Foires et Pompiers
II, 35
1656-1657
Dans deux logis de nuit le feu prendra :
Plusieurs dedans estoufés & rostis :
Pres de deux fleuves pour seur il aviendra :
Sol l'Arq. & Capr., tous seront amortis.
En 1500, des marchands logés à l'hôtel de La Tête d'Argent, rue de Grenette, à Lyon, à l'occasion
de la foire de novembre, périrent dans un incendie ayant débuté dans la cuisine. Guillaume Paradin publia de l'événement, en 1573, un récit qui s'accorde, dans ses grandes lignes, à ce qu'on trouve dans le quatrain.
Nostradamus parle de deux logis, Paradin n'en mentionne qu'un. Les deux fleux sont sans doute la SaĂ´ne et le RhĂ´ne
(Nostradamus, Les premières centuries, ou, Propheties: (édition Macé Bonhomme de 1555), rédacteur Pierre Brind'Amour, 1996 - books.google.fr).
"amortir" signifie d'abord tuer et mourir puis Ă©teindre, dont Ă©teindre une dette sens seul subsistant (Dictionnaire Ă©tymologique Larousse 1969).
Ce sont probablement les incendies qui sont "amortis", Ă©teints.
Nostradamus peut avoir en tête l'incendie de l'année suivante au Couvent des Célestins, le 8 septembre, pendant que Louis XII était à Lyon.
Il y séjourna deux fois en 1501. La première fois, il y arriva le 3 juin et y resta jusqu'au 21 juillet ; la seconde, il s'y trouvait à la mi-août et il en repartit à la fin d'octobre.
Tout le monastère eût été la proie des flammes, si le roi, logé à l'Archevêché, en face des Célestins, n'eût envoyé à leur secours tous ses domestiques, le sieur d'Aubigny avec sa bande écossaise, sa garde suisse,
ses archers et tous les seigneurs de sa cour, en sorte que le monarque resta seul avec la reine et les dames d'honneur. Louis fit faire une quête qui produisit 6,000 livres, et, grâces à cette somme, le désastre
fut entièrement réparé. L'incendie, suivant Paradin, arriva par la faute du cuisinier « qui avoit donné mauvais ordre à couvrir son feu. » Suivant Gonon, le feu prit au dortoir de la cellule
d'un religieux aveugle nommé Pierre de Chevery, homme de naissance
(Boitel, Lyon ancien et moderne, 1841 - books.google.fr).
Quoique les foires de Lyon aient été d'abord créées, au nombre de deux, en 1419, et renouvelées par Charles VII en 1445,
cependant elles n'acquirent une réelle importance qu'en 1462, par un édit de Louis XI, et surtout en 1494 par un édit de Charles VIII, qui en organisa quatre durant chacune quinze jours :
1° le lundi de la Quasimodo ; 2° le 4 août ; 3° le 3 novembre; 4° le premier lundi après la fête des Rois
(Aymar Du Rivail, Terrebasse, Macé, Description du Dauphiné, de la Savoie, du Comtat-Venaissin, de la Bresse et d'une partie de la Provence, de la Suisse et du Piémont au XVIe siècle, 1852 - books.google.fr).
Sachant que le calendrier julien avait quelques dix jours d'avance la foire de novembre, qui durait 15 jours Ă
partir du 3, peut tomber dans le Sagittaire de l'époque. Le Capricorne peut concerner la foire de début janvier.
Déjà deux foires avaient été accordées à la ville de Lyon en 1419, par décision royale, une troisième en 1443.
Sous Louis XI existait une forte rivalité entre Lyon et Genève qui appartenait au duc de Savoie. Louis XI porta à quatre le nombre des foires lyonnaises en 1462, mais de fortes
pressions s'exercèrent sur lui pour les partager avec Genève. On renonça à ce partage quand il apparut que les marchands allemands préféraient venir à Lyon.
