Pape et Tsar II, 93 1699-1700 Bien prés du Tymbre presse la Libitine, Un peu devant grande inondation : Le chef du nef prins, mis à la sentine : Chasteau, palais en conflagration. Libitina : la déesse romaine de la mort Le quiétisme de Michel Molinos avait été condamné par
Innocent XI. Il pénétra en France avec une illuminée, Mme Guyon, qui exerça son
influence sur FĂ©nelon. Celui-ci publia en 1697 ses RĂ©flexions sur les maximes
des saints, d'un quiétisme modéré, assez hétérodoxe pourtant. Bossuet, après un
avertissement à son confrère, porta sur l'ouvrage un jugement sévère, qu'il fit
parvenir Ă Rome. Par un bref du 12 mars 1699, Innocent XII condamna l'ouvrage
de Fénelon, qui se soumit. Malgré ce zèle qui appartenait à sa fonction,
Innocent XII adopta envers les auteurs simplement suspects d'hétérodoxie une
attitude modérée. En 1694, il adressa à l'archevêque de Malines un bref où il
ordonnait de ne pas inquiéter les personnes qui faisaient l'objet d'accusations
vagues de jansénisme et d'hérésie. Le
pontificat d'Innocent XII fut attristé par de nombreuses calamités naturelles :
la peste, l'inondation du Tibre et surtout un tremblement de terre qui
détruisit Bagnorea, Celano,
Orvieto, Asolo Innocent XII, Ă©lu pape en 1691 et mort le 27 septembre 1700,
fit ouvrir, par le cardinal de Bouillon, alors sous-doyen du sacré collège, la porte Sainte de la basilique
Vaticane le 24 décembre 1699 pour le jubilé de 1700, fermé par Clément XI.
Le seul hospice de la Trinité reçut en cette année trois cent mille pèlerins. Semblable
à Innocent XI, dont son pontificat n'était séparé que par une année et demie,
Innocent XII se montra le père commun de la chrétienté, par son admirable
sollicitude pour les indigents, par son zèle pour les fondations pieuses, enfin
par la charité active qui le faisait intervenir partout où il y avait des
irritations à calmer, des rapprochements à opérer. Une inondation du Tibre et un tremblement de terre ravagèrent Rome sous
ce régne. Innocent XII sembla se multiplier pour
venir au secours de toutes les infortunes et relever toutes les ruines Pour jouir du bénéfice du jubilé universel les fidèles
doivent remplir certaines conditions, au nombre desquelles figure la visite des
basiliques de Rome. Boniface VIII désigna celle de Saint-Pierre et celle de
Saint-Paul; Clément VI y ajouta celle de Saint-Jean de Latran, et Grégoire XI
celle de Sainte-Marie Majeure. C'est
pour cela que ces quatre basiliques possèdent une porte appelée sainte parce
qu'elle ne s'ouvre que dans l'année du jubilé. Depuis le quatorzième siècle,
ces quatre basiliques ont été constamment désignées pour être visitées.
Toutefois, en 1625, à cause de la peste qui désolait Rome, et en 1700, à cause
d'une grande inondation, couvrant la route d'Ostie, l'Ă©glise de Sainte-Marie au
Transtévère fut substituée à celle de Saint-Paul. Il
en fut de même en 1825, après l'incendie qui avait détruit la basilique de Saint-Paul Libitina n’aurait été, en fait,
pas une déesse, mais une figure créée par les spéculations des antiquaires
romains sur un espace destiné aux fonctions funéraires (libitina).
