Urbain VIII et Galilée

Urbain VIII et Galilée

 

II, 4

 

1633-1634

 

Depuis Monech jusques prés de Sicile,

Toute la plage demeurera désolée,

Il n'y aura Faubourg, Cité ni Ville,

Que par Barbares pillée, soit & volée.

 

"Monech" : Monaco et la guerre contre l'Espagne

 

Les Espagnols, par un traité conclu en 1605, avec le prince de Valditaro, oncle et tuteur avec le prince d'Honorat II, prince de Monaco, avaient mis garnison dans la ville et le château de ce nom. Ce traité devait être confirmé par le prince de Monaco, parvenu à sa majorité; mais celui-ci mécontent de la cour de Madrid, chercha tous les moyens d'expulser les Espagnols de son pays; et il avait, conclu en avril 1634, un traité avec Louis XIII, par lequel il lui offrait sa personne et la place de Monaco, pourvu qu'il voulût l'indemniser de la perte qu'il ferait des terres qu'il possédait dans les états du roi d'Espagne; terres qu'on ne manquerait pas de confisquer, lorsqu'il aurait pris le parti de la France. Ce traité était resté sans exécution (Gaëtan de Raxis de Flassan, Histoire générale et raisonnée de la diplomatie française, Tome 3, 1811 - books.google.fr).

 

Dans un mĂ©moire du 20 fĂ©vrier 1633, HonorĂ© se plaint d'avoir eu toujours Ă  faire l'avance de la solde de la garnison ; les arriĂ©rĂ©s, capital et intĂ©rĂŞt ne cessent de s'accumuler, et les officiers royaux soulèvent toutes sortes de prĂ©textes pour l'empĂŞcher de toucher ses revenus. Aux Ă©ternelles dolĂ©ances du protĂ©gĂ© rĂ©pond l'Ă©ternelle manifestation platonique de bonne volontĂ© du protecteur : le 12 juillet, le roi ordonne au gouverneur du Milanais et au vice-roi de Sicile de s'acquitter de leurs dettes envers Honoré  (Maurice Moncharville, Monaco, son histoire diplomatique : la question des jeux, 1898 - www.google.fr/books/edition).

 

En 1637, l'armée navale de France, commandée par le fameux Sourdis, archevêque de Bordeaux, reprend les iles de Lérins, sur la côte de Provence, dont les Espagnols s'étaient emparés depuis 1635 et d'où ils inquiétaient notre littoral (Richild Grivel, De la guerre maritime, Revue maritime et coloniale, Volume 25, 1869 - books.google.fr).

 

La guerre avec l'Espagne durera jusqu'en 1659. Des batailles navales auront lieu en Méditerranée (Orbitello en 1646, en Toscane) (fr.wikipedia.org - Bataille d'Orbetello).

 

Henri II de Lorraine, duc de Guise, né en 1614, célèbre par ses amours romanesques, ses duels et ses prodigalités. En 1647, il se rendit à Rome pour faire annuler son mariage avec Honorée de Berghes, devint généralissime des Napolitains qui s'étaient révoltés contre l'Espagne, remporta une victoire sur les troupes espagnoles, puis devint leur prisonnier et fut envoyé à Madrid. Redevenu libre, après avoir vainement tenté de reconquérir le royaume de Naples en 1654, il se retira à Paris, où il mourut sans enfants, en 1664 (Catalogue de l'oeuvre de Pierre Mignard, Mémoires, Volumes 40-41, Société académique d'agriculture, des sciences, arts et belles-lettres du département de l'Aube, 1876 - books.google.fr).

 

"Barbares" : Barberini

 

Quand Florus dit : «Sore et Algide (qui le croiroit ?) nous ont Ă©tĂ© formidables ; Satrique et Cornicule Ă©toient des provinces; nous rougissons des Boriliens et des VĂ©ruliens, mais nous en avons triomphĂ©; enfin Tibur, notre faubourg, PrĂ©neste, oĂą sont nos maisons de plaisance, Ă©toient les sujets des veux que nous allions faire au Capitole;» cet auteur, dis-je, nous montre en mĂŞme temps la grandeur de Rome et la petitesse de ses commencemens; et l'Ă©tonnement porte sur ces deux choses (Charles-Louis de Secondat de Montesquieu, Oeuvres complètes, Tome 3, 1874 - books.google.fr).

