il fut connu de Pie V qui le fit fon Confesseur extraordinaire, Evêque de Sainte-Agathe, dans le Royaume de Naples, & enfin Cardinal en 1569. Il prit avec le nom de Cardinal de Montalte, toutes les mesures qui pouvoient le conduire au souverain Pontificat, affecta une extrême humilité, une indifférence si générale, qu'on la prit pour stupidité : ceux qui ne le connoissoient pas, l'appelloient même l'âne de Montalte. Quoiqu'il n'eût encore que soixante-quatre ans à la mort de Pie V on eût cru à ses dehors négligés & caducs qu'il approchoit de quatre-vingt ans. Toutes ces circonftances le conduisirent à son but; & les Cardinaux assemblés pour élire un successeur à Pie V après bien des divisions dans le Conclave, se réunirent en faveur du Cardinal de Montalte, qui fut élu le 24 Avril 1585. Il prit le nom de Sixte V pour renouveller la mémoire de Sixte IV qui, comme lui, avoit été Religieux Franciscain, & n'étoit pas d'une extraction plus relevée que celle de Peretti (Jean-François Dreux du Radier, L'Europe illustre, contenant l'histoire abrégée des souverains, des princes & des dames célèbres en Europe, Tome 3, 1777 - books.google.fr).

 

Sixte V (1585-1590) et Clément VIII (1592-1605) amorcent une remise en ordre de leurs États par une violente répression contre la noblesse hors-la-loi, un système de délation rétribuée et l'enrôlement des bandits parmi les «soldats de la Sainte Église» (Delphine Carrangeot, Emmanuelle Chapron, Hélène Chauvineau, Histoire de l'Italie du XVe au XVIIIe siècle, 2022 - books.google.fr).

 

"monde confus" : sectes religieuses

 

Le Synode d'Anvers, célébré au mois de mai, en 1610, parle des superstitions dans le même sens que le pape Sixte V, et le Concile provincial de Malines, en 1607. La superstition, dit-il, est un crime énorme, fort injurieux à Dieu, et extrêmement préjudiciable aux Etats. Pour en arrêter le cours, nous voulons que l'on observe ce qui en a été ordonné Sixte V, dans la bulle CÅ“li et terræ; par par les sérénissimes archiducs d'Autriche dans leur édit rapporté à la fin de ce Synode; et par le Concile provincial de Malines, dans le réglement qu'il a fait sur ce sujet. Voici l'édit dont il s'agit, de la manière qu'il se trouve imprimé avec ce Synode :

 

TRÈS-CHERS et féaux : Comme entre autres grands péchés, malheurs et abominations que ce misérable tems nous apporte chacun jour à la ruine et confusion du monde, sont des sectes de diverses maléfices, sorceleries, impostures, illusions, prestiges et impiétés, que certains vrais instrumens du diable après les hérésies, et apostasies, et athéismes, s'avancent journellement mettre en avant. (Jean Baptiste Thiers, Traité des superstitions, Tome 1, 1679 - books.google.fr).

 

Délateurs

 

Sixte-Quint sortait du palais de l'inquisition, où il avait trouvé la pourpre. Son gouvernement fut l'application à la politique des théories des moines blancs sur l'autorité religieuse. L'anarchie qui dévorait Rome exigeait un remède violent. La rigueur était nécessaire, sans doute; mais dans les mains d'un homme dont la volonté n'avait point de frein, elle finit par substituer au désordre le plus dur despotisme. Sixte-Quint n'eut que deux ministres : l'espion et le bourreau. Au lieu d'oublier, en montant sur le trône pontifical, les traditions du Saint-Office, il les prit pour base de sa politique. Rome se trouva soudain enveloppée d'une chaîne de délateurs d'autant plus redoutable qu'elle était invisible; d'autant plus lourde que, rivée à tous les couvents, à tous les confessionnaux, à toutes les églises, elle traversait toutes les maisons et pesait sur le prince comme sur le bourgeois, sur le cardinal comme sur le mendiant du Transtevere. C'est quand le silence, fils des gouvernements absolus, eut étendu sa main de plomb sur la ville des Papes et l'État de l'Église, que Sixte-Quint se mit à brandir son glaive spirituel contre les deux couronnes de France et d'Angleterre. Dans les derniers jours de son faible prédécesseur, une association formidable, imaginée pour tenir tête à la réformation en Allemagne et l'écraser en France, s'était organisée, comme nous l'avons dit, sous l'inspiration des Jésuites. Cette association s'appelait la Ligue catholique. Elle comptait dans ses rangs, le Pape, l'empereur, le roi d'Espagne les princes allemands de la maison d'Autriche, ceux de la maison de Lorraine, les archevêques de Cologne et de Mayence, les ducs de Nemours, de Clèves, de Nevers, de Savoie, de Ferrare, de Parme, le grand maître de l'ordre de Malte, le cardinal de Vendôme, le comte de Vaudémont, les républiques de Gênes et de Lucques, le duc de Florence, le prince d'Écosse et tout le catholicisme français. A l'exemple d'Innocent III, Sixte-Quint enflamme le zèle de ces nouveaux croisés au souffle ardent de ses colères. Une bulle, signée par vingt-cinq cardinaux, est lancée, ce sont ses expressions mêmes, «contre la génération bâtarde et détestable de la maison de Bourbon.» Du droit omnipotent du Saint-Siège, il proscrit le roi de Navarre et son cousin le prince de Condé, les déclare hérétiques, relaps, et, par conséquent, incapables de posséder à l'avenir principauté ou royaume. A cet anathème, dont la violence est inouïe, succède l'excommunication de Henri III, et le coup de poignard de Jacques Clément qui arrache des cris d'admiration à Sixte-Quint : c'est la main de Dieu ! c'est un miracle qui vient de s'accomplir sous nos yeux ! dit-il au milieu du Sacré-Collège, en apprenant l'assassinat du roi de France. Deux ans auparavant, il avait menacé du même châtiment céleste et frappé du même glaive la reine Élisabeth (Mary-Lafon, Mille ans de guerre entre Rome et les papes, 1860 - books.google.fr).

