L'ordonnance du 3 mars 1357 IX, 66 2152 Paix, vnion sera & changement, Estats, offices bas, haut, & haut bien bas Dresser voyage, le fruict premier tourment, Guerre cesser, ciuil procez, debats. Trêve et procès Sur l'ordre de son père, ayant quitté le champ de bataille de Poitiers comme les choses tournaient mal, le dauphin Charles revint directement à Paris. Le pays était consterné; puis il devint furieux, furieux contre le gouvernement, furieux contre les nobles, qui formaient presque toute l'armée royale. Charles eut recours immédiatement à la tactique ordinaire des siens : il essaya, par une pacification rapide, d'empêcher les Anglais de cueillir tous les fruits de leur victoire. Il pria la Papauté de s'entremettre. Dès décembre 1356, il eut à Metz, avec l'Empereur, les légats pontificaux et les envoyés anglais, des conférences; les prétentions anglaises furent exorbitantes; la conversation générale échoua, mais la particulière avec l'Empereur aboutit à un renouvellement de l'alliance. Jean voulut reprendre la maneuvre à son compte et, par l'intermédiaire du Saint-Siège, conclut avec l'Angleterre, personnellement et directement, une trêve à Bordeaux (23 mars 1357); la trêve devait durer jusqu'en avril 1359. Cette pacification imposée par le roi prisonnier eut le don d'exaspérer la foule. Elle voulait combattre, elle. Elle n'entendait pas rester sur la honte du dernier échec. C'était la noblesse et la royauté qui avaient été vaincues et ignominieusement, à Poitiers et à Crécy. Ce n'était pas le bon peuple de France, les paysans aux muscles durs et les bourgeois prudents et réfléchis. On verrait comme ils sauraient venger l'honneur du pays, entaché par l'impéritie des chevaliers et du roi. Et voilà que c'était le roi, le premier des chevaliers, qui venait couper bras et jambe à la volonté nationale de revanche. Les Etats Généraux de 1356-1357 furent l'écho amplifié de ces colères. Ils obligèrent le Dauphin à prendre le titre de régent pour empêcher le retour de pareille ingérence du roi prisonnier. Ils intentèrent des procès aux anciens conseillers de Jean, et ils les destituèrent. Ils placèrent aux côtés de Charles un conseil de régence et un conseil de guerre pour le contrôler et surtout le diriger. Ils le contraignirent à relâcher le roi de Navarre (printemps 1357), qui languissait toujours en prison pour avoir soutenu le pauvre peuple. Avec le Navarrais, le trio fut complet : Etienne Marcel et Robert de Coq qui menaient déjà toute la danse. Ce furent de rudes épreuves pour le Dauphin Charles; du moins lui servirent-elles de rapide et sûr apprentissage (Pierre Corbin, Histoire de la politique extérieure de la France, Tome 1, 1912 - books.google.fr). "paix" et "union" antagonistes Les Etats d'octobre 1356 manifestent ainsi l'irruption sur la scène politique d'une force nouvelle porteuse de considérables enjeux. La captivité du roi et le traumatisme provoqué par la défaite militaire n'ont pas seulement accru chez les représentants des trois ordres le désir de réforme du royaume. Ils entendent bien désormais imposer la participation organique et régulière des Etats généraux, et occuper eux-mêmes une place dans l'Etat monarchique. De 1356 à 1358, les assemblées de la langue d'oïl vont se réunir sept fois. En février 1357, les députés parviennent à imposer une ordonnance (publiée le 3 mars) en contrepartie de l'impôt levé par eux pour la poursuite de la guerre. Ce texte célèbre prescrit l'épuration de toute l'administration royale, la liberté pour les Etats de se réunir eux-mêmes, sans convocation du roi. Il est exact, comme le soulignait déjà Michelet, que l'ordonnance du 3 mars 1357 "changeait d'un coup le gouvernement (...), mettait l'administration dans les mains des Etats". On sait ce qu'il advint. D'avril 1357 à août 1358 l'œuvre réformatrice allait