Mendosus – Ronsard IX, 45 2136-2137 Ne sera soul jamais de demander, Grand Mendosus
obtiendra son Empire, Loing de la cour fera contremander, Pymont, Picard, Paris, Tyrron
le pire. Langue française
et régionalisme Au XVIe siècle, les grammairiens et les poètes
recommandaient expressément de faire des emprunts aux dialectes Montaigne
aussi, avec son bon sens ordinaire, avait dit : "C’est aux paroles Ă
servir et à suivre ; et que le gascon y arrive, si le françois
n’y peut aller" (Essais I, 25). Au grand siècle, tout change : les sévères
puristes protestent vivement contre "la contagion des dialectes", et
contribuent ainsia créer l’unité définitive de
l’idiome français. La lutte contre les dialectes (ou patois) est surtout
soutenue par Malherbe, Vaugelas et Balzac Ă ce dernier, tout est suspect de
"gasconisme" : sur chaque mot d’un provincial, il consulte l’oreille
d’un Parisien, et "peu s’en faut que la Touraine, si proche de Paris, ne
lui en paraisse aussi éloignée que le Rouergue". Même Mlle de Gournay l’adversaire
déclarée de Malherbe, parle sur la question des dialectes comme un disciple de
Vaugelas : "Nous autres purs Francois devons destordre et redresser, non pas suivre les barragouins... Le noeud de la
question, en cela, pour des gens considérez, git seulement a sçavoir si ces dictions se prononcent uniformément, non pas
en Picardie, en Vendosmois, en Auvergne, en Anjou,
mais a Paris et a la Cour,
c’est-à -dire en France ; pour ce que un escrivain ne
doit pas estre le poete
angevin, savergnac, vendosmois
ou picard, ouy bien le poète français". On
constate pourtant l’adoption d’un certain nombre de mots patois. Exemples :
aubergine, avalanche (suisse), batinde, bécharu,
brique-bois, bercail, bourrique, brandade, cabrer, calumet, cargaison, chat, chalet
(suisse), charade, chavirer, claque, crétin (suisse), crevette, dame-jeanne,
espadrille, flaque, galoubet, gimblette, hercher, nougat, ortolan, pecque, etc. Marie de Gournay Écouter (née Marie Le Jars), née le 6
octobre 1565 Ă Paris et morte le 13 juillet 1645 Ă Paris, est une femme de
lettres française des XVIe et XVIIe siècles et «fille d’alliance» de Michel de
Montaigne, dont elle publia en 1595 la troisième édition des Essais, augmentée
de toutes les corrections manuscrites du philosophe Vendosme Mendosus est Ă©crit Vendosme, (par un anagrammatisme). Chavigny a mis en Ă©vidence les
quatrains oĂą son idole parlait de la victoire de "Mendosus"
(Vendosme) sur (les) "Norlaris"
(Lorrains) Dubellay est Angevin, Ronsard Vendomois, enfin Rabelais est Tourangeau. Pierre de Ronsard est un Gentilhomme du Vendômois, né
dans le Château de la Poissonnière, au Village de la Couture en la Varenne du
bas Vendômois, le Samedi onzième jour de Septembre de l'an 1524, mort le
vingt-sept Décembre dans son Prieuré de saint Cosme lès
Tours, dans la chambre du fameux Berenger l'an 1585.
Ronsard possédé encore aujourd'hui le titre de Prince des Poètes François qui
ont paru jusqu'à Malherbe Bérenger de Tours (Beringerius Turonensis) (né en 998 à Tours - mort en 1088) était un
théologien français du Moyen Âge, dont les idées furent condamnées pour hérésie
par le concile de Tours de 1050, à l'occasion duquel elles furent réfutées par
Lanfranc du Bec. Sa doctrine eucharistique, fondée sur une lecture de Ratramne
de Corbie qu’il confond avec Jean Scot Érigène, met en cause la « présence
réelle » et le réalisme eucharistique tel que le comprennent ses
contemporains Ă la suite de Paschase Radbert. Son
enseignement entraîne une controverse eucharistique avec Adelman,
écolâtre de Liège, Abbon de Fleury et Lanfranc. Dénoncé comme hérétique en 1050
au concile de Tours, à la suite duquel il est condamné par le pape Léon IX,
parce qu'il niait la «présence réelle». Il est par la suite à nouveau condamné
par les conciles de Rome et Verceil et contraint en 1059 Ă professer une
formule de foi eucharistique rédigée par Humbert de Moyenmoûtier.
