Constantin Copronyme

Constantin Copronyme

 

IX, 91

 

2170-2171

 

L'horrible peste Perynte et Nicopolle,

Le Chersonnez tiendra et Marceloyne,

La Thessalie vastera l'Amphipolle,

Mal incogneu et le refus d'Anthoine.

 

Peste de Thrace

 

Perinthus et Nicopolis sont deux villes de Thrace ancienne (Gaffiot).

 

Ainsi la neuvième année après les ravages de l'épidémie de peste en Thrace (746-747), c'est-à-dire en 755, dit Théophane, "l'empereur Constantin (Copronyme) exila en Thrace des Syriens et des Arméniens qu'il envoyait de Théodosiopolis (Erzurum) et de Mélitène (Malatya) et par lesquels se répandit l'hérésie des Pauliciens" (Iordan Ivanov, Livres et légendes bogomiles: aux sources du catharisme, traduit par Monette Ribeyrol, 1976 - books.google.fr).

 

Mais cependant le Ciel se déclara contre lui, & frappa les plus belles Provinces de son Empire du plus triste de tous les fléaux. Il ne lui restoit de toute l'Italie que l'extrémité de la Calabre, & ce fut dans cette contrée que commença l'horrible peste qui dura trois ans. Après avoir dépeuplé cette Province elle passa dans la Sicile, de-là en Epire, puis en Gréce, enfin dans la Thrace, & fit plus sentir sa fureur à Constantinople que dans toute autre ville. Elle y fit tant de ravage pendant l'été de la troisiéme année, que le peu de monde qui y restoit, fut obligé d'en sortir, & de laisser les maisons & les ruës pleines de cadavres, au défaut de lieux convenables pour les enterrer (Lawrence Echard, Histoire romaine, depuis la fondation de Rome jusqu'à la translation de l'empire par Constantin, traduit par Pierre-François Guyot Desfontaines, 1737 - books.google.fr).

 

"Thessalie vastera l’Amphipolle" : les Slaves

 

Ainsi sur les frontières désolées de l'Empire d'Orient s'étendent comme plusieurs couches de Barbares, d'abord des trépides, puis des Avares, enfin des Bulgares; au travers ont lieu comme des infiltrations slavones. Les Slaves, dit Procope, payaient aux Gépides un tribut d'une pièce d'argent par homme, pour pouvoir franchir à volonté le Danube, et piller les contrées placées sur la rive droite de ce fleuve. Ces Slaves étaient des peuples qui avaient longtemps erré pêle-mêle entre l'Oural et l'Elbe, dans le pays connu des anciens sous le nom de Sarmatie. Les plus connues de leurs tribus sont celles des Vénèdes, établies dès le second siècle de notre ère sur le bord oriental de la mer Baltique. A mesure que les tribus germaniques s'écoulèrent vers l'Italie, la Gaule, l'Espagne et l'Afrique, les Slaves, suivant ce mouvement de l'invasion qui portait alors tous les peuples barbares de l'orient à l'occident, s'établirent sur les bords de l'Oder et dans la Bohême. Ces Vénèdes se séparèrent en Obotrites, Wiltzes ou Welatables au nord, sur la rive droite de l'Elbe, Serbes dans la Thuringe orientale, Lutizes en Lusace, Poméraniens et Moraves dans les deux provinces qui portèrent ce nom, Tzèches en Bohême, Antes sur les bords du Danube et de la mer Noire, etc.

 

Quand les Avares parurent sur le Danube, les Slaves, qui en habitaient les bords, furent soumis et traités avec la dernière rigueur par Baïan, qui les força de combattre pour lui, et leur confia toujours les expéditions les plus difficiles, les postes les plus dangereux. Mais après sa défaite et sa mort, une partie des Slaves recouvra, comme nous l'avons dit, son indépendance, et plusieurs de leurs tribus s'établirent alors dans les provinces où nous les retrouvons encore aujourd'hui. En 639, des Serbes de la Thuringe descendent au sud jusque sur les bords de la Save, en chassent les Avares, s'établissent en Macédoine; occupent le pays connu aujourd'hui sous le nom de Servie, de Bosnie, une partie de la Dalmatie et quelques îles voisines. Quelques années plus tôt, en 626 ou 623, cinq grandes tribus de Slaves Chorvvates, conduites par des chefs francs, avaient passé dans la Dalmatie et enlevé ce pays aux Avares; c'est alors que Scardona, Narona, Salone et Épidaure furent ruinées; mais à leur place s'élevèrent Spalatro, Raguse, Trau et Zara, qui restèrent sous la domination des empereurs de Constantinople, et formèrent avec leurs territoires le thème de Dalmatie. Quant aux Chorwates ou Croates, leur domination, qui s'étendait entre la Save, le Monte Negro et l'Adriatique, fut partagée en onze bannats ou seigneuries.

 

Dès ce moment les Slaves ne cessèrent de pénétrer en troupes plus ou moins nombreuses dans les provinces de l'Empire d'Orient, et renouvelèrent presque entièrement la population de la Grèce. Dans le septième siècle, on trouve des Slaves sur le Strymon, dans la Thrace, dans les environs de Thessalonique et dans la Mœsie ou Bulgarie actuelle. En 746, sous Constantin Copronyme, ceux qui étaient établis déjà dans la Macédoine s'étendirent sur tout le Péloponnèse, où aujourd'hui encore les chefs portent le titre slave de Voiévodes. Un voyageur moderne regarde même comme Slaves tous les Maïnotes qui habitent la Laconie. D'autres s'établirent dans l'Asie, en Bithynie, en Phrygie, en Dardanie et en Syrie. Ainsi, en 665, cinq mille Slaves se retirèrent en Syrie avec Abderhaman. En 688, Justinien II en expédia un grand nombre au-delà de l'Hellespont, à Opsicium. Sa garde était composée de 30,000 hommes de cette race, que l'on regardait comme invincible. Soixante-dix ans après, 208,000 Slaves traversèrent la mer Noire, et allèrent se fixer en Bithynie, sur les bords de l'Artanas (Philippe Le Bas, Précis de l'histoire du moyen âge, 1845 - books.google.fr).

