Les prisons de Carcassonne III, 12 1713-1714 Par la tumeur d'Heb.
Po, Tag. Timbre & Rosne Et par l'estang Leman & Aretin, Les deux grans
chefs & cités de Garonne Prins, morts, noiés.
Partir humain butin. Inondations au
XIVème siècle L'Ă©numĂ©ration de fleuves dans le quatrain se rĂ©duit Ă
l'Europe. À partir du milieu
du XIVe siècle, en effet, les récits d'inondations et de crues catastrophiques
se multiplient dans toute l'Europe. Une partie des cours d'eau semblent
hors de contrôle. C'est vrai de certains fleuves, mais aussi des torrents. La thèse d'un retour des grandes crues semble étayée.
Dans les premières années du XIVe siècle, le chroniqueur dominicain auteur des
Annales de Colmar revient sur les années 1200 : «Les torrents et les et les
rivières étaient moins forts qu'aujourd'hui, parce que les racines des arbres
retenaient pendant un certain temps dans les montagnes les eaux des pluies et
des neiges. » Or les archives naturelles confirment ce qu'avancent les textes (Fabrice
Mouthon, Le sourire de Prométhée: L'homme et la nature au Moyen Âge, 2017 -
books.google.fr). La population de Narbonne, au début du XIVe siècle,
supportait la comparaison avec Bordeaux, Toulouse, Montpellier, Marseille.
Ville drapière la plus importante du Midi, elle exportait massivement vers la
péninsule ibérique, la Sicile, l'Italie du sud, la Méditerranée orientale. Ses
marchands constituaient un groupe puissant, diversifié. [...] Une série de
coups du sort s'abattait sur la ville : des inondations catastrophiques qui
détournaient le cours de l'Aude, l'expédition du prince Noir en 1355 où le
Bourg fut pris et livré aux flammes, la peste (Les
ports et la navigation en Méditerranée au moyen âge: actes du colloque de
Lattes, 12, 13, 14 novembre 2004, musée archéologique Henri Prades, 2009 -
books.google.fr). A Narbonne, au XIVe siècle, de graves inondations,
bien attestĂ©es, modifient la situation.Â
L' une, avant 1307, a menacé le pont vieux. Le 12 octobre 1316,
survient une crue de l'Aude qui couvre toute la basse vallée, détruit trois
cents maisons dans Narbonne et change complètement le cours de la rivière.
[...] P. de Vaulxcernay
nous apprend ainsi qu'il faut remonter jusqu'Ă Carcassonne pour franchir l'Aude
au moment des inondations «presque périodiques» (Pierre
Verdeil, Données nouvelles sur le quaternaire de la basse vallée de l'Aude,
Bulletin de la Société géologique de France, 1971 - books.google.fr). "citez de Garonne" : Bordeaux et Toulouse ou la
chevauchée de Carcassonne La chevauchée du
Prince noir en 1355 est un raid dévastateur conduit de Bordeaux au Languedoc
pendant les mois d'octobre à décembre 1355 par Édouard de Woodstock - plus
connu sous le nom de Prince noir -, prince de Galles et fils aîné du roi
d'Angleterre Édouard III. Edouard de Woodstock n'a aucune intention de mener le
siège de Toulouse : ce n'est pas sa stratégie, il n'a de toutes
façons pas emmené les machines adéquates, et l'hiver qui s'approche
contrarierait un tel plan. Aussi passe-t-il son chemin, et le 28 octobre
l'armée franchit la Garonne - probablement à Pinsaguel
-, puis l'Ariège. Il pille et met Ă sac tout sur son chemin et arrive Ă
Carcassonne le 3 novembre. Après
quelques jours de sac, sans qu'il ne parvienne à pénétrer dans les murailles,
Woodstock lève le camp le 6 novembre, remontant la rive gauche de l'Aude. A
Narbonne, alors une ville de 30 000 habitants, qui comme Carcassonne est
constituĂ©e d'une citĂ© fortifiĂ©e et d'un bourg,Â
le vicomte Aimery de Narbonne et 500 hommes