peu à peu être compromise par la politique de paix poursuivie à Londres par le roi prisonnier (Jacques Krynen, Le prince tyant ne peut longuement durer, Justice et politique : de la guerre de Cent Ans aux fusillés de 1914, 2021 - books.google.fr). Les trois ordres ne se montrèrent unis qu'aux états de 1355 et 1356. Malheureusement cette union n'eut aucun fruit durable. Au lieu d'imiter l'exemple des barons d'Angleterre, dans une circonstance analogue; au lieu de contraindre le monarque à remplir ses déclarations et ses engagemens; au lieu de constituer le jugement des pairs; de rendre l'impôt annuel, et, par ce moyen, la convocation des assemblées indispensable, ils abandonnèrent, en 1359, la part que les assemblées précédentes avaient prise au Gouvernement (Organisation de la puissance civile dans l'intérêt monarchique, 1820 - books.google.fr). "dresser le voyage" Presque tout le reste de l'an 1573 s'écoula doucement en festoiemens d'ambassadeurs Poulonnois & à dresser le voyage de leur Roy : apres le partement duquel les aduersaires du repos public n'espians autre opportunité retournerent à leur premier mesnage (Jean Le Frère, La vraye et entière histoire des troubles et guerres civiles, 1576 - books.google.fr). "dresser" : péparer (Jean-Paul Clébert, Nostradamus, mode d'emploi: la clé des prophéties, 1981 - books.google.fr). S'utilise aussi pour une expédition militaire : "c'estoit pour dresser le voyage de Metz" (sous le roi de France Henri II, 1552) (Nicole Gilles, Les Chroniques Et Annales De France Dez L'Origine Des Francoys, Et Leurs Venues Ez Gaules, 1585 - books.google.fr). Le voyage de Metz Ce voyage, qui paraît si peu opportun et qui coûtera si cher au Trésor en une période où il est atrocement vide, a étonné. Que va faire le dauphin à Metz ? Malgré les explications qu'a cherchées le biographe de Charles V, le consciencieux Delachenal, on ne saisit pas bien l'intérêt de ce déplacement. Le duc de Normandie a certainement un vif désir de parler à son oncle, de lui demander conseil et appui. Il rapportera pourtant peu de choses du voyage : une vague entente, la reconnaissance implicite de l'occupation déjà ancienne de certaines villes d'Empire et un prêt de 50000 florins. En échange, Charles prête pour le Dauphiné un hommage que son père ne l'aurait pas autorisé à consentir. Le jeune duc de Bourgogne, Philippe de Rouvres, prête un semblable hommage pour le comté de Bourgogne. Pendant que le duc est en Lorraine, laissant à Paris son frère Louis, Étienne Marcel fait de nouveau parler de lui. Les États ont été dissous sans avoir abouti et le problème de la monnaie n'a pas été résolu. On se rappelle qu'avant Poitiers le roi Jean a été contraint, pour payer ses soldats, de faire travailler ses ateliers monétaires et, pour cela d'élever considérablement le prix auquel ils achètent le métal précieux. La monnaie ordonnée par les États de 1355 était une monnaie vingt-quatrième et on en était arrivé à une monnaie soixantième. Ces qualifications de monnaies demandent quelques explications, sans qu'il soit possible toutefois d'entrer dans les détails de toutes les combinaisons de la frappe. Pour définir une monnaie d'alors, il faut considérer, premièrement, le nombre de pièces qui sont taillées dans un même poids de métal qu'on appelle le marc d'argent ou le marc d'or; deuxièmement l'aloi, c'est-à -dire le titre de ces pièces, la proportion de métal fin qu'elles contiennent; et troisièmement, la valeur de ces pièces par rapport à la monnaie de compte qui s'exprime en livres, sous et deniers. La combinaison de ces trois éléments permet des variations infinies qui se définissent suivant une formule assez compliquée dont le produit, multiplié par un nombre constant, le chiffre 5, donne ce qu'on appelle le «pied» de la monnaie (Raymond Cazelles, Etienne Marcel: la