Dracula

Dracula

 

IX, 90

 

2169-2170

 

Un capitaine de la grand Germanie

Se viendra rendre par simulé secours

Au roy des roys ayde de Pannonie ,

Que sa révolte fera de sang grand cours.

 

Germains

 

La Germanie (Germania Magna) est la région historique d'Europe occupée par les peuples germaniques dans l'antiquité, plus précisément à l'époque de l'empire romain. Cette zone couvre d'abord essentiellement le sud de la Scandinavie puis s'étend en Europe centrale. Elle couvre alors une large zone qui va à l'est approximativement jusqu'à la Vistule, à l'ouest et au sud jusqu'au Rhin et au Danube qui la séparent du monde romain (fr.wikipedia.org - Germanie).

 

Les Grecs, qui connaissaient mieux les Gètes, qui les voyaient sur leurs frontières, au marchĂ© d'esclaves oĂą on les vendait, sur le théâtre oĂą on les jouait, louaient leur probitĂ© et leur foi en la vie future. Ils ne leur reprochaient que la pluralitĂ© des femmes; mais la polygamie Ă©tait dans les mĹ“urs de tous les Germains. Ce dernier trait achève une ressemblance qui n'avait pas Ă©chappĂ© aux anciens : Denys le GĂ©ographe met les Gètes au nombre des nations germaniques selon Jornandes, cap. IX, X, XI. Avant lui, Dion Cassius, dont il invoque le tĂ©moignage, avait conduit les Gètes Ă  la guerre de Troie. Strabon (lib. VII) raconte les efforts du roi Berebista et du prĂŞtre Diceneus pour discipliner les Gètes, leurs victoires, et les efforts inutiles des lieutenants d'Auguste pour les dompter. Sur la polygamie des Gètes, cf. Pomponius Mela, II, 2, et MĂ©nandre, citĂ© par Strabon, lib. VII. Le passage de Denys le GĂ©ographe est concluant : «Germanique Getae, Bastarnae, Sarmatae.» (FrĂ©dĂ©ric Ozanam, Études germaniques, Tome 1, 1872 - books.google.fr).

 

Hérodote parle des Gètes à propos de l'expédition de Darius aux bouches du Danube. Il tient à souligner que les Géto-Daces sont les seuls qui aient osé s'opposer à l'avance vers le nord du grand roi.

 

En 514 av. J.-C., quand les Histriens appuient Darius Ier, roi des Perses, qui, dans son expédition contre les Scythes, passe par la Dobroudja et vainc les Gètes. A d'autres occasions les Gètes et les Grecs sont alliés, comme en 339,  quand ils s'opposent ensemble à l'invasion de la Dobroudja par le chef scythe Ateas. Peu de temps après cet événement, la Dobroudja entière tombe sous la domination des rois de Macédoine Philippe et Alexandre le Grand, et, après sa mort, sous la coupe d'un des diadoques, le roi de Thrace, Lysimaque (Histoire de la Roumanie: des origines à nos jours, 1970 - books.google.fr).

 

