Sabbataï Tzevi, messie mais non

Sabbataï Tzevi, messie mais non

 

II, 45

 

1664

 

Trop le ciel pleure l'Androgyn procrée :

Pres de ce ciel sang humain respandu :

Par mort trop tard grand peuple recrée :

Tard & tost vient le secours attendu.

 

Les liens entre L’Androgyn de Dorat, en date de 1570, et du quatrain-ci, sont exposés par Jacques Halbronn, Le Janus Gallicus et l’Androgyn (1570), 2003  - ramkat.free.fr

 

Les datations sont sujettes à caution.

 

"peuple recréé"

 

Ps 101(102),19 : populus qui creabitur.

 

Le Seigneur a tourné ses regards sur la priére des humbles, & il n'a point méprisé leurs vœux. Que cecy soit écrit pour la race qui doit suivre. Et le peuple qui sera créé louera le Seigneur (Le Pseautier de David, 1685 - books.google.fr).

 

Cf. Isaie 43,21 (Principes discutés, pour faciliter l'intelligence des Livres prophétiques, & spécialement des Psaumes, 1764 - books.google.fr).

 

Pour les chrétiens comme pour dieu elle est un «peuple», «peule de saints» (88,8) «peuple heureux» (88,16), «peuple de chercheurs  (23,6), «peuple recréé» (101,19) dont le but est de «louer le Seigneur» (id.). Mais elle est aussi «un peuple captif» (84,2 - 125,1) et même si elle est «la Grande Eglise» (21,26-34, 18 - 39,10) elle peut se conduire comme une «Eglise des méchants» (25,5) (Jean Vanel, Hymnes chrétiens oubliés: Les Psaumes, 2019 - books.google.fr).

 

"secours"

 

Dans le psaume 101(102), le pellicanus solitaire est simplement l'image de l'état d'extrême détresse dans lequel se trouve plongé le malheureux qui appelle Dieu à son secours : «A force que je crie et gémis, mes os se collent à ma peau. Je suis semblable au pélican du désert ; je suis pareil au hibou des ruines. Privé de sommeil, je gémis comme un passereau solitaire sur le toit ?» Au demeurant, il semble bien que la traduction latine, qui identifie au pélican l'oiseau appelé qa'at en hébreu, soit erronée. L'évocation des moeurs de cet oiseau ami des ruines et des déserts, ne correspond pas à ce qu'on sait du pélican, qui vit en bande et recherche les importants plans d'eau. Il est plus vraisemblable que le qa'at biblique soit en fait quelque rapace nocturne, comme le chat-huant ou le choucas. Le pélican n'est sans doute jamais cité dans la Bible hébraïque, bien qu'il se rencontrât et se rencontre encore en Palestine, notamment sur les rives du Jourdain (Christian Cannuyer, Osiris et Jésus, les bons pélicans, Le comparatisme en histoire des religions: actes du colloque international de Strasbourg (18-20 septembre 1996), 1997 - books.google.fr).

 

"sang... répandu"

 

