Le riz

Le riz

 

III, 5

 

1708-1709

 

Près loing défaut de deux grands luminaires,

Qui surviendra entre l'Avril et Mars ;

O quel cherté ! mais deux grands débonnaires,

Par terre et mer secourront toutes parts.

 

"défaut"

 

"defectus" : Ă©clipse (Gaffiot).

 

Une éclipse de lune a lieu le 29 septembre 1708 et une de soleil le 12 septembre (Mémoires de l'académie des sciences, Volume 2, 1775 - books.google.fr).

 

Septembre se trouve pratiquement Ă  mi-chemin d'Avril 1708 Ă  Mars 1709.

 

"cherté"

 

Nous n'entreprendrons pas de refaire ici l'histoire de la disette de 1709, qui fut aggravĂ©e par une guerre malheureuse et par le mauvais Ă©tat des finances. La misère fut très grande, elle fut gĂ©nĂ©rale et supportĂ©e par tous : mais les malheurs Ă©pouvantables, les scènes horribles que l'on prĂ©tend avoir Ă©tĂ© les consĂ©quences du manque de subsistances nous semblent avoir Ă©tĂ© fort exagĂ©rĂ©s. MalgrĂ© les difficultĂ©s considĂ©rables en prĂ©sence desquelles se trouvait l'État pour soulager la misère publique, le mal fut en partie conjurĂ©. Après l'opinion de Voltaire sur les morts de faim, l'apprĂ©ciation de Fontenelle nous semble particulièrement intĂ©ressante Ă  enregistrer : «La chertĂ© Ă©tant excessive dans les annĂ©es 1709 et 1710, le peuple, injuste, parce qu'il souffroit, s'en prenoit en partie Ă  M. d'Argenson, qui cependant tâchoit, par toutes sortes de voies, de remĂ©dier Ă  cette calamitĂ©. Il y eut quelques Ă©motions qu'il n'eĂ»t Ă©tĂ© ni prudent ni humain de punir trop sĂ©vèrement. Le magistrat les calma ; et par la sagesse qu'il eut de les braver, et par la confiance que la populace, quoique furieuse, avoit toujours en lui.» (Fontenelle. Eloge de d'Argenson. Voy. aussi P. ClĂ©ment, op. cit. Vie de d'Argenson : Dans les temps de disette, et particulièrement en 1694 et 1709, le riz a supplĂ©Ă© chez nous Ă  la chertĂ© du pain. Pendant ces deux annĂ©es, il en est entrĂ© en France pour des sommes immenses. En 1768, le curĂ© de Saint-Roch, Ă  Paris, a nourri les pauvres de sa paroisse avec un riz Ă©conomique qu'on leur distribuait tous les jours, et dans lequel il entrait des pommes de terre, des navets, des carottes, etc., rĂ©duits en bouillie. PrĂ©cĂ©demment au curĂ©, un intendant de Guyenne avoit employĂ© pour les pauvres une nourriture semblable, dans une disette qu'Ă©prouva cette province, en 1747. C'Ă©tait un riz fait, en maigre avec du lait, en gras avec un peu de viande ou de graisse.» (Le Grand d’Aussy, op. cit., I, 141) (Fernand Braudel, Civilisation matĂ©rielle, Ă©conomie et capitalisme, Tome 1 : Les structures du quotidien (1967), 2022 - books.google.fr).

 

Le riz reste en Occident une nourriture de secours qui ne tente guère les riches, malgré un certain usage du riz au lait. Des bateaux chargés de riz à Alexandrie d'Égypte, en 1694 et en 1709, furent en France «une ressource pour la nourriture des pauvres» (Anatole Le Pelletier, Les oracles de Michel de Nostredame, astrologue, médecin et conseiller ordinaire des rois Henri II, François II et Charles IX, 1867 - books.google.fr).

 

En 1694, c'est le consul de France à Smyrne, M. Blondel, qui proposa à la Cour de faire venir du riz (Jacques Savary des Brûlons, Philémon-Louis Savary, Dictionnaire universel du commzerce : F-Z, 1723 - books.google.fr).