Lysimaque, à qui la Thrace échut en partage dans la division que les Généraux Macédoniens firent des provinces de l'Empire d'Alexandre, attaqua les Gètes; & loin de réussir dans cette entreprise, tomba au pouvoir de Dromichétès, Roi de cette nation, qui rendit la liberté à son prisonnier. Mais il y a lieu de croire, que le trésor du prince vaincu resta au au vainqueur, vu la grande quantité de pièces d'or frappées au coin de Lysimaque, qui furent trouvées à Déva, du temps de Ferdinand, frère de Charles-quint. Déva étant un lieu situé à l'entrée de la Transilvanie, près de la rivière de Maros, on peut en inférer que ce fut au delà du Danube, & dans l'étendue de la Dace conquise depuis par Trajan, que Lysimaque porta la guerre, lorsqu'il l'entreprit contre les Gètes ; ce qui est d'autant plus vrai-semblable, que pour entrer chez eux Alexandre avoit eu l'Ister à traverser. Quoique les Daces paroissent faire avec les Gètes un même corps de nation au nord du Danube, depuis les plaines de la basse Hongrie qu'occupoit la nation Sarmate des Iazyges, jusqu'aux embouchûres du fleuve, & aux rivages du Pont-Euxin, le même langage étant commun aux uns & aux autres selon Strabon; cet auteur paroît néanmoins y mettre une distinction. Il attribue aux Daces spécialement la partie supérieure de ce pays, eu égard au cours du fleuve, & assigne aux Gètes la partie inférieure : il appelle solitude des Gètes les plaines incultes & arides qui s'étendent le long de la mer, entre les  entre les bouches de l'Ister & l'embouchûre du Tyras, & dans lesquelles l'armée de Darius marchant contre les Scythes, fut en danger de périr faute d'eau. Le nom de Daces, moins familier aux Grecs que celui de Gètes, est plus employé l'autre par les écrivains Romains. Cette nation ayant alors sa demeure bien décidée au-delà du Danube, & étant même cantonnée particulièrement dans les montagnes, comme l'indique Florus en disant, Daci montibus inharent; cela n'empêchoit pas qu'elle ne parût en deçà du fleuve, lors sur-tout qu'étant glacé on le traversoit aisément; quoties concretus gelu Danubius junxerat ripas : ce sont les termes du même historien. Les courses des Daces, en franchissant cette barrière, s'étendoient dans la Thrace, la Macédoine, & l'Illyrie. Strabon cite un Roi Gète, nommé Bœrébiste, qui dans ces expéditions détruisit les Boïens & les Taurisques, nations Celtiques établies dans la Mœsie. Ce que César, selon Suétone, avoit eu dessein de faire, savoir de réprimer ces courses des Daces & des Gètes, fut exécuté, comme on l'apprend du même auteur, sous Auguste : Sic tunc Dacia, non viéla, sed summota ac dilata est. Florus, de qui j'emprunte ces paroles, dit auparavant, ultrà ulteriorem repulit ripam (Augustus); citrà, prasidia constituit. L'avantage que les armes Romaines remportèrent alors sur les Daces, est célébré par ce vers d'Horace, en l'honneur d'Auguste : Occidit Daci Cotisonis agmen, Cotiso, ici nommé, est appelé Roi des Gètes par Suétone  (M. d'Anville, Mémoire sur la nation des Gètes, Histoire de l'Academie Royale des Inscriptions et Belles-Lettres, depuis son establissement jusqu'à présent, avec les Mémoires de Littérature tires des registres de cette Académie, Volume 25, 1759 - books.google.fr).

 

Kritoboulos, grec rallié au pouvoir ottoman, fait, dans sa Vie de Mahomet II, la relation de la prise de Constantinople en 1453 du point de vue de l'assaillant. Il inscrit cette conquête dans la vison de la translatio imperii (Babylone, Perse, Grèce, Romain, Ottoman). L'auteur s'inspire d'Arrien, surtout comme auteur d'une histoire d'Alexandre dont les versions persanes intéressaient Mehmet II, et de Thucydide, et avance une généalogie fabuleuse faisant des Ottomans les descendants des Perses achéménides eux-mêmes censés être des Grecs issus de Persée et d'Achaiménos. L'aspect religieux est édulcoré. On ne se doute pas que Mehmet II soit musulman.

 

(5) Y figurent la guerre avec les Romains, la prise de la Ville, les campagnes d'Ainos, de Phocée, contre les Triballes, leur effondrement et leur servitude, (6) et encore tes première et deuxième descentes dans le Péloponnèse, sa conquête complète avec ses villes et ses ports et sa soumission à l'impôt, (7) et encore les campagnes de Sinope et Trébizonde, villes dignes de mention et renommées, comment elles se sont soumises par reddition avec tout leur plat pays et sont devenues sujettes du Sultan, (8) et encore la révolte de Dracouli, la défection des Gètes, la campagne du contre eux, leur effondrement et leur servitude, comment le leur donna comme maître Rad après avoir chassé son frère Dracouli, la conquête de Mytilène et tout Lesbos (Constantinople 1453 : Des Byzantins aux Ottomans, 2017 - books.google.fr).

 

Dracoulis est le duc des Gètes révolté contre le Sultan (Critoboulos, Vie de Mahomet II, 1875 - books.google.fr).

