Capitole

Capitole

 

IX, 9

 

2110

 

Quand lampe ardente de feu inextinguible,

Sera trouvée au temple des Vestales :

Enfant trouvé, feu, eau passant par crible

Nisme eau périr, Tholose cheoir les hales.

 

Lauragais, pays de Cocagne

 

Le temple des Vestales a été située en Languedoc à Saint Michel de Lanès (Aude) dans les quatrains II, 17 et V, 66.

 

La cour de retour de Bayonne, passera par Toulouse, Villefranche (27 décembre 1659), Castelnaudary (29 décembre), Carcassonne (30 décembre), Béziers, Montpellier, Lunel, Nîmes (9 janvier)... (Mémoires du Marquis de Monglat, Tome III) (Collection des mémoires relatifs a l'histoire de France, depuis l'avénement de Henri IV, jusqu'a la paix de Paris, conclue en 1763, Tome 51, 1826 - books.google.fr, Christophe Levantal, Louis XIV voyageur, 2019 - books.google.fr).

 

Les Enfants trouvés sont une institution fondée par Vincent de Paul en 1638, date de naissance de Louis XIV, qui atteint sa majorité en 1651 : cf. quatrains II, 7 - 1636 et III, 42 - 1735 (Le siècle de Louis XIV). Pierre Jean Fabre (cf. quatrain V, 66) fut médecin de Louis XIII.

 

Le 5 juillet 1622, Louis XIII, venant de Toulouse, s'arrête à Castelnaudary où, étant souffrant, il reste quelques jours. Il est soigné par les trois médecins de Castelnaudary, parmi lesquels Fabre. Par la suite, Fabre fut appelé à la Cour et devint médecin particulier du roi, auquel il dédia son premier ouvrage, le Palladium Spagyricum, imprimé à Toulouse en 1624 (Bernard Joly, La rationalité de l'alchimie au XVIIe siècle, 1992 - books.google.fr).

 

Ce fut entre 1460 et 1562 que se situa l’âge d'or du pastel en Lauragais. Les feuilles de pastel cultivé, donnaient des teintures d'un bleu indélébile. Le meilleur produit provenait du Lauragais. Au milieu du XVIe siècle, l'économie du pastel se trouva aux prises de trois ennemis dont les coups se révélèrent mortels. Le premier ennemi fut l'épisode de la guerre de Religions. Les impôts et les péages assénèrent un second coup à la culture du pastel. Enfin le troisième, danger mortel celui-ci, fut l'indigo, de l'Indigotier qui poussait en Asie et aux Antilles. Beaucoup moins cher que le pastel du Lauragais, son pouvoir colorant était nettement supérieur. Le déclin du pastel fut rapide. Dés 1618 le député de Toulouse aux État signala que "l'usage du pastel s'en va tout à fait ruiné". (sgdelestaing.pagesperso-orange.fr).

 

Toulouse a eu la bonne fortune aux XVe - XVIe siècles d'avoir le quasi-monopole du commerce du pastel. Celui-ci, cultivé en Lauragais, trouvait à Toulouse le marché qui lui était convenable. Or le pastel était un produit d'exportation lointaine. C'est dire que la capitale du Languedoc avait dès ce moment la puissance de rayonnement économique qui devait assurer sa fortune. Si l'on observe d'autre part, que la ville à cette époque, continuant sa glorieuse tradition architecturale, s'est peuplée d'hôtels particuliers qui lui font encore aujourd'hui une magnifique beauté, on ne peut douter de la solidité et de l'ampleur de sa richesse. Les somptueuses demeures des Parlementaires, des Capitouls, des marchands attestent l'opulence d'une bourgeoisie qui volontiers prenait la robe, mais dont la fortune venait de la boutique. Les rues mercantiles spécialisées, la vieille halle de pierre où se faisaient une bonne part des transactions sur les produits régionaux : le pastel, les grains, les cuirs, ont été vraiment à cette époque le coeur de la cité. C'est sur le commerce qu'elle a fondé son prestige, même le plus désintéressé d'apparence (E. Sviatlowsky, Centrographie et géographie des villes, Comptes rendus du Congrès international de géographie, Varsovie, 1934, 1937 - books.google.fr).

 

Au début des années 1560, l'effondrement du marché du pastel et le déclenchement des guerres de Religion mettent brutalement fin au "siècle d'or" de l'histoire toulousaine (Toulouse, parcelles de mémoire: 2000 ans d'histoire urbaine au regard de 8 siècles d'archives municipales : exposition, 5 décembre 2005-6 mars 2006, 2005 - books.google.fr).

 

Les troubles allumés un peu partout en France par des traités précaires trouvent leur écho à Toulouse où exactions et procès se succèdent jusqu'au mois de mai 1562, la violence explosant alors en combats de rues dans une sinistre atmosphère de guerre civile. Fortifiés autour du Capitole et dans son quartier qu'ils ont pris, les huguenots abattent au canon la flèche des Jacobins, saccagent couvents et églises qui se trouvent à leur portée, tandis que les catholiques, "en aussy grande liberté de de conscience que les huguenots mesmes" allument dans le quartier de la place Saint-Georges, un gigantesque brasier de deux cents maisons. On tuait encore en janvier 1589 - un mois après la Saint-Barthélemy 150 protestants ont été massacrés - le premier président Jean Duranti faisant les frais du fanatisme aveugle des Ligueurs, et ce, malgré les venues successives et conciliatrices de Charles IX (1565) et de Catherine de Médicis (1578) (Pierre Coulaud, Henri Rozès, Toulouse, Haute-Garonne (31), 1972 - books.google.fr).

 

Le retournement de la conjoncture et les troubles politiques et religieux provoquent l'abandon de projets importants, comme celui de reconstruire le palais du parlement sur les plans de Bachelier, et plusieurs interruptions du chantier du pont Neuf. Le rétablissement de la paix civile en 1596 ne ramène pas la prospérité d'autrefois. Victime de graves crises de subsistances, de dramatiques épidémies de L'Ancien Régime (16 - 18 siecle) peste et de l'alourdissement massif de la fiscalité royale, Toulouse connaît jusqu'à la fin du règne de Louis XIV une longue période de déclin économique et de stagnation, voire de recul démographique (Toulouse, parcelles de mémoire: 2000 ans d'histoire urbaine au regard de 8 siècles d'archives municipales : exposition, 5 décembre 2005-6 mars 2006, 2005 - books.google.fr).

 

Jusqu'à la Révolution, en effet, sa population diminuée et appauvrie par les épidémies et les disettes, son commerce stagnant - le pastel ne se vend plus - ses moeurs changées, Toulouse sombre dans la morosité et la torpeur économique, malgré la dotation par Colbert de deux manufactures d'Etat, poudres (1667) et tabacs (1674) et la fondation en 1703 de sa Chambre de Commerce (Pierre Coulaud, Henri Rozès, Toulouse, Haute-Garonne (31), 1972 - books.google.fr).

 

Avec l'annexion du Roussillon à la France par le Traité des Pyrénées en 1659, l'histoire militaire de la région audoise prenait fin pour une longue période. Sous le règne personnel de Louis XIV, l'autorité royale, devenue très forte, s'imposa aussi bien aux états qu'aux villes. Et le Languedoc bénéficia largement des réformes économiques entreprises par Colbert : à partir de 1666 commencèrent les travaux du Canal de Languedoc, et vers la même époque s'établit le système des manufactures privilégiées qui assurèrent à la région audoise un extraordinaire développement de l'industrie textile (sgdelestaing.pagesperso-orange.fr).

