Sages-femmes de Toulouse

Sages-femmes de Toulouse

 

IX, 37

 

2130-2131

 

Pont & moulin en décembre versez

En si haut lieu montera la Garonne

Murs, Ă©difice, Tholoze renversez

Qu'on ne sçaura son lieu autant matronne.

 

Las ordenansas et coustumas del libre blanc

 

Les Ordonnances furent pour cette région, ce qu'étaient déjà bien auparavant les Évangiles des Quenouilles, pour la Belgique et pour le nord de la France. On ne saurait mettre en doute que leur auteur ne se fût inspiré de cette facétieuse et tout à la fois instructive composition. On sait ce que sont les Évangiles des Quenouilles, livre éclos au XVe siècle et attribué, quant aux premières éditions, à Fouquart de Cambrai, à Antoine du Val et à Jean d'Arras, mais qui fut augmenté par diverses plumes.

 

Les auteurs ont supposé que, dans une ville qu'ils ne nomment point, des dames se seraient plusieurs fois réunies, à la veillée, tout en filant leurs quenouilles, en des assemblées privées, avec l'intention de recueillir et d'apprécier à leur juste valeur les croyances populaires du temps. Six d'entre elles, jugées les plus capables, deux de plus qu'il n'avait fallu d'apôtres pour rédiger les Saints Évangiles, auraient été commises comme présidentes et directrices de ces graves réunions.

 

Les Ordonnances s'ouvrent par l'énumération des sages têtes féminines, choisies dans les rangs populaires, et appelées à prendre part à la rédaction des Coutumes toulousaines. Ducèdre leur donne des noms, ou plutôt des sobriquets, servant à caractériser ces commères. Il en fait venir des principaux quartiers de la ville, en désignant les rues et les places par des dénominations qui se sont, pour la plupart, conservées jusqu'à nous.

 

Les Ordonnances s'occupent tout d'abord des Préséances, et, à ce sujet, Ducèdre se livre à une longue énumération des conditions des dames à Toulouse, tirée le plus souvent de la position sociale occupée par leurs maris. Il y avait dans la société un ferment d'insurrection contre la distinction des rangs, qui se faisait jour surtout par les femmes ; de là les édits somptuaires provoqués pour maintenir les rangs établis, mais que les résistances opiniâtres de la mode réduisaient toujours à l'impuissance. Dans cette commune de Toulouse, où la bourgeoisie avait fini par constituer une sorte de petite noblesse, on était fort jaloux des distinctions et des titres qu'elle donnait.

 

A Toulouse, les commères le plus en renom de chaque quartier sont convoquées et nominativement désignées. Elles ne s'assemblent qu'une seule fois, dans une salle où, assises sur des corbeilles renversées, ainsi qu'elles ont coutume de le faire en tenant le marché aux oies, et après avoir longtemps parlé toutes à la fois et sans s'entendre, elles finissent par arrêter leurs Ordonnances et Coutumes du livre blanc, titre qui fait allusion au registre nommé Livre blanc, contenant les franchises et coutumes de la ville de Toulouse.

 

1555 est l'année de l'impression des Ordonnances, le titre disant formellement: Imprimadas nouuellament a Tolosa. L'auteur est un Ducèdre dont le nom apparait dans l'acrostiche d'un poème à la fin de l'ouvrage. Ce n'est pas forcément Pierre Ducèdre licencié, puis docteur, syndic de cette ville en 1545 et 1546. Il était syndic de la Province de languedoc en 1555. On le retrouve capitoul en 1562, appartenant à cette municipalité accusée d'avoir favorisé la prise d'armes des huguenots contre Toulouse, et qui, pour cette cause, fut cassée par le Parlement (Jean-Baptiste Noulet, Las ordenansas et coustumas del libre blanc de Pierre Ducèdre, 1878 - books.google.fr).

 

Chronogramme

 

Au vers 9 des ordonnaces de Ducèdre est mentionnĂ© TONIS, Ă®le placĂ©e entre la Garonne et le canal de fuite du Moulin Narbonnais, formant un quartier de Toulouse. Catel en a parlĂ© en ces termes : "Cette isle est appelĂ©e, dans un ancien Arrest, Portus sancti Antonii, oĂą l'on met pour partie le Syndic piscatorum par titarum sancti Cypriani, Badaclei et Thonisii, siue portus sancti Antonii: ce qui me fait croire que le mot de Tounis vient du port Saint-Antoine; car, en langage de ce pays, Toni veut dire Antoine".

 

Un chronogramme, rappelant la date d'une très-grande inondation survenue en 1415, parle de ce quartier (Jean-Baptiste Noulet, Las ordenansas et coustumas del libre blanc de Pierre Ducèdre, 1878 - books.google.fr).

 

Ce chronogramme est de Martin du Mons, marchand de Toulouse au XVe siècle. Ce texte décrit les dommages que les Moulins et les ponts de Toulouse ont subi pendant une inondation, comme dans ce quatrain des Centuries.

 

Nous avons de Martin de Mons, marchand à la rue Malcousinat à Toulouse, actuellement rue de la Bourse, plusieurs compositions que nous allons rapporter ici, en commençant par une Chanson par A. B. C., c'est-à-dire dont chaque strophe commence par l'une des lettres de l'alphabet, placées dans l'ordre convenu. Cette poésie rappelle une de ces années de disette si fréquentes dans le Toulousain, à la fin du 14e siècle et au commencement du 15e; celle de 1433 n'a pas été signalée par nos annalistes, et cependant le prix du blé s'éleva à seize écus d'or le Quarton.