Condamné par pas moins de quatorze conciles, il ratifie une nouvelle profession
de foi en 1079 au concile de Rome, Ă©crite par Guitmond,
Évêque d'Aversa. Exilé sur l’île Saint-Cosme (ancienne île en aval de Tours
aujourd'hui rattachée à la rive gauche de la Loire à hauteur de La Riche) à la demande
du pape Grégoire VII, il meurt en paix avec l’Église à l’âge de 90 ans Un jugement de Chapelain est éclairant à cet égard. Dans une lettre à Balzac datée de 1640, il expose sa conception de la poésie ronsardienne : Ce n'est pas que je ne lui trouve bien des défauts hors de ce feu et de cet air poétique qu'il possédait naturellement, car on peut dire qu'il était sans art et qu'il n'en connaissait point d'autre que celui qu'il s'était formé lui-même [...] galimatias, barbarismes et paroles de grimoire [...] vers étranges et inintelligibles [...] défaut de jugement [...] c'est un maçon de poésie et il n'en fut jamais architecte (Prosper Blanchemain, Pierre de Ronsard, Causeries du lundi, Volume 12, 1857 - books.google.fr). "soûl" Ja du prochain hyver je prevoy la tempeste, Ja cinquante et six ans ont neigé sur ma teste, Il est temps de laisser les vers et les amours, Et de prendre congé du plus beau de mes jours. J'ay vescu, Villeroy, si bien, que nulle envie En partant je ne porte aux plaisirs de la vie; Je les ai tous goustez, et me les suis permis Autant que la raison me les rendoit amis, Sur l'eschaffaut mondain jouant mon personnage D'un habit convenable au temps et à mon age. [...] Pour néant la prudence est guide des humains : L'invincible destin luy enchesne les mains, La tenant prisonnière, et tout ce qu'on propose Sagement, la fortune autrement en dispose. Je m'en vais soûl du monde ainsi qu'un convié S'en va soûl du banquet de quelque marié... (Ronsard, Amours diverses, dédié à Villeroy) Ainsi Ronsard [à 56 ans, il mourra 5 ans plus tard)] évoquait son époque pleine de frénésie, sa propre existence, remplie de la vision des peuples et des rois, quand la France semblait arrivée à ses derniers jours, tant de guerres, de débats, d'accords conclus et rompus (Pierre Champion, Ronsard et son temps, 1925 - books.google.fr). Tyron Philippe Desportes étoit natif
d'Angers ; il fut Chanoine de la Sainte Chapelle, & eut beaucoup de part
aux bonnes graces de Henri III ; il s'attacha Ă ce
Prince dès le tems qu'il étoit
Duc d'Anjou ; il le suivit en Pologne. Lorsque Henri
fut sur le TrĂ´ne, il donna Ă Desportes les Abbayes de Tiron,
de Josaphat, de Vauxcernay & de Bonport. Il faisoit assez bien
des vers, qui cependant se trouvent aujourd'hui confondus avec les médiocres
productions de son tems. Henri III lui donna une très grosse somme d'argent
pour mettre ses Ouvrages sous presse. L'Amiral de Joyeuse lui donna une Abbaye
de dix mille livres de rente pour un Sonnet. Après la mort de Henri III il se jetta dans le parti de la Ligue, ce qui fut cause qu'il fut
privé du revenu de ses Bénéfices, & qu'il se retira auprès de l'Amiral de
Villars, qui lui donna sa table & sa confiance : fâché de ne pas jouir de
ses Bénéfices, il détermina Villars à s'accommoder avec Henri IV. Il eut
beaucoup de part à ce Traité, dans lequel il ménagea très bien ses intérêts ;
outre la mainlevée de ses Bénêfices, il se fit encore