 

Cf. quatrain I, 98 - Expansion des Slaves en Méditerranée aux VI-VIIème siècles/Expansion des Russes à l'Est au XVIIème siècle - 1629-1630.

 

"refus d'Anthoine" : refus fait Ă  Antoine ?

 

Constantin embarrassé déja par d'autres Guerres, & surtout entièrement occupé du nombreux Concile, composé de trois cens trente-huit Evêques, qu'il avoit fait assembler en cette année 753 pour faire abolir les Images, n'étoit pas en état de rien entreprendre contre les Lombards. Etienne voiant donc qu'il n'a voit rien á espérer de Copronyme qui étoit hors d'état de se défendre lui-même, & trop éloigné pour protéger efficacément l'Eglise ; considérant d'un autre côté qu'Aistolfe étoit déja dans le Duché de Rome à la tête imperiale d'une Armée, désoloit le Pais, menaçoit de tout saccager, & de potentianul réduire les Romains à l'esclavage; ce Pontife á l'exemple de Zacharie & des deux Grégoires, prit le parti de recourir à la Protection de la France, & de demander du secours à Pépin. Il dépêcha secrettement une Personne de confiance, qui exposa à Pépin l'extrémité où se trouvoit le Pape, & le désir qu'il avoit de se rendre en France, si on lui envoioit des Ambassadeurs avec lesquels il pût faire le voiage en fureté. Pépin agréa cette offre, & envoia au Pape deux des Principaux Officiers de sa Cour, l'Evêque Rodegand, & le Duc Antoine, pour le conduire en France. Ces Ambassadeurs arrivant á Rome, trouvèrent que les Lombards, après s'être rendus Maîtres de tout le voisinage, étoient sur le point d'investir la Ville; & que les deux Légats du Pape, & l'Envoié de l'Empereur n'avoient raporté de Constantinople qu'un second ordre au Pontife de se rendre en Personne aupres d'Aistulfe pour le solliciter à restituer Ravenne & les autres Villes dont il s'étoit emparé. Il n'y avoit aucune apparence que ce voiage eût le moindre succès. Le Pape voulut cependant encore obéir, & tâcher pour la dernière fois d'engager ce Prince à la restitution. Mais voiant que tous ses efforts étoient inutiles, & qu'Aistulfe, qui lui avoit fait défendre de lui tenir de tels propos, prenoit des mesures pour l'arrêter, il se laissa enfin conduire en France par les Ambassadeurs de Pépin (Pietro Giannone, Histoire civile du royaume de Naples, traduite par Jean Bedevolle, 1742 - books.google.fr).

 

D'autres appellent l'ambassadeur de PĂ©pin Antaire au lieu d'Antoine, "duca Antonio" en 1723 (Pietro Giannone, Dell'istoria civile del Regno di Napoli libri 40, Tome 1, 1723 - books.google.fr).

 

Pépin n'eut pas plutôt lu les lettres du pape, qu'il fit partir un évêque nommé Rodigange, pour l'assurer de sa protection, & fit suivre l'évêque peu de jours après par un seigneur de sa cour nommé Antaire, avec ordre de faire en sorte, que le pape fût conduit hors d'Italie en toute sureté. Cependant Adolphe fit bloquer Rome, & assiéger les plus forts châteaux d'alentour, & c'étoit dans cette extrémité, où les envoyés de France trouvèrent le pape à Rome, quand ils y arrivèrent. Presque en même-temps revinrent aussi de Constantinople, cet officier de l'empereur dont j'ai parlé, l'envoyé du pape, & celui du roi des Lombards, sans avoir rien conclu. L'officier de l'empereur apportoit seulement ordre au Pape, d'aller trouver lui-même le roi des Lombards, pour lui demander de sa part la restitution de Ravenne & des autres villes de l'exarcat, dont il s'étoit emparé. Le pape prévoyoit bien que ces demandes seroient fort inutiles : mais il voulut obéir. II envoya donc prier Astolphe de lui accorder des passeports & sureté pour sa personne, & pour ceux qu'il meneroit avec lui à cette entrevue. Astolphe lui ayant promis la sureté qu'il demandoit, il partit de Rome pour se rendre à Pavie, où ce prince devoir lui donner audience. L'envoyé de l'empereur Constantin & les deux envoyés de France, se joignirent à lui, & le duc Antaire ayant pris les devans, prévint son arrivée à Pavie, pour faire entendre au roi des Lombards la part que son maître prendroit au traitement qu'on feroit au pape. Quand Astolphe fut que le pape étoit proche, il lui envoya dire que dans l'audience qu'il lui donneroit, il prît bien garde à ne pas lui dire un seul mot touchant la restitution de Ravenne & de toutes les autres places de l'exarcat. Le pape ne répondit rien autre chose à l'envoyé, sinon qu'il ne craignoit rien, & que rien ne l'empêcheroit de s'acquitter de sa commission. En effet, après avoir offert quelques presens qu'il avoit apportés, non seulement il lui exposa ce qu'il avoit ordre de lui dire de la part de l'empereur : mais encore il le conjura les larmes aux yeux, de remettre les choses dans l'état où elles étoient avant ses nouvelles entreprises, & de rendre à l'église de Rome tout ce qu'il lui avoit enlevé. Astolphe résolu à tout refuser sur cet article, ne se laissa toucher ni par les larmes, ni par les présens du pape. L'envoyé de l'empereur qui lui présenta des lettres de la part de son maître, ne fut pas plus favorablement écouté. Sur quoi les envoyés de France dirent à Astolphe, qu'ils avoient ordre de leur maître de le prier, de ne pas s'opposer au dessein que le pape avoit pris de se retirer en France, ne pouvant plus demeurer avec fureté ni avec bienséance à Rome. Cette proposition embarrassa le roi des Lombards, & lui donna de l'inquiétude : il tira le pape à quartier, & lui demanda s'il avoit pris en effet cette résolution. Le pape lui répondit nettement qu'oui. Astolphe fit ce qu'il put pour l'en détourner, & les jours suivans il lui envoya secrètement plusieurs de ses confidens, pour tâcher de lui ôter cette pensée, l'assurant qu'il n'avoit rien à craindre de lui, & qu'il le traiteroit toujours avec le respect & les égards dûs au chef de l'église : mais rien ne fut capable de faire changer le pape. Enfin Astolphe dissimulant son chagrin, lui demanda encore une autre fois en présence de l'évêque envoyé de Pépin , s'il étoit entièrement déterminé à se retirer en France. Le pape lui ayant répondu qu'il étoit toûjours dans cette pensée, & qu'il l'exécuteroit, pourvu qu'on ne lui en ôtât pas la liberté: Je vous la donne toute entière, répondit le roi des Lombards. C'étoit bien contre son sentiment qu'il parloit ainsi. On savoit avec quelle colère il s'étoit exprimé plusieurs fois là-dessus, & ce qu'il avoit à appréhender de ce voyage ; mais arrêter le pape contre la foi publique, & refuser aux envoyés de France la permission qu'ils lui demandoient, de l'amener avec eux, comme il le souhaitoit, ç'eùt été quelque chose de trop violent. Le pape partit donc de Pavie le quatrième de Novembre avec les deux envoyés, quelques évêques, & d'autres personnes de son clergé (Gabriel Daniel, Histoire de France: depuis l'établissement de la monarchie françoise dans les Gaules, Tome 2, 1755 - books.google.fr).