 

Le Quarton de Toulouse reprĂ©sentait quatre setiers d'après Lafaille, (Ann. t. 1, page 43), qui a Ă©crit, en parlant de la disette de 1310 : «La mĂŞme annĂ©e il y eut une grande famine causĂ©e par les pluies extraordinaires, et par les frĂ©quentes inondations des rivières. Le bled se vendit jusqu'Ă  treize livres le Carton, qui veut dire quatre de nos setiers d'aujourd'hui ; prix considĂ©rable pour ce temps-lĂ . Les pauvres Ă©taient rĂ©duits Ă  paĂ®tre l'herbe par les champs.» Le dernier trait de cette triste peinture se retrouve dans la chanson de M. de Mons :

 

Bech que mangan, cum salvatges,

Herbas d'amaras savors.

 

J'ai fait connaître, dans les mémoires de l'Académie des sciences, inscriptions et belles-lettres de Toulouse (année 1847), cinq chronogrammes en langue romane, tirés du manuscrit n° 2. Quatre de ces compositions appartiennent sûrement à Martin de Mons, car Guilhaume de Galhac, qui les a écrites de sa main, a placé à la fin de chacune d'elles le nom de ce lauréat; les voici ainsi que les explications dont je crus devoir les accompagner, en les publiant pour la première fois.

 

Et si degus te demanda

L'an que l'ayga foc tan granda,

Laqual se nopna Garona,

Qu'en Tholosa foc gran dona,

Car sus leules dels molys

Del Castel, pres de Thonis,

Un guabarrot y lasec,

E los das pons deroquet,

En aysi tu respondras :

Dins un vergier intraras;

Cuelh una llor de Mellier,

Am QUATRE de Codonier,

Am QUINSE pars d'englentinas,

E trobaras las aysinas

De l'an que m'as demandat,

En lo ramel devisat. (MARTI DE Mons.)

 

Et si quelqu'un je demande l'an que l'eau (rivière) fut si grande - laquelle se nomme Garonne, si bien que dans Toulouse elle fut grande dame, car sur les toits des moulins - du Château , près de Tounis, – un batelet elle y laissa, et les deux ponts renversa, - ainsi tu répondras : - dans un verger lu entreras; - cueille une fleur d'amandier, avec quatre de coignassier, avec quinze parties d'églantines, – et tu trouveras les facilités - de l'an que tu m'as demandé, dans le bouquet détaillé. (Martin de Mons)

 

Ce chronogramme fournit la date de M.CCCC. XV. (1415). (Monumens de la littértature romane: publiés sous les auspices de l'Académie des jeux floraux, Haute-Garonne, Volumes 3 à 4, 1843 - books.google.fr).

 

L'inondation de 1413 aggrave encore la situation. Les capitouls concentrent surtout leurs efforts sur le pont de la Daurade qui, cette fois, n'a pas rĂ©sistĂ© : quatre maĂ®tres Ă©trangers s'offrent Ă  construire trois piles, deux arcs et une tour vers Saint-Cyprien pour 12000 francs; on parle aussi de rĂ©parer le pont Vieux, le duc de Berry fait un don Ă  cette fin. En fait, on se borne Ă  une rĂ©paration provisoire du premier, que, un an plus tard, il faut renouveler, en mĂŞme temps que le pont de Tounis requiert Ă  son tour l'attention des capitouls. On se contente de parer au plus pressĂ©, en sorte qu'en 1423 la question se pose Ă  peu près toujours dans les mĂŞmes termes. En 1427, les capitouls se dĂ©cident enfin Ă  une campagne de travaux de quelque ampleur : elle est confiĂ©e Ă  deux peyriers venus de Mazères et de Barcelone; ce dernier Ă©tablit un devis de 14000 Ă©cus, rien que pour la main-d'ouvre, et visite les carrières les moins Ă©loignĂ©es de Toulouse. On dĂ©cide de demander au roi le droit d'imposer une barre. Les travaux sont effectivement commencĂ©s. MalgrĂ© la violente crue de novembre 1430, qui envahit jusqu'Ă  l'Ă©glise Saint-Nicolas de Saint-Cyprien, ils sont repris et poursuivis : encore n'est-il question que du pont de la Daurade. Une nouvelle catastrophe compromet les rĂ©sultats de ces efforts : c'est la très violente inondation de 1437.

 

Pour le duc de Berry : cf. quatrain précédent IX, 36. Il y a une chapelle Sainte Matrone à Mazères-sur-le-Salat (Haute-Garonne).

 

C'est cependant en 1415 qu'un chronogramme de Marti de Mons, rédigé une cinquantaine d'années plus tard, place l'inondation (Philippe Wolff, Commerces et marchands de Toulouse (vers 1350-vers 1450), 1954 - books.google.fr, Roger Mazelier, Chronogrammes et cabale chez les troubadours et l'archiprêtre de Hita, 1987 - books.google.fr).

 

Dans la lugubre nomenclature des fléaux de même nature dont la région, et en particulier la ville de Toulouse, ont eu à souffrir à diverses époques, on omet de signaler l'inondation de décembre 1413, dont ne parlent, du reste, ni Lafaille dans ses Annales, ni les Bénédictins dans l'Histoire de Languedoc. Par les dégats qu'elle occasionna, comme la rupture des ponts de Tounis et de la Daurade, elle mérite bien de fixer l'attention et de figurer sur la liste des sinistres dont Toulouse doit garder le souvenir. Je ne sais si cette inondation est indiquée dans d'autres documents, mais j'en trouve mention sur le dernier feuillet d'un registre contenant les statuts, en langue romane, de l'Ordre de Saint-Jean-de-Jérusalem, et provenant du grand prieuré de Toulouse. A la suite des statuts, plusieurs scribes ont inséré, en roman, quelques notes relatives à des événements d'intérêt général ou local survenus entre 1404 et 1494. C'est là que se rencontre le récit sommaire de l'inondation, qui eut lieu d'abord le 13 décembre 1413, et recommença, avec plus de de violence, le 31 du même mois. La première fois, la Garonne débordée se contenta de renverser le pont de Tounis; la seconde fois, au moment où elle se retirait, elle emporta le pont de la Daurade (M. Pasquier, Inondation à Toulouse (décembre 1413), Bulletin, Numéros 20 à 22, Société archéologique du midi de la France, 1897 - books.google.fr).

