Les Anglais Ă  Mardyck

Les Anglais Ă  Mardyck

 

II, 37

 

1658-1659

 

De ce grand nombre que lon envoyera

Pour secourir dans le fort assiegés,

Peste & famine tous les devorera,

Hors mis septante qui seront profligés.

 

 

"peste"

 

Plusieurs maladies contagieuses qui ont dĂ©solĂ© l'espèce humaine et qui s'offrent dans l'histoire sous le nom de peste, appartenaient ou Ă  la peste d'Orient ou Ă  d'autres maladies populaires Ă©pidĂ©miques, et n'Ă©taient autre chose qu'un typhus contagieux ordinaire plus rĂ©pandu. Sans prĂ©tendre faire parade d'Ă©rudition, soit en histoire ou en littĂ©rature, et sans me donner la peine de rapporter toutes les pestes dĂ©crites qui n'Ă©taient que le typhus ordinaire, je ne citerai que la peste ainsi nommĂ©e, qui, dans l'annĂ©e 1528, rayagea toute l'Italie ; et enleva seulement parmi les troupes françaises plus de vingt-un mille hommes, et qui, d'après toutes les descriptions et d'après son origine, n'Ă©tait qu'un typhus des camps. La maladie qui rĂ©gna dans l'armĂ©e de l'empereur Charles-Quint, l'an 1552, pendant le siège de Metz, dĂ©crite aussi sous le nom de peste ; la peste qui parut en Hongrie, l'an 1566, et qui, sous le nom de febris hungarica ou pannonica, se rĂ©pandit dans une grande partie de l'Europe ; la peste de Misnie, en 1574, celle du Danemack, de 1613 et 1652, celle de Leyde, en 1669, et plusieurs autres, n'Ă©taient encore qu'une contagion du typhus ordinaire. Une multitude innombrable d'Ă©pidĂ©mies observĂ©es sous diverses modifications, et dĂ©signĂ©es, d'après les diffĂ©rens symptĂ´mes prĂ©dominans, tantĂ´t sous le nom de fièvre putride, tantĂ´t sous celui de fièvre maligne, dyssentĂ©rique, etc. (Johann Valentin von Hildenbrand, Du typhus contagieux, traduit par Jean-Charles Gasc, 1811 - www.google.fr/books/edition).

 