 

On se demande quelle peut bien être cette secte qui tue des gens sur des bûchers.

 

Invention et anoblissement

 

Les villages des rives du lac de Lugano ont la gloire d'avoir donné naissance à de grands artistes. Doménico Fontana, de Mélide, inventa en 1586, sous le Pape Sixte-quint, une machine au moyen de laquelle il transporta le grand obélisque dont le poids est de 16000 quintaux, depuis le cirque jusqu'à la place du Vatican, et qui lui servit aussi à le mettre sur pied.

 

La description de cette machine ingénieuse et du transport de l'obélisque se trouve dans l'ouvrage intitulé : Della trasportazione dell' Obelisco Vaticano fatta del Cavalière Domenico Fontana. Fot. Roma 1590-92.

 

Fontana inventa aussi à Naples des machines hydrauliques d'un effet extraordinaire; il y mourut en 1607 à l'âge de 64 ans, et on y lit son épitaphe dans l'église de Ste Anne (Johann Gottfried Ebel, Manuel du voyageur en Suisse, Tome 3, 1805 - books.google.fr).

 

Fontana fut créé chevalier de l'éperon d'or, & fait noble romain. Le pape lui donna une pension de 2,000 écus d'or, réversible à ses héritiers, indépendamment de 5,000 écus d'or qui lui furent payés comptant; à quoi il ajouta la donation de toute la charpente & de tous les matériaux qui avoient servi à cette grande opération, somme qu'on évalua à plus de 20,000 écus romains, 100,000 fr. Au pied de l'obélisque est une petite inscription, peu apparente à la vérité, mais où on lit : Dominicus Fontana ex pago agri novo comensis transtulit & erexit (Antoine Chrysostome Quatremère de Quincy, Architecture, Tome 2, 1788 - books.google.fr).

 

"peine au délateur"

 

Les deux fameuses colonnes de Trajan & d'Antonin dûrent à Fontana leur rétablissement. Cet infatigable architecte bâtissoit en même temps l'hôpital dei Mendicanti, aujourd'hui destiné à la retraite des prêtres pauvres & infirmes, & dirigeoit la conduite de l'Aqua Felice. L'aqueduc a vingt-deux milles de longueur. Le pape employa constamment à ces travaux deux, trois & juqu'à quatie mille hommes (Antoine Chrysostome Quatremère de Quincy, Architecture, Tome 2, 1788 - books.google.fr).

 

Sixte V fit relever la colonne Trajan qui avoit été renversée, & fit mettre dessus la statuë de S. Pierre. On remarque que ce fut dans cette Place que l'Empereur Antonin fit publier un Edit en faveur des Chrétiens, par lequel il défendoit de les troubler dans l'exercice de leur Religion, & ordonnoit que les délateurs qui les accuseroient fussent condamnés à être brûlés vifs (Le grand dictionnaire historique, par l'abbé Louis Moreri, Tome 3, 1689 - books.google.fr).

 

"Beste"... ieu scenique" : Cirque et théâtre

 

Les ludi scaenici étaient, dans la Rome antique, les jeux sur scène (le théâtre), distincts des ludi circenses ou jeux du cirque. Paraphrase : Le persécuteur de sectes religieuses accordera une grande récompense au délateur; on produira la bête au théâtre, on dressera le jeu scénique; le découvreur de cet antique spectacle sera ennobli; le monde sera confus et divisé à cause des sectes. [...] Commentaire : À propos du premier vers, des récompenses étaient offertes à ceux qui dénonçaient les huguenots : «Le samedy d'après [le 4 juin 1530] fut aussi publié, quiconque sçauroit aucuns luthériens secretz, il les vint révéler à la cour de Parlement, et on donneroit vingt escus d'or au révélant ; autrement qui les receleroit seroit bruslé» (Journal d'un bourgeois de Paris sous le règne de François Ier) (Brind'Amour).