donner le Fort de Fécamp. C'est ainsi que la plûpart
des Ligueurs se faisoient payer du prix de leur rebellion Desportes a pour lui la cour, les beaux esprits, les
raffinés, les délicats et les mignons de Henri III. Il se rattache à l'Italie,
dont il introduit dans notre langue les mélodies, les grâces, et aussi les
mièvreries et les mollesses : il est le chef des Pétrarchistes
plus encore que le représentant de l'école française "Pymont" : Piémont À cette époque-là , la situation linguistique du Piémont
était déjà complexe et paradoxale. Si l'italien était depuis le XVIe siècle la
langue officielle de l'État savoyard, celui-ci était en réalité bilingue,
l'usage du français étant officiellement reconnu en Savoie et dans le val
d'Aoste. Mais, dans les faits, l'italien était à peine parlé, alors que le
français, lui, était largement en usage au sein de l'élite aristocratique, qui
par ailleurs, comme le reste de la population, parlait le piémontais Le piémontais est un amalgame de français et de vieux
italien, proche de la langue française comme le remarque Montaigne dans son
Journal de Voyage, lors de son passage à Turin en 1581 "empire" Dans l'Ode à Simon Nicolas daté de 1584, un an avant sa
mort, Ronsard (le prince des poètes) écrit : Voilà le bien que
je desire, Sans plus en vain
me tourmenter : DĂ©sormais sera mon
empire Que savoir bien me
contenter (XVII, 371) No doubt
it is one of the preoccupations of Ronsard's final year of life that is visible
in the variant of the last two verses that appeared hi the collective edition
of 1587: Afin que mon ame n'empire Par faute de se contenter Le «pere commun des Muses et de la Poesie»,
le «Genie et
l'Oracle de la Poesie françoise»,
comme l'appelle Du Perron dans son oraison funèbre, s'était éteint, le 27
décembre 1585, loin de la cour et de ses amis. Celle-ci et ceux-ci se firent un
point d'honneur de célébrer magnifiquement la mémoire du «grand Pan». Le roi pleura, les amis parlèrent ou chantèrent "contremander" : demander "Contremander" : I - Empl.
trans. A - Contremander qqn
(de qqc.). "Donner un contrordre Ă qqn (Ă propos de qqc.), avertir qqn de
ne pas exĂ©cuter un ordre qui a Ă©tĂ© donnĂ©, avertir qqn de ne pas se rendre Ă
l'ordre, à l'invitation qu'il avait reçu de venir" B - Contremander qqc.
"Annuler ce qu'on avait mis sur pied". II - Contremander Ă qqn.
"RĂ©pondre Ă qqn (par message Ă un message que l'on vient de
recevoir)" Les conseils de défense que propose la rhétorique sont
nombreux. La règle d'or la plus générale est de dénigrer l'accusateur à toute
occasion et de se présenter soi-même sous le jour le plus favorable. Dans le De
l'orateur, CicĂ©ron cite ce prĂ©cepte que Ronsard va respecter d'un bout Ă
l'autre de la Responce. DĂ©jĂ , le titre
souligne la différence de qualité entre son adversaire et lui. S'y désignant
comme «gentilhomme vandomois»,
il met en valeur sa dignité aristocratique et proclame qu'il n'est pas ce
«Messire Pierre Ronsard», qualification que lui donnait le titre du pamphlet
protestant et qui le réduisait à la seule fonction de prêtre. En même temps
qu'il se vante, Ronsard diminue son critique en prétendant ne pas le
reconnaître. Il répond, dit-il, à «je ne sçay
quels Predicans et Ministres de Geneve».