 

Le pont en question est celui du Bazacle, probablement le moins connu de tous ceux qui ont enjambé la Garonne au cours des siècles. La «canso» (en occitan ancien, cançon en occitan moderne) est quant à elle une chanson au sens médiéval du terme, c'est-à-dire un long poème épique écrit en vers, en l'occurrence la Chanson de la Croisade albigeoise. Ce manuscrit conservé à la Bibliothèque nationale (Ms Fr. 25425 ) décrit, en occitan, les événements qui ont ensanglanté le Midi entre 1209 et 1219. Au mois de juin de cette dernière année, Toulouse s'apprête à soutenir un nouveau siège contre l'armée croisée commandée par le prince Louis et...

 

...Sus lo pont del Bazagle, qu'es faitz novelamens

Son li arquer mirable, que tiron primamens,

Que defendol ribatge e los abeuramens

Que lunha naus no i venga ni negus malvolens

 

C'est-Ă -dire :

 

Sur le pont du Bazacle, nouvellement construit,

Sont postés de remarquables archers, tirant serré,

Qui défendent le rivage et les abreuvoirs

Afin qu'aucun bateau ni aucun ennemi n'y vienne (Chanson de la croisade, Ă©d. Martin-Chabot, t. III, l. 214 v. 100-103 et note 12, p. 316-318)

 

Voici donc un indice important sur l'Ă©dification de ce pont qui peut ĂŞtre complĂ©tĂ© par deux autres documents : un testament de l'annĂ©e 1218, conservĂ© aux Archives dĂ©partementales de la Haute-Garonne, dans lequel un certain Pons Fournier a fait un don pour son entretien, et peut-ĂŞtre une autre mention de la Canso ayant trait au retour Ă  Toulouse du comte Raymond en septembre 1217. Celui-ci en effet, nous dit le poète, intravit Tholosam mense septembris, non ponte, sed vado sub Vadaculo (entra Ă  Toulouse au mois de septembre non par le pont mais par le guĂ© en-dessous du Bazacle).

 

Encore cité dans une enquête de 1406, il fut certainement définitivement ruiné lors de la grande inondation de 1413. Ce pont du Bazacle se trouvait quelques mètres en aval de l'actuel pont Saint-Pierre comme en témoignèrent longtemps une arche et une pile, seuls vestiges restés visibles jusqu'à 1710 environ au port de Bidou, qui est devenu l'actuelle place Saint-Pierre. Les plans et le cadastre de la ville du 17e siècle en ont fort heureusement gardé la trace (Le pont d'Avignon a sa chanson "mès a Tolosa un pont es mai conegut gràcias a una canso", septembre 2014 - www.archives.toulouse.fr).

 

"matrone" : accoucheuses Ă  Toulouse

 

MATRONE, Femme grave. Femme sage & un peu âgée. (C'est une matrone Une matrone Romaine, La matrone d'Ephése). Matrone, Sage femme. Dans ce sens, il est vieux, & il ne se dit à cette heure que dans des lettres de reception des sages-femmes. Hors de là, on ne le trouvera que dans les vieux livres. (On la fit visiter par les Matrones, qui raportérent qu'elle étoit grosse (Cronique scandaleuse de Louis II). Elle a été vifitée par les matrones (Pierre Richelet, Nouveau Dictionnaire françois, Tome 2, 1694 - books.google.fr).

 

Au vers 7 des Ordonnaces de Ducèdre, il est question de Dona Stroissida Leuado. Ducèdre aura voulu faire allusion au rôle complaisant que jouaient souvent les accoucheuses en ce temps-là: «Servant de rétrécisseuses de maljoints», ainsi que les en accusait Moulinet dans ses Facetieux Devis et Plaisans Contes.

 

La première sage-femme mentionnée par Wickersheimer est Jacqueline Ariola, exerçant à Toulouse dans la deuxième moitié du XIIIe siècle. En 1292, le livre de la taille contient le nom de huit miresses à Paris, dont deux sages-femmes : Ameline et Michèle. Leur travail semble peu lucratif : Dame Ameline doit huit deniers au fisc, alors qu'un pauvre praticien , Maître Joce, en doit un tiers de plus. D'autres, au contraire, étaient largement payées pour leurs services dans certains milieux. Ainsi, dans les rôles du Parlement de 1474, il est mentionné à propos d'une certaine Marguerite Cobbe, sage-femme au service d'Elisabeth Woodeville, femme du roi Edouard IV : "Etant toujours pourvu que cet acte ou tout autre acte passé ou futur du présent parlement ne portera atteinte ni préjudice aux droits que Marie Cobbe, ci devant épouse de John Cobbe, accoucheuse. de nostre très chère femme Elisabeth reine d'Angleterre, a au don de dix livres sterlings par an, pour sa vie durant, fait patentes du 15 avril de la neuvième année de notre règne. Certaines sages-femmes étaient particulièrement attachées aux nobles. Ameline Alexandre de Paris se rendit à Dijon et à Montbard pour les couches de la duchesse de Bourgogne en 1371, 1377 et 1379. Jeanne La Riquedonne est aussi mentionnée comme matrone jurée du roi au Châtelet de Paris en 1391-1392. De même une certaine Jeanne la Goutière, sage-femme parisienne, a assisté la duchesse d'Orléans dans ses couches à Amiens en 1396 et elle fut aussi au service de la reine Isabeau de Bavière. La même année, décède Jacquemette Peguillote, une sage-femme attachée à la cour de Savoie à Chambéry. Il est possible que ces sages-femmes aient eu certaines connaissances médicales et que leur formation ait été supervisée par des médecins. Certaines étaient assermentées. Elles versaient une somme en échange de lettres confirmant leur statut. La mention la plus ancienne de sages-femmes jurées, relevée par Wickersheimer, date de 1333. Elles étaient alors deux : Mabille la Ventrière et Emeline Dieu La Voie, matrones jurées du prieuré de Saint-Martin-des-Champs. Cette dernière fut ensuite au service du roi jusqu'en 1342. Ces sages-femmes étaient élues par les officiers de l'Hôtel de ville. Elles devaient fournir un certificat de bonne vie et de bonnes moeurs, de religion catholique délivré par le curé. Puis elles prêtaient serment devant les officiers (Sylvie Laurent, Naître au Moyen Age, de la conception à la naissance : la grossesse et l'accouchement (XIIe-XVe siècle), 1989 - books.google.fr).