L'Angleterre, une fois encore, intervenait en arbitre et, de son alliance avec l'une ou l'autre de ces nations, dépendait le sort du conflit. En 1654, des offres d'alliance avaient été faites par l'Espagne à la Grande-Bretagne, alors dirigée par Olivier Cromwell, et, en gage de leur accord, le représentant du Roi Catholique, le Marquis de Leide, avait offert aux Anglais d'attaquer et de leur livrer Calais. Cette nouvelle avait été connue à la Cour de France, par une dépêche adressée le 9 novembre 1654, par l'ambassadeur de Louis XIV à Londres, Monsieur de Bordeaux, et le maréchal de Vendôme, consulté sur les mesures à prendre pour en empêcher la réalisation, avait répondu, dans un mémoire transmis par le Sieur de Boisjeuns, «qu'en l'état de nos affaires, il était impossible d'en empêcher la prise...» Devant les hésitations de Cromwell, les Espagnols réitérèrent leurs propositions le 21 mai 1655. Pour appuyer leurs dires, le ler juillet 1657, le Grand Condé, alors à leur service, tentait, par surprise, de s'emparer de Calais défendue à cette époque par sa seule milice communale. L'attaque échoua grâce au courage des bourgeois calaisiens dirigés par leur colonel Gaspard Mollien, mais la ville demeura l'enjeu de l'alliance anglo-espagnole. A cette époque, cependant, les Espagnols étaient en compétition avec les Français et Mazarin, remarquablement servi auprès du protecteur Cromwell par son ambassadeur, M. de Bordeaux, sut, en offrant aux Anglais de leur livrer Dunkerque, alors espagnol, contre leur aide militaire, manoeuvrer avec une extrême adresse. L'historien calaisien Pigault de Lépinoy en constate lui-même l'effet lorsqu'il écrit : «...ces deux places Calais et Dunkerque étaient alors considérées comme le pivot sur lequel tournait la politique de la France et de l'Espagne, celle de la première de ces puissances prévalut par le penchant de Cromwell à se lier à la France préférablement à l'Espagne que, par le manège du Cardinal Mazarin qui connaissoit le faible de Cromwell pour les honneurs et qui le prit par ce côté, que la gravité et l'ostentation de la Cour d'Espagne ne voulut point lui allouer...» Ainsi, c'est grâce à l'exploitation de ce «faible» de Cromwell que Calais reçut, pour la première fois, son Roi Louis XIV. [...] Lord Falcombridge, entouré d'une cour de cent cinquante gentilhommes, fut reçu au milieu «d'honneurs extraordinaires». Le Cardinal Mazarin lui-même, fidèle à sa politique envers Cromwell, conduisit l'ambassadeur britannique au Roi en lui donnant la main, «honneur qu'il ne faisoit à aucun ambassadeur, ny au Nonce du Pape». Cette réception qui dura cinq jours se passa en fêtes «d'un éclat et d'une magnificience inimaginables» avec, entouré de sa cour, le jeune et superbe roi de vingt ans qu'était alors Louis XIV. Le faste déployé pour ces cérémonies coûta d'autant plus cher à la France que les finances de Louis XIV étaient, écrit Madame de Motteville, si légères que le roi «n'avoit pas d'officiers et manquoit de service et d'argent» et que « quand il alloit à l'armée et rencontroit de pauvres soldats, il ne leur donnoit rien parce qu'il n'avoit point de quoi le faire...». Mais ces dépenses se révélèrent rentables puisque, en conséquence de cette alliance, six mille Anglais, commandés par le colonel Reynolds, et «revêtus de casaques rouges d'un bel effet», débarquaient à Calais pour se rendre au siège de Mardyck. Plus de la moitié de ces soldats allaient mourir à ce siège d'une épidémie de typhus, ce qui n'empêcha pas Louis XIV de s'y rendre le 20 juin 1658 visiter sa nouvelle conquête et d'y être touché par l'épidémie avant de rentrer à Calais où il faillit mourir (Nelly Mulard, Calais et les secrets de l'histoire, 1968 - www.google.fr/books/edition).

 

Le jeune Louis XIV sera atteint de la fièvre des camps, une fièvre tyhphoïde qui faillit le tuer, sa convalescence se prologera jusqu'en août où des fêtes et un Te Deum serotn organisés. Le médecin Vallot, impuissant, le soignera avec un vin émétique (vomitif) d'antimoine fourni par Du Saussoy, médecin d'Abbeville, médicament préconisé par la faculté de Montpellier et Turquet de Mayenne, ancien médecin d'Henri IV, puis exilé en Angleterre de Jacques Ier, Chales Ier et Charles II. Mais cela était interdit par la faculté de Paris dès 1566, qui ne l'autorisera qu'en 1666. Vallot attribuait l'origine du mal aux nombreux malades entassés dans le fort, et aux cadavres qui y pourrisaient (Jean-Paul Walch, Naissance de la chimie, Acteurs de la science, 2018 - books.google.fr).