La variante du titre de 1584-87 accuse
encore plus le ton de mésestime : «Predicantereaux et
Ministreaux de Geneve» En 1583, Ronsard séjourne en Vendômois et prépare la
sixième édition de ses oeuvres complètes parue en
1584. Un Ă©dition posthume est faite en 1587. IX, 50 2140-2141 Mendosus tost viendra Ă
son haut regne. Mettant arriere un
peu les Norlaris, Le rouge blesme le
masle à l'interregne, Le jeune crainte, et frayeur Barbaris. "interrègne" On peut parler de "règne" pour un prince, comme
Ronsard le fut des poètes françois. De Ronsard à Malherbe, il y a en quelque sorte
interrègne, période neutre et transitoire, où les rênes de la poésie flottent
de Desportes Ă du Bartas. Desportes a pour lui la cour, les beaux esprits, les
raffinés, les délicats et les mignons de Henri III: du Bartas a surtout pour
admirateurs les protestants, les esprits graves, les âmes frères et
religieuses. L'un se rattache Ă l'Italie, dont il introduit dans notre langue
les mélodies, les grâces, et aussi les mièvreries et les mollesses :il est le chef des Pétrarchistes
plus encore que le représentant de l'école française. L'autre va puiser à ces
sources bibliques oĂą Malherbe trouvera bientĂ´t ses plus hautes inspirations ;
mais du Bartas use trop souvent des prophètes comme Ronsard avait usé de
Pindare. Aucun d'eux n'est assez puissant, assez libre de toute influence,
assez hardi pour ouvrir à l'art une voie nouvelle. Les Tragiques de d'Aubigné,
qui avait pour les contemporains un style plus proche de Malherbe que de
Ronsard, n'ont pas encore paru. Leur valeur est grande, mais leur influence est
nulle à l'époque de leur publication, datée du Désert (1620). Ils sont moins un
manifeste littéraire à l'usage des contemporains qu'un legs à la postérité, le
dernier cri de la NĂ©mĂ©sis protestante contre les Valois, qui ne sont plus lĂ
pour l'entendre. Régnier reste à part avec sa vive et franche originalité: nous
le verrons bientĂ´t protester contre le despotisme de Malherbe, pour venger
l'honneur de son oncle Desportes. Mais on ne peut dire qu'il fasse Ă©cole. Oserait-on
donner ce nom à la triste séquelle du Parnasse satirique, qui rimaille et
barbote sur ses traces ? Ses vrais héritiers seront plus tard Lafontaine et
Molière, de lignée gauloise comme lui. Quant à l'honnête Vauquelin de la Fresnaie, disciple de Ronsard et ami de Malherbe, il se
trouve pris, étouffé entre le choc et le heurt des deux écoles comme entre le
double rocher des Symplégades. Son Art poétique, commencé
en 1586 et publié seulement en 1605, arrive à la fois trop tard et trop tôt.
Lui-même en fait l'aveu dans sa préface, s'excusant de paraître avec un vieil
accoutrement devant un nouveau public. Vauquelin en est encore Ă admirer les
strophes et anti-strophes des odes pindariques dans
Ronsard : son ami Malherbe devait le trouver en cela bien naïf ou bien arriéré.