 

Isatis tinctoria fut plusieurs fois baptisée : guesde, herbe du Lauragais ou de saint Philippe, ververs, bleu de Perse... Les Égyptiens l'utilisaient comme baume cicatrisant, les Grecs s'en servaient pour soigner la jaunisse et les verrues. Au Moyen Age, elle servit de colorant pour les vêtements des simples (blouses de paysan) comme pour ceux des grands (manteau azur du souverain). La plante aux cent vertus exigeait un travail long et pénible avant de devenir pastel. Il fallait sécher les feuilles, les réduire en bouillie, recouvrir la pulpe d'ail pilé et fabriquer des cocagnes. Ces petites pelotes gluantes étaient alors mises à sécher, leurs coques étant par la suite brisées puis remouillées à l'eau et à l'urine. Ce liquide devait ensuite macérer pendant quatre mois tout en étant remué régulièrement. Finalement, après séchage et concassage, l'agranat était emballé dans des sacs de toile et expédié, à Toulouse et ailleurs. La plante a fait la fortune d'une région tout entière en teintant d'un bleu unique les étoffes jusqu'au XVIe siècle, terrible date où l'indigo débarqua de l'Orient pour lui faire ombrage. Tombé dans l'oubli jusqu'au XIXe, le pastel fait un retour fulgurant grâce, entre autres, à l'École de chimie de Toulouse. On songe d'ores et déjà à utiliser à nouveau cette plante magique en pharmacie comme en cosmétologie. L'or bleu refleurira-t-il en pays de Cocagne ? (Albi - Tarn 2017/2018, Petit Futé - books.google.fr).

 

Le pastel agranat. - La plupart du temps les grossistes achetaient le pastel sous la forme agranat, c'est-à-dire pétri en boules. Cette présentation avait pour but de rendre le pastel facilement transportable. La feuille, sitôt récoltée, allait à un des moulins spéciaux disséminés dans la campagne et y était broyée. On laissait égoutter un peu la pulpe, et quand elle devenait assez ferme, on la formait en « balles » avec la main, sur une planche. Les boules obtenues, appelées « coques » ou « cocagnes » dans le Midi, avaient un diamètre de 15 centimètres environ. On les faisait sécher à l'air pendant une ou deux semaines et, une fois durcies, les coques, ensachées, se prêtaient facilement au transport. Mais le pastel agranat n'était pas industriellement utilisable. Centralisé chez des spécialistes, il subissait une deuxième préparation qui lui donnait toutes ses qualités tinctoriales, par fermentation. Les coques étaient écrasées, on mêlait d'eau cette poudre, puis on laissait agir les bactéries pendant neuf semaines environ; il fallait agiter cette bouillie fétide, pour égaliser la fermentation, et surtout ajouter de l'eau dès que la température devenait excessive. L'opération passait pour très délicate, nécessitant une attention soutenue et un subtil jugement. On obtenait en définitive un mastic noir, qui était séché, passé au crible et mis en barils marqués. Il avait fallu neuf parts de feuilles pour donner une part de pastel en poudre industrielle. Le terme agranat ne désignerait donc qu'un artifice de transport. Au lieu d'agranatum, M. Fagniez propose de lire agravatum, ce qu'il explique par «pastel vieux», et donc de meilleure qualité. Il avait certainement des raisons particulières pour adopter cette lecture dans le document qu'il a publié. Mais l'étendre à tous les textes languedociens mènerait aux plus vastes conséquences, car cela supposerait que le Midi exportait toujours du pastel fermenté. En effet, seul le pastel ayant subi une préparation intégrale, et apte à l'utilisation immédiate, avait le pouvoir de se «bonifier», grâce à quelques ferments subsistants. Or, toutes les études faites jusqu'à présent, si fragmentaires soient-elles, tendent à montrer que le Languedoc exportait une grande part de son pastel en cocagne, et que les pays usagers, notamment l'Angleterre, le faisaient fermenter chez eux. C'est encore un nouveau retard technique par rapport à la Thuringe, qui vendait toujours son pastel préparé (Annales du Midi: revue archéologique, historique, et philologique de la France méridionale, Volumes 13 à 16, 1951 - books.google.fr).

 

A son château de Saint-Michel, début mai 1579, Pierre de Cheverry «général des finances du roi en la province de Languedoc et généralité de Toulouse», recevait Catherine de Médicis, lors de son voyage de conciliation en France en 1578-1579. Le pastel fit la fortune de trois Basques de Bayonne, les frères Cheverry (Etcheverry) : le premier, commerçant à Rouen; le second, Jacmot (Jacques), mêlé à la bourgeoisie bayonnaise; le troisième, Jean, né à Bayonne, épousa une fille Lancefoc, d'où deux enfants, deux filles : l'une épousa Pierre d'Assézat en personne ! Jean Cheverry commerçait jusqu'à Burgos ou la Zélande, et tout particulièrement avec Saint-Sébastien, Pampelune ou Saragosse. Il acheta une propriété à Anglet, vendit ses biens en Normandie, fut capitoul en 1535-1536 et mourut en 1555. C'est le père de Pierre dont le fils, Charles de Cheverry, chevalier et baron de Saint-Michel de Lanes, est trésorier et président du Bureau des finances en Languedoc (Pierre Cuzacq, sur "Le commerce du pastel et de l'épicerie à Toulouse (1450-1561)" de Gilles Caster, Bulletin de la Société archéologique, historique, littéraire & scientifique du Gers, Volumes 64 à 65, 1963 - books.google.fr).

 

La finalité éliminera encore l'âge d'or, fréquent dans la littérature de l'antiquité ou de la Renaissance. Ce modèle relève en effet d'une pensée théologique, il est nostalgie d'un temps d'avant la décadence et la chute, d'un âge de communion avec la nature et les dieux, mais son existence dépend de l'observance de la loi fixée par la divinité : la faute d'Eve ou de Pandore ["don de tout" : cf. quatrain II, 17] le fait irrémédiablement disparaître, puisqu'il s'agissait d'un monde donné à l'homme et non édifié par lui. Comme l'explique C.-G. Jung, sa tendance est en fait régressive : il est l'extrapolation du retour au sein maternel, loin des frustrations et des impuissances de l'âge adulte. Etiologique, il explique, sur le plan du mythe, le malheur présent de la condition humaine, alors que l'utopie, positive. regarde vers l'avenir; il est rêve de bonheur individuel, quand l'utopie propose l'organisation d'une société heureuse fondée sur la perfection institutionnelle. En bonne logique, l'utopie ne peut apparaître qu'après la perte de l'âge d'or, puisqu'elle en constitue un substitut humain, représentation d'une félicité obtenue malgré la chute et volonté de modifier le cours de l'histoire. Les mêmes motifs excluront le pays de Cocagne, procédant d'un identique réflexe compensatoire, mythe consolateur du paysan affamé. Ici encore, nous sommes loin de la construction utopique. Cocagne détruit les refoulements, affranchit de toutes les censures, satisfait une jouissance individualiste et anarchique dans un pays sans lois ni gouvernement et surtout, quand l'utopie se donne pour une histoire parallèle, alternative, Cocagne se situe, à la manière du conte de fées, dans une métahistoire impossible. Comme dans l'âge d'or, l'abondance est offerte sans participation humaine, elle est un donné, non une conquête. Cocagne est peut-être l'idéal du «serf surchargé de besogne», mais ce n'est pas pour autant une «utopie populaire» : la différence n'est pas dans une question de niveau ou de classe, mais dans l'intention constructive. Cocagne et âge d'or supposent un monde tout fait, un cadeau à l'homme, alors que l'utopie représente un monde à bâtir sans intervention extérieure. En quoi elle se distinguera aussi du millénarisme, attente d'un royaume dans l'édification duquel la volonté humaine n'a point de part; l'utopie n'est pas la Terre promise. Des raisons semblables excluront enfin l'Arcadie, Cocagne courtois et élitiste, cadre pastoral et champêtre qui est rejet de la cité et de l'organisation sociale, repli et renoncement: L'Astrée d'Honoré d'Urfé fait l'apologie d'une noblesse de cour et constitue l'évasion bucolique d'une génération lasse des troubles et des guerres (Raymond Trousson, D'utopie et d'utopistes, 1998 - books.google.fr).