Nostredame aura peut-être rencontré cette apologie chez Augustin (Commentaire sur le Psaume 101, 8 ; Enarrationes in psalmos, Christi nativitas, mors et resurrectio in avium figura describuntur) : «Quod enim dicitur, uel etiam legitur de hac ave, id est pellicano [...] Dicuntur hae avec tanquam colaphis rostrorum occidere paruulos filios suas, eosdemque in nido occisos à se lugere per triduum. Postremo dicunt matrem seipsam grauiter uulnerare, & sanguinem suum super filios fundere : quo illi superfusi reviviscunt. Fortasse hoc verum, fartasse falsum sit : tamen si uerum est quemadmodum illi congruat qui nos viuificanit sanguine sua, uidete. Congruit quod matris caro undificat sanguine suo folios suos ? satis congruit. [...] Habet ergo haec avis, si uere ita est, magna similitudinem carnis Christi, cuius sanguine uiuificati sumus : Ne passons point sous silence d'abord ce qu'on dit et même ce qu'on lit de l'oiseau nommé pélican [...] On dit que ces oiseaux tuent leurs petits à coups de bec et les pleurent pendant trois jours après les avoir tués dans leur nid; on ajoute qu'alors la mère se blesse grièvement elle-même et répand son sang sur ses petits qui revivent sous l'effusion de ce sang. Peut-être le fait est-il exact, peut-être est-il faux ; cependant, s'il est exact, remarquez avec quelle justesse il s'applique à celui qui nous a vivifiés par l'effusion de son sang [...] Le pélican, si ce que l'on en raconte est vrai, présente donc une grande ressemblance avec la chair du Christ, par le sang duquel nous sommes vivifiés.» (ed. 1542, p. 1136A ; trad. Peronne, T14, ed. 1872, p. 199 ; Cf. Patrologia Latina 37, 1299). Cf. Isidore (Étymologies, XII, 7, 25) «Fertur, si verum sit, eam occidere natos suas, eosque per triduum lugere, deinde se ipsam vulnerare et aspersione sui sanguinis vivificare filios : on raconte, si cela est vrai, qu'il tue ses petits, les pleure pendant trois jours, puis se fait une blessure et ressuscite ses petits en les aspergeant de son sang» (ed. 1483, p. 63v). [...]

 

Nostredame aurait-il fini par lire cette allégorie en français, par exemple chez Marot (L'Adolescence clémentine, 1532) : «Le pellican de la forest celicque [...] Le Pellican, qui pour les siens se tue» (Lucien De Luca, Nostradamus, lorem ipsum...?: Analyse, commentaire et traduction de la Lettre à Bérard, 2020 - books.google.fr).

 

Mais le sang est humain.

 

Guy de Tervarent, Attributs et symboles dans l'art profane 1450–1600 (Geneva: Droz, 1958), pp.302–3 lists numbers of sources for the pelican as a symbol of Christ and as a symbol of Charity, as in the marriage androgyne in Aneau's 1552 Picta Poesis/Imagination poétique. The printer's mark of the Marnef family, “Au Pelican,” marks this purpose with the accompanying motto, “finis in charitate (Marian Rothstein, The Androgyne in Early Modern France: Contextualizing the Power of Gender, 2015 - books.google.fr).

 

In the branches of the tree above Aneau's Androgyne is a Pelican feeding its young from its breast, a familiar symbol of charity. Alongside the badge on Gargantua's hat there is a “grande plume bleue, prinse d'un onocrotal,” (a big blue feather taken from an onocrotal"), the strange name veiling the nature of the bird, a kind of pelican, just as the Greek letters do the message of charity on the badge (Elizabeth Chesney Zegura, The Rabelais Encyclopedia, 2004 - books.google.fr).

 

Après avoir décrit la bourse, la robe, et le bonnet de Gargantua, Rabelais en vient au plumet du chapeau : une plume bleue de pélican, accompagnée d'un médaillon en émail, représentant l'androgyne, avec la devise : « AGAPH OY ZHTEI TA EAYTHS », «La charité ne cherche pas son propre avantage», I Cor 13,5. Parce que c'est le symbolisme du médaillon qui attire l'attention de l'interprète, personne ne s'est attardé longuement sur la plume du pélican. Normalement, toutefois, on songerait à une plume d'autruche, de faisan ou de paon comme ornement de chapeau plus coutumier (Florence M. Weinberg, Rabelais et les leçons du rire: paraboles évangéliques et néoplatoniciennes, 2000 - books.google.fr).

 