 

JACQUELINE ARIOLA. Sage-femme, citée comme témoin d'un miracle opéré sur un enfant mort-né par saint Louis, évêque de Toulouse (deuxième moitié XIIIe siècle). Acta Sanctorum Augusti..., t. III (Anvers 1737), p. 793 (Ernest Wickersheimer, Dictionnaire biographique des médecins en France au Moyen âge, Tome 1, 1979 - books.google.fr).

 

Jacoba Ariola obstetrix præsens fuit, quando Bertranda Massequa peperit filium verè mortuum: & fecit votum cum viro suo & amita pueri ad S. Ludovicum cum magnis clamoribus & devotione: confectim puer aperuit oculos, perfectè Santi meritis suscitatus (Acta Sanctorum Augusti, Tome 3, 1737 - books.google.fr).

 

Rien ne dit dans ce texte qu'Ariola soit de Toulouse.

 

Claude Odde Triors, Dauphinois étudiant et résidant à Toulouse, y publia en 1578, dans le goût de l'époque, les Joyeuses recherches de la langue Tolosaine, ouvrage parsemé de digressions historico-linguistiques. Il y évoque avec humour les légendes du lac et de l'Or de Toulouse.

 

"Il y a bien peu de gens qui se soint prins garde comme moy, & ce, sur ce proverbe ou adage qui se dict aurum Tholosanum, celebrĂ© et chantĂ© par tant d'historiographes grecs & latins il y a plus, ce croy-je, de mille & cinq cen ans, six mois & cinq semaines, douze jours, vingt & quatre heures, troys minutes & dimi secondes (dis-je) d'horloge, non de femme ny de musisciens. Car, presque d'une miliasse d'hommes qu'il y a en ceste citĂ©, au diable «lou cap» que j'ay treuvĂ© qui m'aye asseurĂ© ny rendu certain du lieu ou estoit cest aurum Tholosanum, les uns me dsent bien qu'estoit Ă  Sainct-Sarnin dans un lac, sunt & nonnuli qui dicunt qu'il estoit Ă  l'Église du Taur, d'autres sent qu'il estoit Ă  la Dauraude; accordĂ©s les flutes; l'un dict bif, l'autre baf, Ă  qui dois-je croire ? Par la vertu de Quinticharpe qui a sang Ă  l'oeil, nec non les mains gluantes, je vouloys dire glissantes, il y a lĂ  pour devenir «crabo» & par consequent cornard, encor bien qu'on ne feut pas «Couyoul». Il seroit presque de besoing que ceste tant sage femme Tholosaine nommĂ©e «dauno Sernini», il n'y a guiere de temps decedĂ©e de ce siècle, laquelle maintenant n'ignore rien comme je crois, retournat des champs Elisiens pour nous acertener vrayement du lieu ou estoit ledict thresor. Quant Ă  moy, suyvant ceste regle de droit qui dict que in rebus dubiis, benignior interpretatio est sumenda, je croirois qu'il feut plustost Ă  la Daurade (pour lors appellĂ©e des anciens payens le temple de Jupiter), que non pas Ă  Sainct-Sernin, inde meo judicio, fortitum est nomen la Daurade ab auro ibi posito: ce qui est bien vraysemblable & n'est du tout impertinente ceste etymologie juxta illud: Conveniunt rebus nomina saepe suis: & de faict d'ou diable est ce donc que ce mot prendroit son etymologie, si ce n'est de l'or estant lĂ  mis".

 

Au-delà de la forme truculente du propos, on peut discerner un point de vue assez caustique sur les vaines recherches des historiens toulousains en vue de localiser l'Or de Toulouse. La nouveauté réside dans la localisation de l'aurum tolosanum à l'église du Taur, ce qui paraît au premier abord étonnant. Mais cela peut s'expliquer si l'on considère qu'il y a lors, pour certains, un lien entre le lieu où repose le corps de l'évêque Saturnin et le lac où repose l'aurum tolosanum (cf. Nicolas Bertrand); or, l'église du Taur passait aux yeux du clergé du Taur, depuis la fin du XVe siècle au moins, pour être le lieu du martyre de l'évêque et/ou le lieu de sa première sépulture (Boudartchouk 1994; Boudartchouk 2001b). Il s'agit donc d'une «migration» de la légende du lac de Saint-Sernin, liée à l'incertitude quant au lieu où fut enseveli, à l'origine, l'évêque Saturnin.

 

Chez Nostradamus, un passage fait clairement allusion à la légende du lac de Saint-Sernin: «Sous l'édifice Saturin trouvé ume/D'or Ion ravy et puis rendu» (NOSTRADAMUS, Centuries VIII, 29, éd. 1568) (E. Connac, Les joyeuses recherches de la langue toulousaine de Claude Odde de Triors,Revue des Pyrénées: France méridionale - Espagne, 1892 - books.google.fr, Jean-Luc Boudartchouk et alii, Les «lacs sacrés» et l'or des Tectosages de Toulouse à travers les sources littéraires de l'Antiquité tardive, du Moyen Age et de l'époque moderne, Société archéologique du Midi de la France, 2006 - gallica.bnf.fr).