 

Antaire est encore ambassadeur de Pépin auprès du successeur d'Astolphe, Didier qui sera obligé de respecter le traité de Pavie qu'il enfraignait.

 

"refus d'Anthoine" : VĂ©rone 774

 

Il existe un "Anthaire le Franchois" au temps de la prise de VĂ©rone en 774 par Charlemagne. Est-ce le mĂŞme ?

 

En ce tamps Karle le Grant assiga et print moult de cités, oultre la cité de Pades', entre lesquelles il print la cité de Véronne, là où furent prins Anthaire le Françhois, la femme de Karlomainneet ses filz, et furent présentez au roy. De là eschappa Adalgise, le filz du roy Désier qui là s'en estoit fuy, se s'enfuy en Constantinople (Pierre François Xavier de Ram, Chronica nobilissimorum ducum Lotharingiae et Brabantiae ac regum Francorum, de Edmond de Dynter, Volume 1, traduit par Jean Wauquelin, 1860 - books.google.fr).

 

Cet Antharius était un prince de la suite de Carloman, frère de Charlemagne, et fils de Pépin le Bref. Lorsque Berthe fut devenue veuve de Carloman, et son état déprécié, son entourage, dont Antharius, l'exhorta à se réfugier auprès de Didier, roi des Lombards, "en l'an sept cens septante cinq". Charlemagne éteint le règne des Lombards en Italie, 206 ans après qu'Alboïn l'eut installé (Antiquitez de la Gaule Belgicque, Royaulme de France, Austrasie & Lorraine, Tome 1, 1549 - books.google.fr).

 

Bref, "Anthoine"  reste assez inconnu.

 

"Mal incogneu"

 

En 775, meurt Constantin Copronyme, empereur de Byzance.

 

En l'année 747. sous le regne de Copronyme, on vit naître une peste horrible, qui dura trois ans, & ravagea la Sicile, la Calabre, & les Provinces de l’Orient; la Ville de Constantinople en fut tellement désolée, qu'elle devint presque deserte, & que la terre à peine pouvoit fournir de sepulture aux morts. Avec cette calamité publique, survint la guerre des Sarrasins, des Esclavons & des Bulgares. L’Empereur perdit plusieurs batailles contre ces peuples, & s'étant mis à la tête d'une nouvelle armée pour les combattre, il fut saisi d'une maladie inconnuë aux Medecins. On  de le rapporta sur son Vaisseau, où il mourut miserablement le 14 Septembre, Indiction XIV. en 775. après avoir tenu l’Empire trente-quatre ans & environ trois mois. Il dit en mourant, qu’il étoit condamné au feu éternel, pour avoir manqué de respect envers la Vierge, Mere de Dieu, & ordonna qu'à l'avenir on eut de la veneration pour elle. Telle fut la fin de ce Prince cruel & perfide, qui ne reconnoissoit point la Vierge pour Mere de Dieu, qui nioit la Divinité de Jésus Christ qui avoit défendu d'invoquer les Saints, & en avoit fait brifer les Images, dont il avoit fait condamner le culte dans un Conciliabule, composé de trois cens trente-huit Evêques, qu'il avoit obligé de s'assembler à Constantinople l’an 754. Indiction VII. Il avoit furtout une grande aversion contre les Moines, & contre ceux qu’il avoit cru contraires à ses erreurs, desquels il fit périr un grand nombre par divers supplices. Dans la deuxiéme année de son regne en 760. le 15. Août, suivant le témoignage de Theophane, un Vendredy sur les dix heures, il y eut une éclipse de Soleil (Abrégé Chronologique De L'Histoire Universelle Sacrée Et Profane: Traduction Nouvelle, Suivant la derniere Edition Latine du P. Petau. Depuis l'an 491 de J. C. jusqu'en 1714, Tome 3, 1715 - books.google.fr).

