Bataille de l'Ecluse

Bataille de l'Ecluse

 

IX, 79

 

2161-2162

 

Le chef de classe par fraude stratageme,

Fera timides sortir de leurs galeres,

Sortis meurtris chefs renieux de cresme,

Puis par l'embusche luy rendront le saleres.

 

Bataille de l'Ecluse

 

Ce qui frappe à première vue quand on lit les divers récits de la bataille de l'Écluse, c'est la grande supériorité des Anglais sur les Français au point de vue de la tactique navale. Le roi Édouard et ses lieutenants prennent grand soin, avant d'attaquer, de faire inspecter les lignes ennemies; puis ils ordonnent leurs vaisseaux, «mettant les plus forts devant, les archers aux extrémités des lignes, et entre deux nefs d'archers une de gens d'armes». En outre ils forment sur le côté un corps de réserve composé d'archers pour soutenir et secourir ceux qui en auraient besoin. Ces dispositions prises, la flotte anglaise s'avance sur la flotte française. Dès le lever du soleil, les Français, les voiles carguées, ont réuni en un seul leurs quatre corps de batailles, et ont joint les uns aux autres tous leurs bâtiments au moyen de cordes et de chaînes de fer; ils ont placé en avant leurs grandes nefs garnies d'archers génois. Ces nefs forment comme un véritable mur d'enceinte; les châteaux de proue figurent les tours, et les châteaux d'amont, au sommet des mâts, s'élèvent comme de véritables donjons dont les défenseurs s'apprêtent à lancer sur les assaillants les pierres dont les barques sont pleines. La flotte française présente un front impénétrable.

 