Et cet espace a tiré son nom du
voisinage d’un temple de Vénus Libitina ou Lubentina, situé devant la Porte Esquiline Le Mont Esquilin,
aujourd'hui le mont de Ste-Marie-Majeure du nom de la basilique qui y est
bâtie, une des sept colline de Rome, au S. du
Quirinal, au N. du mont Caelius, fut renfermé dans la ville par Tullus Hostilius. C'est là qu'un
exécutait les criminels. Il donnait son
nom Ă la Porte Esquiline aujourd'hui la Porte
Saint-Laurent "sentine" Pierre Ier, connoissant
l'ignorance des troupes russes, tâcha, suivant le conseil de son favori, le
baron Le Fort, d'attirer dans son service des officiers Ă©trangers, pour former
ses troupes de terre et de mer aux manœuvres et aux évolutions de celles des
autres nations, et pour rendre par lĂ les siennes
plus redoutables. Dans ce nombre se trouvoit Charles-Eugène, duc de Croy,
prince du saint-empire romain, marggrave de Monte Cornetto, baron de Mûllendonk,
etc. Il fut le premier à dresser la milice russe; mais son travail n'étoit pas achevé lorsqu'on le fit prisonnier, le 30 janvier
1702, Ă la bataille de Narva, et, retenu comme tel dans la ville de Reval
[Tallinn en estonie], il y mourut de chagrin. Il eu tpour successeur
Georges-Benoit, baron d'Ogilvy; mais celui-ci ne pouvant supporter la hauteur
de Menzikoff, dont il connoissoit
la naissance aussi bien que l'incapacité, eut son congé et mourut à Danzik. Pierre Ier eut encore Charles, baron de Rœnne, d'une ancienne famille noble de Courlande, les
généraux Gordon, Anglois, le baron Henri de Golze, les généraux Janus, Allard, Bauer, le comte de Mûnnich, etc. Quant
aux officiers de la marine, aucun ne se montra plus habile et plus expérimenté
que Corneille de Cruys, amiral de la flotte russe et
vice-président du collège de l'Amirauté; c'est à lui que la marine de cet
empire doit tout ce qu'elle est. [...] L'amiral Cruys
mit en peu de tems la flotte russe en état de se mesurer avec la suédoise,
quoique beaucoup plus ancienne et beaucoup plus redoutable, et mĂŞme Ă son
avantage, comme cela arriva en 1705, lorsqu'elle fut attaquée entre l'île de Retusari et de Cronstatt, par
l'amiral Ankerstierna, à trois différentes reprises
et toujours en vain. [...] Comme c'Ă©toit un homme
franc et ouvert, il avoit beaucoup Ă souffrir de
l'amiral Apraxin, qui commettoit
beaucoup de fautes sans le vouloir; Cruys lui en
parla sérieusement à sa façon, et lui dit sans détour ce qu'il pensoit. Cela choqua l'amiral, qui jura sa perte. [...]
Ayant eu le malheur de perdre quelques vaisseaux en 1713, dans la Balthique, par un coup de vent furieux, Apraxin
ne manqua pas de dire au zar que c'étoit par sa faute. Celui-ci, fatigué déjà de plusieurs
autres imputations, ordonna une commission pour le juger, dont Apraxin étoit président : on pouvoit bien s'attendre à la sentence qu'elle rendit, ce ne
fut pas moins que de perdre la vie, mais Pierre Ier voulut bien la commuer en
prison perpétuelle et le reléguer à Casan. [...] Son
exil ne dura que treize mois, car dans ce court intervalle il arriva de si grands
désordres dans la flotte et sur les chantiers russes, que Pierre Ier sentit
bien qu'il avoit éloigné un homme qui lui étoit indispensable et le seul capable de conserver l'ordre
dans sa marine. Il le rappela donc. [...] Cet excellent homme resta chef de la
flotte jusqu'Ă sa mort, qui arriva le 14 juin 1727, le jour de sa naissance Croy ou Cruys,
la sentine est peut-être une image navale de la défaite et de la prison pour le
premier, et la disgrâce (momentanée) pour le second. On sait que le genevois François Lefort passe pour avoir
créé la flotte russe, dont il a été le premier amiral. Son ancêtre Jean-Antoine
Lifforti, de Coni (Cuneo) en Italie (Piémont), s'exile
en Suisse pour cause de réformation. Ce dernier est inscrit comme élève dans l'acaémie de Calvin en 1539 L'école navale fut fondée en 1701. Les élèves étaient
souvent envoyés à l'étranger afin d'étudier la pratique de la navigation et
recevaient une formation dans les flottes étrangères "Croy je" Dès le XVIe siècle, les tournures suivantes sont en voie
de lexicalisation : Ce crois-je connnaît 3 graphies
concurrentes : ce crois-je, ce croy je, ce croy-je. L'on relève 6 exemples de ce crois-je, dont 4 dans
les Essais de Montaigne : je consentirois plustost, ce crois-je, de perdre la veuë
que l'ouir ou le parler. (III, 8, p. 922 B) ; Ce croy je apparaît une fois chez
Rabelais : Vous n'y viendrez pas, ce croy je. (TL,
30, p. 447). Ce croy-je est
présent 19 fois dans Frantext, dont 8 fois chez
Montaigne et 3 chez Du Bellay : Tu me croiras (Ronsard) bien que tu sois plus sage,
/ Et quelque peu encor (ce croy-je)
plus aagé, (Du Bellay, Les Regrets, 26, v. 5-6) De fait, l'addition de signes la plus riche et fructueuse
est sans doute celle Ă laquelle se livre Panurge au moment oĂą il sort de la
cale du navire tout «embrené». Alors que la peur est incontestablement Ă
l'origine de cette lamentable situation, visible et odorante pour tous les
témoins, Panurge s'efforce de modifier cette interprétation en révisant les
signes qui l'ont provoquée. A défaut de pouvoir agir sur l'interprétation, par
une lecture différente, et faute de pouvoir modifier le réel, qui s'impose à la
perception de ses compagnons, Panurge agit sur les signes: il les renomme, de
façon à pouvoir, par conséquent, transformer l'interprétation première. [...] L'énoncé
premier est le suivant: «sa chemise estoit toute foyreuse et embrenée de frays»
(Q67, 698). Il s'agit d'une description par le narrateur de ce qui est visible.
