Le grand siège de Malte

Le grand siège de Malte

 

IX, 61

 

2148-2149

 

La pille faite Ă  la coste marine,

Incita noua & parens amenez :

Plusieurs de Malte par le fait de Messine,

Estoit serrez feront mal guerdonnez.

 

Vers l'époque de la bataille de Saint-Quentin, la flotte de Soliman II avait ravagé les côtes de l'Italie et les Baléares. Décidé à ne pas laisser cette provocation impunie, Philippe II ordonna une expédition par terre et par mer d'Oran sur Tlemcen (1558); mais l'entreprise échoua. En 1561, les puissances de l'Italie résolurent de tenter un effort pour reconquérir Tripoli, que Charles-Quint avait donnée, avec l'ile de Malte, aux chevaliers de Rhodes, et que les Turcs leur avaient prise dix ans auparavant. Le grand maître de l'ordre, Jean de La Valette, détermina le roi d'Espagne à joindre ses galères et ses troupes aux forces de la religion, dont la flotte, rassemblée d'abord à Messine, puis à Malte, comptait deux cents vaisseaux. Piali-Pacha, commandant de la flotte turque, surprit les chrétiens et leur fit éprouver un horrible désastre.

 

Quatre ans après, Soliman attaqua dans leur ile, avec toutes les forces maritimes de son empire, les chevaliers de Malte, alliĂ©s infatigables de Philippe II dans sa lutte contre les Turcs. On sait avec quel hĂ©roĂŻsme les chevaliers repoussèrent durant quatre mois tous les efforts de la formidable armĂ©e du sultan. A leur tĂŞte combattait le grand maitre de l'ordre, l'intrĂ©pide Français Jean de La Valette, Ă  qui est demeurĂ© le principal honneur de cette heureuse rĂ©sistance : il en coĂ»ta sa vie au fameux Dragut et Ă  plus de vingt mille musulmans. Enfin un secours de dix mille Espagnols arriva sous la conduite du vice-roi de Sicile et contraignit les Turcs Ă  se rembarquer (septembre 1565) (H. Chevallier, PrĂ©cis d'histoire de France du Moyen Age et des temps modernes: Du quatorzième siècle au milieu du dix-septième, 1858 - books.google.fr, Laurent Chaulveron, Chronique de Nostradamus, 2022 - books.google.fr).

 

Cf. quatrain I, 9.

 

"Messine"

 

Au Grand Maître, le roi parle de son attachement indéfectible à l'île de Malte et de la confiance absolue qu'il place en l'Ordre, incitant les chevaliers à la résistance; au vice-roi, il annonce que celui-ci a les mains libres pour organiser le secours promis, et lui suggère de recruter des Espagnols dans le royaume de Naples, notamment dans les cités de Naples, Gaeta et Otrante puis de faire appel au soutien du duc de Milan et de la République de Venise. Les forces chrétiennes commencent mollement à se mobiliser. Le 10 juin, Gio Andrea Doria gagne Naples à la tête de 25 galères, transportant environ 1800 soldats espagnols, mais ne rejoint pas la Sicile, à cause de la présence, dans les eaux corses, de navires musulmans qui troubleraient l'avancée de sa flotte; quelques jours plus tard, on apprend que le roi de France Charles IX a refusé tout secours à l'Ordre et aux chevaliers français qui lui en ont fait la demande; enfin, le 21 juin, une lettre du vice-roi de Naples informe Don García de Toledo que le pape doit lui envoyer 600 soldats, sous le commandement de Pompeo Colonna. Ce n'est don qu'à la fin de juin, qu'un petit secours de chevaliers, de gentilshommes volontaires et de soldats est enfin réuni à Messine, prêt à se rendre à Malte (Anne Brogini, 1565, Malte dans la tourmente : Le Grand Siège de l'île par les Turcs, 2011 - books.google.fr).

 

"incita nova" : "citta nova", La Valette

 

La capitale de l'île est la Valette (Citta Nuova), l'une des plus fortes places de l'Europe, divisée en cinq villes ou forteresses, qui peuvent être défendues successivement et dont les ouvrages sont taillés dans le roc. Son port est partagé en deux, le petit au nord, et le grand au sud, séparés par une presqu'île sur laquelle est bâtie la principale partie de la ville. L'entrée est protégée de chaque côté par le fort Tigné, bâti sur la pointe nord, par le fort Ricasoli, bâti sur la pointe sud, et au centre par le fort Saint-Elme, qui est construit à l'extrémité de la presqu'île dont nous venons de parler et qui commande les deux ports. En outre, le port septentrional est commandé par le fort Manuel, situé dans une petite île au milieu de ce port; et le grand port, ou port méridional, est aussi protégé par le fort San Angelo, bâti sur l'une des deux pointes qui découpent la côte méridionale. La Valette est le port le plus beau et le plus sûr de la Méditerranée; refuge pour une marine militaire et point d'appui pour des opérations offensives, il commande toute cetto mer, menace Toulon et Carthagène, Minorque et la Corse, tient la clef de l'Afrique et de l'Italie, regarde Alger et Messine. Cette ville a été prise par les Français en 1798 et par les Anglais en 1800. Ses principaux monuments ont été construits sous la domination des anciens chevaliers, et donnent une juste idée de leur puissance. Le palais du grand maître offre de vastes salles ornées de colonnes en marbre, des portraits des chevaliers les plus célèbres et de tous les grands maîtres. L'église de Saint-Jean, qui renferme les tombeaux de ces nobles défenseurs de la croix, est encore décorée des dépouilles des mahométans. Dans cette ville, qui fut fondée en 1566 par le célèbre grand maitre dont elle porte le nom, on remarque encore 19 autres églises, 4 hôpitaux, de belles casernes, une riche bibliothèque publique et un jardin botanique (Victor-Adolphe Malte-Brun, Géographie universelle de Malte-Brun, Tome 3, 1862 - books.google.fr).