 

Avant de sacrer PĂ©pin, le pape Etienne III, en exil en France, tombe malade en l'abbaye de Saint Denis. On craint pour sa vie. (Jean Pons Guillaume Viennet, Histoire de la puissance pontificale (depuis Saint-Pierre jusqu'Ă  Innocent III), Tome 2, 1866 - books.google.fr).

 

Chersonnèse

 

Il existe une Chersonnèse de Thrace.

 

Skylax nous permet de compléter nos informations : «Lorsque vous avez passé la Macédoine, vous trouvez le fleuve Strymon qui sépare cette région de la Thrace. Cette dernière s'étend depuis le Strymon jusqu'à l'Istros, qui tire sa source du Pont-Euxin. Les villes de Thrace sont Amphipolis, Phagres, Galepsos, Oisigmé, Sagion et plusieurs autres comptoirs. Vis-à-vis de cette dernière est l'île de Thasos, avec une ville et deux ports, dont l'un est fermé. Non loin de Sagion sont la ville de Neapolis (qui n'est pas Naples), celle de Daton ville grecque, bâtie par l'Athénien Callistrate ; Abdère, Dicée, Maronée - d'où Ulysse a ramené le vin qui a servi à enivrer le cyclope Polyphème –, et les fleuves Nestos et Coudetos. Dans le voisinage de ces villes, et dans l'intérieur de terres, sont les comptoirs de Drys et de Zoné. Près de ce dernier est l'île de Samothrace, qui a un port [...], le golfe Melas et le fleuve du même nom, le comptoir de Deris, et celui de Cobrys, habité par les Cardianiens. À l'embouchure du golfe Melas, sont les deux îles d'Imbros et de Lemnos. La première a une ville, et la seconde un port. Au-delà du golfe Melas est la Chersonnèse de Thrace, dont les villes sont Cardia, Idé, Pæon, Alopeconnesos, Araples, Elaos et Sestos... Ici l'embouchure de la Propontide a six stades de largeur. Au fond du golfe sont les villes d'Aigospotamos... C'est là que finit la Chersonnèse de Thrace. Depuis Pactye jusqu'à Carda, il y a d'une mer à l'autre, quarante stades par les défilés... La plus grande longueur de la Chersonnèse, depuis Cardie jusqu'à Elœunte, est de cent cinquante stades (environ 27,5 km). Les premières villes que vous rencontrez, après avoir traversé la Chersonnèse de Thrace, sont Acté la  Blanche, Tiristase, Héraclée [...] et la ville de Selymbria, avec un port. De cette ville à l'embouchure du Pont-Euxin, il y a cinquante stades. Le chemin se fait par le Bosphore jusqu'au temple. Là, le Pont-Euxin a sept stades de largeur (René Peyrous, Retour d'Ulysse de Troie vers Ithaque: Hypothèses sur la seconde partie du parcours depuis le Cap Malée, 2015 - books.google.fr).

 

Marceloine - Macédoine

 

Haut lieu de l'époque carolingienne, Ponthion abritait un palais qui fut souvent occupé par les souverains carolingiens. C'est là que, le 6 janvier 754, Pépin le Bref, proclamé roi des Francs en 751, accueillit le pape Étienne II venu chercher l'alliance des Francs contre les Lombards qui menaçaient le pouvoir pontifical en Italie. Le sacre de Pépin par le pape, la même année, à Saint-Denis, préfigure celui de Charlemagne comme empereur en l'an 800. L'accord de Ponthion est à l'origine de l'ascension de la dynastie carolingienne (fr.wikipedia.org - Ponthion).

 

L'Aleux de Marceloine se situe à Voncq, dans les Ardennes (Trésor des chartes du comté de Rethel: 1415-1490, 1911 - books.google.fr).

 

Après l'épisode extrême de la domination de Charles Martel, les principats de Carloman et de Pépin et le règne de ce dernier apparaissent comme une phase de transition, se concluant par l'assimilation des palais mérovingiens et la création d'une nouvelle trame palatiale au sein de la Francia carolingienne. On sait qu'après des débuts mouvementés, Carloman et Pépin se partagèrent le regnum en 742 à Vieux-Poitiers. Loin de respecter l'antique clivage Neustrie/Austrasie, l'accord attribuait à chaque frère, selon une ligne est-ouest, des portions des anciens royaumes ni. Pour renforcer leur situation dans ce nouveau cadre territorial, les maires du palais rétablissaient en 743 un prince mérovingien, Childéric III (743-751). Cette politique prudente eut sa traduction palatiale : la restauration immédiate et ostensible du souverain mérovingien dans les palatia ancestraux. Childéric III instrumenta en effet en 743 ou 744 à Compiègne, dans le territoire relevant de Pépin, en 743 à Crécy-en-Ponthieu, dans celui de Carloman. Quant aux maires du palais, ils résidèrent dans des villae étrangères aux palais mérovingiens; Pépin en particulier séjourna en Neustrie dans les domaines pippinides de Quierzy et de Ver, le lieu  géométrique de son pouvoir étant le Soissonnais, même après l'abdication de Carloman : signe d'une continuité dynastique depuis le début du VIIIe siècle et de la stabilité du regnum et de son centre depuis la seconde moitié du VIIe siècle. La réticence implicite à l'égard des anciens palais mérovingiens disparut après le sacre. Une analyse rapide révèle que le nouveau roi sacré à Sois- sons résida aux mêmes lieux, Berny et Compiègne, que les rois de Soissons du VIe siècle. En fait, Pépin le Bref se posa en bénéficiaire d'un double héritage. Celui de ses ancêtres maires du palais : Quierzy, Verberie, Ver ; celui des rois mérovingiens : Compiègne, Berny, Ponthion. Mais, créateur d'une nouvelle dynastie, il ne manqua pas d'établir de nouvelles résidences, comme Attigny, Corbeny, Samoussy, qui avaient une claire signification politique. Sises au pays de Voncq (Attigny) ou en Laonnois (Corbeny, Samoussy), elles étaient, comme Ponthion, austrasiennes ; elles se trouvaient en outre aux marges des anciens territoires de Carloman (Laonnois) et de Pépin (Voncq). Ainsi, le réseau palatial tissé sous son règne transcendait le changement dynastique comme les limites des anciens régna neustrien et austrasien, ou celles, plus récentes, de 742. Par la présence du roi, il contribuait à la cohésion du regnum. Il est en fin de compte significatif de la réconciliation neustro-austrasienne contemporaine, illustrée, toujours au plan spatial, par une politique d'effacement des anciennes structures territoriales au profit d'une seule entité entre Seine et Rhin, la Francia, dont il forme véritablement l'armature. La fréquentation de ces palais par Pépin III obéit donc à des raisons éminemment politiques. La densité ultérieure des palais dans les régions retenues, notamment en Soissonnais, doit en fait beaucoup au règne du premier souverain carolingien. Le maintien de tous ces palatia à moyen ou long terme ne se comprend cependant pleinement que si l'on admet, à partir des choix de Pépin, la naissance d'une tradition dynastique conduisant ses successeurs à visiter régulièrement tous ces endroits (Josiane Barbier, Le système palatial franc : genèse et fonctionnement dans le nord-ouest du regnum.. In: Bibliothèque de l'école des chartes. 1990, tome 148 - www.persee.fr).