 

Les exportations de l'Égypte vers la France, Livourne et Venise (avec lesquelles se faisait la presque totalitĂ© de son commerce europĂ©en) se composaient pour les deux tiers de produits vĂ©gĂ©taux, animaux, et minĂ©raux bruts ou semi-ouvrĂ©s (riz, lin, laine, coton filĂ©, cuirs, sĂ©nĂ©, safranum et sel ammoniac : 60,4 % des exportations) pour un quart de produits orientaux et africains rĂ©exportĂ©es (26 % du total) et pour une faible part de produits fabriquĂ©s locaux (tissus : 10,6 %). [...]

 

Les produits végétaux, animaux ou minéraux bruts ou semi-ouvrés constituaient, nous venons de le voir, la plus grande partie des exportations égyptiennes. Bien que l'exportation du riz vers la Chrétienté fût en principe prohibée et que les défenses eussent été périodiquement renouvelées, un courant d'exportation semi-clandestin se maintint à Damiette pendant tout le siècle, pour le plus grand profit des douaniers et des Puissances ; le tonnage variait suivant l'importance des besoins en Europe et la rigueur avec laquelle les défenses étaient observées (André Raymond, Artisans et *commerçants au Caire au XVIIIe siècle, Tome I, 1999 - books.google.fr).

 

"debonnaires"

 

Débonnaire : adjectif ayant, selon Paul Robert, fait son apparition dans la langue française à la fin du XIe siècle ; de de bonne aire, «de bonne race» (Jean-François Chabrun, Vingt et un grammes de plus, Ou L'homme clandestin, 1974 - books.google.fr).

 

On trouve cet adjectif fréquemment employé par les auteurs des XIIe et XIIIe siècles dans une acception favorable. Aujourd'hui, débonnaire est synonyme de bonasse, de faible. Un homme débonnaire est celui contre qui toutes les injures sont permises sans qu'il s'en fâche (L. Gaudeau, Glossaire francais polyglotte, 1847 - books.google.fr).

 

Les beaux vers de Lucain sur l'Egypte restent Ă©ternellement vrais : Terra suis contenta bonis, non indiga mercis Aut Jovis, in solo tanta est fiducia Nilo. «Terre qui se satisfait elle-mĂŞme, Ă  laquelle n'importent ni la denrĂ©e Ă©trangère, ni l'eau du ciel, tant elle a confiance dans les seuls bienfaits du Nil.» Sous les pachas et les beys, comme jadis sous les Pharaons, les CĂ©sars de Rome, les Basileus de Byzance, les khalifes et les sultans mameluks, le fleuve dĂ©bonnaire chaque annĂ©e apportait Ă  l'Égypte le limon fertilisant recueilli par le Nil blanc dans les plaines marĂ©cageuses du Bahr el Ghazal et par le Nil bleu sur les plateaux Ă©thiopiens (Gabriel Hanotaux, Histoire de la nation Ă©gyptienne: L'Egypte turque: pachas et mameluks du XVIe au XVIIIe siècle. L'expĂ©dition du gĂ©nĂ©ral Bonaparte, 1931 - books.google.fr).

 

Mais comme il y a deux "débonnaires", faut-il se focaliser sur Livourne et Venise, qui réexportèrent le riz contrairement à d'autres princes.

 

Cosme III de Médicis (en italien, Cosimo III de' Medici), né le 14 août 1642 à Florence et mort le 31 octobre 1723 dans la même ville, est grand-duc de Toscane de 1670 à 1723 (fr.wikipedia.org - Cosme III de Médicis).

 

Aucune force au monde, en outre, n'exerçait plus d'influence sur son gouvernement que sa propre conscience qu'il avait, comme chacun sait, fort chrétienne et que dirigeaient, non sans peine, quelques confesseurs de talent. Le contexte politique que je viens de décrire, était à la racine de l'attitude ambivalente, hésitante, voire même contradictoire tenue par le souverain dans le domaine financier. Il rend compte, à la fois, de la fermeté du prince et de sa souplesse face aux puissants, de la justice de sa politique et de l'érosion de sa fiscalité. Il explique que le grand-duc ait pu se montrer, tour à tour, despotique et débonnaire, scrupuleux et complice. Le souverain, en effet, était assez indépendant des forces sociales dans lesquelles ses collaborateurs se recrutaient pour qu'il lui soit possible de conduire une politique qui n'était ni celle du patriciat, ni celle de l'Eglise, ni celle de la robe (Jean-Claude Waquet, Le grand-duché de Toscane sous les derniers Médicis, 1990 - books.google.fr).

