Le pape Innocent X

Le pape Innocent X

Fin des Ming en Chine

 

II, 28

 

1651-1652

 

Le penultime du surnom de prophete

Prendra Diane pour son jour & repos :

Loing vaguera par frenetique teste,

Et delivrant un grand peuple d’impos.

 

"penultième... prophète"

 

On peut considérer Saint Jean-Baptiste et Jésus comme les deux derniers prophètes bibliques. On lit dans la bible, Jésus parlant de Jean : Â« Mais qui êtes-vous allé voir […] un prophète ? Oui, vous dis-je, et plus qu’un prophète [1]» (Luc, 7, 24) et de gens de la foule ayant entendu les paroles de Jésus : « Celui-ci est vraiment le prophète [2] Â» (Jean, 7, 40).

 

Le père de Jean-Baptiste porte le nom de Zacharie, fils de Barachie, qui est celui de l'avant-dernier des prophètes, dans l'ordre d'édition, qui ont leur livre dans l'Ancien Testament. Jésus parle d'un Zacharie, fils de Barachie, tué entre l'Autel et le Temple (à Jérusalem). On se demande s'il s'agit du prophète dont l'A.T. ne dit pas comment il est mort (Louis Ellies Dupin, Nouvelle bibliothèque des auteurs ecclésiastiques, Tome 6, 1692 - www.google.fr/books/edition).

 

Ainsi l’avant dernier (« penultime Â») portant le surnom de prophète est Jean-Baptiste en italien Giambattisti qui est le prénom du pape Innocent X [3], élu en 1644, et mort en 1655.

 

Innocent X condamna les 5 propositions supposées résumer l’Augustinus de Jansénius, sous l’influence de Nicolas Cornet, syndic de la Sorbonne et président du conseil de conscience de Mazarin. « Les jansénistes enragent de voir le souverain pontife passer sous la coupe de leurs adversaires [4]». Ils s’opposaient aux jésuites qui fournissaient le plus gros contingent de casuistes. Parmi ceux-ci, on compte Antonio Diana (« Diane Â») (1585-1663) qui sera particulièrement attaqué par Blaise Pascal dans ses Provinciales (voir quatrain II, 36), qui fut longtemps examinateur des évêques et qui était « en un si haut crédit [5] Â» à Rome. Les casuistes offraient par leurs recueil de jurisprudence « aux confesseurs du monde entier les moyens de pardonner au peuple, aux bourgeois et surtout aux princes [6]».

 

"Diane" : Antonio Diana

 

Un mot de Diana, bien qu'il ne fût pas Jésuite. Pascal lui a conféré des droits qui lui méritent une place parmi les théologiens de la Société. Il naquit à Palerme en 1595, d'une famille distinguée, entra chez les Clercs réguliers en 1630, et se livra avec tant d'ardeur à l'étude de la théologie, qu'il y acquit bientôt une grande réputation. Il était consulté de toutes parts comme un oracle, et ses ouvrages étaient aussitôt réimprimés en divers lieux de l'Europe. Les magistrats de Sicile prenaient son avis dans toutes les affaires importantes; les papes ne le traitaient pas avec moins d'estime et de distinction, et Urbain VIII, Innocent X et Alexandre VIII le maintinrent au poste éminent d'examinateur des évêques. Il mourut à Rome le 22 juillet 1663. Il a laissé un ouvrage sur la primauté du pontife romain, et une Somme de théologie en douze parties, sous le titre de Résolutions morales, réimprimée en 8 vol. in-fol. (Michel Ulysse Maynard, Les Provinciales ou Les lettres écrites par Louis de Montalte à un provincial de ses amis et aux révérends pères jésuites, Tome 2, 1851 - www.google.fr/books/edition).

 

Repos

 