 

Autrement, on reste dans les parages de la Grèce.

 

Le Roman d’Alexandre est un recueil de légendes concernant les exploits d'Alexandre le Grand. Source des différents miroirs des princes médiévaux, il fut, malgré la diversité des versions, l’un des livres les plus répandus au Moyen Âge, objet des premières traductions dans les langues vernaculaires d'Europe. Concernant la littérature française, le poème d'Alexandre de Paris Li romans d’Alixandre marque l’apparition du vers de douze syllabes, nommé depuis pour cette raison alexandrin. Au XIIe siècle, les premières versions du roman d'Alexandre en langue vernaculaire apparaissent en Europe, parmi lesquelles il faut mentionner d'abord les trois versions françaises, qui dans l'histoire de la littérature sont restées comme «le» Roman d’Alexandre. [...] La troisième version a été composée vers 1180 par Alexandre de Paris en dialecte français (XIIe siècle) : elle comporte quatre branches en 16000 vers dodécasyllabes (d'où le sens donné au terme «alexandrin»). Augmenté ultérieurement par plusieurs auteurs anonymes puis mis en prose, le Roman d’Alexandre est l'un des premiers textes imprimés en France et connaît une grande vogue jusqu'en 1500 (fr.wikipedia.org - Roman d'Alexandre).

 

Dans la branche I du Roman d'Alexandre d'Alexandre de Paris, le manuscrit T propose "marceloine" pour Macédoine les manuscrit GDNJ "Mascedoine".

 

Le cercle de son hiaume ne peust esligier

Li rois de Maceline por or ne por denier,

Douze pierres i ot que fols ne doit baillier,

Devant sor le nasel un escharboucle chier (Elliot Monographs in the Romance Languages and Literatures, Numéro 38, 1949 - books.google.fr).

 

PĂ©pin et Byzance

 

Pépin satisfait des soumissions d'Astolphe, lui laissa la vie & la couronne ; mais les sermens qu'il avoit déjà profanés ne lui paroissant pas un gage assuré de sa foi, ii ne repassa dans ses états qu'après avoir vu le traité exécuté, au moins quant à ses parties les plus importantes; le pape reçut aussitôt les clefs de plusieurs places; & pour en perpétuer la mémoire, il fit graver sur une table, cette inscription dont on voit encore ces traces : Ce prince pieux a montré aux autres princes le chemin d'enrichir l'eglise en lui donnant l'Exarcat de Ravenne. Cette libéralité de Pépin étoit au moins ìndiscrète ; mais si la politique le blâme d'avoir enrichi un chef déjà trop redoutable par son empire absolu sur les consciences, elle le loue de l'autre de s'ètre réservé la souveraineté des terres de sa conquête; ce prince n'en donna que le domaine utile à Etienne, & s'y comporta au surplus comme dans les autres provinces de sa domination ; il donna le gouvernement de Ravenne à l'archevèque & aux tribuns, pour lui en tendre compte à lui-même. Après avoir donné des marques de son autorité dans toutes les autres villes, Pépin reprit la route de ses états & emporta le tiers des trésors qui étoient dans Pavie, pour se dédommager des frais de la guerre. Les Lombards, honteux de cet humiliant traité, soupiroient après l'éloignement de leur vainqueur: il leur restoit quelques places qu'ils s'étoient obligés de rendre par le traité. Astlolphe en éluda la restitution sous diffétens prétextes ; il les retenoit avec d'autant plus de confiance, qu'il ne croyoit pas cetre infraction suffisante pour occasionner une rupture avec Pépin, & pour déterminer ce prince à passer une troisème sois en Italie; il espéroit d'ailleurs qu'Etienne se contenteroit du sacrifice qu'il avoit été obligé de lui faire. Mais sa mort, qu'un accident occasionna, fit tout à coup changer la face des affaires. Didier, auparavant son connétable & alors son concurrent, mit le comble à la joie du pontife; ce nouveau monarque qui sentoit le prix de l'amitié de la cour de Rome, & plus encore de celle de France, au commencement d'un règne, promit de se resserrer dans les bornes les plus étroites de la Lombardie. Pépin reçut, sur ces entrefaites, des ambassadeurs de la part de l'empereur d'Orient. Les historiens qui sont mention de cette ambassade, ne disent pas quel en étoit le motif; mais on présume que c'étoit pour réclamer l'Exarcat & la Pentapole, dont on venoit de le dépouiller contre tout droit & sans aucun prétexte, puisqu'il n'avoit fait aucune démarche dont Pépin eût à se plaindre; peut-être aussi étoit-ce pour implorer ie secours de ce monarque contre les Bulgares qui désoloient la Thrace, & menaçoient Constantinople. Les ambassadeurs firent à Pépin de très-riches présens; entre autres curiosités, ils lui donnèrent un orgue qui étoit d'autant plus précieux, que c'étoit le premier que l'on eut vu et Occident. Le monarque François étoit alors au plus haut dégré de gloire où un prince pût aspirer: maitre de presque toutes les Gaules & de la plus belle partie de la Germanie, il avoit vaincu les Lombards & assuré la couronne de ces peuples sur la tête de Didier (Encyclopédie méthodique: ou par ordre de matières: par une société de gens de lettres, de savans et d'artistes, Tome IV, 1790 - books.google.fr).