It may thus have been the inspiration for the half-comical, half-mystical device that the young giant wears as a hatmedallion in Rabelais's chronicle Gargantua: Pour son image avoit, en une platine d'or pesant soixante et huyt marcs, figure d'esmail competent, en laquelle estoit pourtraict un corps humain ayant deux testes, l'une virée vers l'aultre, quatre bras, quatre piedz et deux culz, telz que dict Platon in Symposio avoir esté l'humaine nature à son commencement mystic (ch. 8). The coarse description of the androgyne suggests the obscene equivocation that Erasmus sought to avoid, and juxtaposed with the Pauline motto ("Charity Seeketh Not Its Own"), makes it rather difficult to interpret univocally as an emblem of Christian marriage. While I am willing to admit that this is a possible reading of the device, I believe the problems of interpreting devices make Rabelais's androgyne figure highly ambiguous. It is far from clear to me whether Rabelais is following Erasmus in using the androgyne as a figure of Christian marriage or whether he is poking fun at Erasmus's rather prudish preciosity in the Institutio matrimonii, or whether he is doing both simultaneously. Rabelais's androgyne is, indeed, highly problematical, and in that respect, totally different from the use to which it was put in Barthélemy Aneau's emblem book which appeared in 1552 in two versions, one in Latin under the title Picta poesis and one in French under the title Imagination poétique. In both versions the androgyne is being used as a figure de marriage or matrimonii typus. Aneau as principal of the Collège de la Trinité in Lyons, is clearly using the emblem genre for the moral instruction of his exclusively male pupils. Still, the emblem is a fascinating text for our purposes for it displays clear intertextual traces offiliation between the learned and bourgeois intellectual milieux. In his introduction, Aneau describes how he composed the texts to go with woodcuts which his printer already had in his shop, with the exception of the Marriage emblem and several others. These, he claims, are original, that is, the woodcut to go with the verse text Aneau composed (Jerome Schwartz, Some Emblematic Marriage Topoi in the French Renaissance, Emblematica, 1986 - books.google.fr).

 

Zevi androgyne

 

The presumption that Sabbatai Sevi embodies the divine androgyne in his being also underlies Nathan's repeated identification of Sabbatai Sevi as the personification, embodiment, or incarnation of faith ('enunah), a theme repeatedly linked exegetically, as we have already seen, to the verse puletiq be-'emunato yitlyeh (Hab. 2:4). The truc believer has faith in the proclamation of divinity (pirsum 'elohut) through the person of Sabbatai Sevi. That is, according to an older kabbalistic symbol, especially prominent in zoharic literature, the mystery of faith refers to the unification of the masculine and feminine potencies of the divine, a unity that is realized in the personhood of Sabbatai Sevi (Elliot R. Wolfsonn, The engenderment of messianic politics, Toward the Millennium: Messianic Expectations from the Bible to Waco, 1998 - books.google.fr).

 

Le messie

 

Il convient de se demander si Sabbatai Tsevi avait une conscience de son caractère messianique identique à celle que lui attribuait Nathan de Gaza et qui devait être reprise par le mouvement sabbataïste ultérieur. La doctrine, en effet, allait se radicaliser. Selon Gershom Scholem, Sabbatai Tsevi n'eut jamais les capacités intellectuelles de son prophète, même si ses disciples, après sa mort, se réclamèrent de ses rares écrits. Il s'éteignit soudainement âgé de cinquante ans, un jour de Kippour, le 17 septembre 1676, et sa disparition fut considérée comme son occultation messianique suprême, son élévation dans les hauteurs surnaturelles. Un de ses disciples, Israël Hazzan de Kastoria, recueillit en forme d'homélies le témoignage du groupe qui vécut autour de lui à Rovign pendant ses dernières années. Nathan de Gaza mourut peu après Sabbatai Tsevi, le 11 janvier 1680 (www.universalis.fr).

 

Cf. II, 62 - Sabbataï Zévi, Tantale et la Samaritaine - 1676-1677.

 

Le psaume 101(102) et Sabbataï Tzevi

 

Israel Hazzan says after messiah's conversion to Islam :

 

"'For I have eaten ashes litre bread' (Ps. 102: 10) - this is said with respect to the Muslim faith, which he entered in order to ban the forbidden and to sanction the permissible. Hence it says 'I have eaten' precisely (mammash), an exact eating (akhilah wada'it),” as if [it were written] 'I have eaten from the bread of the holy Torah', and this is [the import of] 'I have eaten litre bread'. And conceming his calling it ishes' (efer), it is as it is written [regarding Ishmael] `and he will be a wild ass [of a man]' (Gen. 16: 12), [the word perd] through an inversion of letters is efer".