Les lettres à Mademoiselle de Roannez développent cette idée de l'indispensable inquiétude. Cette pédagogie de l'inquiétude vise d'abord les faux repos du monde, l'utopie des univers réconciliés par un imaginaire trompeur; mais elle s'écarte aussi des spirituels qui adoptent ou adaptent à la dévotion le discours du repos. Il existe bien un authentique repos, le repos chrétien que Dieu procure à son peuple (L'Intégrale de Lafuma, La. 275) et à l'âme (La. 460), état de fusion qui définissait pour un Plotin la vision extatique, état auquel aspire l'âme chrétienne parce qu'il la place comme hors du monde : "Faites, mon Dieu, que dans une uniformité d'esprit toujours égale je recoive toute sorte d'événement" (Prière pour le bon usage des maladies, XIV). Le repos des philosophies mondaines n'est humilié que pour ouvrir la voie à ce repos chrétien, comme l'Église et le monde s'opposent dans un combat qui n'aura de cesse qu'au jour du Jugement (Comparaison des chrétiens des premiers temps avec ceux d'aujourd'hui.). Abolir les confusions, affirmer l'infranchissable frontière d'un ordre à l'autre, l'auteur des Pensées poursuit sur le plan spirituel ce qu'avait entrepris fauteur des Provinciales en dénoncent le chimérique repos de la casuistique. Invitation est ainsi faite au libertin qu'il veut conduire au seuil de la religion à instaurer un nouveau rapport au temps : temps historique de l'humanité marqué par le péché et la rédemption qui laisse le souvenir du repos perdu ; temps de l'individu que la conversion tendra vers l'attente du repos retrouvé dont les Écritures, dans l'image qu'elles en donnent, inspirent le désir. Derrière la réflexion pascalienne se profilent les grandes orientations du thème dans la Bible : "L'homme ne voit pas le repos ni jour, ni nuit" (Écclésiaste, 8, 16) ; qu'on le cherche en effet dans le respect de la Loi (Jérémie, 6, 16), dans l'amour (Cantique, 1,7) ou dans la Sagesse (Écclésiastique, 6, 28), le repos humain est fragile, reflet pâli du repos céleste dont la terre promise est la figure et que Jésus-Christ a célébré en restaurant le vrai sens du sabbat. Le vrai repos est donc moins la cessation du travail que l'accomplissement d'une activité tournée vers Dieu. Rien de surprenant dès lors à ce que le régime rhétorique privilégié de la méditation pascalienne sur le repos soit l'antithèse ou l’oxymore. L'antithèse ne sert pas seulement à opposer au repos tout ce qui lui est antinomique ; elle sert aussi à placer en contraste le mythe moral dont sont mises au jour les illusions et les apories, et le repos chrétien. De rue à l'autre plan, nul passage, nulle progression possible puisque la conversion est rupture. Mais en cette vie terrestre, nulle possession tranquille non plus de ce repos dont la quête est en même temps une anamnèse :

 

L'homme ne sait à quel rang se mettre, il est visiblement égaré et tombé de son vrai lieu. 11 le cherche partout avec inquiétude et sans succès dans des ténèbres impénétrables (La. 400).

 

Être à jamais décentré, l'homme est voué aux oscillations, à la tension entre les contraires, négation même du repos qui appelle au contraire l'oxymore, fusion des valeurs opposées, invention d'une unité nouvelle, instrument de réconciliation. De cette figure, Jésus-Christ est l'image et le modèle puisque lui est centre (La. 449, 811), qu'il est misère et grandeur, homme et dieu, mystère de la rédemption comme retour au repos originel.

 

On voit assez que quels que soient ses antécédents ou ses garants, bibliques et patristiques, stoïciens ou épicuriens, la notion de repos tient son importance dans ta pensée de Pascal moins de son contenu que de ses fonctions. L'argumentation pivote autour d'elle selon une double polarité : secouer le faux repos et éveiller l'inquiétude ; substituer la représentation d'un autre repos et en inspirer le désir. Ainsi se noue le dialogue de l'apologiste et de son temps. Cest la leçon chrétienne qui offre le point fixe d'où peut être regardée et jugée la mouvance du monde, insurmontable à tous les rêves de repos :

 

Ceux qui sont dans le dérèglement disent à ceux qui sont dans l'ordre que ce sont eux qui s'éloignent de la nature et la croient suivre, comme ceux qui sont dans un vaisseau croient que ceux qui sont au bord fuient. Le langage est pareil de tous côtés. Il faut avoir un point fixe pour en juger. Le port juge ceux qui sont dans un vaisseau, mais où prendrons-nous un port dans la morale (La. 697) (B. Beugnot, Méditations sur le repos, Pascal, thématique des Pensées, 1988 - www.google.fr/books/edition).

 

"Loing"

 

En 1644, en Chine (« Loin Â»), les Mandchous s’installent au pouvoir en succédant aux Ming profitant de la décomposition de l’empire. Ils battent l’aventurier Li Zicheng qui disparaîtra avec le butin qu’il aura réuni. Li Zicheng s’était engagé « dans une politique pro-paysanne en promettant aux masses rurales de les délivrer du joug fiscal [7]».