Le culte, d'Horace, il est vrai, les rapprochait; mais ce serait faire trop
d'honneur à Vauquelin que de voir en lui, comme on l'a prétendu quelquefois, un
précurseur de la grande révolution littéraire qui va s'opérer. Aussi croyons-nous
avoir le droit de passer de Ronsard et de la plĂ©iade Ă Malherbe pour arriver Ă
ce que nous appellerons la seconde Renaissance française "Barbaris" : apocope de barbarisme ? N'est-il pas plaisant qu'on reproche à Ronsard comme des
barbarismes, les mots oligochronìe, ocymore, &c. tandis que nous conservons chronologie, période,
circonlocution, benevole & mille expressions
purement grecques & latines ? La renaissance des lettres antiques avait produit l'Ă©cole
gréco-latine qui dura avec Desportes, et Bertaut jusqu'au commencement du XVIIe
siècle, pour faire place alors à l'école française qui eut pour chef Malherbe
(1555-1628). La réforme littéraire de Ronsard avait dépassé le but. Les
disciples avaient encore exagéré les défauts du maître. La mesure et le goût
dans le choix et la formation des mots qu'ils empruntèrent au grec, au latin et
même aux patois, leur firent complètement défaut. La langue s'enrichit sans
doute, s'essaya à la haute poésie; mais chargée d'expressions bizarrement
composées, de métaphores ambitieuses et de barbarismes pédantesques, elle
perdit son caractère et sa pureté. Enfin Malherbe
vint, et le premier en France Fit sentir dans les
vers une juste cadence, D'un mot mis en sa
place enseigna le pouvoir Et réduisit la Muse
aux règles du devoir, Car ce sage
écrivain la langue réparée N'offrit plus rien
de rude à l'oreille épurée. Les stances avec
grâce apprirent à tomber, Et le vers sur le
vers n'osa plus enjamber. Malherbe créa en quelque sorte le langage poétique et
fut, avant Boileau, et comme lui au nom du bon sens et du bon goût, le législateur
du Parnasse français. Le satirique Régnier résista seul à cette réforme. Neveu
de Desportes, il défendit contre Malherbe l'école gréco-latine, mais en realité il fut le continuateur de l'école gauloise «et reproduisit Marot dont
il avait toute la libre allure avec plus d'énergie et de couleur.» A cette même
école se rattachent les auteurs de la Satire Ménippée:
Le Roy, Passerat, Pilhou, Rapin, etc. Réformateur, Malherbe l'a été par ses œuvres, par ses conseils aux jeunes poètes, ses disciples, et par son commentaire sur Desportes. C'est lui qui apporta en poésie cet esprit d'ordre, de mesure, de proportion, de règle, de méthode, qui est un besoin bien caractéristique de l'esprit français. On l'a dit : Henri IV, Richelieu et Louis XIV disciplinèrent l'Etat ; Malherbe, l'Académie et Boileau disciplinèrent la littérature. Grande fut dans ses effets la réforme de Malherbe ; on peut la discuter ; on en peut regretter la sévérité parfois bien rigoureuse (Gustave Allais, Malherbe et la poésie française à la fin du XVIe siècle: (1585-1600), 1895 - books.google.fr). En 1633, l'équipe des Malherbiens publia un volume collectif, les Nouvelles Muses. On y voit figurer, aux côtés de Mainard et de Racan, les jeunes poètes qui reconnaissent les lois de Malherbe : L'Estoille, Malleville, Baro, Jean Habert, Godeau et Des Marests. Chapelain y publie son Ode à Richelieu. [...] Dans tout ce fatras de louanges, une seule page peut-être mérite d'arrêter l'attention. Des Marests, dans son Discours, s'en prend à une secte poétique. Il ne nomme pas les écrivains qu'il vise. Il leur reproche de pousser trop loin le souci de la simplicité, de faire fi de l'inspiration, de rester timides et guindës. Ce témoignage d'un Malherbien prouve que le groupe avait conscience des périls que recélaient les tendances modernes pour la poésie lyrique (Antoine Adam, Histoire de la littérature française au XVIIe (1948), Tome 1, 1997 - books.google.fr). "le masle" La date de la mort de Jean Le Masle est incertaine. On suppose, d'après son Discours des incommodités de la Vieillesse, écrit en mars 1568, oùil dit n'avoir pas encore trente-cinq ans révolus, que
Jean Le Masle naquit vers 1533. H était de Baugé, en
Anjou. Il perdit ses parents de bonne heure, et ce fut un de ses oncles,
Mathurin Chalumeau, Sieur de Bemay, Avocat Ă Angers,
qui se chargea de développer les heureuses dispositions qu'il montrant pour
l'Ă©tude Il aimait les lettres, qu'il ne cultivait, comme il le
dit lui-même, que pour se distraire de travaux plus sérieux ; aussi beaucoup de
ses ouvrages ont-ils été perdus. Le Temple des vertus n'a point été imprimé; il
est dirigé principalement contre les réformateurs que l'on nommait alors
politiques. Le Masle Ă©tait ligueur et ne le dissimule
point ; il déplore la mort du duc de Guise, assassiné par Poltrot. [...] Le poëme se poursuit jusques après la mort de
Henri III; mais il se termine avant l'entrée de Henri IV à Paris,
c'est-à -dire de 1589 à 1594, car Le Masle espère
encore le succès de son parti. Dans son épître de l'Excellence des poètes
adressée à son ami Dorat, et qui fait partie de ce volume, Le Masle donne de curieux détails sur sa vie, sur ses goûts,
d'où l'on serait tenté de croire que ce fougueux ligueur était l'homme le plus
doux et le plus tolérant ; mais nous savons par expérience combien dans les
temps de révolutions l'esprit de parti dénature les caractères. Jean Le Masle est un poëte original.