On a dit que si les Français furent vaincus dans cette journĂ©e, cela tint Ă  leurs mauvaises dispositions autant qu'Ă  l'infĂ©rioritĂ© de leurs troupes. On a reprochĂ© aux amiraux français de s'ĂŞtre ancrĂ©s dans une anse resserrĂ©e oĂą il devait leur ĂŞtre impossible de dĂ©ployer leurs navires. Nous croyons que ce reproche n'est qu'Ă  moitiĂ© juste. Si, en effet, les Français avaient conservĂ© cet ordre de bataille que nous venons d'indiquer, jamais la flotte anglaise n'aurait rĂ©ussi Ă  forcer le passage. Nous allons tâcher d'expliquer comment, Ă  la suite d'une manĹ“uvre habilement combinĂ©e, les Anglais parvinrent Ă  faire rompre d'elles-mĂŞmes les lignes françaises, et Ă  isoler ainsi les navires ennemis, qu'ils attaquèrent les uns après les autres. Tant que les navires français restèrent joints les uns aux autres, les marins d'un bord passaient sur le bord voisin au moyen de ponts ; s'ils avaient Ă©tĂ© attaquĂ©s dans cette position, ils auraient pu se porter secours rĂ©ciproquement. C'est donc, selon nous, pour dĂ©sunir les bâtiments français et non pour gagner l'avantage du vent, du soleil et du flot, que les Anglais exĂ©cutèrent un mouvement de retraite (stratagème qui avait si bien rĂ©ussi Ă  Guillaume de Normandie Ă  la bataille d'Hastings). - «Tunc Anglici, perpendentes navigium francigenarum fore cum cathenis ferreis in una acie adeo colligatum quod non potuit penetrari retro paululum navigarunt. Francigenae vero, per hoc decepti, suum navigium dissolverunt, et Anglicos ut credebant fugientes insequi nitebantur.» (Roberti de Avesbury historia, p. 54). - Barbevaire avait proposĂ© un plan de bataille tout diffĂ©rent de celui des amiraux français; Ă  l'approche de la flotte anglaise, n'ayant pu obtenir qu'on prĂ®t position en pleine mer, il se retira avec le corps qu'il commandait. Seules les Chroniques de Saint-Denys et la chronique des quatre premiers Valois rapportent ce fait de la retraite de Barbevaire. Dans un des mss. de Froissard, il est dit que Barbevaire se sauva Ă  la fin de la bataille; telle est croyons-nous la vĂ©ritĂ©. Nous voyons, en effet, que, le 12 janvier 1341, Philippe VI fit don Ă  P. Barbevaire de 100 l. t., «à condition de faire venir de GĂŞnes en nostre dit royaume sa femme et ses enfants pour y faire perpĂ©tuelle rĂ©sidence». Or il est bien Ă©vident que le roi n'aurait pas fait ce prĂ©sent Ă  Barbevaire si celui-ci avait pris la fuite Ă  l'Écluse. Un des Actes normands jette un nouveau jour sur cette question; nous lisons dans un compte du bailliage de Caen : «pour lettres envoiĂ©es Ă  touz les justiciers demouranz sur les pors de la mer, pour faire prendre et arrester tous les GĂ©nevois de la galiĂ©e Barbevaire pour la traison qu'il li avoient faite, si comme le bailli de Caux tesmoignoit, VI s. VI d.» D'après cet extrait on peut supposer que ce fut Barbevaire qui fut abandonnĂ© par ses soldats Ă  la bataille de l'Écluse. — «La bataille commence : archers et arbalĂ©triers dĂ©cochent leurs flèches, bideaux lancent leurs dards; les dĂ©fenseurs des châteaux d'amont font pleuvoir sur les assaillants des grĂŞles de pierres.» Puis on jette les grappins et on en vient Ă  l'abordage. AussitĂ´t qu'un navire est pris, le vainqueur foule aux pieds l'Ă©tendard du vaincu et arbore immĂ©diatement le pavillon national. Robert d'Avesbury et Walsingham rapportent que les Français aimèrent mieux, se voyant vaincus, se prĂ©cipiter dans la mer que de pĂ©rir sous les coups des Anglais. Ce fait, qui rappelle l'histoire d'un nigaud cĂ©lèbre, ne nous paraĂ®t pas très-vraisemblable; aussi tâcherons-nous de l'expliquer autrement que ne l'ont fait les susdits historiens. Il suffit pour cela de citer la phrase suivante de W. Hemingford : Depositis armis suis qui intus erant scaphas intrabant, sed antequam terram tangere possent, naviculae nimis oneratĹ“, submersis circa II milibus hominum, profundum maris perierunt. Cette bataille ne nous donne pas grands renseignements sur l'Ă©tat de dĂ©veloppement oĂą en Ă©tait alors arrivĂ©e la tactique navale, parce qu'elle se livra dans une anse resserrĂ©e oĂą les commandants de flottes ne pouvaient faire exĂ©cuter ces Ă©volutions qui constituent rĂ©ellement la science de la mer. Il y a bien eu, sous Philippe VI, deux batailles livrĂ©es en haute mer, mais les Français n'y ont pris aucune part. Cette bataille de l'Écluse ne nous prĂ©sente que des luttes d'homme Ă  homme, et, comme dit Jal, des siĂ©ges de citadelles par d'autres citadelles. On doit se demander alors comment les Français furent vaincus, bien qu'ils eussent montrĂ© un très-grand courage. Trois causes, selon nous,amenèrent la dĂ©faite des Français. La première fut que les soudoyers qui combattaient sur la flotte française Ă©taient, comme soldats, bien infĂ©rieurs aux hommes d'armes et aux archers anglais. «Si avint que Beuchet, qui estoit un des souverains, ne voult recevoir gentil gent aveques soy pour ce qu'il vouloient avoir trop grans gages; mais retint povres poissonniers et mariniers, pour ce qu'il en avoit grant marchiĂ©; et de tieux gens fist-il l'armĂ©e.» Certes une armĂ©e navale composĂ©e uniquement de marins eĂ»t Ă©tĂ© prĂ©fĂ©rable dans le cas d'une bataille en pleine mer ou d'une expĂ©dition sur les cĂ´tes ennemies; mais Ă  l'Écluse ce ne fut, nous l'avons vu, qu'une lutte d'homme Ă  homme qu'une suite de sièges de citadelles par d'autres citadelles. Or aux arbalĂ©triers gĂ©nois le roi Édouard opposait ses archers qui avaient dĂ©cochĂ© trois flèches avant que leurs ennemis ne leur eussent envoyĂ© un carreau; car, comme dit Froissart, «vous saves que archier de l'arc Ă  main sont trop plus isniel que ne soient arbalestriers»; aux braves mais inexpĂ©rimentĂ©s mariniers normands et picards Ă©tait opposĂ©e la fleur de la noblesse anglaise. Cependant les Français rĂ©sistaient avec Ă©nergie et le sort de la bataille Ă©tait encore indĂ©cis lorsque les Flamands accoururent de tous les ports environnants au secours des Anglais. Alors se produisit ce fait que l'on a vu se renouveler dans toutes les batailles de l'antiquitĂ© et des temps modernes : surpris par une attaque Ă  laquelle ils ne s'attendaient pas, les Français pris de vertige ne songèrent plus qu'Ă  la fuite. Les historiens anglais se sont bien gardĂ©s de nous montrer les Flamands accourant Ă  la rescousse des Anglais; mais le rĂ´le important jouĂ© dans cette journĂ©e par ces auxiliaires nous est attestĂ© par le tĂ©moignage des chroniqueurs flamands et français. Telle fut une des causes de la dĂ©faite des Français. Le père Fournier y ajoute deux autres causes: la première, que le flux de la mer survenant avec orage, les galères françaises demeurèrent inutiles; la deuxième, que les Anglais, ayant fait semblant de reculer du cĂ´tĂ© du midi, gagnèrent le vent aux nĂ´tres. Mais le père Fournier semble ignorer que les galères de la flotte française ne prirent point part Ă  la bataille. Quant Ă  la seconde cause de l'avantage du vent, nous ne pouvons l'admettre, puisque nous avons essayĂ© de prouver que les Anglais ne reculèrent que pour briser la ligne de bataille de la flotte française.