 

La principale raison de l'échec des deux grands rebelles paysans est leur incapacité à transformer leur pouvoir militaire en un pouvoir politique, à passer d' une structure de bande à une structure étatique. Le facteur mandchou, qui semble important à première vue, ne l'est pas autant que cela si l'on compare avec d'autres périodes où Türks, Ouïghours, Tibétains constituaient des menaces tout aussi graves pour le pouvoir chinois et ses compétiteurs internes. Le changement de dynastie n'est pas un changement social, mais un simple changement de la superstructure; dans la plupart des cas, la haute fonction publique et les propriétaires terriens se rallient au nouveau pouvoir si celui-ci sait faire en leur direction les gestes adéquats. En s'appuyant, à l'origine, sur un mouvement paysan dont les intérêts sont fondamentalement divergents de ceux de la gentry, Li et Zhang n'avaient que deux solutions : soit instaurer un nouveau régime social fondé sur un partage des terres, soit se concilier les propriétaires terriens et les aristocrates en évacuant la problématique agraire originelle de leur mouvement. C'est la seconde option qui fut choisie par Zhu Yuanzhang à la fin du XIVe siècle et c'est ce qui lui a permis de fonder la dynastie Ming; mais ni Li Zicheng ni Zhang Xianzhong ne semblent avoir eu les capacités intellectuelles d'opérer un tel choix. Ils sont restés prisonniers d'une conception purement militaire du pouvoir et d'une vision extérieure et formelle de la fonction impériale. Ils n'ont pas compris que pour durer, un pouvoir doit reposer sur une assise sociale stable et pas seulement sur une force militaire si vaillante soit-elle. Li balança entre une alliance avec la gentry et certains secteurs de la bureaucratie et les promesses faites aux paysans, et Zhang renforça jusqu'au délire son appareil de répression (François Thierry, Monnaies chinoises. Tome IV: Des Liao aux Ming du Sud, 2014 - books.google.fr).

 

"frenetique"

 

Ici, il semble qu'il faille dédoubler en deux personnages la "frenetique tête" qui délivre de l'impôt, les deux grands rebelles de la fin du règne des Ming.

 

Les rebelles, prétendants à l'Empire, surgissent simultanément partout, dans la Chine disloquée, avide de réformes et déchirée par les factieux. L'un d'eux, Tchang Hien-tsong (de Mailla, XI. p. 17), menaçant les villes de Ngan-k'ing et de Yang-tcheou, fait trembler Nankin, dont il ravage les abords. Bientôt, refoulé partiellement, il se déclare empereur au Se-tch'oan. Ce monstre de cruauté, qui favorisa, puis persécuta les missionnaires, appelés à sa Cour, périt de la main des Tartares.

 

A l'arrivée du terrible Tchang Hien-tchong en 1643 à Nankin, les Pères s'enfuient et sont rejoints et ramenés: On les introduit au palais en 1644. L'usurpateur, extrême en qualités comme en vices, les fait mandarins, leur commande des sphères célestes et terrestres. Lors des massacres, les PP. sauvèrent beaucoup de monde [...]. Le tyran se fit couronner à Tch'eng-lou en 1646, “Roi et Empereur de toute la Chine." Le tyran, malgré sa frénésie de cruauté, reconnaissait la valeur de notre Religion. Souvent les PP. lui tinrent tête héroïquement. Il fut tué le 3 janvier 1647 d'une flèche reçue au côté dans une escarmouche contre les Tartares (Louis Gaillard, Nankin d'alors et d'aujourd'hui, 1903 - books.google.fr).

 

Joseph-Anne-Marie de Moyriac de Mailla (Moirans, 1669 - Pékin, 1748) était un missionnaire jésuite en Chine, également mathématicien, cartographe et historien sinologue (fr.wikipedia.org - Joseph-Anne-Marie de Moyriac de Mailla).

 

Prophètes chinois

 

Many rebels looked to the future as well as to the past, using prophecy, divination and portent to convince themselves and others of a favourable outcome to their resistance. In China, members of a popular religious sect known as the White Lotus Society had long predicted that a man named Li would one day be emperor, and as he strove to make this prediction come true, Li Zicheng consulted a medium (and when the prophet unwisely stated that 'Zicheng is not a true Son of Heaven' and predicted the imminent demise of his power, Li executed him). Like most Chinese, Li also placed great importance on portents. When a dust storm and yellow fog engulfed his temporary capital just after he proclaimed himself prince of Shun, Lipanicked until his seers assured him that it was an auspicious sign because, when a new Chinese dynasty arose, the sun and moon temporarily lacked light (Geoffrey Parker, Global Crisis: War, Climate Change and Catastrophe in the Seventeenth Century, 2017 - books.google.fr).