 

Toulouse

 

En 1651, la muraille du Logis de la Halle s'écroula, mais on attendit pour la faire reconstruire, de connaître les intentions des commissaires de l'œuvre du pont, qui devaient prendre une partie de la Halle pour l'édification des maisons de la place du Pont ; en 1659, en effet, une partie fut démolie, et, en 1662, le buste d'Henri IV et ses trophées furent transportés sur la façade de la maison joignant le pont. En 1680, la réédification de la Halle n'était pas encore terminée (Jules Chalande, Histoire des rues de Toulouse, Mémoires de l'Académie des sciences, inscriptions et belles-lettres de Toulouse, 1918 - books.google.fr).

 

Nîmes

 

La question de l'eau était cruciale et la population vivait au rythme des excès du climat méditerranéen, aux prises avec l'alternance éprouvante des sécheresses et des inondations, des crues et des étiages de la source vauclusienne et de la nappe phréatique. La ville avait beau revendiquer l'héritage antique et compter le pont du Gard dans ses merveilles touristiques, le réseau d'adduction d'eau romain était oublié depuis bien longtemps et elle n'avait même pas idée au XVIIe siècle de l'existence du bassin d'arrivée des canalisations antiques. Par contre, son sol était truffé de points d'eau. De nombreuses maisons disposaient d'un ou plusieurs puits particuliers creusés au milieu de la cour ou du jardin ou bien ménagés directement dans la cuisine ou la boutique pour les habitants des rez-de-chaussée, les autres s'approvisionnant au puits commun cerné par les pièces d'habitation. Avec le partage de l'entrée, le droit de puisage ou le simple droit de passage pour accéder au puits resté indivis constituait la servitude majeure pesant sur la propriété des immeubles. [...] (Line Teisseyre-Sallmann, Métamorphoses d'une ville: Nîmes de la Renaissance aux Lumières, 2009 - books.google.fr).

 

Désarmés devant la promiscuité et la pollution du centre, les Nîmois vivaient les faubourgs comme une bouffée d'oxygène. Ils avaient pris l'habitude de sortir des murs pour aller prendre le frais du côté des jardins les soirs de printemps, sans parler des nuits caniculaires de l'été, où ils guettaient le moindre souffle. Les consuls résolurent de suivre l'inclination de la communauté et d'aménager le lieu préféré de la sociabilité urbaine. Le 1er avril 1643, le conseil décidait de nettoyer et de transformer le plan situé devant la porte de la Couronne. [...] Le résultat fut si concluant que les consuls décidèrent d'étendre les plantations aux parages de toutes les autres portes. Cette extension à l'ensemble de la périphérie urbaine est importante, dans la mesure où c'est le seul moment, cours de l'époque moderne, où la municipalité donne le sentiment d'avoir une vision globale de la ville et de son aménagement. [...] Les environs de la Fontaine firent l'objet d'un traitement spécial. Au sortir de la porte de la Bouquerie, se rejoignaient deux allées d'ormes. L'une bordait le chemin qui conduisait à la source et une muraille devait le protéger des eaux, qui coulaient des biefs des moulins, l'autre partait en direction de la porte de la Madeleine, où l'on rejoignait le couvent des Récollets par «une belle avenue de plusieurs allées d'ormes». Comme l'auteur des Délices de la France, la population tomba sous le charme et trouva dans ses parages un autre lieu de promenade. «C'est un plaisir de voir le grand nombre des messieurs et des dames qu'il y a au-devant de leur porte le soir pour prendre le frais sous ces agréables ormeaux, qui forment un des plus agréables lieux de la ville et il n'est rien de si charmant que d'entendre les belles voix qui y charment les oreilles.» La population fréquentait aussi la Fontaine, mais celle-ci avait un pouvoir ambigu, attractif et répulsif à la fois. La baignade se terminait souvent en noyade, si bien qu'au XVIIIe siècle la municipalité dut intervenir pour l'interdire. La source était responsable de terribles inondations et le mystère de son origine ne faisait qu'aggraver le trouble. Au-delà de l'aspect bucolique, salutaire ou menaçant, la Fontaine renvoyait l'écho rassurant de la grandeur romaine (Line Teisseyre-Sallmann, Métamorphoses d'une ville: Nîmes de la Renaissance aux Lumières, 2009 - books.google.fr).

 

Après La Grava sul camin, chef d'œuvre du roman réaliste, Jean Boudou change de registre et se renouvelle d'une manière inattendue. Dans La Santa Estèla del centenari (1960), un homme qui nous rappelle Boudou revoit, après une longue absence, la ville de Rodez, où un fou, enfermé à l'hôpital, lui confie des cahiers couverts d'écriture. Le roman sera la transcription de de ces cahiers. Le prétendu auteur - le fou de l'hôpital - Ambrôsi Lorei, est un jeune facteur rural de l'Aveyron, qui, dans ses heures de loisir, compose des vers en patois. Il rencontre Enric Molin, qui lui propose d'aller assister à la Sainte-Estelle d'Avignon commémorant (on est en 1954) le Centenaire du Félibrige. Après toute une série de déboires, y compris la perte du seul exemplaire de ses poésies, Ambrôsi est pris en charge par un vieillard («lo vièlh»), qui l'amène d'abord à Nîmes, où Ambrôsi est témoin d'une scène curieuse - un homme se noie dans une fontaine - puis à Saint-Ferréol, village abandonné dans le Rouergue. Là, Ambrôsi tombe amoureux d'une jeune fille - domestique du Vieux - et ils font l'amour. Le lendemain ils se réveillent dans l'affolement et la consternation. Le Vieux, ingénieur de génie, les a transformés en robots mi-métalliques mi-humains - aujourd'hui on dirait des «cyborgs» - afin qu'en tant qu'espèce nouvelle et supérieure, ils se reproduisent et dominent la planète pour et au nom des des occitanophones. Ambrôsi et Joseta se rebellent. Ambrôsi tue la jeune fille par accident, et le Vieux administre une sorte d'électrochoc au jeune facteur-poète, qui, au réveil, se découvre être le noyé rescapé de la fontaine de Nîmes. On l'enferme dans la maison d'aliénés. Ce récit tout à fait (William Calin, Du réalisme magique dans le roman occitan : lecture subversive de la Santa Estela del centenari de Jean Boudou, Toulouse à la croisée des cultures: actes du Ve Congrès international de l'Association internationale d'études occitanes, Toulouse, 19-24 août 1996, Volume 2, 1998 - books.google.fr).

 

La Fontaine, & le Temple de Diane, ou de Vesta, qui est au dehors de la ville, est ruiné; & il n'y reste plus rien que quelques marques fort augustes de ce qu'il a été. On remarque qu'il y avoit deux rangées de colonnes des deux côtés, d'un ouvrage trés-magnifique. On a voulu dire que la Fontaine, qui est auprés de cét Edifice, servoit autrefois pour purifier les Vestales, & que ce n'est pas une source, mais des eaux conduites par artifice pour l'usage que nous venons de dire, de quoy je me mets fort peu en peine (François-Savinien d'Alquié, Les délices de la France. Avec une description des provinces et des villes du royaume. Enrichis des plans des principales villes de cet estat, Tome 1, 1670 - books.google.fr).