 

Pour les Lombards, cf. quatrain III, 58 - Le traité d’Aix-la-Chapelle - 1747-1748 et IX, 54 - Exarchat de Ravenne - 2143-2144.

 

Typologie

 

Le report de 2171 sur l'intervalle pivot 747 - 775 (règne de Constantin Copronyme) donne -677 - -621.

 

-685 -546 : La dynastie des Mermnades règne en Lydie, qui occupe la partie la plus occidentale du plateau anatolien. [...] Elle se termine avec Crésus battu par Cyrus. La capitale Sardes est brûlée. Vers 1200, une dynastie héraclide se serait, selon Hérodote, emparée du pouvoir et, en 685, le dernier des Héraclides, Candaule, aurait été renversé et tué par Gygès, premier souverain de la dynastie des Mermnades - dont le nom signifie «Faucons». Ce Gygés apparaît sous le nom de «Gugu, roi de Luddu» sur les tablettes assyriennes d’Assurbanipal, car il recherche l’alliance d’Assur contre les Cimmériens qui ont détruit Gordion, la capitale phrygienne, et dévasté l’Urartu, le grand royaume établi dans la région du lac de Van et dans les montagnes d’Arménie. Gygès prend Colophon et Magnésie du Sipyle mais échoue devant Smyrne, et ménage de bonnes relations avec Milet et surtout Éphèse. En -659, Gygès fonde Dascylion pour concurrencer sur les rives de la Propontide (mer de Marmara) la colonie milésienne de Cyzique établie en 676. Souverain philhellène, il envoie de riches offrandes à Delphes et cherche à s’allier au pharaon Psammétique contre l’Assyrie. En -652, Gygès est tué lors d’une attaque des Cimmériens qui dévastent Sardes, Éphèse et Magnésie du Méandre. Son fils Ardys lui succède, et le troisième quart du VIIe siècle voit un certain retour au calme, favorisé par la mort de l’Assyrien Assurbanipal survenue en 626.

-652 -615 : Règne d’Ardys, qui s’empare de Priène (www.clio.fr).

 

Théophane donne d'une manière très exacte l'indication du jour où Constantin s'empara de Constantinople, maison n'est pas d'accord sur l'année où eut lieu la reddition. Les opérations militaires de cette campagne de seize mois paraissent avoir été très intéressantes. Constantin V s'y révèle tel qu'on le retrouve en bien des circonstances, stratège avisé et bon manœuvrier, très supérieur à son adversaire dont il viendra finalement à bout. Constantin gardait les thèmes fidèles des Anatoliques, des Thracésiens et des Cibyrrhéotes. L'Asie-Mineure, très foncièrement et très généralement favorable à l'iconoclasme, fut toujours l'appoint le plus sérieux de Copronyme, tandis qu'Artavasde ne put jamais compter tout à fait que sur l'armée du thème d'Opsikion qu'il immobilisa dès le début du conflit dans Constantinople. Pendant l'hiverde 741-742, le Copronyme, après une démonstration à Chrysopolis sur la rive opposée du Bosphore, alla prendre ses quartiers à Amorium. Pour s'affermir au pouvoir, Artavasde fit sacrer empereur son fils Nicéphore et envoya son second fils, Nicétas, comme stratège du thème des Arméniaques, le chargeant de prendre à revers l'armée de Constantin. Les opérations recommencèrent au mois de mai 742. A cette date, Constantin avait rallié à sa cause même le thème d'Ojisikion. Artavasde y entra et fit des dégâts, il passa dans le thème thracésien. Il comptait évidemment sur le concours de son fils Nicétas, formant une aile de son armée et chargé, avec les troupes d'Arménie, de prendre Constantin en queue pendant qu'Artavasde l'aborderait en tête. Mais la rapidité de manœuvre de Constantin fit échouer ce plan, d'ailleurs bien conçu. A la nouvelle du débarquement d'Artavasde, Constantin avait quitté Amorium, traversé la Phrygie et la Lydie, rejoint son compétiteur à Sardes où il l'avait battu, rejeté et poussé vers le nord. Ce ne fut pas une retraite, mais une déroute. Enfin Artavasde avec les débris de son armée gagna Cyzique, s'y embarqua et rentra à Constantinople. Pendant ce temps, le Copronyme se jetait sur Nicétas accourant d'Arménie et le battait à Modrina, août 742. Constantin n'ayant plus personne devant lui, arriva devant Chalcédoine au mois de septembre, s'embarqua et passa en Thrace d'où il commença le siège de Constantinople. On pouvait en prévoir l'issue lorsque Nicétas, ayant rallié les débris des troupes battues à Modrina, se présenta avec une armée de secours, à Chrysopolis. Constantin, sans lever le siège, franchit le détroit et marcha à l'ennemi qui ne l'attendait pas (H. Leclercq) (Histoire des conciles, Tome III, Deuxième partie, 1910 - www.theologica.fr).