 

Acrostiche : LIPE

 

"lippe" : grec "lipas" gras. La lèvre inférieure, lorsqu'elle est grosse et avancée, s'appelle lippe, "lipas". Cette appellation s'explique facilement, parce qu'une grosse lèvre, bien charnue, ressemble à un corps gras. Lucien a employé "lipara cheilè", mais dans un autre sens. "lipos" ne signifiait pas seulement gras, mais encore riche, bien portant, beau, éclatant, et c'est de ce dernier sens qu'était venu le nom d'une pierre précieuse, appelée liparée, au moyen âge.

 

REMARQUE. Lippe apparait dans notre langue dès le XIe siècle, et l'on disait dĂ©jĂ  alors : faire la lipe, pour faire la moue. Lippe a passĂ© des Gaules en Allemagne et en Angleterre. Vieux français, lipe. Anglo-saxon, lippa Allemand, lippe. D'oĂą lippĂ©e, lippu (J. Espagnolle, L'origine du français, Tome 2, 1888 - books.google.fr).

 

La fête du 8 septembre était surtout célébrée avec pompe et magnificence. C'était le jour anniversaire de la levée du siége de Malte en 1565.

 

Tous les traits de la physionomie du Maltais trahissent son origine africaine. Comme les hommes de race barbaresque, il a le nez écrasé, les lèvres épaisses et relevées, le front bas, les cheveux crépus, l'œil noir et animé, la peau basanée, les membres puissamment musclés, quoique grêles en apparence, la taille courte et svelte. La beauté n'est pas rare chez les femmes, quoique leur figure offre le même caractère, sauf la couleur de la peau. La blancheur singulière des femmes de Malte étonne tous les étrangers qui arrivent de l'Italie méridionale, et qui se rappellent surtout la figure cuivrée des Siciliennes; mais la surprise cesse lorsqu'on apprend que les Maltaises ne s'exposent jamais au soleil, et qu'il n'est pas de soins qu'elles ne prennent pour conserver à leur teint tout son éclat et toute sa fraîcheur. Il est bien entendu qu'il n'est question ici que des hommes et des femmes issus de familles de sang non mêlé; les exceptions sont très-nombreuses, car les chevaliers ont, par leurs alliances secrètes, singulièrement altéré les caractères de la race primitive, et cela principalement dans la capitale et les lieux les plus voisins (Marie Armand P. d'Avezac-Macaya, Iles de l'Afrique, Volume 4 de L'univers, 1848 - books.google.fr).

 

Typologie

 

Le report de 2148 sur la date pivot 1565 donne 982.

 

Jouant sur les noms de lieux, Nostradamus dit : «Malte (autrefois Melite)» pour Melito (H. TornĂ©-Chavigny, Lettres du grand prophète d'après l'histoire prĂ©dite et jugĂ©e par Nostradamus et l'apocalypse interprĂ©tĂ©e par le mĂŞme auteur, 1870 - books.google.fr).

 

Cf. "Temple Melite" du quatrain I, 9.

 

Il est remarquable qu'Ibn-al Atir et la Brevis historia liberationis Messanæ s'accordent pour dire que les Normands commencèrent la conquête de la Sicile à la suite de conférences et négociations à Mileto. Cf. supra p. 347. Mais l'historien musulman se trompe en disant que Mileto avait été conquis en 982 (371 de l'égire) par Bardwil (c'est évidemment l'empereur Othon II qu'lbn-al Atir désigne par ce nom de Bardwil car en 982 Othon Il fit dans l'Italie méridionale une expédition restée célèbre) et que depuis lors cette ville n'avait pas cessé d'appartenir aux Francs. Cf. Amari : Storia T. L. II, p. 328, note 1 et T. III, p. 62 note 1. Aboulféda désigne Malte au lieu de Mileto comme rendez-vous entre Ibn-at Timna et Roger mais cette erreur de copiste est facile à corriger. Abulfedæ Annales T. III, 279. Hafniæ 1791 in-40 (Odon Delarc, Les Normands en Italie depuis les premières invasions jusqu'à l'avèvement de S. Grégoire VII (859-862. 1016-1073), 1883 - books.google.fr).

 

Si le danger sarrasin, grâce Ă  l'action pontificale, s'est estompĂ© en Italie centrale, il est encore vivant dans le sud de la pĂ©ninsule : la dĂ©faite de l'empereur Otton II au cap Colonne, en Calabre, en 982, face aux forces des Kalbites de Sicile en est la preuve Ă©clatante. La colonie sarrasine du Freinet n'est Ă©liminĂ©e qu'en 972, et la menace musulmane reste une rĂ©alitĂ© dans le sud de l'Italie jusqu'aux environs de 1030, quand elle est Ă©liminĂ©e par les citĂ©s-Etats italiennes (Venise, Pise, GĂŞnes) (Cahiers d'histoire, NumĂ©ros 78 Ă  79, 2000 - books.google.fr).

 

Les Aghlabides (kalbites) de Tunisie conquièrent la Sicile (827) et Malte (870). Ils se maintiennet à Malte jusqu'en 1090 où ils sont assujettis par les Normands.

 

nostradamus-centuries@laposte.net