 

Li Zicheng s'est acquis une position stable à partir de 1640. Il gagne à lui deux anciens «licenciés» (candidats reçus au concours des provinces), Li Yan et Niu Jinxing, qui lui fournissent des présages fastes et resteront ses conseillers jusqu'à la fin. A la première lune de 1644, Li Zicheng se proclame roi du royaume de Dashun (Grande Prospérité) et met en place une administration régulière. Il dispose alors de 400 000 fantassins et de 600 000 cavaliers. Trois mois plus tard, il entre à Pékin (Jacques Gernet, Le monde chinois, 1972 - books.google.fr).

 

Les rites chinois

 

La question des cérémonies chinoises est une de celles sur lesquelles on a le plus écrit; elle a duré environ un siècle, depuis Innocent X jusqu’à Benoit XIV. Quand les pères dominicains parvinrent à se fixer dans la province du Fou-kien, ils crurent devoir étudier plus a fond les cérémonies que permettaient la plupart des jésuites. Le P. Moralés, dominicain de la province de Manille, voulut se rendre compte des faits, par lui-même, et interrogea les lettrés qui tous répondirent qu’on offrait les sacrifices pour en recevoir des biens temporels. Il rédigea alors un mémoire ou sommaire des difficultés, sous le nom de quinze doutes. Chassé par la persécution, il vint à Rome et obtint un décret d’Innocent X (12 Septembre 1645). Le Pape se prononçait dans le sens des dominicains, mais avec la clause: «jusqu’à ce qu’il en soit décidé autrement,» ce qui supposait la sentence réformable. De retour en Chine, le P. Moralés notifia cette réponse a tous les missionnaires, selon l'ordre qu’il avait reçu de la Sacrée Congrégation de la Propagande. De leur côté, les pères jésuites firent un exposé de la question et envoyèrent à Rome le P. Martini. Alexandre VII publia un décret (23 Mars 1656) d’après lequel, supposant vrai l’exposé des faits, les cérémonies pouvaient être tolérées, pourvu qu’on protestât d’avance contre toute superstition qui s’y rencontrerait. Ces deux réponses étaient différentes, mais non contradictoires, parce que les mémoires des dominicains et des jésuites ne se ressemblant pas, Rome avait répondu aux uns et aux autres "juxta exposita." Le décret de Clément IX, qui confirme les deux précédents. La Congrégation du Saint Office fut chargée de prendre des informations en 1699. et fit l’examen avec lenteur, maturité, et très grand soin (selon l’expression de Benoit XIV). On entendit les raisons des deux partis, on leur donna la plus ample faculté de se défendre librement et Clément XI poursuivant l’examen commencé par ses prédécesseurs, rendit un décret solennel (20 Novembre 1704), par lequel il prohibait les cérémonies en l‘honneur des ancêtres et de Confucius, ainsi que tous les termes autres que celui de Tien-tchou. pour exprimer la divinité. Rome avait parlé, la cause devait être terminée; malheureusement, il n’en fut pas ainsi, il y eut encore quarante années de discussions. Benoit XIV reprenant toute la suite de la controverse, confirma le décret et la bulle de Clément XI et publia la bulle Ex quo singulari (11 Juillet 1742), dans laquelle il fait l’historique de la discussion, cite les différents décrets et ordonne une nouvelle formule de serment. Cette bulle fut aussitôt envoyée dans les missions, mais comme elle éprouvait encore des obstacles de. la part de quelques partisans des rites, Benoit XIV acheva, par un bref du 19 Decembre 1744, d’écarter tous les prétextes, en montrant que les raisons de convenance ne suffisent pas, quand il s’agit de pratiques vraiment idolatriques (Félix Gennevoise, Aperçu historique sur la Chine, 1873 - books.google.fr).

 

Pascal avait dénoncé les pratiques des jésuites en Chine, dans la cinquième Provinciale (20 mars 1656) : "Quand ils se trouvent en des pays où un Dieu crucifié passe pour folie, ils suppriment le scandale de la Croix, et ne prêchent que Jésus-Christ glorieux, et non pas Jésus-Christ souffrant : comme ils ont fait dans les Indes et dans la Chine, où ils ont permis aux chrétiens l'idolâtrie même, par cette subtile invention de leur faire cacher sous leurs habits une image de JésusChrist, à laquelle ils leur enseignent de rapporter mentalement les adorations publiques qu'ils rendent à l'idole Cachin-choam et à leur Keumfucum, comme Gravina, dominicain, le leur reproche".

