Le grand Condé et le Charolais II, 76 1686-1687 Foudre en Bourgogne fera cas portenteux, Que par engin homme ne pourroit
faire : De leur senat sacriste fait boiteux, Fera sçavoir aux
ennemis l'affaire. Dans la chanson de geste Girart de Roussillon, le miracle des gonfanons brûlés, qui met fin à la
meurtrière bataille de Vaubeton, et le miracle de
Vézelay (laisses 640-644) qui disculpe la comtesse Berthe que Girart avait un instant et à tort soupçonnée d'infidélité,
sur la foi de calomnies. La première de ces manifestations éclatantes de la
volonté divine nous intéresse ici au premier chef, puisqu'elle sépare les deux
armées à l'instant où la bataille fratricide tourne à la boucherie et que, la
foudre consumant au même instant leursÂ
enseignes respectives, elle est signe d'une égale réprobation Ã
rencontre du roi comme de Girart, qui frappe sans
discrimination et le suzerain jaloux et le vassal révolté (laisses 171-172) Le « sacriste » est
le sacristain, fonction ecclésiastique, que l'on retrouve dans la Chanson de Girart
de Roussillon, le secretain, un "preudhomme" (sage, avisé), de l'abbaye de Pothières dont un moine écrivit le roman en question. Il doit s'agir de "senat"
(sensé du latin sanatus) et non de "Sénat",
mot de vieux français qualifiant un "bibe"
(évêque) dans ce même roman. L'"affaire" aussi mentionnée est d'en terminer, pour les gens de Girart, avec le roi : "Oncle Girart, dit Fourques, et li autre barnés,
/ Pour Dieu, or ne soit plus si fel rois esparnés : / Fasons autel de lui com il veltde nous faire; / Quar assés sumes
gent pour eschuïr l'affaire" (echuir... : Venir à bout de l'affaire). Girart
et sa femme Berthe devenus saints guérissent estropiés, aveugles, sourds, muets
et boîteux ("clop"). Le secretain
ouvre la porte de son abbaye à une boiteuse guérie miraculeusement nommée Engiersen, une religieuse. Il a aussi une vision, celle de
Berthe, morte, et des âmes qui l'entourent au Paradis Dans son ensemble, l'aire sémantique de sage dans les
chansons de geste de 1150-1180 est ici nettement et largement dominée par le
registre intellectuel. Celui-ci présente, d'ailleurs, une fragmentation sémique
fort importante ; le savoir-faire et le savoir y
jouent un grand rôle. [...] Les groupements associatifs, qui sont souvent le
signe d'une bonne intégration du terme dans son contexte, ne sont fréquents que
dans le registre intellectuel, tout particulièrement dans Girart de Roussillon. Ce fait est à mettre en relation avec d'autres :
c'est dans Girart de Roussillon que le registre social
fait son apparition ; c'est dans cette chanson que le registre moral touche au
registre social avec le sémème « réservé », qui, d'une certaine manière,
s'inscrit dans l'idéologie courtoise ; c'est, d'ailleurs, encore dans Girart de Roussillon que, aussi bien dans les
groupements associatifs que dans les couples, cortois
fait le plus souvent son apparition ; cet adjectif peut, il est vrai avoir des
valeurs diverses. Le fait est que, dans Girart de Roussillon,
plus encore que dans Raoul de Cambrai, la femme et l'amour ont une part
sérieuse dans le déroulement de l'intrigue, sans que, pour autant, ces chansons
révèlent une trace quelconque de l'amour typiquement courtois. Toutes ces
remarques prouvent que Girart
se situe en marge des chansons de geste Les Bénédictins de Pothières, Ã
défaut des œuvres de Luther, disposaient de l'Histoire des actes et écrits du
réformateur par son adversaire Jean Dobeneck, dit Cochlà us (1479- 1552), premier pamphlet catholique (1549),
violent et malveillant Les Histoires de
Charles Martel de 1463, et surtout les Croniques et Conquestes de Charlemaine,
offertes au duc en 1458 ont été composées par David Aubert. Tandis que dans le
premier ouvrage il s'agit notamment des histoires de Charles Martel, de Girard
de Roussillon et de la famille des Lorrains puisées à un poème perdu sur
Charles Martel, à une chanson remaniée de Girart de Roussillon et au cycle de la Geste des Lorrains, David Aubert a
eu dans les Croniques et Conquestes l'ambition de donner à ses lecteur une
histoire complète de Charlemagne en recourant à autant de poèmes épiques que
possible ayant trait à son héros, tout
en racontant les événements de Roncevaux selon une Chronique du
Pseudo-Turpin Le rêve de domination sur le royaume de France du comte
de Charolais, même si sous une forme ironique et désabusée, avait été réalisé
sur papier par l'écrivain de Hesdin: les Histoires de Charles Martel ne
pouvaient être étrangères aux ducs de Bourgogne qui y voyaient une projection
de leurs désirs. Pour en venir brièvement aux modèles utilisés par David
Aubert, on s'est souvent rangé à l'avis de Gaston Paris, lequel avait constaté
qu'Aubert disposait de sources excellentes, en partie perdues aujourd'hui Une miniature du manuscrit 6 de Bruxelles, nous montre
précisément le duc de Bourgogne rendant visite à David Aubert dans son atelier.