 

"famine"

 

Les épidémies de typhus ont si régulièrement suivi les famines célèbres que l'on a fini par outrer le rapport étiologique et par prendre l'babitude de dire : «fièvre de famine» (de Mersseman), «famine fever, Hungerpest [déjà en 1761], Hungertyphus, typhus famélique». Cependant, si rien ne conduit plus sûrement au typhus que la famine, il est certain qu'en aucun cas le premier ne sort de la seconde sans l'intermédiaire de l'étoffe putride que l'on vient de signaler. On voit, d'ailleurs, le typhus éclater parfois sans qu'il y ait eu famine, mais non sans qu'il y ait eu accumulation de détritus putrides; ainsi, dans les vaisseaux, les bagnes, les prisons, les armées de Crimée (1854-1855). Nous sommes même disposé à assimiler complètement, sous ce rapport, au typhus pétéchial, le typhus à rechûtes, fièvre récurrente, relapsing fever, que Murchison regardait comme plus étroitement que le premier lié à la famine (relapsing or famine fever). La grande raison apportée par l'illustre auteur anglais était que le relapsing fever ne sort pas des pauvres, c'est-à-dire des groupes affamés. Or, il reste là où il est né, tout simplement parce qu'il n'est pas contagieux; mais il naît, comme l'autre, dans la matière putride de qualité et d'abondance particulières que les pauvres gens faméliques accumulent autour d'eux. La faim est un état négatif; ce ne peut pas être une étoffe à fermentation; ce n'est pas un milieu dans lequel puisse s'opérer, à un titre quelconque, la genèse d'un principe morbide. La famine et l'association famélotyphique ont des fastes lugubres dont il est utile de rappeler les dates; elles éclairent l'éliologie. La famine fut l'état normal en Lorraine pendant la période française de la guerre de Trente ans (1630-1640); si l'on prend les historiens à la lettre, cette famine aurait été accompagnée de la peste (peste Suédoise). Il est très probable que cette peste n'était autre que le typhus. La famine régna dans presque tout le nord-est de la France pendant la Fronde (1645-1655), avec des foyers de typhus plus ou moins actifs ; les généraux du temps coupaient les blés en vert pour du fourrage à leur cavalerie. Une famine rigoureuse sévit sous l'administration de Colbert, en 1662 (Jules Arnould, Nouveaux éléments d'hygiène, 1881 - www.google.fr/books/edition).

 

Encore qu'il ne soit pas parler de famine dans l'Ă©pisode de la prise de Mardyck.

 

"secourir"

 

Bientôt Mardyck et Dunkerque furent de nouveau enlevés aux Espagnols (1658), grâce, il est vrai, aux secours envoyés par Cromwell, auquel ces places furent remises et Turenne s'empara, dans sa belle campagne de 1658, d'une grande partie des Pays-Bas. Ils allaient tomber en entier entre ses mains, quand la nouvelle des négociations l'arrêta. Mazarin, dans l'espoir que le mariage de Louis XIV avec l'infante Marie-Thérèse assurerait au roi la succession d'Espagne (Alexandre Saint-Léger, La Flandre maritime et Dunkerque sous la domination française (1659-1789), 1900 - www.google.fr/books/edition).

 

Turenne ! ce nom dit assez que l'affaire allait ĂŞtre sĂ©rieuse. Elle le fut en effet. L'habiletĂ© du grand capitaine contraste avec l'impĂ©ritie des chefs espagnols que la crainte semble avoir paralysĂ©s. Don Juan, — qu'il ne faut pas confondre avec le vainqueur de Lepante, - Ă©tait chef de l'armĂ©e de dĂ©fense. A lui s'Ă©tait joint le prince de CondĂ©, alors transfuge, CondĂ© qui avait autrefois donnĂ© Dunkerque Ă  la France et qui venait aujourd'hui la lui disputer ; avec CondĂ©, plusieurs officiers Français altachĂ©s Ă  sa personne et ayant Ă©pousĂ© sa querelle. Le talent de ce gĂ©nĂ©ral lui a-t-il fait dĂ©faut ? L'insuccès Toujours est-il, que CondĂ© ne fut plus que l'ombre de lui-mĂŞme. Suivant le plan adoptĂ©, Turenne s'assura d'abord de quelques places secondaires. Il enleva Mardyck dont il fit la remise aux Anglais. Le gĂ©nĂ©ral anglais Reynolds, qui Ă©tait Ă  la tĂŞte de 6,000 Anglais, s'Ă©tant noyĂ© en allant visiter ses amis en Angleterre, Lockart le remplaça. Du reste, charmĂ© du dĂ©but de la campagne, de la loyautĂ© de la France et des Ă©gards dont les troupes anglaises Ă©taient l'objet, Cromwell commença Ă  dĂ©tendre la dĂ©fiance qu'il avait invinciblement gardĂ©e jusque lĂ . Il envoya un renfort de 10,000 hommes de bonnes troupes. Les cours de France et d'Angleterre firent assaut de prĂ©venances et de courtoisie. Nous supprimons toutefois les dĂ©tails que Faulconnier nous fournirait et que le lecteur peut y lire. Etait-ce une comĂ©die oĂą les acteurs cherchaient mutuellement Ă  se tromper ? ou bien y avait-il effectivement une dupe ? (Victor Derode, Histoire de Dunkerque, 1852 - books.google.fr)