 

Sabbatai Sevi's partaking of the faith of Islam, which is linked exegetically to the scriptural formula `I have eaten ashes like bread' - by a transmutation of letters the word efer, `ashes', is linked to pere, a term used in the expression pere adam to describe Ishmael is explicated by Hazzan as if the messiah consumed the holy bread of Torah. Prima facie, the matter may be explained by the fact that even after the conversion to Islam Sabbatai Sevi continued to observe the rites of Judaism, thereby serving as the paradigm of the early Dönmeh who became Judaeo-Muslims, straddling the fence between the two faith communities. Beyond this consideration, however, the implicit philosophical point of Hazzan's remark is that the surpassing of law, which I assume encompasses both religious ritual and moral codes, does not betoken a desire to destroy, punish, and relinquish religion on account of anger and revenge, nor does it stem exclusively from the personal encounter with the God of Israel that defies communication. On the contrary, the dialectical tension within the tradition itself yields the way to transcend the limits of the tradition (Elliot R. Wolfsonn, Venturing Beyond - Law and Morality in Kabbalistic Mysticism, 2006 - books.google.fr).

 

Israel Hazzan puts into the messiah's mouth the "prayer of the afflicted" (Ps. 102) as well as all the other psalms in which the sufferer, overwhelmed by anguish, turns to God. It was preordained that the messiah would have to walk crooked byways that are beyond human understanding, and hence the special significance of the psalmist's prayer, "Teach me Thy ways." The symbol of the "crooked Torah" easily links up with Nathan's concept of the "crooked circle" and hence the messiah prays - according to Israel Hazzan - “Sustain my goings in Thy paths (Ps. 17:5) - for although I have walked in crooked circles [the Hebrew word translated as 'path' can also mean 'circle'] yet these are the paths [or circles] of righteousness, as R. Nathan has explained, and therefore 'let not my footsteps slip' (Ps. 17:5), for many unsuccessfully tried to do the same, but I descended into the depths of the qelippoth and yet my footsteps slipped not." Sabbatai Sevi will successfully accomplish his mission because his soul is continuously united to the Shekhinah, which in kabbalistic symbolism is also called "righteousness." Hence the messianic prayer ends with the words, "As for me, I will behold Thy face in righteousness" (Ps. 17:5), that is to say, that by his intimate union with "righteousness" the messiah succeeds in collecting and saving all the sparks and holy souls from the prison of the qelippah (Gershom Gerhard Scholem,, Sabbatai Sevi: The Mystical Messiah, 1626-1676, traduit par R. J. Zwi Werblowsky, 1973 - books.google.fr).

 

Zevi se marie

 

Zevi resta au Caire deux ans et c'est là, durant cette période qu'eut lieu le 31 mars 1664, son étrange mariage avec Sarah, une jeune Polonaise dont Cecil Roth nous dit "qu'elle avait perdu ses parents dans les massacres récents (1648 en Pologne) et avait été baptisée par l'Eglise catholique... elle était venue en Orient convaincue qu'elle était destinée à être l'épouse de l'oint du Seigneur (François Michée Nzenza Mpangu, Kimbanguisme et messianisme juif, 2010 - books.google.fr).

 

Le 12 août dernier, la communauté portugaise israélite d'Amsterdam a célébré le deux centième anniversaire de l'édification de sa magnifique et célèbre synagogue. C'était une fête splendide et grandiose. Nous extrayons de la Wochenschrift l'intéressant compte rendu suivant : Ce jubilé était en même temps un souvenir de la tolérance religieuse la plus ancienne de l'histoire juive moderne. Les juifs, quittant les bords inhospitaliers de l'Espagne et du Portugal; les fugitifs, se sauvant devant l'Inquisition inhumaine, trouvèrent ici à Amsterdam, appelé justement la nouvelle Jérusalem, un accueil bienveillant et une existence digne de l'homme. La synagogue et la place devant elle étaient magnifiquement ornées de fleurs, de drapeaux et de décorations. Au-dessus du Hechal se trouvaient trois blasons, celui des Pays-Bas, celui de la maison d'Orange et celui de la communauté portugaise ; ce dernier représentant un pélican nourrissant ses petits. Aux quatre principaux pilastres de la synagogue se trouvaient des trophées où étaient inscrits les noms de l'ancienne communauté, de ses fondateurs, et ses dates, à savoir : fondateur Jacob Tirado, 6358=1598 ; fondateur Isaac Franco Madeiros, 5368=1608; fondateur David Baruch Osorio, 5378 = 1618, et fondateur David Pardo, 5398 = 1638 (L'Univers israélite: journal des principes conservateurs du judaisme, 1876 - books.google.fr).