 

La réussite de ce stratagème nous paraît être la troisième cause de la victoire des Anglais. Il en résulta, nous l'avons dit, que les bâtiments français se trouvèrent isolés et ne purent se secourir mutuellement; comme ils n'avaient pas la ressource de se déployer dans cette anse resserrée, leur nombre ne leur servait de rien, attaqués comme ils l'étaient les uns après les autres. Les chroniqueurs sont encore loin de s'accorder sur le nombre des Français tués à l'Écluse; les évaluations varient de 10000 à 40000 hommes (Ch. Dufourmantelle, La marine militaire en France au commencement de la guerre de cent ans, 1878 - books.google.fr, fr.wikipedia.org - Bataille de L'Ecluse (1340)).

 

"chef renieux du cresme"

 

Celui qui renie le sacre de Philippe VI est Edouard III d'Angleterre qui revendique la couronne de France, provoquant la guerre de Cent ans, sous l'influence de Robert d'Artois.

 

Édouard III, à bord du Thomas, fait preuve d'un sang-froid qui force l'admiration de ses troupes et les galvanise au plus haut point (Jean-Marc Soyez, Quand les Anglais vendangeaient l'Aquitaine: d'Aliénor d'Aquitaine à Jeanne d'Arc, 2004 - books.google.fr).

 

Après l'abordage, les combats furieux se font sur les ponts. Quiéret et Béhuchet parviennent à investir le bateau d'Édouard, La Thomas, et à blesser ce dernier à la cuisse. Mais les chefs français sont faits prisonniers. Immédiatement Quiéret est décapité et Béhuchet pendu (fr.wikipedia.org - Bataille de L'Ecluse (1340)).

 

Il y a deux "chef" dans le quatrain. On pense à la décapitation de Jean Baptiste (cf. le "chef de l'an" du quatrain X, 91) dont la fête tombe au 24 juin, jour de la bataille de l'Ecluse.