révolte de Paris, 2006 - books.google.fr). L'ordonnance du Dauphin prévoyait une réévaluation et non une dépréciation de la monnaie de compte de la langue d'oïl. Mais aussi un décri des espèces de billon et d'argent et l'obligation de les porter aux ateliers pour les fondre et les retirer de la circulation. C'est cette dernière mesure à laquelle les marchands étaient opposés. A Toulouse, en langue d'oc, le roi avait reconnu qu'il ne pouvait changer le cours de la monnaie et que le devoir des sujets est de s'y opposer. Etienne Marcel s'appuyait sur cet exemple et souhaitait conserver sous la coupe des Etats généraux le gouvernement du roi, en l'empêchant d'obtenir des subsides par manipulation de la monnaie, sans leur participation (Raymond Cazelles, Société politique, noblesse et couronne sous Jean le Bon et Charles V, 1982 - books.google.fr). Le dauphin va à Metz rendre hommage à son oncle l’empereur Charles IV pour le Dauphiné ce qui lui permet d’obtenir son soutien diplomatique. À son retour en mars 1357, il accepte la promulgation de la «grande ordonnance», esquisse d’une monarchie contrôlée et vaste plan de réorganisation administrative, mais obtient le maintien en captivité de Charles de Navarre. Une commission d’épuration doit destituer et condamner les fonctionnaires fautifs (et particulièrement les collecteurs d’impôts indélicats) et confisquer leurs biens. Neuf conseillers du dauphin sont révoqués (Étienne Marcel tient sa vengeance contre Robert de Lorris). Six représentants des états entrent au conseil du roi qui devient un conseil de tutelle. L’administration royale est surveillée de près : les finances, et particulièrement les mutations monétaires et les subsides extraordinaires, sont contrôlées par les états (fr.wikipedia.org - Etienne Marcel). Les Flandres Le mécontentement que causa le départ du dauphin pour Metz fut augmenté encore par le départ de la reine, sa belle-mère, Jeanne de Boulogne, pour Dijon. La nation, dans sa détresse, se croyait abandonnée par les chefs, qui auraient dû se faire un devoir de la défendre. Jeanne ne songeait qu'à marier son fils du premier lit, Philippe, duc de Bourgogne, alors âgé de onze ans et demi, avec Marguerite de Flandre, qui n'en avait pas plus de sept. Ce mariage fut en effet célébré au mois d'avril 1357, et à l'occasion de l'union de ces deux enfants, la Bourgogne et la Flandre n'entendirent plus parler que de fêtes somptueuses, de présents magnifiques à distribuer, d'achats de terres et de maisons de plaisance, de contributions extraordinaires à recueillir, pour subvenir à ce luxe insensé (Jean-Charles-Léonard Simonde Sismondi, Histoire des Français, Tome 6, 1847 - books.google.fr). Cf. quatrain précédent IX, 65. Haut et bas Le Dauphin fait sommer Marcel de laisser passer la nouvelle émission de monnaie. Peuple et prévôts en armes refusent à l'unanimité, et forcent Charles à s'engager à ne plus changer le titre des deniers publics. L'anarchie politique d'en haut courbe la tête devant celle d'en bas; et, pour sa propre sauvegarde, convoque les États généraux. [...] Le 3 mars, assemblée générale dans la grand'chambre du parlement. Robert le Coq, évêque de Laon, au nom du clergé national, assigne les gouvernants en responsabilité des fléaux publics. Il exige la destitution de tout le Conseil du roi, la suspension de tous les grands officiers du royaume, l'envoi dans toute la France de réformateurs élus par les trois Ordres et institués officiellement par le Dauphin. Jean de Picquigny pour la noblesse, Nicolas le Chanteur et Étienne Marcel pour le Tiers, appuient de toute leur force l'évêque de Laon (Joseph Alexandre marquis Saint-Yves d'Alveydre, La France vraie: mission des français, 1887 - books.google.fr). "fruit premier tourment" Un tourment et un tourmente, qui étaient tous deus "tourment" et "tourmente" au XVIe siècle, se sont mués au XVIIe siècle en un tourment qui n'est plus que un tourmente qui n'est plus que "tourment" et en "tourmente" qui n'est plus que "tourmente" (J. Gilliéron, Leurs étimologies, Revue de philologie française, 1920 - books.google.fr). "tourmente" : émeute (Tristan Delamare, Nouveau dictionnaire des mots croisés de I à Z, 2013 - books.google.fr). Étienne Marcel ne dépassait pas encore ses droits de prévôt des marchands : il en usait avec énergie, jusqu'aux extrêmes limites de la légalité, pour résister au duc de Normandie. Le voyage de Metz tint le dauphin éloigné de Paris du 5 décembre 1356 au 14 janvier 1357. Il paraît assez difficile d'établir si ce voyage était réellement nécessaire, au point de vue de la politique intérieure et extérieure. Le comte d'Anjou, frère du dauphin, qui était demeuré à Paris avec le titre de lieutenant, eut à se débattre contre les prétentions d'Étienne Marcel et de la collectivité parisienne et il ne sut pas leur résister avec l'habileté du duc de Normandie. Avant son départ, le dauphin, fatigué de demander en vain des subsides à la municipalité parisienne, s'était résolu à se procurer par une mutation de monnaies les ressources qui lui manquaient : son mandement, qui avait été rédigé dès le 23 novembre, ne fut publié que le 10 décembre. La mesure était maladroite, et le temps que le dauphin laissa écouler entre la rédaction du mandement et sa publication indique assez qu'il n'était pas sans redouter la colère des Parisiens. On ne peut s'expliquer, car des besoins d'argent pressants ne constituent pas une excuse suffisante, que le duc de Normandie, toujours si averti, ait laissé à son frère le soin de faire appliquer une mesure si détestée (Bulletin de la bibliothèque et des travaux historiques, Volumes 6 à 7, 1913 - books.google.fr). Ne voit-on pas le Faubourg Saint-Antoine prendre part au mouvement populaire suscité par Étienne Marcel, et dater fièrement du 19 janvier 1357 sa première émeute, sa première prise d'armes contre l'injustice et les abus du Pouvoir ? (La Renaissance, Volume 4, 1921 - books.google.fr). Le duc revint le 14 janvier 1357, accompagné du chancelier Pierre de la Forêt, qui venait d'être nommé cardinal par le pape; le 19, il manda à Saint-Germain-l'Auxerrois le prévôt et les échevins, et leur signifia de "cesser l'empêchement qu'ils avoient mis au cours de la monnoie nouvelle." - Rien n'en ferons ! répliquèrent le prévôt et les échevins. «Et fit commander ledit prévôt par toute la ville que chacun s'armât.» Tous les métiers cessèrent à l'instant leurs travaux, descendirent en armes dans les rues et déployèrent leurs bannières à l'image des patrons de chaque corporation. Le duc de Normandie fut tellement effrayé qu'il engagea ses principaux conseillers à s'éloigner ou à se cacher, rappela Marcel le lendemain de grand matin au Palais, et lui déclara qu'il consentait que « ladite monnoie » n'eût point cours, et que les députés des trois ordres s'assemblassent quand bon leur semblerai; que, de plus, il «boutoit» hors de son conseil les sept grands officiers dénoncés par les États, et les ferait prendre et mettre en justice s'il les pouvait trouver (20 janvier 1357). «Desquelles choses ledit prévôt requit lettres qui lui furent octroyées». Tel fut le succès du premier essai que le corps municipal fit de sa force l'émeute parisienne conquit ce qui avait été refusé à l'intervention régulière des États-Généraux, et la révolution reprit son cours (Henri Martin, Histoire de France depuis les temps les plus reculés jusqu'en 1789, Tome 5, 1855 - books.google.fr). Acrostiche : PEDG, pédagogie Charles V créa en son palais du Louvre une monde de livres conçu pour les rois et les princes, sa librairie comptera plus de 900 ouvrages. Le français commence à se substituer au latin, devient