 

Nombreux sont les personnages qui, au XVIIe siècle, ont visité Nîmes; mais rares sont ceux qui y ont étudié autre chose que les reliquats de la civilisation romaine. Qu'ils soient érudits ou profanes, lettrés ou ignorants, ils ne semblent avoir des yeux que pour la ville antique ; ils se pâment d'admiration devant les monuments qu'elle conserve ; ils se complaisent à décrire les Arènes, la Maison Carrée, etc., etc., et tout entiers aux souvenirs du passé qu'ils ressuscitent, ils ne font, à la ville moderne, pas même l'aumône d'un seul mot. [...]

 

Envisagés dans leur ensemble et comparés à ce qu'ils étaient à la fin de du XVIe siècle, les corps de métiers ont subi des changements divers et éprouvé des modifications plus ou moins radicales. Avec les années, les uns ont disparu pour faire place à des créations nouvelles, tandis que d'autres, se confinant dans certaines de leurs attributions, ont donné naissance à de nouveaux corps d'état. Par suite de l'accroissement de la population, accroissement démontré par le relevé des baptêmes, le nombre des artisans s'est notablement accru, mais d'une façon inégale, c'est-à-dire que, suivant les circonstances, il y a eu augmentation pour certaines catégories et diminution marquée pour d'autres. [...]

 

Les corps de métiers plus ou moins récemment établis sont, par ordre d'ancienneté, les horologers (sic), qui vendent et réparent les montres, qui construisent et entretiennent les horloges du Palais et de Hôtel-de-Ville ; les lapidaires, qui vendent des pierres précieuses ; les cruveliers (sic), qui fabriquent les cribles et vendent des parchemins ; les romaniers qui confectionnent les balances et les romaines d'où vient leur nom, et enfin les tapissiers qui, depuis 1650, sont chargés d'ajuster les tours de lit, de revêtir les chaises de cuir, de droguet ou d'autres étoffes, et d'appliquer sur les murs de certaines salles les tapisseries de cuir doré d'Auvergne, d'Aubusson et de Felletin. N'oublions pas les faiseurs de chaises, dont l'industrie va prospérant de jour en jour. A s'en référer aux inventaires, les escabeaux et escabelles ont disparu des maisons particulières, et ce n'est guère qu'à la maison de ville que les représentants des quatre classes continuent à s'asseoir sur des bancs de noyer (Albert Puech, La vie de nos ancêtres d'après leurs livres de raison ou les Nîmois dans la seconde moitié du XVIIe siècle, Mémoires de l'Académie de Nîmes, Volume 8, 1886 - archive.org).

 

Partout on travaillait le bois, mais surtout à Toulouse, qui avait ses tourneurs, à Montpellier, à Nimes (Statuts des tonneliers-broquiers-barraliers de Montpellier, 1603-1610 (Arch. dép. Hérault, C. 2684). - Cruveliers (fabricants de cribles) et chaisiers à Nimes, Puech, op. cit., 1885, p. 178), et dans la région cévenole, où les tonneliers et les barraliers fabriquaient, avec le bois de châtaignier, les cercles de barriques et les vaisseaux vinaires de toute espèce (Prosper Boissonnade, L'état, l'organisation et la crise de l'industrie languedocienne pendant les soixante premières années du XVIIe siècle. In: Annales du Midi : revue archéologique, historique et philologique de la France méridionale, Tome 21, N°82, 1909 - www.persee.fr).

 

"Enfant trouvé", "feu" et "crible"

 

Pas plus que la Flaminica la matrone ne peut être considérée comme une prêtresse du feu ; on ne peut donc expliquer le flammeum comme un voile de consécration au service du foyer sacré. La preuve en est que les Vestales qui, elles, sont, sans doute possible, les desservantes d'un culte du feu public, ne portent pas le flammeum. Il faut donc chercher ailleurs la raison pour laquelle la Flaminica et la uirgo nubens sont enveloppées dans le voile de flamme. Une autre direction s'offre à nous : on sait que, dans un grand nombre de civilisations, le feu passe pour avoir un pouvoir fécondant. G. Bachelard a bien montré cette sexualisation du feu dans les mythes et l'inconscient collectif. Pour M. Eliade, la signification sexuelle du feu est liée à la première technique utilisée pour l'obtenir : le frottement en va-et-vient, qui est à l'image de l'acte sexuel. G. Durand, qui développe la même idée, souligne que beaucoup de légendes traduisent cette sexualisation du feu en situant son origine dans la queue d'un animal (Nicole Boëls, La fiancée embrasée, Hommages a Henri Le Bonniec, 1988 - books.google.fr).

 

Festus rapporte une autre manière d'allumer ce feu. Quand le feu sacré est éteint, dit-il, les vestales percent une table avec un vilebrequin, jusqu'à ce que le mouvement y produise du feu. Une vestale le reçoit dans un crible d'airain et le porte dans le temple. Elles se servaient d'un crible d'airain, parce qu'étant percé de plusieurs trous, il servait à entretenir ce feu par l'action de l'air. Au reste, Plutarque et Festus peuvent tous deux dire vrai, en rapportant les deux manières à des temps différens; car l'invention des miroirs ardeus est due à Archimede, qui florissoit environ 500 ans après Numa. Auparavant, les Vestales se servoient vraisemblablement de la manière rapportée par Festus; mais depuis Archimède, elles se servirent de ses miroirs comme d'un moyen plus noble de rallumer le feu sacré (Plutarque, Les vies des hommes illustres, Numa Pompilius, Tome 1, traduit par Dacier, 1762 - books.google.fr).

 

À Rome, la mythologie, ou plutôt l'histoire, - car Rome a tendance à transformer ses mythes en anecdotes pseudo-historiques -, offre des exemples significatifs du pouvoir fécondant attribué au feu. Frazer avait déjà rassemblé un certain nombre de légendes ayant trait à des naissances miraculeuses qui, toutes, étaient l'Å“uvre du feu divin. Il y a d'abord la version moins connue des origines de Rome qui attribue la naissance de Romulus et Rémus à un génie phallique apparu dans le foyer du roi Tarchetios : le roi ayant ordonné, sur la foi d'un oracle, que sa fille s'unisse au feu divin, dont devait naître un héros au destin exceptionnel, la princesse envoie sa suivante à sa place et c'est celle-ci qui met au monde les jumeaux dans la prison où le roi, furieux, fait enfermer les deux complices. C'est un prodige analogue qui, selon la tradition, serait à l'origine de la naissance du roi Servius Tullius : la servante Ocrisia, alors qu'elle portait les offrandes rituelles au foyer du palais royal, aurait vu dans les flammes une apparition semblable ; sur le conseil de la reine Tanaquil, experte dans l'interprétation des prodiges, le roi Tarquin aurait alors ordonné à Ocrisia de revêtir l'habit nuptial pour s'unir au génie du feu ; c'est ainsi que serait né le futur roi de Rome. Le héros fondateur de Prèneste, Caeculus, passe lui aussi, pour être un fils du feu : la légende veut que sa mère ait été une vierge fécondée par une étincelle du foyer auprès duquel elle était assise. Abandonné par elle, il aurait été ensuite découvert par d'autres jeunes filles, auprès d'un feu dont la fumée lui aurait abîmé les yeux, d'où son nom : Caeculus est un diminutif de caecus. On a visiblement affaire à une synthèse de deux versions différentes d'un mythe unique : l'enfant trouvé auprès d'un feu par des jeunes filles est une variante édulcorée du thème du feu fécondant miraculeusement une vierge. On voit que Rome était familière avec cette mythologie du feu fécondant  (Nicole Boëls, La fiancée embrasée, Hommages a Henri Le Bonniec, 1988 - books.google.fr).