 

DONO, DONNO (a.), DOUOGNO, DUEGNO (rouerg.), DAUNO (g.), DAUNE (b.), (rom. dona, doana, domna, dompna, na, for. dana, denna, cat. dona, port. dona, esp. doña, dueña, lat. domina), s. m. Dame (vieux), mais encore usité avant la Révolution pour honorer certaines femmes du peuple (Frédéric Mistral, Lou tresor dóu Felibrige, ou, Dictionnaire provençal-français: embrassant les divers dialectes de la langue d'oc moderne, Tome 1,1878 - books.google.fr).

 

A Toulouse, entre 1555 et 1580, plusieurs textes composés par des étudiants pour accompagner les festivités urbaines de Carnaval, en parodiant des formes d’écriture prescriptive - dictionnaire, recueil juridique des franchises municipales, recueils de secrets -, célèbrent, à leur tour, le savoir des femmes.

 

Las nonpareilhas Receptas per far las femnas tindentas, risentas, plasentas, polidas e bellas, Toulouse, 1555, Ă©dition en graphie normalisĂ©e par J.-B. Noulet, Montpellier-Paris, 1880; Las Ordenensas et coustumas del Libre Blanc, observadas de tota ancianetat, compausadas per las sabias Femnas de Tholosa. Et regidas en forma deguda par lor Secretary, Toulouse, 1555, deux Ă©ditions modernes en graphie normalisĂ©e : G. Bonnet, Paris-Toulouse, 1846 et J.-B. Noulet, Montpellier, 1876; Claude Odde de Triors, Les Joyeuses recherches de la langue tolosaine, Toulouse, 1579, Ă©dition annotĂ©e par J.-B. Noulet, Toulouse, 1892. Ces textes ont fait l’objet, au Centre d’Anthropologie (ehess-cnrs) de Toulouse, d’un sĂ©minaire collectif dirigĂ© par Daniel Fabre qui a, le premier, proposĂ© d’inscrire le traitĂ© de Joubert dans cet ensemble unifiĂ© par la notion d’une «coutume des femmes».

 

Ce faisant, ils transposent, dans l’écriture, l’appropriation grotesque des fonctions et des attributs du corps fĂ©minin, propre Ă  la Jeunesse masculine au temps de Carnaval, tout en portant sur la sociabilitĂ© urbaine un regard ethnographique, nourri par la pratique de l’enquĂŞte. L’un d’eux, Les Ordonnances et coutumes du livre blanc (1555) - longtemps rĂ©duites Ă  une simple adaptation occitane des Évangiles des Quenouilles -, nous offre la matière la plus proche de celle examinĂ©e par Joubert dans ses Erreurs populaires. Outre les hiĂ©rarchies sociales qui se donnent Ă  voir, dans les cortèges et les processions, Ă  travers le rang, le vĂŞtement et la parure, sont codifiĂ©s les diffĂ©rents Ă©tats de la vie fĂ©minine - la jeune fille, la femme mariĂ©e, la veuve, mais aussi les servantes -, Ă  partir de ces moments «critiques» oĂą la coutume du temps de la vie vient s’inscrire dans celle du temps de l’annĂ©e. RĂ©gime alimentaire, manières de table et parures concourrent Ă  la rĂ©gulation, interne et externe, de la physiologie fĂ©minine. Mais l’étudiant et le mĂ©decin ne retiennent pas exactement les mĂŞmes registres de ce savoir fĂ©minin : l’écrit parodique en accentue la dimension «magique » et Ă©sotĂ©rique, le traitĂ© mĂ©dical valorise les pratiques que l’interprĂ©tation pourra reconduire Ă  des effets physiologiques ou psychosomatiques, autrement dit Ă  une causalitĂ© naturelle (Giordana Charuty, L’invention de la mĂ©decine populaire. In: Gradhiva : revue d'histoire et d'archives de l'anthropologie, n°22, 1997 - www.persee.fr).

 

L'Or de Toulouse

 

Les antiquaires ont cru pendant long-temps que Saint-Sernin était bâti sur un lac; M. Du Mège rapporte même des fouilles qui furent faites il y a peu d'années, pour sonder les fondemens de l'église. (La recherche me semble passablement puérile). C'est la croyance populaire de ce lac qui nous a suggéré l'idée plus rationnelle de simples marais. Les preuves qui viennent à l'appui de celle opinion sont, 1° la sur face très plane du terrain en cet endroit; 2° la probabilité d'un ruisseau coulant autrefois de ce côté, pour recevoir les eaux pluviales que recueille aujourd'hui le canal des Deux-Mers; 3° enfin le rapprochement de la Garonne de l'abbaye Saint-Sernin, et la tendance des inondations à se jeter de ce côté, tendance dont nous trouvons la preuve dans une charte de Louis XI, qui accorde des indemnités à l'abbaye Saint-Sernin, pour l'aider à réparer les dommages des inondations. Tout cela, joint à la tradition populaire, nous prouve que Saint-Sernin était situé dans un lieu aquatique; mais la simple raison ne peut s'arrêter à l'idée d'une église bâtie dans un lac, tandis qu'en ne voyant là que des marais, son édification sur un ilot entouré d'eau demeure très rationnelle. D'ailleurs, les anciens auteurs parlent d'un lacus; mais on connait la prédilection de nos pères pour le ton pompeux. Le mot lacus leur aura paru plus digne que celui de palus, et une petite figure de rhétorique aura jeté leurs descendans dans une erreur qui me parait insoutenable. Au reste, je renvoie encore le lecteur à la dissertation de M. Du Mège sur les lacs des Tolosales, dans son ou vrage sur les monumens religieux des Volces Tectosages, p. 25 à 67 (Justin Cénac-Moncaut, Aquitaine et Languedoc; ou, Histoire pittoresque de la Gaule Méridionale, Tome 1, 1847 - books.google.fr).