 

Dracoulis - Dracula

 

Ce Dracoulis est Vald Dracul prince de Valachie devenu Dracula chez Bram Stocker.

 

Vlad capitaine

 

La Valachie en 1421 était devenue tributaire des Turcs. Elle en supportait le joug avec impatience et profitait de toutes les occasions pour tenter de reconquérir son indépendance.

 

Quand l'espoir de sauver Byzance et plus généralement d'expulser les Turcs d'Europe s'écroula, les Valaques participèrent à un baroud naval sur le Danube avec la flotte bourguignonne et un Jânos Hunyadi devenu prudent. Vlad Dracul, père de Vlad Tepes, se rendit donc à nouveau auprès du sultan et renouvela le traité en 1447 (Traian Sandu, Histoire de la Roumanie, 2008 - books.google.fr).

 

Jean Hunyadi "capitaine suprême" de Hongrie, "capitaine des Valaques" selon le bourguignon Walerand de Wawrin, ne pouvait admettre la trahison d'un prince chrétien. Il soutint donc les partisans de la famille des Dan et, en 1447, Vlad Dracul, fait prisonnier, fut décapité en même temps que son fils aîné Mircea. A sa place fut couronné le prince Vladislav-Dan. Pendant ce temps, Vlad Dracula, otage des Turcs, était instruit chez les janissaires. Il paraissait soumis et particulièrement tranquille. Aucun Turc n'avait deviné la haine terrible, mortelle et tenace que Vlad avait conçue à l'égard de la puissance ottomane, coupable de trahison et coupable d'avoir poussé son père sur le chemin le menant à la mort. Mais pour l'instant, il paraissait d'autant plus soumis qu'il mettait à profit tout ce temps pour apprendre et pour bien apprendre les méthodes de combat des Turcs. En fait, sa soumission apparente était telle que le sultan décida de l'employer comme marionnette sur le trône de la Valachie. Il le proclama donc prince en 1448 et lui donna une armée pour conquérir le trône. L'expédition tourna court. A la première occasion, Vlad s'enfuit du camp ottoman et se réfugia d'abord en Moldavie puis en Transylvanie. Loyal envers lui-même et envers son pays, Vlad préféra renoncer au trône, plutôt que de le tenir des mains de l'ennemi et préféra s'allier avec Jean Hunyadi, l'assassin de son père, plutôt qu'avec les Turcs. Il participa d'ailleurs, sous les ordres de ce grand général, à plusieurs expéditions contre les Turcs. En 1456, Vlad entra avec une armée en Valachie, élimina Vladislav-Dan et prit possession du trône (Adrien Créméné, Françoise Zemmal, La mythologie du vampire en Roumanie, 1981 - books.google.fr).

 

La mort, à Belgrade en 1456, de ce grand capitaine permit à Vlad d'opérer un certain rapprochement avec Mahomet II et de s'installer plus durablement sur le trône de Valachie (Matei Cazacu, Les biographies contemporaines de Vlad III Tepes, prince de Valachie (1430 - 1476), Position des Theses, Ecole nationale des chates, 1977 - books.google.fr).

 

En 1462, Vlad l'Empaleur se retourne contre les Ottomans en reversant ses alliances et s'associant au roi de Hongrie Matthias Corvin. La même année 1462 de la défection de Vlad Tepes, Mehmed II donnait à son frère Radu le trône de Valachie et lançait une expédition contre le nouveau Dracul. Radu Le Beau devait régner de façon chaotique sur la Valachie resta une principauté vassale de la Porte jusqu'au XIXe siècle (Constantin Mihailovic, Mémoires d’un janissaire: Chronique turque, 2014 - books.google.fr).

 

Aidé par quelques paysans d'Arefu, Vlad III regagne la Transylvanie pour demander la protection du roi Matthias Corvin qui le fait emprisonner à Visgrade. Il y restera douze ans, mais après sa conversion, il épousera la sœur du roi.