 

Antonio Diana, qui était théatin, est un modèle de ce laxisme que Pascal qui pourrait être le grand prophète du quatrain II, 36 (il a eu comme pseudonyme Amos) reprochait aux Jésuites. Cependant, Diana n'intervient pas dans cette querelle des rites.

 

Probabilisme

 

Le Probabilisme, qui n'était pas le fait des seuls jésuites, prend son nom de la théorie des opinions probables : en cas de doute moral, il était conseillé de s'en tenir aux opinions des «personnes autorisées», de quelque autorité morale ou, à défaut, de suivre l'opinion la plus vraisemblable, la plus probable (Benito Pelegrín, Éthique et esthétique du baroque, 1985 - books.google.fr).

 

Le probabilisme est irrecevable a priori, parce qu'il est rationalisme et naturalisme tout crus. Il faut, selon Pascal, «un aveuglement surnaturel» pour ne pas s'apercevoir qu'il n'y a aucune place pour le rationalisme dans la morale chrétienne, que l'essence de cette morale est d'être fondée sur la parole de Dieu interprétée par les Pères et l'Eglise, avec exclusion de la raison, et qu'au contraire l'essence de la morale païenne est d'être fondée sur la raison interprétée par les philosophes, avec exclusion de l'autorité divine. Or, cet aveuglement est celui des casuistes (Émile Baudin, Études historiques et critiques sur la philosophie de Pascal, Tome 3, 1947 - books.google.fr).

 

Cet aveuglement peut s'exprimer par le deuxième vers "prendra Diane pour son jour" où Diane représente la lune, et "prendre la lumière de la lune pour le jour" ou "prendre la nuit pour le jour" (Nicolas Talon, L'histoire Sainte du nouveau Testament, 1669 - books.google.fr, Charles Boileau (1648 - 1704), Homélies et sermons, Tome 2, 1720 - books.google.fr).

 

On peut reconnaître dans "repos" un synonyme de relâchement :

 

Mais il ne faut pas croire que tous les probabilistes ont donné dans le même excès de relâchement; plusieurs ont entendu par opinion probable, non celle en faveur de laquelle on peut citer tout au plus une ou deux autorités , mais celle qui est appuyée sur des raisons, et soutenue par un nombre de docteurs graves et non suspects. Le probabilisme ainsi entendu a été le sentiment commun des casuistes de toutes les écoles, de tous les ordres religieux et de toutes les nations ; il y a de l'entêtement à soutenir que ce sentiment était une corruption de la morale, un principe de fausses décisions, un moyen d'excuser et d'autoriser tous les pécheurs (Nicolas Sylvestre Bergier, Dictionnaire de théologie, Volume 7, 1834 - books.google.fr).

 

Cet antiprobabilisme est un paradoxe chez Pascal lui-même, dont il heurte de façon si surprenante les doctrines critiques les plus personnelles, son probabilisme métaphysique, son probabilisme apologétique, son probabilisme scientifique, son probabilisme historique. Il est un paradoxe surtout envisagé à la lumière de l'histoire de la philosophie, soit de la philosophie en général, soit de la philosophie morale en particulier. L'histoire de la philosophie en général montre le probabilisme s'insinuant et s'établissant peu à peu entre le dogmatisme et le scepticisme, déterminant contre l'un et l'autre, et élargissant de plus en plus, le domaine des vérités évidentes, scientifiquement démontrables et démontrées. Ce probabilisme philosophique a eu, de l'antiquité à nos jours, des représentants de plus en plus nombreux et conscients. Dans l'antiquité on peut citer d'abord le dogmatique Platon, puis, et surtout, les platoniciens Arcésilas et Carnéade (Émile Baudin, Études historiques et critiques sur la philosophie de Pascal, Tome 3, 1947 - books.google.fr).