La durée de chaque foire était de quinze jours et pendant cette période les marchands bénéficiaient d'exemptions fiscales, c'est-à -dire des droits sur les échanges
de marchandises, mais aussi du droit d'aubaine s'ils venaient à décéder pendant ce temps. Dès le milieu du XVe siècle les marchands italiens se firent plus nombreux à Lyon,
attirés par les foires qui créaient un fort mouvement d'échanges. En 1484, la ville perdit ses foires en raison d'un mouvement de pensée mercantiliste et sur
les instances de villes rivales, qui espéraient bénéficier d'un courant d'échanges selon elles abusivement capté par Lyon. Dès 1487 le roi rétablissait
les foires de Pâques et de la Toussaint dans la capitale des Gaules et en 1494 Charles VIII restitua à la ville ses quatre foires, c'est-à -dire qu'il rétablit celles des rois (janvier) el d'août, avec les mêmes
privilèges et la même durée que précédemment. Ses successeurs immédiats les confirmèrent au XVIe siècle avec parfois quelques légères restrictions fiscales
(Jacqueline Boucher, Présence italienne à Lyon à la Renaissance: Du milieu du XVème à la fin du XVIème siècle, 1994 - books.google.fr).
Nicolas de Nicolai dans sa Description générale de la ville de Lyon et des anciennes provinces du Lyonnais et du Beaujolais,
1573, donne une liste d'ordonnances royales concernant la ville de Lyon :
celles du roy Charles cinquiesme contenans la creation & institution de deux foires en lad. ville de Lyon,
l'une Ă Pasques, l'autre Ă la feste de Toussainctz, en datte du neufiesme iour de febvrier l'an de grace mil quatre cens dix-neuf; celles du roy Loys unziesme contenant l'amortissement
des foires de Geneve pour les transferer Ă Lyon, tant a raison de la rebellion faicte par ceux dudict Geneve a l'encontre du duc de Savoye, leur seigneur naturel, que pour le bien &
utilité de ladicte ville de Lyon, en datte du vingt-cinquiesme d'octobre l'an mil quatre cens soixante deux
(Nicolas de Nicolay, Description générale de la ville de Lyon et des anciennes provinces du Lyonnais et du Beaujolais (1573), 1881 - books.google.fr).
C'est de Dax que Louis XI envoie ses lettres concernant les foires de Lyon en mars 1462.
En cette même année, le boulanger Jehan Le Pelletier met accidentellement le feu à deux maisons à Chartres dans le quartier Sainte Foy, sans doute de nuit
(Ordonnances des roys de France de la troisième race: Ordonnances rendues depuis le commencement du règne de Louis XI jusqu'au mois de mars 1473, Tome 15, Claude Emmanuel Joseph Pierre marquis de Pastoret, 1811 - books.google.fr,
Claudine Billot, Chartres Ă la fin du Moyen Age, 1987 - books.google.fr).
L'année 1487 fut cruelle à Bourges. Quelques mois après l'abolition de ses foires, la ville était détruite par l'incendie du 22 juillet, dit de La Madeleine,
parti de chez un menuisier, rue Saint-Sulpice, au coin de la rue des 3 Pavés. Les deux foires de Bourges de Pâques et Toussaint sont transférées à Lyon par Charles VIII.
Typologie
En 1655 est créée le service contre l'incendie qui deviendra les pompiers de la ville de Lyon.
En 1654, le consulat affecte quarante-cinq mille livres « aux réparations à faire sur le Rhône, pour le contenir dans son lit
ordinaire le long des murailles de la ville. » La même année, il acquiert, sous le nom de trois échevins, et au prix de deux cent mille livres, les offices de juge-conservateur des priviléges des foires,
de lieutenant et de greffier au même siége. Son but, depuis longtemps poursuivi, était de réunir cette juridiction à l'autorité consulaire ; il l'exerça par ses prête-noms, en attendant qu'il eût obtenu des
lettres-patentes de réunion , ce qui n'arriva qu'après des sollicitations assez longues. L'année suivante, douze charpentiers de la ville, six du côté de Fourvières et six du côté du Rhône, ayant
chacun sous soi un escouade de cinq hommes, furent préposés pour porter secours dans les incendies. Ils n'avaient pas un gage fixe, mais on allouait dix-huit livres à l'escouade, pour chaque secours porté.