 

Cf. quatrain II, 39.

 

"septante"

 

L’une des plus importantes qui, après celle de la discipline, base de toute organisation militaire sérieuse, devait forcément et constamment préoccuper Le Tellier, comme plus tard ses successeurs, fut celle du recrutement même de l’année, tant pour la quantité que pour la qualité des soldats, sans cesse réclamés plus nombreux, pour les grandes guerres qui précédèrent et suivirent les traités de Westphalie et des Pyrénées. Pour y pourvoir, on avait alors recours à trois modes de procéder, également défectueux dans leur principe et surtout dans leurs résultats : la levée, l’engagement de soldats étrangers mercenaires, l’enrôlement.

 

La levée proprement dite n’était ordonnée que dans les circonstances où, le royaume paraissant en péril, on avait eu, à l’époque antérieure, recours à l’appel du ban et de l’arrière-ban. Au XVIIe siècle, la plus célèbre levée eut lieu après cette fameuse prise de Corbie, qui jeta l’alarme dans la France entière, et il ne serait pas difficile d’y trouver plus d’un trait commun avec le départ des volontaires de 1792, après que la patrie eut été proclamée en danger.

 

Un des traits distinctifs de l’ancienne armée royale était de compter de nombreux corps étrangers, composés de mercenaires, soldats de profession, se battant souvent très bien, mais fort exigeans en toutes choses, la question d’argent étant la seule qui les déterminât à servir. Lorsque Le Tellier devint secrétaire d’Etat, les régimens étrangers étaient très nombreux. La guerre de Trente ans avait, si l’on peut ainsi parler, mis sur le marché quantité de reîtres, selon l’expression alors usitée, qui pouvaient peser, d’un grand poids, dans la balance et qu’il était prudent de s’attacher : «On pourra avoir, écrivait Mazarin à Turenne, en 1648, pour nous servir contre l’Espagne, 25000 à 30000 soldats bien aguerris, dont on ne craindra pas la dissipation, quand on prendra soin de les bien entretenir.» Tel était, on ne s’en étonnera pas, le calcul de Mazarin qui, se sentant l’homme le plus impopulaire, du royaume, malgré les grands services qu’il lui avait rendus ou qu’il devait lui rendre, ne cessa de se montrer favorable à l’accroissement du nombre des soldats étrangers. A la bataille des Dunes, en 1658, il n’y avait pas moins de 27 régimens étrangers sur les 137 régimens qui y furent engagés du côté français. Jusqu’au traité des Pyrénées, qui mit fin à cette longue période belliqueuse, en attendant qu’il s’en ouvrît une nouvelle avec la guerre de Dévolution, Le Tellier, si peu favorable qu’il fût personnellement à l’augmentation du contingent étranger, dut se borner à exercer sur lui une surveillance qu’il s’appliqua à rendre efficace, afin d’assurer la stricte exécution des conventions relatives à ces troupes, fournies au Roi dans des conditions dont on peut juger par celles d’un traité conclu, en mars 1649, avec un gentilhomme anglais nommé Rokeby. Ce gentilhomme s’engageait envers Le Tellier « à lever et mettre sur pied en Angleterre le nombre de 600 hommes, tous d’âge et de force convenables pour bien servir, armés chacun d’une épée et baudrier, et de les faire passer par mer dans le royaume, moyennant qu’il plaise à Sa Majesté lui faire payer 18000 livres, qui est à raison de 300 livres par chaque homme : 9000 livres à Londres par les ordres de l’ambassadeur de Sa Majesté, et les 9000 livres restant au port où nous ferons débarquer lesdits hommes, où ils seront aussi armés, les deux tiers de mousquets avec bandollières et l’autre tiers de piques. » D’autre part, Rokeby, s’il ne parvenait pas à réunir l’effectif promis, s’engageait à rembourser sur la somme totale la quote-part afférente aux manquans. La plupart des accords conclus avec les étrangers ressemblaient, à peu de chose près, à celui-là. Les Suisses étaient les plus nombreux.