 

Alors que Servius Tullius était enfant, une flamme parut sur sa tête. Tanaquil y vit le présage de la dignité royale et conseilla à son époux de lui donner la même éducation qu'à leurs propres fils. Devenu grand, Servius Tullius épousa la fille de Tarquin l'Ancien (fr.wikipedia.org - Servius Tullius).

 

"eau" et "crible"

 

Les Vestales devaient non seulement tenir la flamme perpétuelle, mais tenir toujours prête pour les res divinae l'eau, pure de la souillure des tuyaux, qu'elles allaient puiser e fontibus et amnibus, aux Camènes et au fleuve le plus proche : le Tibre. Le prétendu miracle de la Vestale Tuccia (Tucia, Tutia) qui, accusée d'inceste, pour prouver sa virginité, rapporta l'eau du Tibre dans un crible, semble témoigner d'une ancienne ordalie des Vestales par le Tibre (Jérôme Carcopino, Virgile et les origines d'Ostie, 1919 - books.google.fr).

 

Puiser ou porter de l'eau dans un crible, étoit un proverbe usité chez les Grecs pour marquer une chose impossible (Les antiquites romaines de Denys d'Halicarnasse, Tome 1, 1723 - books.google.fr).

 

L'événement est situé par Pline en 518 anno Urbis soit en 236 avant notre ère, sous la République.

 

Clélie

 

Les Vestales ont apparemment été popularisées par l'Astrée, car dans la religion mixte du Forez du Ve siècle les vierges druides avoisinent les vierges vestales : le roman de d'Urfé contient en effet 43 occurrences de «vestale(s)», sur un total de 86 pour la période 1600-1670 (dont 13 chez Coëffeteau, Histoire romaine). C'est sans doute par référence à l'Astrée qu'il faut comprendre les vers de Dorise dans le Clitandre de Corneille, tragi-comédie pastorale: «Souffrez que pour pleurer mes actions brutales, / Je fasse ma retraite avecque les Vestales» (vv. 1569-1570). Le sens figuré apparaît le plus nettement chez les satiriques, dans un contexte misogyne et anti-pastoral: ainsi, chez d'Esternod, en 1619: «Cependant cette putain sale / Faisait de sa vierge vestale»; chez Du Lorens, en 1646: «Je supporte aisément que cette putain sale / Soit la sainte n'y touche et fasse la vestale». Le mot «vestale(s)» n'est guère attesté pour les années 1650-1670: quatre occurrences seulement, dont celle que contient Britannicus. Mais ce chiffre ne tient pas compte de la Clélie de Mlle de Scudéry, où les Vestales sont fréquemment mentionnées, sans d'ailleurs être simplement identifiées à des religieuses chrétiennes, comme le montre le passage cité en exergue (Volker Schröder, La tragédie du sang d'Auguste: politique et intertextualité dans Britannicus, 2004 - books.google.fr).

 

Cf. quatrain I, 86 qui selon Pierre Brind'Amour concerne Clélie, et selon ce site typologiquement Marie de Médicis ("Royne").

 

L’Etrusque Porsenna était venu assiégé Rome pour rétablir Tarquin, qui s’en était vu fermé les portes, alors qu’il était allé combattre les Ardéates. Clélie fut remise en otage avec d’autres jeunes femmes, par les Romains, au chef étrusque pour qu’il lève le siège. Trahissant la confiance de leurs gardes, Clélie et ses compagnes s’enfuirent alors qu’elles se baignaient dans le Tibre. Clélie se serait procurée un cheval pour traverser le fleuve. Elles furent poursuivies sans succès.

 

Si vous aviez vu Rome comme je l'ai vue, répliqua Racilia, vous auriez bien plus de sujet de parler comme vous faites ; car du temps que j'étais jeune, toutes les femmes étaient aussi réservées que des vestales ; on ne les voyait presque qu'aux temples et aux fêtes publiques; les mariages se faisaient plutôt par l'intérêt des familles, que par la connaissance des personnes ; et l'amour de la gloire occupait si fort le cÅ“ur des hommes, qu'ils ne songeaient à autre chose. Mais depuis la mort de la vertueuse Tanaquil, et le renversement de Servius Tullus, la plupart des Romaines ne sont plus de véritables Romaines; et les femmes vivent presque ici comme elles font ailleurs (Madeleine de Scudéry Clélie: histoire romaine, Partie 2, présenté par Chantal Morlet-Chantalat, 2001 - books.google.fr).

 

Si on admet que les figures de Lucrèce et Clélie ont un rapport avec les mêmes représentations divines qui se reflètent à travers Tanaquil et Tullia, on ne peut manquer d'être frappé par le fait que Lucrèce et Clélie offrent une image symétrique. À Tanaquil, posée comme épouse de Tarquin l'Ancien et protectrice du jeune Servius, d'aspect par conséquent plus matronal, répond Lucrèce, tandis que la fougueuse Tullia, d'allure plus juvénile et liée au cheval par son côté de «dame au char», aurait plutôt son correspondant dans Clélie. Par là les deux personnages féminins dont la geste encadre le récit de l'expulsion des rois et de l'établissement du nouveau régime républicain reprendraient, d'une manière positive cette fois, ce qu'avaient représenté, dans le processus de dégradation du regnum aboutissant à la tyrannie du Superbe, Tanaquil puis Tullia. Autrement dit le souvenir des déesses tutélaires de la monarchie, avec ce qu'elles impliquaient d'insupportable pour un régime qui n'admettait pas qu'un individu prétende s'élever au-dessus des autres cives et bénéficier d'une protection personnelle de la divinité, contre lesquelles la République naissante réagissait violemment, non seulement aurait subsisté à travers des figures, ambiguës ou franchement honnies, comme Tanaquil et Tullia, mais aurait poussé à leur opposer les contreparties positives que sont Lucrèce et Clélie. Finalement, la place, inattendue, donnée, à ce moment de l'histoire de la cité, à des figures de héros féminins serait, elle aussi, le reflet de l'importance qu'avaient eue les représentations religieuses des souverains de la fin de la période royale (Dominique Briquel, Des figures de femmes héroïoques à Rome : Lucrèce et Clélie, Modelli eroici dall'antichita alla cultura europea : Bergamo, 20-22 novembre 2001, 2003 - books.google.fr).

 

Dans le contexte de la Fronde, contemporaine du Commonwealth (République), cela peut avoir un sens.

 

Apparu aux alentours de 1650, le roman précieux a pour sujet de prédilection le sentiment, son analyse et son discours. Il est caractérisé par l'importance qu'il accorde à l'intériorité, par le raffinement dans l'analyse des sentiments, par son vocabulaire élevé et son style baroque. Clélie, histoire romaine est un roman de Madeleine de Scudéry, publié en 10 volumes in-8°, de 1654 à 1660. Ce roman est un excellent exemple du roman précieux, sous-genre du roman français du XVIIe siècle, engendré par le courant de la préciosité. Comme beaucoup de romans et nouvelles de Madeleine de Scudéry, Clélie offre «une représentation romanesque de la société précieuse et galante» dépeignant ses idéaux mondains, mais également «sa conception de l’art de vivre en société et de l’art d’aimer.» C’est dans Clélie que se trouve la carte de Tendre, «représentation topographique et allégorique de la conduite et de la pratique amoureuse.» (fr.wikipedia.org - Clélie, histoire romaine).