 

"salere" : sel et salique

 

Salière : n. f, réfection (v. 1225) de salere (déb. XIIIe s.) en concurrence avec le masculin saler attesté isolément (XIIe s.), est issu du latin salarius «par où l'on transporte le sel», et nom masculin «marchand de salaisons», dérivé du latin sal (Alain Rey, Dictionnaire Historique de la langue française, 2011 - books.google.fr).

 

Le sel a toujours été en France d'une grande abondance et d'une qualité supérieure. Cependant, quand les finances étaient ordinaires, c'est-à-dire qu'elles ne consistaient que dans le domaine qui faisait alors tout le revenu de nos rois, le commerce du sel était libre, et cette substance n'était point imposée. Mais, quand les aliénations du domaine et les besoins d'une civilisation qui se développait, obligèrent la royauté à recourir aux finances extraordinaires, Philippe le Bel le premier mit un impôt sur le sel. Créé pour un temps, il ne tarda pas à devenir permanent, et déjà, sous Philippe VI, cet impôt était levé régulièrement et les greniers à sel établis partout. On connaît le spirituel mot d'Edouard III à propos de l'ardeur de ce prince à augmenter les droits sur le sel. Les proportions immenses qu'ils avaient prises sous les Valois s'accrurent encore sous les Bourbons, et Richelieu, qui appelait l'impôt du sel les Indes du roi de France, calculait que la couronne ne lui était pas moins redevable que l'Espagne aux mines du Potose, du Chili et du reste de l'Amérique.

 

Philippe de Valois ayant établi des greniers pour y faire vendre le sel à son profit «dont il acquit l'indignation et la malgrâce des grands comme des petits et de tout le peuple,» à cette occasion Édouard III appela Philippe VI l'auteur de la loi salique, par allusion à l'avantage que Valois avait tiré de la véritable loi salique, qui lui fit obtenir le trône à l'exclusion des descendants de la branche féminine. (Voyez Bailly, Hist. financ. de la France, t. I, p. 100.) (Félix Joubleau, Études sur Colbert: ou Exposition du système d'économie politique suivi en France de 1661 à 1683, Tome 1, 1856 - books.google.fr).

 

Si la loi salique n'est pas encore mentionnée dans les textes en 1328, "vers 1340, la voilà précisément évoquée, sans toutefois être nommée - «cette constitution faite longtemps avant Charlemagne et gardée par tous les rois depuis icelui temps» - dans la traduction française des Échecs moralisés de Jacques de Cessoles, effectuée par Jean du Vignay pour le compte du futur Jean le Bon (Laurent Theis, Le trône de France interdit aux femmes, La Véritable Histoire des femmes: De l'Antiquité à nos jours, 2019 - books.google.fr - books.google.fr).

 

"embusche" : embuscade

 

La guerre de Cent Ans ne fut pas une guerre de batailles rangées, ce fut une guerre de coups de main, de sièges et d'embuscades (fr.wikipedia.org - Liste des sièges de la guerre de Cent Ans).

 