 

Visible - Invisible

 

Au Livre II de La République de Platon, le sophiste Thrasymaque, soutenant devant Socrate que la justice n'est qu'une convention sociale, raconte la belle histoire de l'anneau de Gygès, berger au service du roi de Lydie. Gygès trouva dans une crevasse un cheval d'airain creux, percé de petites ouvertures à travers lesquelles, ayant glissé sa tête, il aperçut un cadavre qui était apparemment celui d'un géant. Entièrement nu, ce mort n'avait rien sur lui sauf un anneau d'or au doigt, dont Gygès s'empara avant de remonter à la surface. Au cours de la réunion des bergers, Gygès tourna par hasard le chaton de l'anneau vers la paume de sa main et devint soudain invisible. Il joua à tourner et retourner l'anneau, passant, comme dans un clignotement infernal, du visible à l'invisible, de l'invisible au visible. Sûr de son pouvoir, il se rendit plus tard au palais, il y séduisit la reine puis tua le roi sans effort ni risque, s'emparant tout à la fois de la femme de celui-ci et du pouvoir (Claude Lanzmann, L'homme invisible, La règle du jeu n°41, 2009 - books.google.fr).

 

Dans son récit des premières mesures prises par Léon l'Isaurien (Leo III Isaurus) contre le culte des images, l'auteur de la Vie de saint Etienne le Nouveau raconte (suivant la rédaction grecque) que l'empereur, ayant assemblé le peuple, prononça un discours des plus violents contre les saintes icônes, regardées par lui comme des idoles fabriquées, (allusion probable aux icônes acheiropoiètes) et conclut qu'on ne devait pas les vénérer. A ces mots un grand tumulte s'étant élevé parmi le peuple, Léon s'empressa de taire ce qui devait suivre cette déclaration et fit porter l'entretien sur un autre sujet.

 

Un texte latin de la même biographie (publié pour la première fois par Lïppomani (Vitae Sanctorum, Venise, 1551- 1558, 6 v. in 4°), reproduit dans les Vitae Sanctorum de Surius (Cologne 1570, 6 v. in-f°, 2e édit. 1618, tome IV, November, p. 621-649), puis par le cardinal Baronius, Annales Ecclesiastici, t. IX, p. 55-56, ad ann. 726, Rome, 1600) nous donne des détails sur la suite du discours impérial. Léon interloqué par les protestations du peuple changea aussitôt d'attitude, «comme s'il avait tourné l'anneau de Gygès», plus semblable à un caméléon qu'à un lion. «Mon avis, dit-il, n'est pas précisément de détruire les icônes, mais de les placer dans un endroit élevé, afin qu'aucune bouche ne puisse les effleurer et profaner ainsi des objets qui sont dignes d'honneur» (Louis Bréhier, Sur un texte relatif au début de la querelle iconoclaste. In: Échos d'Orient, tome 37, n°189-190, 1938 - www.persee.fr).

 

Constantin Copronyme fils de Léon l'Isaurien naquit en 719. Dès l'année suivante, le jour de Pâques 31 mars 720, il fut associé à l'empire avec le titre d'Auguste. Léon meurt en 741 et son, fils poursuit sa politique iconoclaste (Histoire générale de l'Église depuis la Création jusqu'à nos jours, Tome 16, 1872 - books.google.fr).

 

Pour les icônes, ce n’est pas seulement leur contenu qui signifie ce passage permanent, cet échange mouvant entre deux mondes ; leur facture elle-même semble incarner et résoudre parfaitement la problématique du visible et de l’invisible. C’est d’ailleurs là son origine historique, l’icône byzantine ayant été confrontée à la crise de l’iconoclasme avant d’en sortir victorieuse, comme un type de peinture propre à exprimer la nature double du Christ, à signifier l’incarnation du divin, et donc à rendre visible l’invisible (Karine Winkelvoss, Rilke et Venise : Poétique de l’intransitivité et poétique du passage In : Villes et écrivains, Berlin, Munich, Venise, 1999  - books.openedition.org).

 

Cf. quatrain VII, 39.

 

Des Antoine et le refus des images

 

En 753 le métropolite Pastilas avait été nommé comme coprésident du Concile de Hiéria, et l’évêque suffragant de Sylaion, la ville voisine, avait été choisi comme Patriarche de Constantinople par Constantin Copronyme. L’iconomaque Constantin-Antoine, jurisconsulte, moine puis évêque de Sylaion, fut patriarche de 754 en 766 sous le nom de Constantin II ; il aurait renforcé l’Empereur dans l’opinion que le culte des images entraînait la défaite des chrétiens. En 787, Sylaion, l’évêché tout proche de Pergè, était devenu métropole, et son chef était orthodoxe. Au début du ixe siècle, la fusion de Sylaion-Pergè était définitive, effet possible d’une victoire locale du parti iconodoule dans ce bastion très disputé. En 814, l’anathème fut prononcé contre l’évêque iconoclaste Antoine de Sylaion. Dans la «Vie d’Étienne le Jeune», Sylaion était cité avec Sykè comme limites de la région épargnée par l’hérésie, le long de la Propontide chypriote

 

Dans la «Vie d’Étienne le Jeune» sont citées les régions qu’il aurait conseillées comme lieux de refuge aux moines iconodoules. Elles étaient périphériques et comprenaient au nord-est du Pont Euxin, le sud de la Crimée [Chersonnèse taurique] et son voisinage ; sur l’Adriatique, une partie de l’Épire [Nicopolis, différente de celle de Thrace] et l’Italie soumise au Pape ; Chypre et la Propontide chypriote entre Sylaion et Sykè, et à l’est, la côte jusqu’à Tripoli, Tyr et Jaffa. Les localisations exactes restent délicates (Nicole Thierry, Topographie ponctuelle de l’iconomachie en Asie Mineure, In : Mélanges offerts à Hélène Ahrweiler, 1998 - books.google.fr).