 

Comme l'écrit Tallemant des Réaux, Madeleine de Scudéry «étoit persuadée de Sarrasin [sic] et croyoit mal à propos qu'il feroit beaucoup pour elle». Secrétaire du prince Armand de Conti, le poète avait, en effet, l'occasion, s'il le voulait, de protéger son admiratrice, qui s'est toujours plainte de sa misère. Tallemant ajoute qu'«il avoit esté dix ans sans la voir» et «y retourna, quand il vint icy negocier pour le mariage de son maistre». Sarasin revint de Guyenne à Paris à l'automne 1653, on l'appelle alors Polyandre et il prit part à «la journée des madrigaux», le 20 décembre 1653. Faut-il croire que de 1643 à 1653 il ne vit jamais Sapho ? Cela paraît exagéré. Ce n'est qu'en 1651 que Conti entraîna Sarasin dans le midi, et le poète et la romancière demeurèrent certainement liés durant toutes ces années, puisqu'elle lui adressa en décembre 1650 les derniers tomes de Cyrus (Alain Niderst, Madeleine de Scudéry, Ménage et Pellisson, éditeurs de Sarasin, L'écrivain éditeur, Tome 1, 2001 - books.google.fr).

 

Armand de Conti, gouverneur du Languedoc à partir de 1650, est le prototype de ces puissants «rentiers» du XVIIe siècle mûrissant. Il vit du fisc, de la dîme, et de la rente; du triple revenu de ses pensions, de ses terres et de ses abbayes (Emmanuel Le Roy Ladurie, Les Paysans de Languedoc, Tome 1, 1966 - books.google.fr).

 

M. le Maréchal de Roquelaure a un portrait en pied de Mme de Scudery représentée en Vestale, entretenant le feu sacré avec ce mot Fovebo, gravé au bas de l'Autel qui soûtient ce feu, pour marquer qu'elle entretiendra toûjours avec soin une aimable liaison & commerce avec plusieurs illustres amis qu'elle avoit (Evrard Titon Du Tillet, Parnasse françois, 1732 - books.google.fr).

 

En cherchant l'acrostiche du quatrain QSEP. On tombe sur internet sur Quintus Septiminius Florens Tertullianus soit Tetullien qui dans son Apologétique fait une allusion à la vestale Tuscia (Tuccia) avec les mots latins : "et aquam cribro gestatam" (Tertullien et Saint Augustin: oeuvres choisies, avec la traduction en français, 1845 - books.google.fr).

 

Tertullien insère dans une liste rapide des miracles païens «et l'eau portée dans un crible et le navire déplacé avec une ceinture», petits divertissements dont la valeur dérisoire apparaît dès qu'ils sont mis en regard des vrais miracles, ceux du dieu unique (Le corps virginal: la virginité féminine en Grèce ancienne, 1987 - books.google.fr).

 

Typologie

 

Depuis la date pivot de 1651, le report de 2110 donne 1192.

 

Capitole

 

De 1190 à 1204, les capitouls acquièrent à frais communs des terrains contigus à la muraille romaine délimités par la rue de Saint-Quentin et la rue de la Porterie (place du Capitole), la rue des Imagiers (rue de la Pomme), la rue de Villeneuve (rue Lafayette). Ils devaient arrondir leur enclos initial en achetant en 1284 la maison de Jean de Galhac, en 1306 celle de la dame Obria, en 1369 la tour de Pons Guitard, en 1534 la maison de Bertrand Bastier, en 1568 l'hôtel de l'apothicaire Jean Bayle. A cet emplacement qui ne remontait qu'à la fin du XIIe siècle fut maintenu le nom de Capitole, confirmé par les textes de 1292 et de 1388. Dérivait-il du Capitole romain, dont l'église du Taur marque la place, ou de l'assemblée (capitol) des consuls qui aurait désigné, et l'édifice et les magistrats municipaux (los senhors de capitol) ? Le terme de capitole gravé sur le marbre ou inscrit dans les Annales, n'est que du style soutenu. Clercs, syndics ou trésoriers écrivent : palais communal (palacio communal), maison communale (maison communal) et plus tard hôtel de ville (Robert Mesuret, Évocation du vieux Toulouse, 1960 - books.google.fr).

 

Nîmes, comme Narbonne et Toulouse, avait un Capitole. Le nom de Saint-Etienne-de-Capdeuil, Sanctus-Stéphanus-de-Capitolio, que portait une chapelle voisine de la Maison-Carrée, semblerait indiquer que le Capitole était voisin de ce dernier Monument (Guide aux monuments de Nîmes, antiques et modernes, Gaude, 1824 - books.google.fr).

 

La dénomination de domus quadrata (Maison carré) ne me semble pas de beaucoup antérieure à la parution de l'ouvrage de Poldo d'Albenas (1560) : sur le plan cavalier que cet auteur nous donne de la ville de Nimes, l'édifice porte encore le nom de «Capitole», qu'il eut durant le moyen âge ; et sur la première planche qu'il consacre au monument on peut lire ce titre : «Le Capitole, dict la Maison Carree». Il précise d'ailleurs lui-même que le «vulgaire l'appelle Capitole, ou bien Capdueil, qui en langaige du païs vaut autant, que Capitole». D'autres témoignages nous font connaître la persistance, jusqu'au début du siècle suivant, de ce nom médiéval ou mieux encore l'existence simultanée des deux noms de «Capitole» et de «Maison Carrée». Ces différents textes permettent, je crois, de fixer vers le milieu du XVIe siècle l'apparition du terme «Maison Carrée» qui ne supplanta définitivement celui de «Capitole» qu'une centaine d'années plus tard (Jean Charles Balty, Études sur la Maison Carrée de Nîmes, Volume 47 de Collection Latomus : revue d'études latines, 1960 - books.google.fr).

 

Du côté languedocien également, la phase consulaire est décisive dans la fortification des villes.  Le comte de Toulouse, Raymond V le 15 septembre 1194 accorda aux habitants de Nîmes le droit construire un rempart et un fossé, notamment autour des arènes. Ainsi furent unifiés les deux espaces urbains contrôlés respectivement par le consulat de Nîmes et le consulat des chevaliers. La ville faisait désormais de l’ordre de 30 hectares (Germain Butaud, Murs neufs et vieux murs dans le Midi médiéval, Les frontières dans la ville, Cachiers de la Méditerranée N° 73, 2006 - journals.openedition.org).

 

Même avant la construction de l'enceinte régulière et continue de 1193, les habitants de Nimes ayaient songé à clore certains points plus ouverts ou plus exposés que d'autres. Le Murus Novus (début du XIème siècle) avait été élevé pour protéger la Maison-Carrée (Sala de Capitolio). Il était situé sur l'emplacement de la façade du théâtre actuel, et devait s'étendre de la Porte de la Bouquerie à la Porte de la Magdeleine (Germer-Durand) (Eugène Germer-Durand, Cartulaire du Chapitre de l'église cathédrale Notre-Dame de Nîmes, 1874 - archive.org).

 

Vestales et Capitole

 

Le sonnet 32 des Antiquités de Rome de Joachim du Bellay s'inspire de l'ode XXX du livre III des Odes d'Horace dont voici le texte très célèbre :«J'ai achevé un monument plus durable que le bronze [«Exegi monumentum aere perennius»], plus haut que la décrépitude des royales pyramides, et que ne sauraient détruire ni la pluie rongeuse, ni l'Aquilon emporté, ni la chaîne innombrable des ans, ni la fuite des âges Je ne mourrai pas tout entier [«Nonomnis moriar»], et une bonne partie de mon être sera soustraite à Libitine [déesse des funérailles] ; sans cesse je grandirai, toujours jeune par la louange de la postérité, tant que le pontife, avec la vierge silencieuse [la Vestale qui accompagne le Pontife], montera au Capitole. On dira que, né au pays où résonne l'impétueux Aufide, où Daunus, mal pourvu d'eau, régna sur des peuples rustiques, devenu un maître d'humble que j'étais, j'ai le premier annexé le chant d'Eolie aux cadences italiennes. Prends un orgueil que justifient mes mérites, Melpomène, et viens, de bon gré, ceindre ma chevelure du laurier delphique».