 

Alors qu’il y avait une noblesse militaire, qui était censée payer de son sang, — ce qu’elle fit souvent et brillamment, d’ailleurs, — le maintien de ses privilèges, il n’était guère facile de changer le mode de recrutement qui fonctionnait en France depuis la création de l’armée permanente sous Charles VII. Ce système, c’était celui de l’enrôlement effectué par des recruteurs agissant au nom du Roi. Le jugement suivant, rendu en 1656, au siège de la connétablie de Paris, et qui en résume beaucoup d’autres du même genre, suffirait à rappeler de quelle façon se pratiquait cet enrôlement soi-disant volontaire : «Sur ce qui a esté remontré par le procureur du Roy que plusieurs capitaines, lieutenans et autres officiers de guerre, pour faire plus facilement la levée ou recrues de leurs compagnies, composent et font des traitez avec aucuns exempts, archers ou autres personnes pour leur livrer des hommes, au lieu de faire battre le tambour (on battait le tambour pour appeler ceux qui étaient dans l’intention de s’engager, d’après des offres faites et des conditions à débattre). Et pour exécuter plus facilement ces conventions, lesdits exempts, archers ou leurs advoüez prennent des enfans de famille, escoliers, artisans, croche leurs, serviteurs et laboureurs sous prétexte de leur trouver des conditions de les l’aire travailler de leur métier, les mettent en des lieux écartez, les retiennent par force es maisons particulières. Et après les avoir enfermez quelque temps, sans permettre qu’ils donnent advis de leur rétention, les font sortir de nuict pour les livrer auxdits capitaines, et en faire entr’eux un honteux commerce, auquel mesme plusieurs loueurs de chambres garnies et gargotiers contribuent de leur partz…»

 

Pour remédier le plus possible à cet état de choses, — un tel mode de recrutement ne donnant au Roi que des soldats fort défectueux, qui souvent s’empressaient de déserter, — Le Tellier multiplia les pénalités sévères contre les officiers qui prêteraient la main à ce «honteux commerce.» Déjà, par une ordonnance de 1643, il avait décidé que les capitaines de compagnie seraient désormais tenus de munir les lieutenans et enseignes, auxquels ils délègueraient le pouvoir de recruter en leur nom, d’une procuration régulière, « en sorte que le capitaine en demeurât strictement responsable, » afin que le Roi sut à qui s’en prendre s’il arrivait que, pour recruter, on eût recours à des procédés coupables ou qu’ensuite les engagemens contractés ne fussent pas remplis. Dorénavant tous les capitaines qui n’auraient pas leurs compagnies complètes, au chiffre alors réglementaire de 70 hommes, seraient contraints «de restituer l’argent de la recrue des hommes qui leur manqueront par saisie de leurs biens et devront être privée de leurs biens.» Si la faute avait un caractère encore plus grave, l’officier prévaricateur devait être arrêté, traduit en conseil de guerre et puis «exemplairement puni à la vue de toute l’armée.»