 

La campagne pour l'installation de Vlad sur le trône de Valachie eut lieu la même année, en octobre-novembre. Comme gage de ses bonnes intentions à l'égard des Saxons de Transylvanie, Dracula confirmait le 7 octobre 1476 aux bourgeois de Brasov la liberté totale de leur commerce en Valachie, en renonçant au droit d'étape et de dépôt, qu'il appelle, en slavon, skala, du latin scala «escale». Après un siège de plusieurs jours, Vlad occupa Targoviste, la capitale valaque, d'ou il annonga, le 8 novembre, sa victoire sur Basarab III. Bucarest, la deuxieme capitale, fut occupée le 16 du même mois. Le 4 décembre, de Bude, Mathias faisait savoir à Gabriele Rangoni, légat papal et évêque d'Erlau (Eger), la victoire de «ses capitaines», Dracula et Etienne Bathory (l'ancêtre de la comtesse Erzsébet, célèbre pour ses bains de sang). Cependant, ce troisième règne de Vlad allait finir tragiquement (Janus Pannonius, L'Histoire du prince Dracula en Europe centrale et orientale (XVe siècle), traduit par Matei Cazacu, 1988 - books.google.fr).

 

Mathias Corvin parle de Vlad Dracul comme "Dragula, meus capitaneus" dans une lettre au pape de la fin de l'année 1476 pour lui annoncer la victoire des armées hongroises (Grigore Ureche, Chronique de Moldavie depuis le milieu du XIVe siècle jusqu'à l'an 1594, traduit par Emile Picot, Volume 9 de Ecole des langues orientales vivantes, 1878 - books.google.fr).

 

"Se viendra rendre par simulé secours"

 

"simulé" peut-être pour "simul" (adv.) Cic. Ensemble, en même lieu, en même temps (Gaffiot).

 

Vlad se partageait en effet entre les deux puissances hongroise (Panonnie) et turque ("Roi des rois"). La Valachie payait tribut Ă  la Porte et recevra l'aide du roi Mathias Corvin, en vain.

 

Vlad l'Empaleur devait évaluer la situation créée par suite de l'aggravation de l'état de tension entre les deux puissances voisines, l'Empire ottoman et la Hongrie qui imposaient à la Valachie un double statut juridique : Etat tributaire et dépendance vassalique (Revue roumaine d'histoire, Volume 22, 1983 - books.google.fr).

 

La mort de Vlad l'Empaleur était un coup dur pour les prétentions de domination des Hongrois sur la Valachie et avançait un pion ottoman non négligeable sur l'échiquier de l'Europe. La Valachie après la mort de Vlad restera dans la dépendance des Turcs jusqu'au XIXe siècle.

 

Mehmet II "roi des rois"

 

Après la prise de Constantinople, Georges de Trébizonde rédigea, à l'attention de Mehmet II, son essai De la vérité de la foi chrétienne ; écrit sous forme de lettre, ce texte suggère au Conquérant la convocation d'un concile islamo-chrétien la fusion de l'islam et du christianisme et la création d'un empire nouveau et puis sant sous le gouvernement du sultan turc. Plus tard (1465), il fera même le voyage à Constantinople dans l'espoir de rencontrer le souverain ottoman en personne :

 

Nombreux sont les motifs qui m'ont persuadé d'oser prendre la plume et d'écrire à ta puissance et à ton excellence et altesse, ô roi des rois, très grand souverain et très grand émir, sultan Mahomet bey (Mehmet II). C'est d'abord ton grand règne et ton pouvoir, ta grandeur d'âme, ton courage, bref la vertu très admirable et la diligence royale, dont ta sublime souveraineté fait preuve, pour attirer les hommes à la piété et à la foi droite. Car à la vérité, tout souverain qui ne se soucie pas de la piété n'est pas un souverain et ne tient pas sa royauté de Dieu, mais du diable (De la vérité de la foi des chrétiens) (A.Th. Khoury, Georges de Trébizonde, Patrimoine littéraire européen, Tome 6 : Prémices de l'humanisme (1400 - 1515), 1995 - books.google.fr).

 

Typologie

 

Le report de 2170 sur la date pivot 1462 (date de la révolte de Dracoulis) donne 754.

 

Cette date tombe dans le règne de l'empereur byzantin Constantin Copronyme auquel est consacré l'interprétation du quatrain suivant IX, 91.

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