Cet établissement est le germe de celui des corps de pompiers. En 1657, trois cent quatre-vingt-deux mille livres furent versées à la caisse des consignations, pour l'acquisition du pré et ténement de Bellecour
(Pierre Clerjon, Richard, Histoire de Lyon, depuis sa fondation jusqu'Ă nos jours, Tome VI, 1837 - books.google.fr).
Au côté de la garde bourgeoise, diverses troupes participent ponctuellement au service du feu : la compagnie du « guet royal »,
créée en 1565; la compagnie des « gardes suisses », épisodiquement présente à Lyon depuis 1565; la « compagnie franche du régiment de Lyonnais », formée en 1699; et la compagnie municipale des « arquebusiers »,
réorganisée et devenue permanente en 1714 avec cinquante hommes
(www.sdis69.fr - Historique,
theses.univ-lyon2.fr - Duportal,
André Steyert, Nouvelle histoire de Lyon et des provinces de Lyonnais, Forez, Beaujolais, Franc-Lyonnais et Dombes, Tome II, 1895 - books.google.fr).
On trouve parfois 1565 pour la création du service mais l'Inventaire-sommaire des Archives communales antérieures
à 1790 de Lyon confirme la date de 1655 mais parle de treize maîtres charpentiers (6 du côté de Fourvière et 7 du côté de Saint-Nizier)
(Inventaire-sommaire des Archives communales antérieures à 1790: Série AA. Série BB, Ville de Lyon, Fortuné Rolle, 1865 - books.google.fr).
Charles VII et Louis XI créèrent un juge-conservateur des priviléges de ces foires. Cet office de juge-conservateur,
et les autres offices qui composaient cette juridiction furent réunis en 1656 par Louis XIV au corps consulaire pour être exercés par le prévôt des marchands et par les quatre échevins avec six autres
juges nommés tous les ans par le roi et par le consulat
(C. Beaulieu, Histoire de Lyon: depuis les Gaulois jusqu'à nos jours, ornée de vignettes, points de vue et portraits, 1837 - books.google.fr).
La réunion de l'office de juge-conservateur au corps consulaire est parfois datée de 1655 :
Présentement & depuis l'Edit de Louis XIV. du mois de Juillet 1669, la Conservation de Lyon connoît
privativement à tous autres Juges de toutes les affaires du Commerce de cette Ville, même hors des foires, & en matiere criminelle. On remarquera qu'en l'an 1655, par un Edit de Louis XIV. la Jurisdiction appellée
Conservation avoit été unie au Corps Consulaire de ladite Ville, & l'on peut dire que l'union de la conservation au Corps Consulaire n'a proprement été qu'une restitution qu'on
lui a faite de ces anciens Droits; puisqu'en effet, dès l'année 1464, Louis XI, avoit accordé aux douze Conseillers ou Consuls de cette Ville, le droit de nommer chaque année deux Notables Marchands, pour être
Assesseurs du Juge Conservateur, & assister à la décision des procès à la maniere des Juges Consuls. Ainsi présentement cette Jurisdiction a deux prérogatives considérables.
La premiere l'égale à toutes les autres Jurisdictions Consulaires, & la seconde, aussi bien que quantité d'autres attributions qui lui sont particulieres, la met dans un ordre en quelque sorte supérieure, & lui donne
une compétence qui n'est propre qu'à elle
(Noel Chomel, Jean Marret, Dictionnaire oeconomique, Tome 1, 1741 - books.google.fr).