 

Celui qui règne temporellement sur Rome et spirituellement sur le reste du monde catholique, est un petit vieillard morose, âgĂ© de soixante ans, Florentin et avare comme un Florentin, Italien avant tout, prince avant tout, oncle surtout, avant tout. Il pense Ă  acquĂ©rir des morceaux de terre pour le Saint Siège et des richesses pour ses neveux, dont trois sont cardinaux: François et les deux Antoine, et le quatrième, ThaddĂ©e, gĂ©nĂ©ral des troupes papales. Pour satisfaire aux exigences de ce nĂ©potisme, Rome est au pillage : - «Ce que ne firent point les Barbares,» dit Marforio, ce Caton, le censeur des papes, - «les Barberini l'ont fait.» Et, en effet, Matteo Barberini, exaltĂ© au pontificat, sous le nom d'Urbain VIII, a rĂ©uni au patrimoine de saint Pierre le duchĂ© dont il porte le nom [Urbino] (Alexnadre Dumas, Le comte de Moret, 1866 - www.gutenberg.org).

 

Les neveux du pape seront poursuivis pour concussion et pillage des biens de l'Eglise par le nouveau pape Innocent X [cf. quatrain II, 28] qui leur doit pourant son élection (1644) et favorable à l'Espagne, mais qui favorise ses propres neveux. Les Barberini sont protégés par Mazarin qui les accueille en France durant leur exil (Yvonne Singer-Lecocq, La Tribu Mazarin, 1989 - www.google.fr/books/edition).

 

Ce que n'ont pas fait les Barbares Ă  Rome, Barberini l'a fait : Trait dĂ©cochĂ© contre le pape Urbain VIII (Barberini), qui avait pris l'airain du PanthĂ©on pour en faire des canons. [...] 

 

De tous temps, à Rome, les statues servirent de pilori pour clouer les ridicules à coups d'épigrammes. Le peuple de Rome, qui peut-être n'a jamais perdu cette habitude, la reprit de nouveau à la fin du quinzième siècle ou au commencement du seizième, lorsque l'on eut découvert & adossé à la boutique d'un malin tailleur nommé Pasquin, en face du palais Pamphili une statue antique mutilée représentant, à ce que l'on croit, Ménélas défendant le corps de Patrocle. Cette statue, qui fut immédiatement baptisée par le peuple du nom de Pasquin, était chaque jour couverte d'épigrammes & de satires qui n'épargnaient ni le pape ni les cardinaux. Bientôt une seule statue ne put suffire aux nombreuses railleries lancées par les Romains. On donna comme compère à Pasquin une statue colossale placée sur le Capitole & surnommée Marforio, du forum de Mars où elle fut trouvée. Alors commencèrent chaque matin, entre les deux amis, des demandes & des réponses où Pasquin représentait la bourgeoisie & Marforio la noblesse. Une autre statue, un Facchino (portefaix), fut à son tour chargée de représenter le peuple, & prit part à la conversation, à laquelle se mêlèrent encore d'autres statues (La Revue de poche littéraire & anecdotique, Volumes 1 à 6, 1868 - www.google.fr/books/edition).

 

Les Barberini acquirent Palestrina, à 37 km au sud de Rome, en 1630. La mosaïque nilotique qui représente une procession sur le Nil dessiné de sa source à la mer avec sa faune et sa flore, était dans le temple de Fortune. Elle fut déposée et transportée au palais Barberini de la ville (Hélène Morlier, Pouvoir, art et archéologie, Concours pour le Musée des Antiquités égyptiennes du Caire, 1895, 2021 - www.google.fr/books/edition).

 

"plage" (plage) ou "plaga" (peste en espagnol)

 

"plage" : vieilli, poĂ©t. ContrĂ©e. 1290 «étendue de terre» (Cartulaire de St Vandrille, t.1, p.1009 ds du Cange, s.v. platea2); 1377 «rĂ©gion, contrĂ©e» (N. Oresme, Le Livre du Ciel et du Monde, Ă©d. A. D. Menut et A. J. Denomy, p.352). Empr. au lat. plaga «étendue, rĂ©gion». A Ă©tĂ© confondu avec l'homographe plage Ă  partir du XVIes. Ca 1298 plaje «espace plat et dĂ©couvert sur le rivage de la mer» (Marco Polo, Ă©d. L. F. Benedetto, chap.183, p.198) (www.cnrtl.fr).