Les premières phases de la «Guerre de Cent ans», qui s'Ă©taient dĂ©roulĂ©es dans le nord du royaume, furent suivies, sous le règne de Jean II le Bon («le brave», en termes de chevalerie), de combats illustres ou sournois, en Touraine ou dans les provinces voisines. Le milieu du XIVe siècle fut d'abord lourdement marquĂ© par le flĂ©au de la "peste noire" que les chroniqueurs d'Ile-de-France rapportent surtout aux annĂ©es 1348 et 1349 : «Celui qui aujourd'hui Ă©tait en bonne santĂ©, demain Ă©tait mort et portĂ© en terre. Les malades avaient tout Ă  coup des grosseurs sous les aisselles et dans l'aĂ®ne... c'Ă©tait un signe infaillible de mort... Ledit flĂ©au, Ă  ce que l'on dit, commença chez les mĂ©crĂ©ants, puis vint en Italie ; traversant les monts, il atteignit Avignon oĂą il frappa quelques cardinaux et dĂ©cima leur entourage. Puis peu Ă  peu, Ă  travers l'Espagne et la Vasconie, il arriva en France» (chronique latine de Jean de Venette). L'Ă©pidĂ©mie succĂ©da, en Touraine, Ă  une pĂ©riode de graves inondations (1346), puis de disette (1347-1348). Elle venait du Poitou, dont les pèlerins espĂ©raient obtenir de saint Martin leur guĂ©rison ; elle causa des ravages, notamment en l'annĂ©e 1351. Les chroniques tourangelles n'en donnent aucun rĂ©cit ; tout au plus sait-on, par la «Chronique  abrĂ©gĂ©e de Saint-Aubin d'Angers», que la Touraine fut moins Ă©prouvĂ©e qu'ailleurs : In provincia Turonensi mitius se habuit quam alibi communiter. Et voici, de la mĂŞme source, les formes du mal dans notre rĂ©gion : «Les uns crachaient le sang, d'autres avaient sur le corps des taches rouges et noirâtres Ă  l'instar du peigne marin ou du poisson-tourterelle, et parmi eux nul n'en rĂ©chappait ; d'autres avaient abcès ou tumeur Ă  l'aine ou sous l'aisselle, et quelques-uns d'entre eux pouvaient s'en sortir» (Ă©d. P. Marchegay et E. Mabille, 1869). Après les bonnes rĂ©coltes de 1352, l'Ă©pidĂ©mie sembla disparue pendant une dizaine d'annĂ©es. Mais un retour du flĂ©au se produisit après le printemps froid et neigeux de 1362. [...]

 

Le dauphin Jean, créé comte de Poitou depuis le début de 1344, avait reçu pour mission de contenir les Anglo-Gascons qui avaient franchi la Charente en direction du nord. Mais il fut rappelé en Picardie par Philippe VI aux prises avec la «descente» d'Edouard III d'Angleterre. Sans arriver à temps pour éviter le désastre de Crécy, le dauphin laissait le Poitou et le sud de la Touraine à la merci des Anglo-Gascons qui commencèrent alors de fructueuses «chevauchées» de pillage. D'entrée de jeu, Henri de Lancastre, Comte de Derby, réussit à s'emparer de Poitiers qui fut mis à sac pendant dix jours ; après quoi, Derby rejoignit Bordeaux avec le butin. «Il devint brutalement évident qu'il n'est plus possible de compter pour la défense sur les armées du roi, comme on l'a fait jusque là... Aussi partout les bourgeois mirent-ils leurs villes en état de défense, décidés désormais à se protéger eux-mêmes» (R. Favreau, 1976). On assiste donc, dès lors, à deux séries de faits importants : la guerre d'embuscades et la réparation des remparts des villes et des châteaux-forts (Pierre Leveel, Histoire de Touraine et d'Indre-et-Loire, 1988 - books.google.fr).

 

Lien avec le quatrain précédent

 

La traduction de Jean de Vignai est la plus connue et la plus répandue des traductions de Jacques de Voragine . Elle fut commandée à l'auteur par sa protectrice Jeanne de Bourgogne, épouse du roi Philippe VI. Le ms. M, dont nous donnons le texte, est daté de 1348, ce qui permet de situer le travail du traducteur probablement dans le deuxième quart du XIVe s. Cette traduction présente la particularité de faire précéder la plupart des vies, dont celle de Pélagie, d'un bref prologue consistant souvent dans une explication du nom du saint par l'étymologie (Pierre Petitmengin, Pélagie la pénitente: La survie dans les littératures européennes, Tome 2, 1981 - books.google.fr).

 

Jean du Vignay Ă©tait de l'Ordre de Saint Jacques du Haut Pas : cf. quatrain VIII, 21 et VIII, 23, sur la loi salique qui est en cause dans les motifs de la guerre de Cent ans.