 

Dans sa politique étrangère, Côme était contraint, par la petitesse de son État, de maintenir un difficile équilibre entre la France, l'Espagne et l'Empire. Du côté de l'Empire, il n'en tira qu'une pure satisfaction d'amour-propre avec le titre d'Altesse Sérénissime (mais la France et l'Espagne le lui refusèrent). En revanche, quand les troupes impériales et celles du duc de Savoie Victor-Amédée II eurent vaincu les Français, en 1706, on lui fit payer sa neutralité par une énorme contribution qui le contraignit à engager ses bijoux de famille (Pierre Antonetti, Les Médicis, 1997 - books.google.fr).

 

Alvise II Mocenigo (né le 3 janvier 1628 à Venise et mort le 6 mai 1709 dans la même ville) est le 110e doge de Venise, élu en 1700, son dogat dure jusqu'en 1709. Il réussit à tenir la République hors de la guerre de Succession d'Espagne, la préservant d'une guerre inutile pour les intérêts vénitiens même si le passage des troupes françaises et espagnoles ravage la terre ferme. Il ne se produit rien pendant ce dogat qualifié de tranquille ; la longue décadence de la République débute qui se conclura avec sa chute en 1797 (fr.wikipedia.org - Alvise II Mocenigo).

 

L'hiver 1708-1709, fut très rigoureux en Savoie comme en France ; les blĂ©s gelèrent et une grande famine fut le rĂ©sultat de ce dĂ©sastre. Le Duc de Savoie interdit l'exportation du riz de PiĂ©mont sous prĂ©texte de ne pas nourrir l'armĂ©e française qui occupe la Savoie depuis 1703 (Jean-François Gonthier, Victor-AmĂ©dĂ©e Lafrasse, Histoire de Ballaison, 1951 - books.google.fr).

 

Acrostiche : P QOP

 

Lettres hébreues pé et qop (coph, koph, qop, etc.).

 

PSAUME CXLIV. On ignore en quelle occasion ce Psaume fut composé. C'est un cantique de louanges sur les attribues de Dieu, & d'actions de graces pour ses bienfaits. Les Interpretes remarquent que ce Psaume & les six suivants, étant tous remplis des louanges du Seigneur, sont comme l'épilogue de ?e Livre. Ce Psaume est alphabétique, de celle sorte que chaque verset commence par une des vingt-deux lettres de l'alphabet prises selon leur ordre. Le verset de la Lettre Noun, qui manque dans l'Hébreu, se crouve dans les Septante & dans la Vulgate. [...]

 

PĂ© : Et vous Seigneur, vous ouvrez votre main libĂ©rale ; & vous remplissez tous les animaux des effets de votre animal bontĂ©.

 

Coph : Car le Seigneur est proche de ceux qui l'invoquent, de tous ceux qui l'invoquent en vérité (Augustin Calmet, Henri François de Vence, Sainte Bible en Latin et en François avec des notes litterales, critiques et historigues, des prefaces et des dissertations, Tome 7, 1770 - books.google.fr).

 

...que puis-je faire sinon de suivre l'exemple de ces oiseaux, & de recourir Ă  vous, qui estes mon Pere, afin d'obtenir de vostre main liberale le secours que demande ma misere ? (Louis de Grenade, TraitĂ© de l'oraison et de la mĂ©ditation, traduit par M. Girard, 1687 - books.google.fr).

 

Riz et Ă©clipse

 

Dans un mythe japonais, la déesse Amaterasu, maitresse de la culture du riz et des arts matriarcaux, est bafouée par son frère Susanoo, dieu de la nature sauvage. Elle s'enferme dans une grotte et provoque une éclipse interminable qui obscurcit la Terre (Heide Goettner-Abendroth, Les sociétés matriarcales, 2020 - books.google.fr).

 

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