Contemporain et condisciple de Ronsard, son vers, moins poétique sans doute,
est plus libre, plus dégagé, plus franc, toujours clair et bref; qualité plus
rare alors que jamais Si l'on considère
la date de ses Ĺ“uvres, Le Masle appartient Ă l'Ă©cole
de Ronsard et de du Bellay, pour lesquels il professait la plus grande
admiration. Si l'on examine son style et sa langue, il est plutĂ´t de l'Ă©cole de
Malherbe. Il n'a pas les images brillantes des écrivains de la Pléiade,
mais il n'affecte pas non plus leur érudition pédantesque, et sa phrase n'est
jamais diffuse, alambiquée, comme celle de la plupart des poètes du seizième
siècle. Son vers est toujours concis, ferme, net. Les sujets grandioses lui
conviennent mieux que les sujets gracieux ou légers. Il est plus épique que
pindarique "rouge blesme" Ces deux adjectifs, dans l'interprétation liée à Ronsard,
situe le quatrain dans les guerres de Religions et du conflit entre protestants
et catholiques (cf. quatrain I, 3 : "Lors les blancs et les rouges
jugeront Ă l'envers" et le quatrain suivant IX, 51 avec ses
"rouges" aux prises avec les "sectes"). [Ils] prennent les
couleurs à telz corps convenables, Pour mieux représenter
leurs feintes vrai-semblables Comme on voit bien
souvent Iris se figurer Des rayons du
Soleil qui la vient peincturer En cent couleurs, pourveu que l'opposée nüe, Où l'image se faict, soit concave et menüe: Autrement l'Arc au
Ciel n'auroit impression: Mais le Daimon la
prend de sa propre action Et de sa volonté, en la maniere
mesme Que soudain nostre
joue en craignant devient blesme De son propre vouloir, et toute
rouge alors Que la honte luy
peint la peau par le dehors : En ce poinct les Daimons masquez de vaines feintes Donnent aux cœurs humains de merveilleuses
craintes: Car ainsi que l'Air
prend et reçoit à -lentour Toute forme et
couleur, ce pendant qu'il est jour, Puis les rebaille à ceux qui de nature peuvent En eux les reçevoir, et qui propres se treuvent:
Tout ainsi les Daimons font leurs masqueures
voir A nostre fantasie, apte Ă les
recevoir: Puis notre fantasie à l'Esprit les r'apporte... Dans ces vers, le phénomène physique permet de démonter
les mécanismes d'un problème moral. C'est ce qu'implique d'abord le réseau
lexical de la prédation. Le ton est donné dès la première occurrence du verbe
«prendre» : les démons aiment à s'approprier les couleurs et les formes. Dans
les images de l'arc-en-ciel, de la joue et de l'air, deux types d'appréhension
se côtoient : l'une, météorologique, sert une transmission, l'autre,
affective et morale, introduit la peur et la prédation. Ici, paradoxalement, la volonté égale l'affection, comme
si elle équivalait à la nature passionnelle des démons qui « s'affectent » de
leur propre volonté; et, non moins paradoxalement, cette volonté semble
synonyme de passivité, du fait que la coloration de la joue dépend d'un
sentiment de honte qui «luy painct
la peau». Il est dès lors étonnant que ce phénomène serve de comparant aux «
vaines feintes » des démons, comme si la coïncidence de la volonté et de la
passivité était l'indice d'un mal. Mais ce mal, à quoi tient-il? En amont, il
réside dans la cause de la honte, plutôt que dans sa manifestation: la
fiabilité du signe, qu'atteste sa passivité, renvoie à une volonté mauvaise. En
aval, le rougissement involontaire du fautif, acteur et victime, traduit une
perte de contrôle sur ces manifestations : ce n'est pas l'irréalité du