 

On reconnaît facilement dans la «vierge silencieuse» une vestale, peut-être la grande vestale. Dans le contexte de cette ode, l'évocation de la montée au Capitole du pontife et de la vestale doit être comprise comme un fait régulier, répétitif, conçu par le poète comme symbole de la pérennité de la Ville. Le commentaire du scholiaste Pseudo-Acre confirme cette interprétation240 ; celui- ci indique explicitement, en passant au pluriel, ce qui d'ailleurs est peut-être significatif du fait que plusieurs vestales participaient à cette cérémonie, que ces prêtresses sur le point de sacrifier avaient l'habitude de monter, silencieuses, au Capitole (Françoise van Haeperen, Le collège pontifical (3ème s.a. C.-4ème s.p. C.): contribution à l'étude de la religion publique romaine, 2002 - books.google.fr).

 

Politien (Miscellaneorum centuriae primae, Florence, 1489, fin du chap. 100) attira l'attention sur la présence de cet adjectif tacita : pourquoi la Vestale, accompagnant le pontife dans son ascension rituelle du Capitole, est-elle silencieuse. Porphyrion n'explique pas vraiment tacita. Ps-Acron (aut uerecunda, aut pro sacrificio tacenre) ne convainc pas Politien, qui tente une explication (« Tacitam Virginem intellexit quasi claram sacerdoti nobilitate...», parce que l'expression été rapprochée du silentia lunae virgilien qui retient surtout son attention. Glareanus, dans ses Annotationes qui suivent son éd. (1536, 1553), observe avec raison que Polilien contredit le Ps.-Acr., mais sans rien apporter de plus. [...] Nous avons consulté une quarantaine d'éd. commentées, depuis les incunables. Landin 1482 sq. et Locher 1498 reprennent quasi textuellement Porph. et Ps-Acr. ; bien des commentateurs par la suite (de Cruquius 1578 et Torrentius 1608 à Nisbet et Rudd 2004) expliquent le silence de la Vestale par la solennité de l'ascension du Capitole ; le P. Sanadon 1756, commentateur prolixe, ne consacre que quatre lignes : seul le «Grand-Prêtre» parle ; quelques-uns, comme Bentley, n'expliquent pas tacita qui, fait assez rare, n'a pas suscité de conjectures. Lambin 1561 ne commente pas tacita, mais, en 1568, termine son explication du rôle des Vestales : «Sed cur tacitam virginem dixit ?» Trois réponses possibles (avec textes parallèles mais sans référence à Politien): ce sont des secrets; les femmes romaines doivent se taire, surtout à propos des choses sacrées ; les Vestales étaient astreintes au silence  (Bernard Stenuit, Horace, Od. III, 30, 9 : pourquoi "tacita" ?, Latomus, Volume 69, Parties 1 à 2, 2010 - books.google.fr).

 

Habitants de l'Apulie septentrionale, où leur civilisation avait vu le jour au premier âge du fer (IXe- VIIIe siècles), les Dauniens tiraient leur origine des Iapyges. Les Iapyges étaient arrivés en Italie à partir du Bronze récent (XIIIe-XIIe siècles), surtout durant le Bronze final (XIe-Xe siècles). Divers mouvements de populations dans la péninsule balkanique les avaient amenés à traverser l'Adriatique pour s'établir sur de nouvelles terres. Leur pénétration y fut lente et progressive. Ils s'assimilèrent aux populations qui occupaient les lieux : des groupes subapenniniques, descendants des pasteurs apenniniques nomades, qui, dans le courant du Bronze récent, s'étaient sédentarisés (Th. Van Compernolle, La civilisation daunienne dans les collections du Musée Royal de Mariemont, dans Les Cahiers de Mariemont 17, 1986 - books.google.fr).

 

On disoit l'Apulie Daunienne, Apulia Daunia ; ou les Apuliens Dauniens, Apuli Daunii. Cette contrée fut ainsi nommée de Daunus, qui, selon Festus , étoit un personnage illustre de la nation Illyrienne. Obligé de quitter sa patrie, pour quelque sédition domestique, il vint s'emparer du pays auquel il donna son nom. Tzetzès dit que Daunus regnoit sur les Dauniens, lorsque Diomede aborda en Italie. Il lui fit épouser sa fille. [...] La Daunie étoit au nord-ouest de la Peucétie. Elle étoit bornée au nord & à l'orient par la mer Adriatique ; par le Biserno, les Samnites & les Hirpins au couchant; & enfin, au midi par le Cervaro, qui la séparoit en partie des Peucétiens. Pline, qui fournit ces limites , dit néanmoins peu après qu'elle commençoit au fleuve Aufide, & renfermoit la Salapie dans la Daunie (François Sabbathier, Dictionnaire pour l'intelligence des auteurs classiques, grecs et latins, 1773 - books.google.fr).

 

L'indication précise de Strabon et d'Appien, et la ressemblance du nom de Iapodes ou Iapydes avec celui de Iapyges rendent très vraisemblable que la race proprement dite des Iapodes ait été illyrienne (Attilio Tamaro, La Vénétie Julienne et la Dalmatie: histoire de la nation italienne sur ses frontières orientales, Tome 1, 1918 - books.google.fr).

 

Hécatée ne différencie pas le nom des Iapodes ou Iapydes de l'Illyrie septentrionale des Iapyges d'Italie (Jean Bérard, Héraclès et Minos, Bibliothèque des écoles françaises d'Athènes et de Rome, Numéro 150, 1941 - books.google.fr).

 

Ces procédés de peinture corporelle paraissent avoir été en grand usage dans l'Antiquité. Les Iapodes d'Apulie, au dire de Strabon (VII, 5, 4), se tatouaient comme leurs parents, les Illyriens et les Thraces. [...]

 

Horace accole au nom de Circe l'épithète vitrea, et ce mot évoque l'idée d'une teinture à la guède. [...] On peut considérer Circe comme synthétisant dans l'Odyssée les magiciennes barbares. Dès lors, les femmes de Grande- Bretagne et vitrea Circe nous resteraient comme les témoins attardés de vieux mystères oubliés, dans lesquels la peinture corporelle en bleu noir jouait un rôle de premier ordre (J. et Ch. Cotte, La guède dans l'Antiquité. In: Revue des Études Anciennes. Tome 21, 1919, n°1 - www.persee.fr).

 

Dans les scholies à Lycophron la scène de l'ensevelissement est déplacée dans l'espace. La mésaventure des Etoliens se déroule en Daunie, donc dans une région dont Brindes ne fait pas partie. Et cet épisode s'inscrit dans la légende, connue depuis Mimnerme au VIIe s., mettant en rapport Diomède et le souverain local Daunos et aboutissant - autre exemple de perfidie barbare - au meurtre du premier par le second. Le héros aurait en effet voué à la stérilité cette terre tant qu'elle ne serait pas cultivée par des Etoliens de sa race. Et c'est pour tourner cette malédiction qu'intervient dans cette version l'enterrement des Grecs : les Dauniens auraient été proposer l'héritage de leur chef aux Etoliens, mais ceux d'entre eux qui se seraient laissé tenter par ces promesses fallacieuses auraient été, une fois sur place, enterrés vivants. [...]