langue de culture par volonté royale; Politique, Economique, Ethique d'Aristote sont traduits en français. Voici le traducteur Nicole Oresme présentant, agenouillé, les écrits du grec au Valois. Dans une autre miniature, Charles V commande la traduction qui sera apportée au roi et montrée. “La considéracion et le propos de notre bon roy est à recommander qui fait les bons livres et excellens translater en françois." Plus qu'une simple mise en images de la politique de traduction instaurée par Charles V, cette peinture illustre l'ambitieuse translatio studii voulue par le sage roi (Art & métiers du livre, Numéros 201 à 206, 1997 - books.google.fr, (Tous les savoirs du monde: encyclopédies et bibliothèques, de Sumer au XXIe siècle, 1996 - books.google.fr). L'ouvrage éducatif de Vincent de Beauvais (1264), pédagogue des enfants de Saint Louis, est traduit en français en 1382 à la demande de Charles V. Les méthodes pédagogiques mises en oeuvre combinent l'usage de la semonce et du fouet (Danièle Alexandre-Bidon, Le patrimoine de l'éducation nationale, 1999 - books.google.fr). La rencontre du Defensor Pacis (rédigé par Marsile de Padoue en collaboration avec Jean de Jandun entre 1318 et 1324), du Songe du Vergier (Ouvrage anonyme français parfois attribué à Évrard de Trémaugnon, écrit vers 1378, probablement sur l'ordre de Charles V) et des gloses d'Oresme est-elle purement fortuite ? Les trois oeuvres comportent plus d'un dénominateur commun, et notamment l'aspect réformateur et quasi pédagogique qui les anime, conjoint au souci politique qui les inspire, tant au plan des institutions politiques qu'à celui des institutions ecclésiastiques. [...] Oresme précise dans la préface de sa traduction des Politiques qu'il a pour propos principal d'analyser des idées et des principes susceptibles d'être appliqués aux institutions de son époque aux fins de réforme. "De même qu'il y a un art de la médecine, qui a pour finalité de conserver la santé, de la même façon, l'art de gouverner dont la politique est la science a pour finalité de «soutenir la cure de la chose publique et (elle est la science) qui, par l'industrie de sa prudence et par la balance ou poies de sa justice et par la constance et fermeté de sa fortitude et par la patience de son attrempance donne medicine au salut de tous» (Jeannine Quillet, La philosophie politique du Songe du Vergier, 1378: sources doctrinales, 1977 - books.google.fr). Typologie Le report de 2152 sur la date pivot 1357 donne 562. 25 novembre : complot contre Justinien. Bélisaire est impliqué, semble-t-il malgré lui, puis réhabilité le 19 juillet 563. Cependant il ne retrouve plus jusqu’à sa mort de commandement important (fr.wikipedia.org - Année 562). En France les évocations trop fréquentes, & faites sans cause légitime, ont toujours été regardées comme contraires au bien de la justice; & les anciennes ordonnances de nos rois veulent qu'on laiffe à chaque juge ordinaire la connoissance des affaires de son district. Telles font entr'autres celles de Philippe-le-bel, en 1302; de Philippe de Valois, en 1344 du roi Jean, en 1351 & 1355; de Charles V, en 1357; de Charles VI, en 1408, & autres postérieurs (Encyclopédie, ou Dictionnaire raisonné des sciences, des arts et des métiers, Tome 13 : Esp-Fer, 1781 - books.google.fr). Dans la Novelle 69, du 1er juin, le prince se plaint amèrement des évocations obtenues par les hommes puissants, et des vexations par lesquelles ils traînaient leurs adversaires, souvent pauvres, devant des juges éloignés. Au lieu de les renvoyer à leurs juges naturels, Justinien n'y apporte que d'insuffisants palliatifs. Il reconnaît aussi, sans y remédier, l'inconvénient résultant des priviléges des établissements ecclésiastiques. Procope, dans ses Anecdota, nous fait connaître que nul n'a plus que Justinien abusé