 

Une série d’autres ordonnances précisa ultérieurement dans quelles conditions le recrutement devait être effectué et confia spécialement aux intendans le contrôle de ces opérations. A vrai dire, celles-ci purent être plus ou moins régularisées, mais il y avait de tels vices dans ce système de recrutement, qui resta en vigueur jusqu’à la Révolution, qu’il ne put jamais devenir satisfaisant. Ainsi que Turenne l’écrivait à Le Tellier, en 1658, le capitaine de compagnie ne se souciait guère que de se procurer le plus d’argent possible : «pourvu qu’il mène douze à quinze gueux de recrue auxquels il n’a donné que la moitié de ce que le Roi donne, il croit avoir satisfaction et estre asseuré de n’être pas cassé.» (Alphonse Bertrand, Michel Le Tellier et son administration militaire, Revue des Deux Mondes, 5e période, tome 36, 1906 - fr.wikisource.org).

 

Je n'ay aucune nouvelle de Mardik depuis vostre depart, mais je suis en peine d'une lettre, que j'ay veue entre les mains de l'abbĂ© Fouquet, du capitaine de Picardie' qui commande les François dans ladicte place, dont le contenu est : que les troupes consistoient en trois cens soldats anglois, soixante sergens et cinquante officiers, trois cens soldats françois, soixante-dix sergens et soixante officiers et cent trente chevaux. Sa lettre est du treize du courant. Il dict aussy que les mousquetaires du Roy et mes gardes estoient arrivez; mais comme je croyois que la garnison fust, au moins, de deux mille cinq cens hommes, j'ay estĂ© faschĂ© d'apprendre ce que dessus ; car s'il pouvoit reussir aux ennemis de rompre la communication de la mer Ă  la place, asseurement ils en auroient bon marchĂ©. J'espere pourtant que cela leur sera tres-malaisĂ©, et que ce pendant, les secours de France et d'Angleterre entrant, ils ne reussiront pas en leur dessein; Ă  quoy je suis persuadĂ© que vous contribuerez tout ce qui dependra de vous (Lettre de Mazarin Ă  Turenne, 18 dĂ©cembre 1657) (Lettres du Cardinal Mazarin pendant son ministere: Juillet 1657-AoĂ»t 1658, 1894 - www.google.fr/books/edition).

 

Il y avait au moins 70 sergents Ă  Mardyck, parmi les autres soldats qui eurent du mal Ă  prendre le fort.

 

ObĂ©issant Ă  un ordre formel, Turenne avait investi Dunkerque le 29 mai (1658). Nous avons exposĂ© ailleurs les difficultĂ©s de l'entreprise; le duc d'Anguien les avait surmontĂ©es en 1646; Turenne les connaissait, les jugeait aggravĂ©es; rentrĂ© dans son gouvernement, le vieil Antoine de Leede s'appliquait Ă  multiplier les obstacles autour de lui ; l'accès de la place, de tout temps si peu praticable, Ă©tait presque interceptĂ© par les Espagnols, maitres de Gravelines, de Bergues et de Furnes. Mardick, que nous venions Ă  peine de reconquĂ©rir Ă  grand'peine, isolĂ© au milieu des sables, Ă©tait difficile Ă  garder, un embarras plutĂ´t qu'un secours (Revue des deux mondes, Volume 117, 1893 - books.google.fr).

 

Régiment de CHAROST : Levé 27 mars 1630, par Louis de Béthune, comte de Charost. Conquête de la Savoie. Réformé après la campagne. Rétabli 22 février 1644, sur le pied de 15 compagnies de 70 hommes, pour tenir garnison à Calais. Défense de Calais en 1657. Licencié en décembre 1658 (Louis Susane, Histoire de l'ancienne infanterie française, Tome 8, 1853 - books.google.fr).