 

La comparaison entre la pratique romaine bien connue et ce qu'il nous a paru possible de supposer à partir de la tradition sur Diomède en Apulie n'est pas seulement d'ordre rhétorique. On ne peut manquer d'être frappé par les analogies entre ce que l'on sait des faits romains, au moins tels que les présentent certaines sources, et ce qui nous a semblé devoir être la forme originale de la tradition apulienne. Les gens de Brindes, d'après Justin, auraient enterré des Grecs afin de respecter la lettre d'un oracle qui promettait à ces Hellènes la possession perpétuelle du sol de leur cité. Or les événements de Rome de 228 sont justifiés d'une manière tout à fait analogue dans le passage de Dion Cassius et dans le texte de Zonaras, qui s'en inspire certainement directement. Là également un oracle aurait affirmé que la ville devait être prise par des ennemis, Grecs et Gaulois en l'occurence, et ce serait, à en croire les deux historiens grecs, afin de trouver une interprétation tout à leur avantage de cet arrêt du destin que les Romains auraient procédé aux ensevelissements du Forum Boarium. Il paraît bien difficile de considérer comme fortuite une telle coïncidence... [...]

 

En ce qui, concerne le lien entre le faute des vestales et la mise à mort des Gaulois et des Grecs, il n'est clair qu'à propos des événements de 114, dont l'existence même est sujette à caution. Il paraît dangereux de partir de là pour tirer une explication valable aussi bien pour les événements de 228 et 216. Car si en 216 on recourt à ce rite après la découverte du stuprum des vestales, c'est, il faut le souligner avec C. Bémont, à l'occasion d'une «crise prodigiale» qui dépasse de beaucoup cette faute, dont cette dernière ne constitue que l'un des aspects même si c'est le plus marquant. Le stuprum n'est finalement que l'occasion de la consultation des Livres, occasion préparée par toute la série des défaites et des phénomènes alarmants. C'est en dernier ressort ce contexte, essentiellement militaire, qui fait, exceptionnellement, considérer ce stuprum comme un pro- digium; ce qu'il n'a jamais été auparavant, puisque jamais, jusque-là, faute de Vestale n'avait provoqué le recours aux Libri. Quant aux événements de 228, la liaison avec le crime de Tuccia, vraisemblablement antérieur de deux ans, est bien douteux. Il est de bien meilleure méthode de s'en tenir au témoignage des textes, tous concordant sur ce point, et de penser que c'est l'imminence du péril gaulois (qu'il soit exprimé ou non par l'«oracle» dont parlent Dion et Zonaras) et uniquement cela qui a provoqué l'ensevelissement (par le biais, chez Plutarque, de la consultation des Livres). Nulle part il n'est fait allusion à la faute de Tuccia. Il vaut mieux ne pas l'introduire dans l'affaire et lui garder son aspect exclusivement militaire. [...]

 

Ce qui était légende dans la Pouille vers 330 apparaît sous les traits d'une triste réalité au Forum Boarium en 228, en 216 et peut-être en 114. A en croire Pline la coutume d'enterrer vivants des êtres humains se serait même prolongée beaucoup plus tard, jusqu'à son époque (Dominique Briquel, Les enterrés vivants de Brindes. In: L'Italie préromaine et la Rome républicaine. I. Mélanges offerts à Jacques Heurgon. Rome : École Française de Rome, 1976 - www.persee.fr).

 

Sous Numa Pompilius, le crime d'inceste était puni de mort : la vestale était lapidée et ensevelie avec son complice sous les pierres. Tarquin l'ancien les condamna à être ensevelies vivantes dans une fosse (Histoire des Vestales et de leur culte, d'après Plutarque, Tacite, Suétone, &, traduit par B. Cartour, 1825 - books.google.fr).

 

D'après la tradition, Capitolium n'était pas le plus ancien nom de la colline : il ne remonterait pas plus haut que l'époque du dernier Tarquin. Selon Varron : L'un de ces montes a été dit «Capitolin» parce que, à ce qu'on rapporte, les travaux de fondation du temple de Jupiter avaient mis à jour une tête d'homme. Auparavant, la hauteur s'appelait mons Tarpeius, du nom de Tarpéia, la vierge vestale tuée par les armes des Sabins et ensevelie sur la colline. Il reste un souvenir de son nom : aujourd'hui encore un rocher du Capitole est appelé Tarpeium saxum, et Plutarque : Tarpéia ayant été ensevelie à cet endroit, la colline fut appelée Tarpéienne, jusqu'au moment où, le roi Tarquin ayant consacré ce lieu à Jupiter, les restes de Tarpéia furent transportés ailleurs, et son nom oublié, si ce n'est qu'on appelle aujourd'hui encore «Tarpéienne» une roche du Capitole d'où l'on précipitait les criminels. Désireux de résoudre le problème onomastique qu'ils avaient eux-mêmes soulevé en rattachant le terme Capitolium au dernier des Tarquins, les érudits romains se devaient de retrouver l'«ancien» nom de la colline. Or il se faisait d'une part que les légendes mettaient en scène une Tarpéia qui, pour avoir livré le Capitole à l'ennemi sabin, y avait trouvé la mort, et d'autre part qu'un éperon de la même colline portait à l'époque historique le nom de saxum Tarpeium : c'était «la roche Tarpéienne», d'où l'on précipitait dans le vide certains criminels. Le Capitole apparaissait donc comme «la colline de Tarpéia» : la jeune fille y avait vécu en compagnie  de son père; elle en avait trahi la citadelle ; elle y avait péri ; elle y avait été enterrée, et son nom était resté attaché à l'un des rochers. En un mot les érudits donnèrent à l'ensemble de la hauteur le nom qui apparaissait lié au Capitole dans une légende et dans un toponyme (J. Poucet, Recherches sur la légende sabine des origines de Rome, Recueil de travaux d'histoire et de philologie, 1967 - books.google.fr).

 

Selon Plutarque, Tarpéia est une des quatre premières vestales. Chez le poète Simylos, également cité par Plutarque, Tarpéia ne livre pas le Capitole aux Sabins, mais aux Celtes (fr.wikipedia.org - Tarpeia).

 

Pétrarque

 

La Vestale Tuccia est célébrée dans les Trionfî de Pétrarque.

 

Le Triomphe de la Chasteté est pour Pétrarque un moyen de célébrer Laure et l'amour pur qui le lie à elle Pièce allégorique en vers qui s'inscrit dans le genre de la «psychomachie», l'œuvre présente la vaine attaque d'Amour qui a tenté de réduire Laure à sa merci, mais qui est vaincu par elle et traîné en triomphe. Pétrarque rétablit ici la tradition antique du cortège triomphal. Mais son érudition sert ici sa démarche poétique : il ne saurait s'agir d'une reconstitution rigoureuse à l'antique. Car à la suite de la Chasteté, défilent des femmes uniquement, toutes également connues pour leurs chastes exploits, et relevant aussi bien des traditions païennes que des récits bibliques. Parmi elles, la vestale Tuccia a droit à la plus plus longue évocation.

 

Les auteurs chrétiens chercheront à discréditer les Vestales et leurs miracles (cf. Tertullien).

 

D'abord utilisée comme réfèrent mythique précisément identifié, à l'intérieur de collèges de figures féminines antiques, toutes hautement représentatives d'un exemplum virtutis et le plus souvent en rapport avec un projet matrimonial ou un contexte conjugal, Tuccia progressivement va assumer une signification à portée plus générale : symbolisant la Pudeur, voire la Chasteté (Revue de l'art, 2006 - books.google.fr).

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