 

Dès l’Antiquité, l’origine des richesses de Toulouse a fait l’objet de deux traditions opposées qui forment la trame de l’argumentation développée par Strabon. La première suppose que les trésors sont le fruit du butin amassé par les Tectosages à l’occasion d’expéditions menées en Orient et en Grèce, principalement lors du raid sur le sanctuaire de Delphes en 278 a. C. L’autre que l’or et l’argent proviennent du pays même des Tectosages, extrêmement riche en métaux précieux.

 

Le texte de Strabon prĂ©cise les lieux oĂą Ă©taient dĂ©posĂ©s les richesses et les trĂ©sors des Tectosages : soit dans des enclos soit dans des lacs sacrĂ©s. En fin de paragraphe, il souligne que le sanctuaire Ă©tait l’objet d’une vĂ©nĂ©ration telle que personne n’aurait eu l’audace de toucher Ă  ces richesses”. Il faut donc comprendre que les offrandes Ă©taient faites dans le sanctuaire de Toulouse, Ă  l’intĂ©rieur duquel se trouvaient des enclos et des lacs sacrĂ©s. Dion Cassius reste Ă©vasif en Ă©voquant simplement le pillage des sanctuaires, tout comme Aulu-Gelle (in eius oppidi templis). Justin parle du lac de Toulouse (lacum Tolosensem) et Orose du temple d’Apollon (e templo Apollinis). Comme l’a bien montrĂ© J.-L. Boudartchouk, toute l’érudition toulousaine, du Moyen Ă‚ge jusqu’au dĂ©but de l’époque moderne, s’est appuyĂ©e presque exclusivement sur les textes de Justin et d’Orose, nĂ©gligeant celui de Strabon, pour retrouver les traces des lieux des trĂ©sors volĂ©s par Caepio. D’oĂą l’identification du temple d’Apollon avec l’église de la Daurade et du lacus de Justin avec l’emplacement de Saint-Sernin. Cependant, il est Ă©vident que ces deux versions rĂ©sultent de dĂ©formations progressives. Orose confond (Ă  dessein ?) le temple de Toulouse avec celui de Delphes et Justin simplifie la version de Strabon (ou une ultĂ©rieure), traduisant par un lacus au singulier le pluriel des "limnai".

 

Donc, les seules indications valables restent celles de Poseidonios transmises par Strabon (Christian Goudineau, Patrick Thollard, L’or de Toulouse. In: Aquitania : une revue inter-régionale d'archéologie, tome 25, 2009 - www.persee.fr).

 

Dans la dissertation sur les AntiquitĂ©s de Toulouse de Etienne de Gan, le texte sur l'Or de Toulouse prend place dans une dissertation sur Toulouse antique, oĂą l’auteur cite certains des documents qu’il a consultĂ©s, dont la Passio de Saturnin de Toulouse. Orose et Adon sont pour l’épisode de l’Or de Toulouse ses sources principales; rien n’indique qu’il connaisse Justin. L’identification explicite du temple d’Apollon avec l’édifice de La Daurade y est affirmĂ©e pour la première fois. La lĂ©gende s’enrichit pourtant in fine d’un nouvel Ă©pisode : la reprise du trĂ©sor par les toulousains aux dĂ©pends de Caepio, Ă  Marseille. Cette nouvelle pĂ©ripĂ©tie Ă  la gloire des Toulousains paraĂ®t induire un retour du trĂ©sor Ă  Toulouse.

 

Étienne de Gan, originaire de la cité de Toulouse, de l’Ordre des Frères mineurs, maître en théologie et professeur, composa son traité en 1451/1453 et le dédia à Bernard du Rosier, archevêque de Toulouse (1451-1475), en remerciement des bénéfices que celui-ci lui avait conférés.

 

Caepio y devient Scipion, comme depuis certains manuscrits d'Orose et Adon de Vienne archevêque de Vienne en 859/860, décédé le 16 décembre 875, qui composa entre autres ouvrages une chronique qui commence à l’origine du monde et s’arrête à la date de 867 (Jean-Luc Boudartchouk et alii, Les «lacs sacrés» et l'or des Tectosages de Toulouse à travers les sources littéraires de l'Antiquité tardive, du Moyen Age et de l'époque moderne, Société archéologique du Midi de la France, 2006 - societearcheologiquedumidi.fr).

 

Cf. quatrains VIII, 28-29-30 - Aurum Habet Americanum.

 

Bertrande Ysalguier, matrone toulousaine

 

Il n'est pas question de ClĂ©mence Isaure de leur temps, car les historiographes de Toulouse, contemporains ou mĂŞme postĂ©rieurs, ne la mentionnent nulle part, tels que Guillaume Bardin, conseiller au Parlement en 1444, qui rĂ©signa ses fonctions le 25 fĂ©vrier 1474 et qui a Ă©crit une Histoire chronologique relatant les Ă©vĂ©nements passĂ©s dans le Haut-Languedoc, et particulièrement Ă  Toulouse, de l'an 1031 Ă  l'an 1454; frère Étienne de Gan (de Ganno), cordelier, qui vivait Ă  la mĂŞme Ă©poque et qui, dans sa dissertation sur les AntiquitĂ©s de Toulouse composĂ©e vers l'an 1450, dĂ©diĂ©e Ă  l'archevĂŞque Bernard Du Rosier (de Rosergio) et qu'on peut lire au commencement du Livre Blanc conservĂ© dans les Archives municipales, cĂ©lèbre cependant la gloire que Toulouse retirait des Jeux de la Gaie Science; – Nicolas Bertrand (Bertandi), qui parle de l'archevĂŞque Bernard de Rousergue (de Rosergio) comme l'ayant vu frĂ©quemment (Ă  nobis crebrò visus) en son Histoire de Toulouse, intitulĂ©e : De Tolosanorum Gestis, publiĂ©e en 1515; enfin, Antoine Noguier, dont l'Histoire Tolosaine parut en 1559 «à Tolose, chez G. Boudeville, jurĂ© de l'Université». Il en est de mĂŞme du manuscrit que possède l'AcadĂ©mie des Jeux Floraux et oĂą un zĂ©lĂ© mainteneur, Guillaume de Galhac, a transcrit de sa propre main ou fait transcrire les principales poĂ©sies couronnĂ©es par le Gai Consistoire de 1324 Ă  1484 (M. Desazars de Montgailhard, Les avatars biographiques et iconographiques de ClĂ©mence Isaure, 1916 - books.google.fr).