 

Ci commence la vie sainte Pelagienne. Pelagienne estoit la premiere de la cité d'Antyoche, et estoit plaine de richesces en toutes choses. Ele estoit tres bele de cors, noble d'abit, vaine et variable de courage, et non caste du corps (Pierre Petitmengin, Pélagie la pénitente: La survie dans les littératures européennes, Tome 2, 1981 - books.google.fr, jonas.irht.cnrs.fr).

 

Dans l'édition de Batailler, l'étymologie est présente en introduction de la vie de la sainte :

 

Pelagienne est dicte de pelagus qui vault autant adire comme mer. Car ainsi come la mer habunde de toutes eaues elle habunda en la mer de ce monde de toutes richesses et delices. Elle fut mer d'iniquite et fleuve de péchés. Mais ette le plungea à la mer de larmes et se laua au fleuve de baptesme (Jacques de Voragine, Légende dorée. Ed. Jean Batallier, traduit par Jean de Vignay, 1476 - books.google.fr).

 

Le De re militari de Végèce constituait un 'objet de traduction' fort goûté au Moyen Age. Jean de Meun s'y met le premier (1284) : nous le rencontrons uniquement sous navigation, qui est sans aucun doute un latinisme. Quelques années plus tard (1290), Priorat ne fait au fond que mettre en vers le texte de son prédecesseur, et il n'a probablement pas eu sous les yeux l'original latin; nous retrouvons chez lui navigation, plus quelques mots français: accrocher, avaler, [espierarre / spirace 'barque de pirates' < épier'], joindre, [naigement 'navigation'], naigier, [nef], noitonier et tormante. La traduction de Jean de Vignay (2. quart du 14e siècle) nous offre antainne / anteinne, qui en principe peut provenir de l'original (antenna) (Jan Fennis, Trésor du langage des galères: Dictionnaire exhaustif, 2011 - books.google.fr).

 

Jean de Vignay ou du Vignai (1282 ou 1285 - après 1350) auteur d'une Apparition de Maître Jean de Meun, suit les traces de son modèle littéraire en commettant une traduction de Végèce vers 1320. Cette traduction semble avoir été un exercice de jeunesse, peut-être commandé par Jeanne de Bourgogne, épouse de Philippe VI, pour laquelle il travaillait ordinairement. Jean de Vignay était un religieux hospitalier de l'ordre de Saint-Jacques du Haut-Pas et c'est ainsi que le montrent les miniatures de présentation du XIVe siècle. Probablement d'origine normande, car il dédia sa traduction du Jeu des Échecs au duc de Normandie, en se présentant comme vostre petit religieus entre les autres de vostre seigneurie, et parce qu'il déclare avoir vécu au Molai-Bacon. Pas moins de douze traductions lui sont lui sont attribuées dont l'une est perdue, l'Alexandre qui date de 1341. Certains commentateurs modernes l'ont jugé comme un traducteur laborieux et un écrivain médiocre, mais force est de constater le succès de ses traductions. La plus célèbre fut Li Livres Flave Vegece de la chose de Chevalerie. Jean de Vignay reproduisit des passages entiers de la traduction de Jean de Meun et raccourcit à l'occasion le texte de Végèce, en particulier le livre II. En dépit de ces défauts, Christine de Pisan a emprunté des morceaux considérables de la traduction de Jean de Vignay pour composer son Livre des fais d'armes et de Chevalerie. [...]

 

La ville de Turin possède une traduction anonyme de Végèce connue par ce seul manuscrit, copié au XVe siècle. En plus du Vegesse de lart militayre, le manuscrit contient les Ordonnances du bon roy Philippes de France des cerimonies de gaige de bataille en duel plus des empereurs, roys, ducz, datées de 1306. La traduction est proche de Jean de Meun qui n'est pas cité dans l'explicit contrairement à l'usage. La principale modification par rapport à Jean de Meun tient à la répartition des chapitres en cinq livres au lieu de quatre. La version modifiée de Turin a séparé les chapitres concernant la poliorcétique et ceux traitant de la guerre navale. Le livre V porte d'ailleurs le titre : Cy commence le ve livre et sont les commandemens des batailles qui sont faictes par mer et par eaue (Philippe Richardot, Végèce et la culture militaire au Moyen Age: Ve-XVe siècles, 1998 - books.google.fr).