 

Dans le cirque et dans l'amphithéâtre les spectacles étaient composés de courses de chevaux, de combats de gladiateurs, d'animaux, les concours d'athlètes, d'exhibitions d'animaux exotiques ou de créatures monstrueuses (Pascal Charvet, Stéphane Gompertz, Annie Collognat, Pompei, 2023 - books.google.fr).

 

Dans le quatrain, on aurait introduit des animaux sur la scène d'un théâtre.

 

Le théâtre de Pompée est un théâtre romain situé au Champ de Mars, à Rome, dans l'actuel rione du Parione, construit par le consul Pompée, entre 61 et 55 av. J.-C. Il est à Rome le premier théâtre construit de façon durable en maçonnerie et de dimensions monumentales, prototype absolu mais en même temps héritier d'une tradition déjà ancienne, tant italique que gréco-orientale. Issu d'inspirations multiples et modèle pour des édifices ultérieurs, il constitue une rupture dans l'histoire des édifices de spectacles du monde romain et une étape dans l'histoire de l'architecture romaine publique. Il abritait aussi un sanctuaire dédié à Vénus et des chapelles annexes vouées à des divinités de moindre importance (fr.wikipedia.org - Théâtre de Pompée).

 

Pompée donna pour la dédicace du théâtre de Vénus Victrix, des jeux pendant cinq jours. Rome vit alors pour la première fois un rhinocéros. Vingt éléphants, ou dix-sept, selon d'autres, combattirent contre des prisonniers gétules armés de javelots. Enfin, il ne parut pas dans l'arène moins de quatre cent dix panthères et six cents lions, dont trois cent quinze à crinière (Charles Magnin, Les origines du théâtre antique et du théâtre moderne, ou Histoire du génie dramatique depuis le 1. jusqu'au 16. siècle, 1868 - books.google.fr).

 

Fontana n'employa pas, dans tout le cours de l'entreprise de l'obélisque de la place Saint Pierre, moins de 900 ouvriers et de 140 chevaux (Biographie universelle, ancienne et moderne, ouvrage rédigé par une société de gens de lettres, Tome 14, 1856 - books.google.fr).

 

Le cirque de Caligula et de Néron (cirque de Néron, Gaianum ou encore cirque du Vatican; Circus Vaticanus) était situé entre le mont Janicule et le mont Vatican, à la périphérie de Rome, dans la plaine vaticane, le long de la Via Cornelia (fr.wikipedia.org - Cirque de Caligula et de Néron).

 

En latin, on a toujours appelé circenses les jeux de l'amphithéâtre : l'expression latine Panem et circenses («du pain et des jeux») comprenait tous les jeux, ceux de l'amphithéâtre comme ceux du cirque (fr.wikipedia.org - Cirque romain).

 

Le théâtre de la Bibliothèqhe Vaticane

 

Sixte V fit ajouter aux bâtimens de la Bibliothèque du Vatican, une partie appelée le Théâtre, que construisit l'architecte Fontana, et qu'il fit orner de peintures (Trésor de numismatique et de glyptique, ou Recueil général de médailles, monnaies, pierres gravées, bas-reliefs, etc., Tome 9, 1839 - books.google.fr).

 

Acrostiche : SBD P

 

Sur le monnayage du duc de Savoie Charles Ier on peut avoir "SBD" pour Savoie et "P" ou "PC" pour princeps. Il y a aussi "XPS vincit - XPS regnat - XPS Inper" (imperat) (André Perrin, Catalogue du médaillier de Savoie, Tome 5, 1883 - books.google.fr).

 

Charles Ier, dit le Guerrier, né à Carignan le 29 mars 1468, mort à Pignerol le 13 mars 1490, fut duc de Savoie, prince de Piémont, comte d'Aoste et de Maurienne de 1482 à 1490, roi titulaire de Jérusalem et de Chypre de 1485 à 1490 et marquis de Saluces de 1487 à 1490. Il est contemporain du pape Sixte IV 212e pape de l’Église catholique de 1471 à sa mort en 1484 (fr.wikipedia.org - Charles Ier (duc de Savoie)).

 

L'acclamation du chrisme triomphal XPC NIKA ayant été ensuite augmentée et même complétée en celle-ci : CHRISTVS VINCIT, CHRISTVS REGNAT, CHRISTVS IMPERAT, nous sommes heureux de la voir et sur le revers des monnaies de Louis XI et Louis XII rois de France, sur les monnaies de Charles Ier duc de Savoie, sur une infinité de cloches qui en sonnant, annoncent la gloire du Sauveur, et sur le grandiose obélisque élevé par le pape Sixte V au beau milieu de l'immense et superbe place vaticane (Vincent Ambriosiani, Le chrisme et ses variétés (III), Revue de l'art chrétien: recueil mensuel d'archéologie religieuse, Volume 30, 1887 - books.google.fr).

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