signe qui est en cause, mais son autonomie, premier pas vers la révolte et la
«vanité». A la fois fiable et incontrôlable, la coloration de la joue trahit
donc doublement le mal issu d'un abandon volontaire aux passions. Ce mal
caractérise les exégètes, dont la volonté contredit la nécessité que leur
impose leur condition sublunaire. La mince peau des hommes illustre en effet
souvent la fragilité humaine, qui devrait dissuader l'interprétation. La Remonstrance
oppose ainsi par cette pellicule à la fois frêle et trop dense la présomption
de l'exégèse à la nature divine du divine du Christ, dont le mystère est
insaisissable. [...] La sensibilité épidermique des interprètes joue un rôle
central dans la polémique qui oppose Ronsard à la Réforme, après que Les Daimons ont invité à réfléchir sur l'affection dans ses
rapports avec la volonté. Transformés métamorphosés, déguisés de couleurs
feintes, les démons agissent avec une volonté passionnelle. [...] Face à cette
«peau» représentative de la condition sublunaire, deux attitudes religieuses
sont renvoyées dos à dos : l'Opinion protestante, dont le serpent, «coullant sans toucher / De ce moyne
abusé ny la peau ny la
chair», pénètre profondément l'âme de Luther en laissant le corps intact, et
l'hypocrisie des prélats, dénoncée par l'Opinion elle-même puis réitérée dans
la Responce.
[...] Si, sous l'interprétation protestante et sous une prédation catholique, Ronsard dénonce au fond une même mascarade, qui fait du sens le prétexte aux exactions, l'hypocrisie des prélats a des enjeux plus limités que l'attitude des réformés où perce sans doute, aux yeux du poète, le refus spirituel d'une condition corporelle (Anne-Pascale Pouey-Mounou, L'imaginaire cosmologique de Ronsard, 2002 - books.google.fr, Germaine Lafeuille, Cinq hymnes de Ronsard, 1973 - books.google.fr). La peur résonne dans le vers 4 : "crainte & frayeur". L'interprétation est liée à la honte et à la couleur rouge tandis que la prédation catholique à la peur et au blême. L'image vient de Psellos traduit par Marcile Ficin. Historiquement c'est inversé : le rouge est la couleur des catholiques espagnols et de leurs alliés ligueurs, le blanc celle des protestants (cf. panache blanc d'Henri IV). D'Aubigné semble reprendre dans Les Tragiques les deux
adjectifs toujours en rapport avec la crainte : Et que faict la Foiblesse au tribunal
des rois ? Car tout lui sert
de crainte, et ses crainctes de loix.
Elle tremble, elle
espère, elle est rouge, elle est blesme : Elle ne porte rien
et tombe sous soi-mesme. Poètes lorrains Poursuivant dans cette veine littéraire, on peut
considérer les Norlaris comme des Lorrains certes
mais aussi comme des représentants de la poésie du duché de Lorraine. Si la Lorraine apparaissait bien comme une entité
politique que renforçaient les conflits et les rivalités, au même titre que le
duché de Savoie ou celui de Bouillon, elle n'avait pas pour autant, aux yeux des
Français, une réalité culturelle. Elle était considérée en général comme
faisant partie de la «nation» française, en raison de sa langue surtout et de
ses modes de vie. Dans son avis Au Lecteur qui fait suite à la Thébaïde, Jean Robelin, qui n'est ni lorrain ni français mais franc-comtois, parle de «nostre
France» et prend soin de préciser : «J'appelle France toutes les
Provinces ausquelles est commun le langage François».