 

Antoine-Constantin de Sylaion, qui sera la patriarche Antoine Ier de janvier 821 à sa mort fin 836 ou avant le 21 janvier 837, avait servi d'agent à Léon V pour tenter notamment de convertir Euthyme de Sardes à la cause iconoclaste ; son patriarcat est tout aussi insignifiant que le fut celui de Constantin II au VIIIe siècle ; c'est en tout cas ce dont témoignent les sources. Leur appartenance au camp iconoclaste a joué dans la damnatio memoriae qu'ils ont subie, tout comme la destruction des actes qu'ils ont pu émettre ou le passage sous silence de ceux-ci dans les sources iconodoules (Benjamin Moulet, Évêques, pouvoir et société à Byzance (viiie-xie siècle): Territoires, communautés et individus dans la société provinciale byzantine, 2016 - books.google.fr).

 

Le Scriptor Incertus de Leone Armenio nous informe que Constantin-Antoine Kassimatas (le futur patriarche Antoine 1er) avait appris la grammaire et était devenu nomikos (Hélène Saradi, Le notariat byzantin du IXe au XVe siècles, 1992 - books.google.fr).

 

Tout semble se précipiter. Michel Ier est injurié par la foule, signe que Dieu l'abandonne; les chroniques notent à la date du 4 mai une éclipse de soleil. A Constantinople, les adversaires des images se livrent à une étrange mise en scène, racontée ainsi par Théophane : «La ville faisait des litanies avec le patriarche dans l'église des Saints-Apôtres, lorsque quelques impies de la détestable hérésie de Constantin (V) haï de Dieu, après avoir verrouillé les portes des tombeaux des empereurs (qui sont en effet dans une pièce adjacente), sans que personne le remarquât en raison de la foule compacte, s'arrangèrent pour les ouvrir d'un coup comme par un miracle divin ; et, s'étant précipités à l'intérieur, ils se jetèrent sur le tombeau de l'égaré (Constantin V), l'invoquant lui et non pas Dieu, et disant : "Lève-toi et viens au secours de l'Etat qui se meurt !", et répandant partout le bruit que l'empereur s'était réellement dressé, à cheval, et était parti combattre les Bulgares, lui qui habite l'Enfer avec les démons !» Après la défaite militaire de Versinikia (juin 813), Michel Ier se déchargea de l'Empire sur le stratège Léon l'Arménien (Histoire du christianisme, Tome 4 : Évêques, moines et empereurs (610-1054), 1993 - books.google.fr).

 

À Constantinople, les populations associent iconoclasme et victoire militaire, iconodoulie et défaites, comme le montrent les pèlerinages en 813, à l'Église des Saints-Apôtres, sur le tombeau de Constantin V. Léon V l'Arménien, stratège des Anatoliques, monte sur le trône en 813. Léon V fait le même constat que Léon III et considère que Dieu a abandonné son peuple. De plus, Dieu exauce ses prières en faisant mourir le tsar des Bulgares Krum d'une hémorragie en avril 814 (Éric Limousin, 100 fiches d'histoire du moyen âge: Byzance et le monde musulman, 2005 - books.google.fr).

 

Désireux d'agir «selon les desseins de Dieu», Léon V interprétait ainsi l'histoire récente et choisissait son modèle (Constantin V au long règne victorieux); il constatait, en tout cas, que le ralliement à Nicée II n'était que partiel. Aussi décida-t-il de faire reprendre l'enquête par une petite équipe de laïcs et de clercs comprenant deux sénateurs (Jean Spektas et Eutychianos), trois moines (Léontios, Zosimos et l'Arménien Hamazasp), et surtout Jean le Grammairien, simple clerc du Palais encore peu connu, et Antoine évêque de Sylaion, choisi pour donner à l'opération une allure moins officieuse. Le Scriptor incertus rapporte de façon assez vraisemblable la première rencontre de Léon V avec Antoine, en juillet 814. L'empereur demande à l'évêque s'il est écrit quelque part de vénérer les images ; Antoine répond : «Ce n'est écrit nulle part, mais on dit que c'est une vieille tradition.» A quoi l'empereur rétorque : «S'il n'est pas textuellement écrit dans les Evangiles ou dans les Actes "Vénérez mon image", moi je n'accepte pas C'est bien alors le maître-mot, qui déclencha une recherche fébrile dans les bibliothèques des églises et des monastères, à laquelle Jean et Antoine donnèrent, nous dit-on, comme prétexte à ceux qui les interrogeaient que l'empereur faisait vérifier certaines prophéties sur la durée de son règne. Il fallut d'abord retrouver un exemplaire du Synodikon de Constantin V (c'est-à- dire des actes de Hiéréia), puis recomposer à partir de ce document un nouveau florilège patristique fournissant une base sérieuse de discussion. Les difficultés de l'enquête montrent le très bas niveau intellectuel de l'Eglise d'alors; sa réussite laisse présager une renaissance des lettres et un regain d'activité des ateliers de copie (Histoire du christianisme, Tome 4 : Évêques, moines et empereurs (610-1054), 1993 - books.google.fr).

 

Les clercs patriarcaux et impériaux s'affrontent et Léon V fait ôter le Christ de la Chalkè. La politique impériale entraîne un effritement rapide du front iconodoule et les défections se multiplient sur la base d'un iconoclasme modéré, comme le montre l'horos de 815 qui est une voie moyenne entre Hiéréia et Nicée (Éric Limousin, 100 fiches d'histoire du moyen âge: Byzance et le monde musulman, 2005 - books.google.fr).

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