Or, Panurge prend la parole pour modifier la lettre du visible: «Que Diable est
cecy ? Appelez-vous cecy...
C'est (croy je)... C'est...» (Q67, 701). Il semble,
vu l'usage du verbe «être» qu'il redéfinisse le réel. Le signe s'enfle des
étranges précisions qui viennent ainsi se greffer sur lui. Ces ajouts sont
personnels, et s'organisent en une progression cumulative qui tend vers un objectif Le château-palais :
l'incendie du Kremlin Conflagration , incendie. II,
149; III, 63 ; Conflagrer, brûler, être en feu. V, 178 La position générale de Moscou rappelle singulièrement
celle de Prague. La Moskva traverse l'ancienne
capitale russe comme la Moldau l'ancienne capitale bohĂŞme, et par une inflexion
semi-circulaire toute semblable. Dans l'une et dans l'autre, la rivière baigne,
sur la rive du nord, le pied de la colline que couronne le vieux château-palais, appelé Kremlin ici, et là Hradschin Sanctuaire religieux de la Russie, le Kremlin de Moscou
est aussi, en quelque sorte, son sanctuaire politique. Il réunit tous les vieux
souvenirs de son histoire, jusqu'Ă l'Ă©poque oĂą, par une secousse gigantesque,
Pierre le Grand fit entrer la Russie dans l'Europe. On ne sait rien de précis
sur l'origine du Kremlin, ni.mĂŞme sur l'origine et le
sens de son nom (kreml), que certains étymologistes font dériver de krem, pierre. Ce nom d'ailleurs ne lui est point particnlier; il y a d'autres kreml en Russie; Kasan a sou kreml, Toula aussi, d'autres villes encore.
Kreml est donc sans doute un nom plus général, comme, par exemple, celui
d'Alcazar (El-Kasr) que les Arabes ont tant répandu
en Espagne, et qui signifie un palais fortifié. Le Kremlin n'est pas autre
chose qu'un alcazar, une forteresse qui renferme et protége,
avec la résidence du souverain, tout ce que la nation a de plus cher et de plus
sacré. Près des temples et des images que je viens de citer sont des reliques
d'une autre espèce. Voilà le vieux palais des czars, non moins étrange et non
moins bariolé, de ses fondations jusqu'au faîte des coupoles, que l'église
Saint-Basile; voilĂ le vieux palais des patriarches, oĂą se conservent encore
tous les actes et tous les livres du saint synode ; voilà le sénat de
l'arsenal; voilà le Trésor ou palais des armures (Oroujéinaïa
palata), dans lequel vingt salles sont encombrées des
objets les plus précieux par la matière, le travail ou les souvenirs qu'ils
rappellent, des trĂ´nes, des sceptres, des couronnes, des bijoux, des armes, des
armures, des drapeaux, des croix, des crosses, des bâtons de commandement. On
trouve là , parmi d'autres curiosités, le sceptre et le globe qu'envoya, dit-on,
l'empereur Alexis Comnène à l'un des grands-princes moscovites, Vladimir Monomachos; le trône dlvaa III,
celui de Boris Godounoff, celui des deux fils
d'Alexis, Ivan et Pierre; les couronnes des royaumes de l'Asie ct de l'Europe
annexés à la Russie, les habits que Pierre le Grand portait à Pultava et le brancard sur lequel on promenait Charles XII
à cette bataille, qui décida entre les deux rivaux, etc. Il y a en Europe beaucoup plus de cloches célèbres qu'on
ne serait porté à le penser quand on n'a pas étudié l'histoire des cloches. De
toutes ces cloches, la plus grosse, la plus lourde et par conséquent la plus
fameuse, est la cloche de Moscou, surnommée la reine îles cloches. En effet, cette cloche, coulée en 1733 par
les ordres de l'impératrice Anna Ivanovna pour remplacer celle du czar Alexis Mikaïlovitch, brisée lors de l'incendie du Kremlin, en 1701,
a 20 pieds 7 pouces de hauteur sur 22 pieds 8 pouces
de diamètre, et elle pèse 12,000 pouds, soit 216,000
kit. Aussi n'a-t-elle jamais été suspendue dans un clocher. Un incendie en a
fait éclater un morceau, et ce n'est qu'en 1856 qu'un architecte français, M.