Cazaux conjecture que Philippe a également surveillé
la création de Girart de Roussillon, dont la matière lui
tenait tant à cœur en raison de ses aspirations politiques. Comme Philippe
avait visité Pothières en 1433, le même savant a
probablement raison de spéculer que le duc y a emporté au moins une copie du
poème du XIVe siècle, qu'il s'agissait sans doute soit du manuscrit de
Bruxelles soit de celui de Paris. Étant donné que c'est seulement ce dernier
qui est édité (bien que fort médiocrement), nous allons baser nos comparaisons
sur celui-ci L'armée mit le siège devant Mussy-le-Châtel,
l'une des places à reconquérir, tandis que le samedi 11 juillet, au plus tard,
le duc et la duchesse parvenaient à l'abbaye de Pothières.
Deux jours plus tard, Philippe le Bon conduisit sa femme à Châtillon-sur-Seine
et revint dans la même journée à Pothières. Il ne
quitta le monastère que le dimanche 19, après la capitulation de la garnison de
Mussy. Peu après, il devait emporter Lézinnes, puis Pacy, enfin Avallon, qui s'ouvrit à lui le 17 octobre : il
prit la peine d'en donner avis à Charles VII par une lettre personnelle.
Pendant ce temps, le séjour de la duchesse se prolongeait à Dijon où, le 11
novembre, naissait le petit comte de Charolais, que son père, vingt jours plus
tard, fit chevalier de la Toison d'Or. Il est inutile d'insister davantage sur
la portée de ce voyage de la Cour bourguignonne dans le vieux duché
patrimonial, origine de sa grandeur Le comte de Tonnerre reparaissait alors à la cour de
Bourgogne, où un incident regrettable fournissait au duc un prétexte pour
poursuivre l'œuvre de ses rancunes. Louis de Châlon,
qui ne participait que trop à la licence des mœurs de cette triste époque, et
avait répudié Marie de Trémouille, sa femme, dont il
avait obtenu d'être séparé pour cause de parenté, par une bulle du Saint-Père,
séduisait, enlevait et épousait une demoiselle d'honneur de la duchesse,
appelée Catherine de Périllieux. Alors, le duc,
affectant une grande colère, transformait en reprise de fief et en confiscation
la saisie qu'il n'avait jamais levée sur les fiefs du Tonnerrois. Il faisait
même ordonner, le 15 janvier 1411, dans le conseil royal, où il était maître
absolu, cette confiscation au nom du roi, et s'en faisait nommer gouverneur.
Puis, douze jours seulement après, par une étrange et audacieuse contradiction,
agissant comme si cette confiscation lui était abandonnée, il transmettait, par
un acte de donation formelle, à son fils, le comte de Charolais, les fiefs de Cruzy, Griselles, Laignes et Pothières, et
adressait au bailli de la Montagne l'ordre de mettre à exécution cet acte
d'investiture. Des commissaires envoyés par ce magistrat allaient dans tous les
châteaux et les villages « mettre et asseoir sur tous « les lieux, places et
églises parochiaux, les panonceaux « des armes du
seigneur comte de Charolais. » Typologie De Fontbrune interprète ce
"Foudre" comme Napoléon Ier, "foudre de guerre", le grand
Condé en était un autre en ces années 1680. Le Charolais est souvent disputé entre la France et
l'Espagne. Le traité des Pyrénées de 1659 met fin à la guerre entre la France
et l'Espagne commencée en 1635. Le comté de Charolais est toujours aux mains
des Habsbourg d'Espagne, mais le traité prévoit que Philippe IV doit verser un
million de francs au prince de Condé, dit le Grand Condé, pour le dédommager de
l'aide qu'il avait apporté au roi d'Espagne. Cependant Philippe IV n'est pas en
mesure de lui payer cette somme. Louis XIV fit d'abord confisquer ce pays vers
1674, et s'en saisit définitivement en 1684, au profit du grand Condé qui se le
fait adjuger par arrêt du Parlement de Paris, le 28 mars 1684. Il devint au XVIIIe siècle l'apanage de Charles de
Bourbon-Charolais, comte de Charolais, prince qui n'est connu que par ses
débauches et sa cruauté. La dernière héritière du comté, Élisabeth-Alexandrine
de Bourbon-Condé (1705-1765), mademoiselle de Sens, fille de Louis III de
Bourbon-Condé, cède le comté au roi de France Louis XV contre, notamment, la
terre de Palaiseau. Le Charolais est finalement réuni à la Couronne en 1761.
Quant aux États de Charolais, ils sont supprimés et leurs attributions passent
aux États de Bourgogne |