 

A l'histoire de l'école toulousaine se rattache la légende de Clémence Isaure, qui date du XVIe siècle. Les poésies à la Vierge composées par les poètes toulousains du XVe siècle étaient adressées souvent à la Vierge de Clémence ou de Miséricorde ou à Clamensa tout court. Le mot de la langue classique était Merce; je ne trouve pas d'exemple de Clemensa avant 1455, Joyas, éd. JEANROY, n° XII (pièce d'Antoni de Junhac). En 1489, pour la première fois, on trouve, dans un compte des archives municipales, la mention de Dama Clamenssa. Au XVIe siècle la légende se développe. Ce n'est qu'à partir de 1540 environ qu'on trouve le nom d'Isaure accolé à celui de Dame Clémence; Isaure était le nom d'un roi légendaire de Toulouse ou plutôt celui d'Isauret Torsin, comte non moins légendaire de Toulouse. Clémence Isaure était représentée comme fondatrice de Jeux Floraux; on lui attribuait un testament imaginaire, d'après lequel la ville de Toulouse devait pourvoir. (Joseph Anglade, Histoire sommaire de la littérature méridionale au Moyen Age: des origines à la fin du XVe siècle, 1973 - books.google.fr, Jean Baptiste Noulet, De dame Clemence Isaure substitutee a Notre-Dame la Vierge Marie, comme patronne des jeux litteraires de Toulouse, 1852 - books.google.fr).

 

Un magistrat latiniste et falsificateur - ces deux qualitĂ©s pouvaient, paraĂ®t-il, se rencontrer ensemble chez les capitouls du seizième siècle a inventĂ© son testament-Ă©pitaphe, et quant Ă  la statue qui a popularisĂ© sa figure, ce serait la reprĂ©sentation tombale de dame Bertrande Ysalguier, une matrone du quatorzième siècle, Ă  laquelle les restaurateurs du dix- septième ont ajoutĂ© des bras de femme de lettres, porteurs de manuscrits et de joies florales... Pauvre ClĂ©mence Isaure ! son nom mĂŞme on saurait Ă  qui elle l'a empruntĂ©; la moitiĂ© appartiendrait Ă  la sainte Vierge et l'autre Ă  de prĂ©tendus comtes de Toulouse, d'une existence aussi chimĂ©rique et fallacieuse que la sienne (Emile Pouvillon, Eloge de ClĂ©mence Isaure, Recueil de l'AcadĂ©mie des jeux floraux, 1893 - books.google.fr).

 

La Daurade

 

Accueillante aux légendes toulousaines, la Daurade le fut à deux de ses plus charmantes images, la reine Pédauque et Clémence Isaures qui, pour d'aucuns, y trouvèrent le repos éternel (Jacqueline Caille, Sainte-Marie "La Daurade" à Toulouse: du sanctuaire paléochrétien au grand prieuré clunisien médiéval, 2006 - books.google.fr).

 

On assure que Clémence Isaure fut ensevelie dans l'église de la Daurade (Deaurata). Les fleurs en or et en argent, destinées à ceux qui ont remporté des prix au concours de l'académie des jeux floraux, sont placées sur l'autel principal de l'église de la Daurade (J. B. Cadet, L'indicateur toulousain, ou, Le guide du voyageur dans Toulouse, 1822 - books.google.fr).

 

Lafaille nous apprend que la vieille famille toulousaine des Ysalguier avait sa sépulture dans la première des trois chapelles du chapitre des Pères Bénédictins de la Daurade (François de Gélis, Histoire critique des Jeux floraux: depuis leur origine jusqu'à leur transformation en Académie (1323-1694), 1981 - books.google.fr).

 

Le passage d’Orose sur l'or de Toulouse, soit directement, soit relayé par des chroniqueurs qui le démarquent fidèlement comme Adon de Vienne à l’époque carolingienne, servit de socle aux légendes toulousaines. Ces dernières ne sont connues que sous la forme qu’elles revêtaient au XVe siècle. La plus anciennement attestée est celle du temple d’Apollon situé à l’emplacement de l’église de La Daurade; celles des lacs de La Daurade, de Saint-Sernin et même du Taur procèdent plutôt de Justin et peut-être de sources hagiographiques locales mal maîtrisées (Jean-Luc Boudartchouk et alii, Les «lacs sacrés» et l'or des Tectosages de Toulouse à travers les sources littéraires de l'Antiquité tardive, du Moyen Age et de l'époque moderne, Société archéologique du Midi de la France, 2006 - societearcheologiquedumidi.fr).

 

Triors disait : "Quant à moy, suyvant ceste regle de droit qui dict que in rebus dubiis, benignior interpretatio est sumenda, je croirois qu'il feut plustost à la Daurade (pour lors appellée des anciens payens le temple de Jupiter), que non pas à Sainct-Sernin, inde meo judicio, fortitum est nomen la Daurade ab auro ibi posito".