de Montferrand, est parvenu à la placer sur un piédestal octogone en granit au pied
de la tour d'Ivan Veliki. Ce monument, haut de 11
mètres, est une des curiosités du Kremlin de Moscou Après l'incendie
de Moscou en 1701, il fit construire l'Académie d'«Etudes mathématiques et de
Navigation»; il interdit de construire des maisons de bois. Partout s'élevèrent
des immeubles en pierre; on ne pouvait plus construire n'importe oĂą et
n'importe comment. Il s'agissait de construire à «l'occidentale». Une
planification rigoureuse fait disparaître les vieilles rues et donne naissance
Ă des boulevards rectilignes. Un nouvel arsenal est construit au Kremlin; le
premier journal russe apparaît : les Vedomosti (les Nouvelles) en janvier 1703 Acrostiche "libitina"
et "sentina" se trouve dans un poème en
latin du Moyen âge écrit par Galtz (Galli) de
Rouffach (Rubeancensis) en Alsace acrostiche formant
"Cathrina" : "Nos de sentina mundi, mortis Libitina" Sainte Catherine fait penser aux Catherine russes, femme de Pierre Ier et la Grande. Ce qui donne l'idée de lire "BULC" dans l'acrostiche du quatrain. BULCOGLI, Fils de Bulc. Les Turcs appellent ainsi dans leurs histoires, les
Despotes de Servie, à cause que le premier, qui obtint cette Principauté
d'Estienne Roy de Bulgarie, se nommoit Eleazar ou Lazare, fils de Bulc.
C'est aussi par la même raison qu'ils les appellent Laáz
ou Lazares du nom de ce premier Prince, de mĂŞme
qu'ils ont accoûtumé d'appeller
Constantins tous les Empereurs de Constantinople avec
lesquels ils ont eu des affaires. Ce Bulcogli ou Laaz, premier Despote ou Prince de Servie, fut celui qui
présenta bataille dans la plaine de Cosova à Amurath, premier du nom, troisième Sultan des Othomans, l'an de l'Hegire 791,
de J. C. 1388, & qui fit tuer ce Sultan dans sa propre tente, par un de ses
domestiquas, qui s'étoit retiré comme transfuge dans
le camp des Turcs: mais la mort d'Amurath ayant été
cachée, Bajazet, premier du nom, son fils, s'étant mis à la tête de l'armée Othomanne, defit l'armée du
Despote, le fit prisonnier, & tailler en pieces
en sa présence. Les Historiens Grecs & Latins appellent ce Despote Bulcovitz, nom qui signifie en langue Esclavonne la même
chose que Bulcogli en Turc Pour Bajazet fils d'Amurath cf.
quatrain VII, 13. Pierre Ier introduisit le calendrier julien, le 1er
janvier 7208 devenant ainsi le 1er janvier 1700, simplifia l'alphabet
cyrillique en "alphabet civil" (grazdânskij
srift) remplaça le patriarcat par le saint-synode.
C'était en fait soumettre l'Église au pouvoir temporel. Lorsqu'il tournait son
regard vers l'Occident, Pierre le Grand voyait deux Europe : d'un côté,
l'Europe méditerranéenne et catholique dans les salons de laquelle régnaient
bonnes manières et culture raffinée ; de l'autre, l'espace germanique, et plus
puritain, de mœurs moins policées et de mentalité plus fruste. C'est auprès de
cette seconde Europe que la Russie entra en apprentissage. Le tsar était un représentant de cette Fachlichkeit
allemande, mentalité qui ne montrait que mépris pour l'étiquette en usage dans les pays latins La Serbie se trouve à la frontière du monde catholique
(Croates, et "Tymbre"). DĂ©jĂ en 1700, un Ă©vĂŞque catholique, Ambroz
Kuzmic, Ă©crivait au pape au sujet des Serbes
orthodoxes : «Il vaut mieux tous les (Valaques) égorger que les nourrir», recommandait-il |