C'est là un amalgame assez courant que l'examen des réalités ne permet guère de
contester. La province de Charles III s'est indubitablement située dans
l'attraction culturelle française, faisant entendre l'écho des tapages
parisiens, répercutant les intrigues et les enthousiasmes. A travers les
figures un peu fuyantes de Pantaléon Thévenin, de Nicolas Clément et de Didier Oriet passe l'esprit de la Pléiade. Au-delà , ce sont les
valeurs et les modèles français qui s'imposent irrésistiblement. [...] Ronsard est pour Pantaléon Thévenin celui qui a sur tous «finablement remporté la palme», mais aussi parce que cette forme d'hommage plaît à sa conscience de chrétien érudit qui a besoin d'assurance ; son enthousiasme dissimule peut-être une vraie gravité qui ne nous apparaîtra nettement que dans ses derniers recueils d'Ingolstadt. [...] L'apparition de nouveaux poètes en cour de France dans
les années 1570, l'émergence du baroque et de nouvelles formes poétiques, la
dureté des temps qui éloigne un peu le public des «folastries»,
tout cela donne l'impression que l'Ă©toile de Ronsard se ternit. Pourtant, au
mĂŞme moment, certains Lorrains entretiennent le culte ronsardien qu'ils ont
pratiqué dès le collège. A leurs yeux, Ronsard n'est pas seulement, comme pour
Montaigne, un de ceux qui ont le plus « donné credit
a nostre poesie Françoise ». Il est surtout le symbole de la
consécration sociale du savoir. C'est pourquoi l'admiration qu'ils portent au
prince des poètes, si docte soit-elle, n'est jamais qu'un aspect d'une visée
plus conquérante. Ils sont moins sensibles à l'homme et à son œuvre qu'à la
réputation qu'il s'est acquise. Nicolas Clément, dont
on a à plusieurs reprises évoqué les rêves impatients, témoigne en ce sens.
Dans ses Prémices figure ce curieux sonnet adressé Au detracteur
de M. de Ronsard : Mais qu'a besoin d'ouir ce
haut-sonnant Ronsard ? / Cest Apollon Francois, que peut-il plus aprendre ? [...] L'admiration que les poètes lorrains ont vouée aux
maîtres français ne résulte pas du seul commerce des livres. Il faut imaginer
de véritables échanges et des rencontres dont on peut déterminer les
circonstances à défaut de pouvoir en préciser les dates. Les civilités poétiques
avec envois d'épigrammes et pièces encomiastiques supposent tout un jeu de
relations qui nous échappent en partie. Les grands poètes n'étaient nullement
inaccessibles et se soumettaient volontiers comme des pontifes aux séances de
visites. Certains, par leur place en cour ou grâce aux leçons qu'ils donnaient
dans tel ou tel collège, bénéficiaient d'un public permanent et renouvelé.
Qu'ils reposent sur l'admiration et la condescendance, ou alors sur une
mutuelle estime, ces rapports Ă©taient Ă l'avantage de tous. En parcourant les
recueils d'anagrammes de Nicolas Clément, on découvre avec intérêt le réseau de
ses relations. S'il a longtemps été dans le voisinage de Boissard,
de Pillot ou de Melissus, sur le versant allemand de
l'Europe si l'on peut dire, il a également approché les grands humanistes
français. Vers 1580, il croisa Du Bartas à Lyon, alors que alors que celui-ci était sans doute en
mission pour le roi de Navarre. A Padoue, il a aussi salué Marc-Antoine Muret,
l'ancien commentateur de Ronsard. SĂ©duit par les feux romains, comme
beaucoup de Français, Muret offrait
alors l'exemple d'une Ă©tonnante reconversion. C'est en homme d'Eglise que
Clément a pu le voir, grassement pourvu de bénéfices pontificaux, proche des
cardinaux les prĂŞt Ă bĂ©nir la mĂ©moire de Charles IX Ă
la moindre allusion faite à la Saint-Barthélemy |