 

Si Carnéade critique le polythéisme, ce n'est point pour saper la religion populaire, mais pour combattre les Stoïciens, qui professaient le rationalisme et voulaient en même temps sauver la religion. Inventeurs de l'apologétique, ils raffinaient sur les croyances populaires, tout en prétendant les conserver. «Pour les Stoïciens, dit Em. Bréhier (Chrysippe, 1910, p. 202-203; cf. p. 196-198), il s'agit, tout en se plaçant, autant que les sophistes ou les cyniques, à un point de vue rationnel, de garder une signification à toutes les valeurs de la civilisation grecque et notamment aux poèmes d'Homère et d'Hésiode.» Cette position est-elle tenable ? En mettant le rationalisme au service de la religion populaire, les Stoïciens souscrivaient verbalement à des croyances qu'ils n'entendaient pas de la même façon que le vulgaire. De là une contradiction inextricable, que Carnéade mettait en lumière par des sorites destinés à montrer l'impossibilité de définir le dieu. On ne peut donner du dieu une definition qui convienne à tout le défini et au seul défini. Sitôt que l'on adore un dieu pour des raisons déterminées, on est conduit, pour les mêmes raisons, à tenir pour dieu ce qui n'est pas dieu, voire à tomber dans de grossières superstitions. Vous répudiez les monstra imperitorum et les barbarorum deos, mais où est la ligne de démarcation entre les faux dieux et les vrais dieux ? comment discerner ce qui est religion de ce qui est superstition ? (Pierre Coussin, Les sorites de Carnéade contre le polythéisme. In: Revue des Études Grecques, tome 54, fascicule 254-255, Janvier-juin 1941 - www.persee.fr).

 

Acrostiche : LPLE, Elpe, Elpel

 

Elpe et Elpel désignent en allemand le merisier à grappes (ou putier parce que ses feuilles et son bois sentent mauvais) (Nouveau dictionnaire d'histoire naturelle, 1817 - books.google.fr).

 

Tite-Live mentionne en 169 la torrentialité dans le domaine méditerranéen de montagne, à propos de l'Elpée : «Ce fleuve prend sa source au mont Olympe; en été, il se réduit à un mince filet à un mince filet d'eau mais, quand il est grossi par les pluies d'hiver, il se transforme en torrent, tourbillonne sur les rochers, emporte vers la mer la terre qu'il arrache sur son passage; il coule au fond d'un lit profondément creusé, entre deux rives élevées (Gilles Bernard, Néron et Jésus, 2018, p. 46)

 

Olimpia Maidalchini, surnommée la Papesse Olimpia, née en 1594 à Viterbe et morte en 1657 à San Martino al Cimino, est une aristocrate italienne et la belle-sœur du pape Innocent X, sur lequel elle exerce une grande influence (fr.wikipedia.org - Olimpia Maidalchini).

 

Cf. "Diane" autre nom mythologique.

 

L'Elpe est une rivière du duché de Clèves (Jean-Joseph Expilly, La topographie de l'univers. Par M. l'abbé Expilly, Tome 2, 1758 - books.google.fr).

 

Des intérêts plus importants avoient fait laisser l'affaire de la succession de Clèves, de Berg et de Juliers, dans l'état d'indécision où elle étoit sous le règne de Mathias. Elle parut s'arranger en 1650, époque où les troupes étrangères évacuèrent les places fortes du pays. Le prince de Neubourg se mit en possession de Berg et de Ravenstein; et Frédéric-Guillaume, électeur de Brandebourg, occupa les duchés de Clèves, et les comtés de la Marck et de Ravensberg. Ce partage entre deux princes qui aspiroient à toute la succession, ne pouvoit contenter ni l'un ni l'autre. Quoiqu'il eût été convenu entr'eux que la religion resteroit dans l'état où elle se trouvoit en 1612, ou avant les troubles, et que la paix de Westphalie eût confirmé les stipulations 1648–1657. de ce genre, le prince de Neubourg voulut, à la faveur de l'article qui indiquoit l'an 1624, pour l'année définitive en général, rétablir le culte catholique partout où il avoit été exercé. L'électeur de Brandebourg, saisissant ce prétexte avec empressement, réclama l'exécution des conventions particulières. Espérant être soutenu par les Provinces-Unies, par la France, par la Suède et par les Protestants d'Allemagne, il entra dans le duché de Berg. Le prince de Neubourg fit des préparatifs pour repousser l'attaque; et le duc de Lorraine, qui étoit dépouillé de ses états, et qui, s'étant mis à la tête d'une armée de mercenaires, cherchoit toutes les occasions qui pourroient lui procurer de l'emploi, vint à son secours. Une contestation de ce genre, dans une conjoncture si délicate, ne pouvoit manquer d'attirer toute l'attention de l'empereur. Désirant avec ardeur d'y mettre fin avant que les puissances étrangères eussent eu le temps d'y intervenir, il fit sommer l'électeur de Brandebourg de retirer ses troupes, et de porter l'affaire devant les tribunaux de l'Empire. Ferdinand ne s'en tint pas là. Il réclama l'intervention des autres électeurs; et ceux de Cologne et de Bavière s'empressèrent, pour soutenir les intérêts de leur religion, de lui prêter l'appui qu'il leur demanda. L'électeur de Saxe même se déclara aussi contre Frédéric-Guillaume. Les dissensions civiles, qui agitoient la France ne permirent pas à cette puissance de faire revivre une querelle, qui ne la concernoit point. La Suède étoit en contestation avec l'électeur de Brandebourg, pour la possession de la Basse-Pomeranie, et le parti qui dominoit en Hollande, refusa de prêter des secours à ce prince, qui renonça, quoiqu'à regret, à cette entreprise précipitée. Il se fit par la médiation des Provinces-Unies et de l'électeur de Cologne, un accommodement (11 octobre 1651) qui confirma les traités de partage et garantit aux Protestants la liberté de conscience que leur avoient promises des conventions particulières faites dans le temps qui s'étoit écoulé entre l'année 1612 et l'année 1647 (William Coxe, Histoire de la Maison d'Autriche, depuis Rodolphe de Hapsburg, jusqu'à la mort de Leopold II (1218-1792), 1809 - books.google.fr).