 

Acrostiche : PEMQ

 

pemuk, pamuk, pembuk : coton en turc (Johann C. Clodius,n Compendiosum Lexicon Latino-Turcico-Germanicum, Tome 2, 1730 - books.google.fr, Folia orientalia, Volume 17, 1976 - books.google.fr).

 

Enfin le coton est sans doute importé d'Espagne, et des batteurs de coton en viennent aussi exercer leur métier à Toulouse. En juillet 1435, Gabriel de Carant, marchand de Barcelone, vend 2 quintaux 1/2 de coton , aux consuls de Marquefave, pour 26 écus (Not., reg. 3306, fo 116 vo). En janvier 1449, Nicolas Castellain, marchand de Toulouse, vend 4 quintaux de coton valant 40 écus à des nobles de la région de l'Ariège (Not., reg. 4381 (2), fo 21 vo). L'épicier Jean de Camps engage des batitores cotonide Valence, Martorell en Catalogne et Perpignan (Not., reg. 12017.100, fo $ 42, 44 vo et 49) (Philippe Wolff, Commerces et marchands de Toulouse (vers 1350-vers 1450), 1954 - books.google.fr).

 

Venise, rééquilibrant son commerce vers la Méditerranée occidentale, organise au début du XVe siècle des convois de galères transportant en priorité cotron et épices dans les ports languedociens et catalans. En 1412, une ligne de navigation dessert tous les ans ces destinations. Aigues-Mortes remplacera Marseille après l'attaque des Aragonais en 1423. Ceux-ci s'y saisiront des reliques de Saint Louis d'Anjou, évêque de Toulouse de 1296 à 1297 date de sa mort (Les mondes méditerranéens au Moyen Âge: VIIe-XVIe siècle, 2018 - books.google.fr).

 

Dans les années 1440, Jacques Coeur installé à Montpellier y fait venir du coton (Emmanuel le Roy Ladurie, Histoire du Languedoc : «Que sais-je ?» n° 958, 2020 - books.google.fr).

 

Typologie

 

Le report de 2131 sur la date pivot 1413 donne 695.

 

A la fin du VIIe siècle, l'Aquitaine, qui avait déjà depuis longtemps ses ducs particuliers, devint un État indépendant. Son premier duc s'appelait Loup; il descendait de Clotaire Ier. Eudes, son successeur, se ligua avec Chilpéric II contre Charles-Martel, auquel il se réunit cependant lors de l'invasion des Musulmans d'Espagne, conduits par Abdoul-Rhaman ou Abdérame, qui franchit les Pyrénées en 730, prit d'assaut la ville de Bordeaux, la livra au pillage, mit à mort son gouverneur, et vint, après avoir désolé l'Aquitaine, se faire battre et tuer, en 732, près de Tours (Léo Drouyn, La Guienne militaire, Tome 1, 1865 - books.google.fr).

 

A la place de Tours (cf. quatrain précédent IX, 36), on a vu Poiters.

 

Eudes succéda à son père Boggis; sous son règne les Sarrasins, déjà maîtres de l'Espagne, traversèrent les Pyrénées, se flattant d'envahir les Gaules. En 721, une armée innombrable, commandée par Zama, parut devant Toulouse; Eudes la combattit, la mit en déroute, ayant de sa main tué le général ennemi (ELBDLL, Précis de l'histoire de Toulouse, Biographie toulousaine, Tome 1, 1823 - books.google.fr).

 

Cet Eudes a été identifié par certains auteurs à l'Odoynus du document daté de 700, 710 ou 716 et trouvé lors de l'invention des reliques de Marie Madeleine à Saint Maximin en 1278-1280. Si Eudes a été roi d'Aquitaine il n'a jamais été roi des Francs comme indiqué dans le document (Victor Saxer, Les origines du culte en occident, Marie Madeleine dans la mystique, les arts et les lettres, 1989 - books.google.fr).

 

En rapport avec le quatrain précédent IX, 36 où il serait question du pasume 128 avec la mention du coultre (soc ou pièce complémentaire de la charrue), le psaume 140 en parle aussi selon certaines traductions.

 

Ps. 140. 8. : Sicut crassitudo terræ erupta est super terram : De même qu'une terre dure et serrée, étant rompue avec le soc, est renversée sur une autre terre. Nos os ont été brises & renversés (Isaac-Louis Le Maistre de Sacy, La sainte Bible en latin et en françois, Tome 2, 1717 - books.google.fr).

 

Ps 141, 7 : Comme une meule éclatée par terre, nos os sont dispersés à la bouche du shéol (Bible de Jérusalem, 1998).

 

Le grand Ĺ“uvre de Bernard de Clairvaux est l'ensemble des quatre-vingt-six Sermons sur le Cantique des cantiques.

 

Dans 22, 9, I 135, 20-25, il combine, Ă  propos de l'onction du Christ par Nicodème et Marie Madeleine après sa mort, deux rĂ©cits d'onctions qui eurent lieu avant la Passion : celui de Lc 7, 38 et celui de Io 12, 3-8 et Mt 26, 6-13, ce dernier texte Ă©tant Ă©voquĂ© par une allusion tangendo lepram, qui rappelle in domo Simonis leprosi. De mĂŞme, dans 12, 6, I 64, 12-15, il a en vue en mĂŞme temps l'onction de la pĂ©cheresse de GalilĂ©e (Lc 7, 38) et celle de BĂ©thanie (Io 11, 2). Dans 16, 15, I 97, 26-27, des mots du Ps 140, 5 : oleum autem peccatoris non impinguet caput meum s'allient avec des mots de Mt 6, 17 : cum ieiunas, unge caput tuum, en une mĂŞme phrase : quod caput ieiunantis impinguat, ut oleum peccatoris non sentiat (Jean Leclercq, Recueil d'Ă©tudes sur Saint Bernard et ses Ă©crits, 1962 - books.google.fr).

 

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