 

1634 Muore in Monaco Anna Clara vedova di Michelangelo Galilei con tre de suoi figli, verosimilmente di peste (Antonio Favaro, Cronologia Galileiana, 1892 - www.google.fr/books/edition).

 

Une redoutable épidémie de peste ravagea la Toscane de juin 1630 à l'été 1633 (Dessins toscans, XVIe-XVIIIe siècles: 1620-1800, 1988 - books.google.fr).

 

VoilĂ  donc la peste Ă  Mantoue, dans le Languedoc, dans le Poitou, dans la Bourgogne et la Champagn !! Elle s'y montre, elle s'y maintient pendant deux lustres, de 1628 Ă  1637. Le mĂ©decin F. RONDINETTI a Ă©crit, en 1634, une relation sur la peste de Florence, de 1630 Ă  1632. Daniel de LENNERT a traitĂ©, en 1634, des fièvres pestilentielles et malignes Ă  Francfort. Michel Rotta a, dans la mĂŞme annĂ©e, dĂ©crit la peste qui ravageait Venise en 1630. Jos Rivamonti a Ă©crit cinq livres sur la peste de Milan, en 1630. Un autre italien, Alexandre TADINI, recherche l'origine de cette peste de Milan, dans les annĂ©es 1629, 1630 et 1631. L'Italie et l'Allemagne sont donc Ă©galement ravagĂ©es par ce flĂ©au (Bulletin de la SociĂ©tĂ© des sciences historiques et naturelles de l'Yonne, Volume 3, 1849 - books.google.fr).

 

Michelagnolo Galilei ou Michelangelo Galilei (Florence, 18 dĂ©cembre 1575 - Munich, 3 janvier 1631) est un compositeur et luthiste italien de la Renaissance tardive et des dĂ©buts du baroque. Fils du compositeur, luthiste et musicologue Vincenzo Galilei (1520-1591), Michelagnolo Galilei est Ă©galement le frère du cĂ©lèbre physicien et astronome Galileo Galilei, dit GalilĂ©e (1564–1642). Son frère Galileo qui lui trouve cette fois un poste auprès du duc Maximilien Ier de Bavière Ă  Munich oĂą Michelagnolo s'Ă©tablit dĂ©finitivement en 1608 et Ă©pouse Anna Clara Bandinelli qui lui donna sept enfants dont deux allaient devenir plus tard luthistes comme lui : Alberto Cesare et Vincenzo. En 1620, Michelagnolo publie Ă  Munich son Primo Libro d'Intavolatura di liuto avec le soutien de son frère. Il reste en poste Ă  Munich jusqu'Ă  sa mort en 1631 (fr.wikipedia.org - Michelagnolo Galilei).

 