 

Le pape Innocent avait déjà protesté contre le Traité de Westphalie au sujet de la clause laissant une liberté de conscience relative en Allemagne.

 

Malgré son âge avancé, le duc de Neubourg Wolfgang Guillaume se remaria pour la seconde fois avec une catholique, la comtesse Françoise Marie de Fürstenberg; le pape, auquel il avait demandé sa bénédiction, se hâta de l'accorder, en approuvant ce troisième mariage comme utile aux intérêts de la religion (lettre d'Innocent X du 1er juillet 1651) (Albert Waddington, Le grand électeur Frédéric Guillaume de Brandebourg, Tome 1 : (1640-1660), 1905 - books.google.fr).

 

Contre la volonté de ses parents, luthériens convaincus, Wolfgang-Guillaume (1578 - 1653) se convertit secrètement au catholicisme en juin 1613 et épouse Madeleine de Bavière. La conversion est officialisée et fêtée à Düsseldorf le 15 mai 1614. Dans ses duchés de Juliers et Berg, Wolfgang-Guillaume entreprend la reconquête catholique. Le duc s'appuie sur les ordres religieux et une politique de refoulement des protestants (fr.wikipedia.org - Wolfgang-Guillaume de Neubourg).

 

Jansénius et Neubourg

 

Comme maître d'études les élèves le trouvaient irascible et exigeant, ayant peu de relations avec les autres. Néanmoins, Cornelius Jansen, plus souvent connu sous la forme latine de son nom, Jansénius, né le 28 octobre 1585 à Acquoy (Pays-Bas) et mort le 6 mai 1638, prit une part active dans la résistance de l'Université contre les Jésuites, qui avaient établi leur propre école de théologie à Louvain, et qui se posait en rivale de la Faculté universitaire. Dans l'espoir d'empêcher leurs empiétements, Jansen fut envoyé deux fois à Madrid, en 1624 et 1626; la deuxième fois il échappa de peu à l'Inquisition. Il soutint chaleureusement l'évêque missionnaire catholique aux Pays-Bas, Rovenius, dans ses démêlés avec les Jésuites, qui essayaient de recatholiciser le pays sans tenir compte des vœux de l'évêque (fr.wikipedia.org - Cornelius Jansen).

 