 

Le 30 juin 1658, à Mardyck , Mazarin apprend l'état du roi et lui impose de se retirer à Calais, où il est resté du 1er au 22 juillet. Louis-Armand Ier de Béthune (1641 env. - 1717), marquis, puis duc de Charost, gouverneur de Calais depuis le 2 janvier 1658 (JAlexandre Cojannot, Viaggio del Cardinale Mazzarini a St Jean de Luz l'anno 1659 de Atto Melani, 2010 - books.google.fr).

 

Il semble que parfois les compagnies anglaises étaient aussi composées aussi de 70 hommes :

 

In a letter of this Topping to Secretary Thurloe, March 17th, 1655, ibid. he says, "We have two companies in this garrison, consisting of 70 men in a company." He complains of the coldness of the situation of the castle, of the sickness of his foldiers, and requests a greater number of men (John Brand, The History and Antiquities of the Town and Country of the Town of Newcastle Upon Tyne, 1789 - books.google.fr, (A Collection of the State Papers of John Thurloe : December 1654 to September 1655, 1742 - books.google.fr).

 

Acrostiche : DPPH, dipaphos

 

CicĂ©ron dĂ©signe l'augurat par le mot dipapha, pourpre deux fois teint ; il dit Ă  CĂ©lius : «Car notre ami Curtius rève dipaphos, mais son teinturier l'arrĂŞte : Nam Curtius noster dipaphum cogitat, sed eum infector minoratur». Il Ă©crit aussi Ă  Atticus : «Qu'ils fassent donc tels consuls, tels tribuns qu'ils voudront ; qu'ils revĂŞtissent mĂŞme du dipaphos sacerdotal le goĂ®tre de Vatinius». [...]

 

Jean Zonaras s'est soumis à l'autorité de Pline, et il nous apprend qu'après avoir soumis ses voisins, Romulus eut les honneurs du triomphe. Fier de ces succès, qui ajoutaient à sa considération, il abandonna ses manières populaires, pour pren dre l'appareil odieux et pénible d'un monarque absolu, et il introduisit l'usage de la tunique de pourpre, de la toge prétexte et des chaussures rouges (Cette Dissertation est extraite de l'ouvrage sur les Empereurs, Par M. Chazot, conumissaire de Police à Paris) (Gazette nationale, ou le moniteur universel, 1808 - opacplus.bsb-muenchen.de).

 

Le soleil ressuscite chaque jour ; le phĂ©nix, cet oiseau de la lĂ©gende, dont HĂ©rodote nous conte les miracles et qui renaĂ®t de ses cendres, est l'emblème du soleil, mais en Grèce PhĂ©nix veut dire aussi le palmier et la pourpre. Le palmier est donc l'arbre d'Apollon, qui naquit Ă  DĂ©los sous son ombre ; un palmier de bronze se dressait dans son temple en cette Ă®le. On peut noter le goĂ»t que, sous Louis XIV, les dĂ©corateurs manifestent pour cet arbre. La mode de l'exotisme a pu contribuer Ă  le rĂ©pandre, mais peintres, architectes, Ă©rudits n'ignoraient pas ses liens avec le Soleil, car sur maintes mĂ©dailles il lui est associĂ©. Quant Ă  la pourpre, elle avait servi Ă  teindre le manteau d'Apollon, tyrio saturata murice palla, et elle demeure un attribut de la souverainetĂ© (Louis HautecĹ“ur, Louis XIV, roi soleil, 1953 - books.google.fr).

 

Louis est victime de la plus virulente des «fièvres pourprées» – on ne parle pas à l'époque de typhus exanthématique (Franck Ferrand raconte, 2019 - books.google.fr, (www.legeneraliste.fr).