 

Androgyne chrétien

 

The upheaval surrounding Shabtai Tsvi's messianic claims and his subsequent conversion to Islam in 1666 affected Christian millenarian speculations and led various Christian missions to the the Jews to intensify their efforts in European countries. Although a hundred years later many still travelled through Europe and had contacts with Sabbateans (Gal'ed, Volumes 20 à 21, 2006 - books.google.fr).

 

A Amsterdam, en ces dernières décennies du XVIIe siècle, l'expérience religieuse passait nécessairement par l'expérience visionnaire. Il fallait témoigner, pour paraître sérieux, d'un calendrier fourni de fantasmes et d'extases. Johann Georg Gichtel, à partir de 1690, mais surtout de 1697, où s'affirme dans ses lettres la prise de conscience de sa mission et où se constitue définitivement la spéculation sur l'androgyne et la Sophia, oppose à ses confrères qu'il méprise des illuminations «authentiques» venues de l'Esprit saint. Nous avons relevé trois phases. La première dans les années 60 à 70, avec trois visions importantes, en 1664, 1668, 1673-1674, paraît bien avoir déclenché puis confirmé chez le boehmiste la conversion mystique : transport devant Dieu le Père, et vision du Christ écrasant le serpent, révélation du «mystère du temps, de la lutte en particulier de Michel et du dragon», apparition surtout de la Vierge Sophia qui promet une fidélité éternelle. La deuxième phase, des années 80 aux années 1703-1704, est dominée par les luttes et les tentations diaboliques, la troisième, de 1704 à la mort, occupée par des visions de triomphe. Durant toute l'année 1708 en particulier, la Sagesse «se dénude enfin totalement». Le Christ trône dans le cæur, nous atteignons la porte du ternaire sacré, la trinité, le septième sceau se brise, nos ennemis deviennent nos amis. Avec les textes analysés du psautier kuhlmannien, les témoignages de Johann Georg Gichtel sont les rares documents proprement visionnaires en langue allemande, dont nous disposions pour le XVIIe siècle, siècle si fécond en évocations françaises d'illuminations et d'extases. Le démantèlement de la vie spirituelle et l'affirmation du visionnaire ne sont cependant pas ce qui a le plus surpris et dérouté les rares lecteurs. Ce qui a le plus frappé est ceci : l'itinéraire spirituel est tout entier enserré engainé dans le langage particulier de la métaphysique boehméenne. Les subtilités des étapes du retour de l'âme en Dieu se traduisent en concepts et en et en spéculations qui sont des emprunts à la philosophie du Teutonique. Chez Czepko et Kuhlmann, Böhme est partout présent. Chez Gichtel, il est omniprésent Véritable relais, il reprend et il transmet à l'aube du siècle des lumières et en langue allemande les intuitions les plus profondes de la pensée boehméenne, celles-là même qui aideront au renversement de l'Aufklärung et à la formation de de la philosophie allemande romantique. Avec force il concentre, comme son maître, sa théogonie autour de l'opposition polaire des ténèbres et de la lumière, du courroux et de l'amour, de Dieu et de Lucifer, bref, du mal et du bien. Il affirme que cette bipolarité ne peut avoir de réalité et de signification que si elle est déjà présente et active en Dieu lui-même. Il est nécessaire, répète-t-il sans cesse, de poser à l'intérieur de la Trinité et dans une véritable «nature divine», dans un «corps de Dieu», la polarité essentielle d'une force négative, destructrice, et d'une force positive, salvatrice.  Ces deux nœuds dynamiques s'équilibrent cependant, et leur opposition violente est le garant même de leur maintien. Le thème primordial que le boehmiste dégage, c'est que la force négative n'a aucune indépendance dans la nature éternelle. Les ténèbres ne peuvent se transformer en mal, parce que la lumière entrave toujours leur débordement