Ne pouvant concilier avec les paroles de l'Écriture-les faits astronomiques dont la certitude invincible se rĂ©vĂ©lait Ă  son esprit, GalilĂ©e n'avait pas osĂ© Ă©lever sa voix depuis l'Ă©poque Ă©loignĂ©e oĂą la CongrĂ©gation de l'Index avait promulguĂ© la dĂ©fense qui interdisait toute discussion, toute controverse sur ces matières brĂ»lantes ; mais jamais il n'avait perdu de vue le but de son existence presque entière. Aussi crut-il ne pouvoir mieux faire que d'aller encore Ă  Rome prĂ©senter ses fĂ©licitations au nouveau pape, en mĂŞme temps qu'il lui dĂ©diait son Ă©crit sur les comètes, le Saggiutore, publiĂ© par la cĂ©lèbre SociĂ©tĂ© des Lincei dont le fondateur et le chef Ă©tait un illustre patricien ; le prince FrĂ©dĂ©ric CĂ©si, duc d'Aqua-Sparta. Ce fut dans de telles circonstances que GalilĂ©e, enhardi et comptantsur des protections, hĂ©las ! illusoires, Ă©crivit son dialogue cĂ©lèbre sur les systèmes de PtolĂ©mĂ©e et de Copernic : Dialogo intorno ai due massimi sistemi del mondo. Qui de nous ouvre jamais le beau volume in-4° dont je parle; le Dialogue sur les systèmes du monde, qui causa l'exil et la sĂ©questration de GalilĂ©e ; un livre sĂ©vère d'aspect, imprimĂ© par Landi Ă  Florence, en 1632, en caractères italiques, doux ĂĄ l'Ĺ“il, ornĂ© d'une gravure d'Étienne de la Belle. Cette gravure seule est tout un drame. Vous voyez devant vous la mer infinie, les vaisseaux prĂŞts Ă  partir, l'horizon lointain ; et trois philosophes sur la plage, discutant le mouvement du monde et les rĂ©volutions des sphères. L'un est Sagredo l'Espagnol ; tĂŞte chauve, ardent Ă  la dispute, il reprĂ©sente l'Ă©lĂ©vation de l'âme et l'enthousiasme du savoir. L'autre porte le costume vĂ©nitien, la barrette et les fourrures ; c'est Salviati de Venise, physionomie attentive, fine, gardĂ©e, rentrĂ©e en elle ; deux personnages rĂ©els que GalilĂ©e a connus, qui ont reçu ses enseignements et adoptĂ© ses doctrines. L'un et l'autre s'Ă©vertuent Ă  dĂ©montrer par des arguments, les uns philosophiques (Sagredo), les autres mathĂ©matiques (Salviati), le principe de Copernic, le mouvement de notre planète et la rotation de la terre. L'adversaire qu'ils veulent convaincre est placĂ© au fond de la scène, entre les deux philosophes nouveaux. C'est Simplicio l'homme du passĂ©, ce vieillard oriental que son turban et ses draperies font aisĂ©ment reconnaĂ®tre. Partisan de PtolĂ©mĂ©e et des anciennes idĂ©es, attachĂ© Ă  la tradition; les axiomes reçus le contentent, les nouveautĂ©s lui rĂ©pugnent, les apparences lui suffisent, la monstruositĂ© du paradoxe lui fait horreur, l'abĂ®me oĂą vont se plonger les nouveaux penseurs l'Ă©pouvante. «Les hommes d'autrefois ont toujours bien jugé», dit-il; il a pour lui la croyance des vieux siècles, la politique de tous les temps et le bon-sens d'aujourd'hui. Si ce Simplicio n'est pas Urbain VIII lui-mĂŞme, c'est au moins la vivante image de l'immobilitĂ© dĂ©finitive et de la stagnation volontaire; jamais poĂ«te comique n'aurait pu imaginer de type plus excellent et plus attique. Jamais satire plus dĂ©licate et plus courtoise n'atteignit plus vivement son but. La victime (Simplicio, ou Urbain VIII reprĂ©sentant le passĂ©), forcĂ©e de se livrer sans rĂ©sistance, se laisse immoler sans dire un mot et voit tous ses arguments confondus, tout son sang couler, sans pouvoir mĂŞme maudire les sacrificateurs ? […] Une fois brouillĂ© avec le pouvoir, ce grand esprit fut dĂ©laissĂ© de tous. On ne bougea plus en sa faveur Ă  Florence ou Ă  Venise. L'astronome resta sur la plage, dĂ©semparĂ©, isolĂ©, sans secours et sans ressource, comme le bateau du pĂŞcheur que la marĂ©e abandonne (Philarète Chasles, Gino Doria, Masurier, Galileo Galilei sa vie, son procès et ses contemporains, 1862 - books.google.fr).

 

Acrostiche : DT IQ

 

Dt : deutéronome, livre biblique.

 

IQ : ius quiritium, droit des Quirites (citoyens romains) (Dictionnaire de la conversation et de la lecture inventaire raisonné des notions générales les plus indispensables à tous, Tome 11, 1875 - www.google.fr/books/edition).

 

Le Deutéronome est mis en rapport avec le droit des quirites au sujet de la bâtardise dans sa dimension infamante (L'année littéraire ou Suite des lettres sur quelques écrits de ce temps, Volumes 1-2, 1778 - www.google.fr/books/edition).

 

Au cours d'un de ses frĂ©quents voyages Ă  Venise, GalilĂ©e rencontre une jeune femme nommĂ©e Marina di Andrea Gamba et commence une relation avec elle. Elle emmĂ©nage dans sa maison Ă  Padoue oĂą ils auront trois enfants : Virginia (16 aoĂ»t 1600 – 1634), plus tard, sĹ“ur Marie CĂ©leste ; Livia (1601–1659), plus tard sĹ“ur Arcangela ; et Vincenzio (1606–1649) (fr.wikipedia.org - Marina Gamba).

 

CF. le quatrain II, 7 - 1636 au sujet des enfants illégitimes et trouvés.

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