 

Végèce, lib. V, cap. 14: «On se sert dans un combat naval, non-seulement de toutes les espèces d'armes employées dans une bataille sur terre, mais encore de machines et d'instruments usités dans l'attaque et la défense des places fortes. Rien n'est si cruel qu'un combat sur mer, où les hommes périssent dans les flammes et dans les eaux. La première précaution doit être de munir les combattants d'armes défensives, d'armures, de cuirasses, avec des casques et des jambières. On leur donne encore des boucliers plus forts pour résister aux coups de pierres et plus larges à cause des faux, des crocs et des autres espèces d'armes navales.» (G. Lefèvre, Rapport de fouilles à Landen, Bulletin de l'Institut archéologique liégeoise, Volumes 19 à 20, 1886 - books.google.fr).

 

Typologie

 

Le report de 2162 sur la date pivot 1340 donne 518.

 

La petite église de Saint-Paul fut, d'abord, suivantles chroniques du pays, un monastère fondé, en 518, par Jocondius et Pélagie, père et mère de saint Yrieix (Aradius) (Charles-Nicolas Allou, Description des monuments des différents âges observés dans a Haute-Vienne, avec un précis des annales de ce pays, 1821 - books.google.fr).

 

Au point de vue du droit féodal, il semble que Philippe de Valois fut l'usuparteur; pour les fiefs ordinaires, on pouvait, par une disposition testamentaire, renoncer à la loi salique et instituer des filles héritières. La Guyenne, la Normandie, le Ponthieu, Montreuil, étaient venus au roi d'Angleterre par des femmes; les comtés de Toulouse, de Provence, étaient tombés entre les mains des femmes. Philippe de Valois , qui s'arma de la loi salique contre Edouard III, soutint en - Bretagne contre Montfort les droits d'une femme, de Jeanne , qui épousa Charles de Blois. Les prétentions d'Édouard d'Angleterre étaient cependant invalidées par cette considération que, dans son système, les trois derniers rois de France étaient des usurpateurs, en tant au moins que  les descendants mâles de leurs filles avaient plus de droits que lui-même (Auguste Laugel, La France politique et sociale, 1877 - books.google.fr).

 

L'héritage du défunt duc de Bretagne n'était rien moins que les deux Bretagne (la Bretagne française et la Bretagne bretonnante ou celtique) et la vicomté de Limoges (Georges Bordonove, Jean II Le Bon, 1980 - books.google.fr).

 

Les mentions de Francs régis par la loi Salique se prolongent fort longtemps, et au delà certainement de l'époque où on a coutume de dire que la territorialité des lois a complètement succédé à la personnalité. Dans notre France la loi Salique est encore mentionnée en 987 dans le cartulaire de Saint-Père de Chartres; le concile de Limoges de l'an 1031 l'invoque" aussi ; mais ce sont dès lors des références vagues (Paul Viollet, Histoire du droit civil français: accompagnée de notions de droit canonique et d'indications bibliographiques, 1893 - books.google.fr).

 

Par le traité de Brétigny de 1360, le Château de Limoges est cédé au roi d'Angleterre, et Michel Bize, maître particulier du Prince Noir, y frappe toute la série des monnaies franco-anglaises (L. Royer, La monnaie de Limoges, Bulletin de la Societe d'etudes scientifiques du Limousin et de sa Section de radiesthesie, Numéros 97 à 144, 1904 - books.google.fr).

 

Cf. quatrain suivant IX, 80 ("Bize & Luc") qui aurait aussi un rapport avec la chevauchée du Prince Noir en Languedoc.

 

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