 

D'autre part, surtout chez les Anglais, ce culte de la Sagesse est lié directement à la spéculation sur l'androgyne, et il donne une place centrale aux visions, comme chez Johann Georg Gichtel. John Pordage (1607-1681), chassé de sa cure en 1654 et réinstallé après la Restauration, en 1663, commence en janvier 1651 sa carrière de visionnaire. Ses œuvres paraissent à Londres de 1655 à 1683. Une des plus importantes,  la Theologia Mystica, est éditée en 1683. Jane Leade surtout (1623-1704) bénéficie en 1670 de l'apparition de la Sophia. Ses extases, visions, illuminations (Bernard Gorceix, Flambée et agonie: mystiques du XVIIe siècle allemand, 1977 - books.google.fr).

 

Acrostiche : TPPT, Tappete

 

"tappete" : "tapetum", tapis (Franciscus Hesselius, Fragmenta quae supersunt, 1707 - books.google.fr, W. Geoffrey Arnott, Alexis: The Fragments: A Commentary, 1996 - books.google.fr).

 

Il n'y avoit point à Smyrne parmi les Juifs de festin, de réjoüissance, de mariage, de circoncision, où Sabataï ne fust invité, & où il ne se rendist avec une escorte nombreuse de ses Sectateurs. Les ruës par où il devoit passer estoient couvertes de tapis, ou de piéces de beau drap ; mais son humilité l'obligeoit à se détourner, & à ne pas fouler aux pieds ces marques de l'affection de ses disciples. Aprés s'estre si bien assuré de la tendresse du peuple qui l'admiroit, il crût qu'il estoit temps de se faire connoître & de prendre la qualité de Messie, & de Fils de Dieu (Farnese Casa, Histoire des trois derniers empereurs des Turcs. Depuis 1623. jusqu'à 1677. Traduite de l'Anglois du Sr. Ricaut, 1683 - books.google.fr).

 

Tzevi est arrêté en 1666 alors qu'il arrive par bateau à Constantinople.

 

A Gallipoli, au lieu du sinistre cachot dans lequel il avait été enfermé à Constantinople, Sabbataï reçut tout ce dont il pouvait avoir besoin au fort de Gallipoli, hormis la liberté : nourriture en abondance, boissons, tapis et rideaux à volonté. Les pèlerins venus le visiter - maître (shtadlan) Mordecai le médiateur et le rabbi Isaiah le «faiseur de remontrances» venu de Pologne - s'émerveillèrent de la vaisselle d'or et d'argent dans laquelle mangeait le Messie et furent divertis par des musiciens et chanteurs turcs avec lesquels Sabbataï fredonnait ses mélodies préférées (Simon Schama, L'Histoire des Juifs, Tome 2, Appartenir, de 1492 à 1900, 2019 - books.google.fr).

 

Quatrain suivant

 

Pour relier au quatrain suivant II, 46 - Comète de 1664-1665, annonciatrice de catastrophes - 1664-1665.

 

The ongoing war with England and the plague of 1664-1665 had ravaging effects on the Netherlands. Many thought that the death rate was exacerbated by the comet of 1664. The more messianic spirits among Amsterdam's Jews were looking for an indication that all of this suffering had some purpose. When the reports about Zevi, one of whose wives had lived briefly among the Amsterdam Ashkenazim, began arriving in November of 1665, there was much rejoicing (Steven Nadler, Steven M. Nadler, Rembrandt's Jews, 2003 - books.google.fr, R.H. Popkin, Christian interest and concerns about Sabbatai Zevi, Millenarianism and Messianism in Early Modern European Culture: Volume I: Jewish Messianism in the Early Modern World, 2013 - books.google.fr).

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