 

A priori, il n’y a rien d’alchimique dans la gravure de frontispice ornant l’Hortus Regius de Denis Joncquet, le catalogue des plantes cultivĂ©es au Jardin royal. De prime abord, il ne s’agirait que d’une banale mĂ©taphore assimilant le souverain Ă  Apollon sur le plan iconographique. Avec discrĂ©tion, la devise latine HOC NUMINE FLORET («Ce dieu le fait fleurir») orne la scène du triomphe royal. Le quadrige de Louis-Apollon citharède perce les nuĂ©es sous le regard interdit d’une allĂ©gorie allongĂ©e sur le sol, au milieu des plantes du Jardin parmi lesquelles, au premier plan, de l’aloès, une cactĂ©e, de la gentiane et un lys. Un coq, la tĂŞte Ă  droite et les pattes posĂ©es sur une sphère fleurdelisĂ©e, annonce sans doute le lever du Soleil. Le souverain rĂ©gĂ©nère la Nature par sa seule prĂ©sence. D’après les signatures visibles, la figure aurait Ă©tĂ© dessinĂ©e par Charles Le Brun avant d’être finement gravĂ©e par Gilles Rousselet : le roi apporte la chaleur nĂ©cessaire Ă  l’éclosion des plantes, comme le feu transforme la matière, la nourrit, la dĂ©truit et la rĂ©gĂ©nère. Cette scène encomiastique en faveur du protecteur du Jardin doit toutefois ĂŞtre rapprochĂ©e de l’une des planches de la traduction française des Douze clefs de philosophie de Basile Valentin. La figure symbolique qui illustre le thème alchimique du phĂ©nix a-t-elle inspirĂ© Le Brun, un artiste sollicitĂ© par Denis Joncquet pour illustrer son inventaire botanique ? La migration des symboles, dune discipline Ă  une autre, d’un registre Ă  un autre, explique-t-elle le hasard de ces frappantes analogies ? En l’occurrence, on ignore quelle est la gravurequi a pu inspirer la planche de l’Hortus Regius (les autres frontispices de cata- logues botaniques sont très diffĂ©rents) ou celle de Valentin, d’ailleurs absente de l’édition latine des Douze clefs Ă©tablie par MaĂŻer en 1618. La gravure alchimique ne figure que dans la version française imprimĂ©e Ă  trois reprises, en 1624, 1659 et 1660, soit plusieurs annĂ©es avant le catalogue de Joncquet. Ou bien le hasard a disposĂ© des Ă©lĂ©ments très comparables de façon identique voir le coq-phĂ©nix en position centrale, les fleurs et la position d’un Saturne- Apollon très proche de l’antique Sol Invictus), ou bien certains motifs en voie de devenir Ă©sotĂ©riques se sont glissĂ©s dans l’iconographie royale. Cette planche alchimique a Ă©tĂ© rĂ©utilisĂ©e, avec une lĂ©gère modification, dans le traitĂ© intitulĂ© Le Triomphe hermetique. On terminera en insistant sur le fait que l’influence du pseudo-Valentin pourrait dĂ©couler aussi d’une particularitĂ© Ă©tymologique remarquĂ©e par Leibniz dans son Oedipus Chymicus : le philosophe s’est aperçu que Basile signifiait «roi», et Valentin «santé»... [...]

 

La Couronne aurait sauvĂ© l’antimoine dĂ©criĂ© par la FacultĂ© et, en retour, l’antimoine aurait sauvĂ© le roi Ă  l’occasion de la maladie de Calais. L’almanach triomphant de 1659, «La France ressucitĂ©e» (sic), montre effectivement Louis XIV alitĂ©, entourĂ© par ses proches, et sauvĂ© par un ange descendu du ciel avec une jolie aiguière Ă  la main : sur le rĂ©cipient, on peut lire une inscription : «Le Remde (sic) divin» (Stanis Perez, Antimoine, mĂ©decine et alchimie Ă  la cour autour de la guĂ©rison de Louis XIV en 1658 - www.biusante.parisdescartes.fr).

 

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