Passé à Paris le 10 mai et arrivé à Louvain le 16, Jansenius lui-même fit le 20 mai devant l'assemblée générale des docteurs de l'Université l'exposé de ses négociations. Il fut chaudement félicité et remercié. On le chargea en outre de correspondre avec les universités espagnoles. Enfin, le 12 juin, la commission lui accorda une gratification de 400 florins : c'était à la fois la récompense de son dévouement et une indemnité pour la perte qu'il avait subie en quittant Lille au moment où il venait d'y louer une maison. Jansenius jouit pendant les mois suivants d'une liberté totale : il en profita pour se consacrer entièrement à l'étude des problèmes de la grâce et pour résider, comme il le souhaitait depuis si longtemps, au logis parisien de Saint Cyran. Cette période enchantée fut interrompue par un incident particulièrement grave de l'affaire des universités. Les Lovanistes n'avaient pas tardé à s'apercevoir que le nouveau péril que Jansénius leur avait annoncé au début de l'année n'avait rien d'imaginaire. Lorsqu'il connut la décision du 3 octobre 1624, le P. de Montmorency, provincial de Flandro-Belgique, avait en effet adressé à Philippe IV un mémoire justificatif. En outre, il chargea de sa cause le P. Rosmer, confesseur du duc de Neubourg. Les démarches de celui-ci auraient pourtant échoué si le Roi n'avait alors appelé auprès de lui son oncle Charles d'Autriche, évêque de Breslau et grand protecteur de la Compagnie. L'Archiduc mourut le 28 décembre 1624, mais il avait eu le temps de plaider auprès de son neveu la cause des Pères de Louvain. Aussi Philippe IV ordonna-t-il le 21 décembre 1624 à Brizuela de rédiger des dépêches qui leur donneraient satisfaction. Le dominicain s'y refusa en faisant remarquer que c'était contraire aux lettres du 3 octobre. Il ne put néanmoins empêcher le duc de Neubourg d'obtenir que le Roi ne recommandât le 19 mars à sa tante les intérêts des jésuites. Pour éviter un mal plus grand, Brizuela proposa donc d'accorder à ceux-ci une leçon extraordinaire de théologie au sein même de l'Université. L'ordre en fut signé le 11 mai 1625 et notifié le 16 septembre aux Lovanistes par l'Infante (Jean Orcibal, Jansénius d'Ypres: (1585-1638), Volume 22 de Collection des études augustiniennes, 1989 - books.google.fr).

 

Pour se défendre des assauts que lui livraient des antithomistes rarement à court d’expédients polémiques, l’ordre de Saint-Dominique pouvait être tenté de se prévaloir du texte du serment que les théologiens de l’Université de Salamanque avaient adopté le 19 juin 1627 – l’affaire avait connu un grand retentissement dans les milieux universitaires européens, et notamment à Louvain, dans la mesure où elle s’était produite au cours du séjour salmantin de Jansénius. Sans entrer dans le détail d’une affaire très complexe, on se borne ici à rappeler que les docteurs de Salamanque entendaient faire promettre – par le serment dont ils venaient de voter l’adoption – aux candidats au doctorat d’enseigner, lors des cours de théologie scolastique, la doctrine de saint Augustin, doctrina Augustini, et les conclusions de saint Thomas, conclusiones Diui Thomæ, obligation dont ils étaient toutefois déchargés s’ils devaient occuper des chaires scotistes ou durandistes. L’objectif était d’écarter les jésuites de la Faculté de théologie de Salamanque. Vaine entreprise, puisque le 7 février 1628, le Conseil de Castille refuse de donner force exécutoire à la décision prise par les docteurs salmantins le 19 juin précédent. L’escarmouche n’en a pas moins durablement marqué les esprits, et ses échos se font encore entendre à Paris, au milieu de la campagne des Provinciales.

 

Dans une querelle de la grâce où les frontières partisanes se sont révélées singulièrement poreuses, la question des rapports entre thomisme et calvinisme a douloureusement hanté les théologiens catholiques. Dans son Dictionnaire historique et critique, dont la première édition paraît à Amsterdam en 1697, le protestant Pierre Bayle (1647-1706) rappelait, peut-être un peu trop vigoureusement, en quels termes se posait le débat : «Tous ceux qui ont un peu de pénétration voient clairement que sur la matière de la liberté, il n’y a que deux partis à prendre : l’un est de dire que toutes les causes distinctes de l’âme qui concourent avec elle lui laissent la force d’agir ou de n’agir pas; l’autre est de dire qu’elles la déterminent de telle sorte à agir qu’elle ne saurait s’en défendre. Le premier parti est celui des molinistes, l’autre est celui des thomistes et des jansénistes, et des protestants de la confession de Genève. Voilà trois sortes de gens qui combattent le molinisme, et qui dans le fond ne peuvent avoir là-dessus que le même dogme.» (Sylvio Hermann De Franceschi, L'empire thomiste dans les querelles doctrinales de l'âge classique Le statut théologique de saint Thomas d'Aquin au XVIIe siècle, Dix-septième siècle n° 247, 2010 - www.cairn.info).



[1] La Sainte Bible, traduite par Louis Segond, La Maison de la Bible, Genève, 1968

[2] ibid.

[3] Giambattisti Pamfili

[4] Jacques Attali, « Blaise Pascal Â», Fayard, 2000, p. 230

[5] Blaise Pascal, « Les Provinciales Â», Maxi-Poche, 1998, p. 90

[6] Jacques Attali, « Blaise Pascal Â», Fayard, 2000, p. 226

[7] P. Etienne-Will, L’Histoire n° 78, p. 39

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