des évocations, pour en trafiquer aux dépens des deux parties, Beaucoup des Novelles qui nous ont été conservées ne sont que crits. C'est d'ailleurs ce qui est confirmé par la Novelle 73, du 4 juin (François André Isambert, Histoire de Justinien, Tome 1, 1856 - books.google.fr). En 1357, le pays se prononça dans le sens de ses mandataires qui, sous l'entraînement des idées populaires, s'exprimèrent d'une manière plus menaçante qu'en 1356. Par l'organe de Robert-le-Coq, évêque de Caen, ils attaquèrent les abus avec une violence que le désordre effroyable du temps peut seul expliquer. Ils demandèrent de nouveau le renvoi de plusieurs officiers de finances et de justice, le droit de s'assembler deux fois par an sans convocation et la nomination d'une commission de trente-six membres «pour ordonner les besognes du royaume et à laquelle tout le monde serait tenu d'obéir.» C'était la substitution de l'autorité de la commission des états à celle du roi. Le dauphin dut céder et signer l'ordonnance de réforme du 3 mars 1357, par laquelle il dépossédait de leurs charges un grand nombre d'officiers et s'engageait à rendre la justice impartiale et prompte, à ne plus vendre les offices de judicature, etc. La plupart de ces réclamations étaient légitimes au fond, mais exagérées, et elles eurent pour effet la complète suspension du gouvernement et de la justice. Le Parlement de Paris, appelé en 1364 la cour de France, n'était pas encore permanent et des lettres patentes, du mois d'août 1366, le rapellent d'une manière expresse. D'autres lettres patentes de 1366, portant évocation au grand conseil des contestations soumises au Parlement entre le duc de Berry et plusieurs églises du Berry et de l'Auvergne, prouvent que l'abus des évocations remonte au règne de Charles V (Ennemond Fayard, Aperçu historique sur le Parlement de Paris, Tome 1, 1870 - books.google.fr). En l’an XII, l’auteur du Dictionnaire raisonné des matières de législation définissait l’évocation comme «l’action de tirer une cause d’un tribunal pour la remettre à un autre; d’evocare, appeler quelqu’un dans un autre lieu que celui où il est». L’évocation-récusation soulève peu de critiques, voire d’observations, de la part des praticiens : elle s’inscrit dans la logique d’un ensemble de voies de recours – à côté de la cassation, par exemple – tendant à réguler la procédure et le fonctionnement des institutions judiciaires afin d’assurer une justice équitable. En revanche, l’évocation-dessaisissement, dont une des premières formes a visé les juridictions ecclésiastiques, a souvent été vivement contestée. Ainsi, un des plus ardents défenseurs de la cause parlementaire, La Rocheflavin, ne se prononce pratiquement pas sur la première technique; il est en revanche disert sur la seconde. Il en fait remonter l’origine à la guerre de Cent ans : dans la confusion du temps «ceux qui avoient la force et puissance par-devers eux, pour gouverner toutes choses à leur appétit, faisoient évoquer les affaires qu’il leur plaisoit par- devers le conseil du roi» composé au gré du succès ou de l’insuccès des factions. Ainsi le parlement se trouvait-il privé des causes qui lui revenaient. L’usage de la justice retenue prend ainsi la forme, lorsqu’il s’agit du roi, d’évocations de propre mouvement (le proprio motu canonique), celles, précisément, qui sont contestées par les cours supérieures. À la suite de la réunion des États généraux, Henri III, en mai 1579, avait par l’ordonnance de Blois (art. 97) déclaré ne plus vouloir donner de lettres d’évocation, générales ou particulières, «de nostre propre mouvement» mais confier l’examen des demandes d’évocation aux maîtres des requêtes de l’Hôtel (Guillaume Leyte, Les évocations, entre régulation juridique et arbitrage politique, Histoire, économie & société, 2010/3 - www.cairn.info). |