d'armes lui opposent toute la nuit et la journée du 9 une résistance si
farouche que le prince n'insiste pas et se retire le 10. Prenant la route du
nord pour éviter les armées françaises qui le suivent à distance, il continue
ses ravages. Il est maintenant temps de prendre le chemin du retour, avant que
les pluies d'automne ne gonflent trop la Garonne, seul obstacle significatif
avant la Gascogne. Le 15, les colonnes se déploient et incendient Limoux (15
000 habitants), Routier, Montréal, Villar-Saint-Anselme,
Fanjeaux, Lasserre et Villasavary. Il sera de retour à Bordeaux le 9 décembre,
chargé de butin (fr.wikipedia.org
- Chevauchée du Prince noir (1355)). "butin" La prospérité est encore là , en 1355, après la peste,
c'est ce que note le prince de Galles Ă©crivant Ă l'Ă©vĂŞque de Winchester. [...] C'est
aussi l'avis de Froissart qui insiste sur la richesse du pays et sur tout le
butin que le Prince Noir et les siens trouvent dans les principales villes du
Lauragais : Castelnaudary, Montgiscard, Avignonet,
Villefranche (Marie-Claude
Marandet, Les campagnes du Lauragais à la fin du Moyen Âge: 1380 - début du
XVIe siècle, 2006 - books.google.fr). "noiés" Jean d'Armagnac que le roi de France avait nommé
gouverneur du Languedoc, était passé en Navarre où tranquillement il pillait
les Etats de Charles II, enlevait ses châteaux et brûlait ses villages. Gaston
vit lĂ une excellente occasion, non pas tant de venir au secours de son
beau-frère, que de jouer un mauvais tour aux Armagnacs. Il leva des troupes et
s'en vint en Bigorre rafler quelques-uns des fiefs du comte Jean. Encouragé par
de tels exemples, le Prince de Galles avait quittĂ© Bordeaux et s'Ă©tait mis Ă
piller consciencieusement la vallée de la Garonne. Inquiet, et estimant qu'il
avait tout à perdre à cette anarchie méridionale, le roi Jean envoya un
messager au comte de Foix pour essayer tout au moins de rétablir la paix entre
les princes français. L'envoyé du roi
trouva Gaston Phœbus sur les bords de l'Adour en train de surveiller quelques
noyades de prisonniers Armagnacs. Il lui remit une lettre dans laquelle le
roi l'invitait Ă venir Ă Paris pour expliquer lui-mĂŞme ses griefs contre le
comte d'Armagnac, gouverneur du Languedoc. Gaston III qui, comme nous l'avons
déjà dit, était assez vaniteux et quelque peu snob, fut flatté d'être ainsi
convié à venir voir le Roi dans sa capitale. En outre, il devait penser que
l'importance que Jean II semblait lui attribuer ne pouvait que rehausser son
prestige auprès des seigneurs du sud-ouest. Il allait marquer un point sur son
rival Jean d'Armagnac. Il partit donc pour Paris dans le courant de l'année 1356
(Jean
Du Sault, La vie aventureuse de Gaston Phœbus, 1958 - books.google.fr). Les préparatifs
criminels de Charles le Mauvais étaient de ceux pour lesquels furent inventées
les lettres de cachet et au XIVe siècle les noyades nocturnes dans la Seine, que
Charles V lui-mĂŞme n'ignora pas. Mais si Jean II Ă©tait contraint Ă la
réticence sur le chapitre des motifs, il revendiquait la conscience calme la
responsabilité de ses actes de justice (Jean
Médéric Tourneur-Aumont, La bataille de Poitiers (1356) et la construction de
la France, 1940 - books.google.fr). Les enlumineurs la
réservent à certains héros de l'Antiquité, en prenant soin cependant de les
jeter de la roche Tarpéienne d'où le condamné serait tombé droit dans le Tibre.
Cette image symbolique de Rome permet de transcender la scène et d'éclipser la
honte de la noyade. La distorsion entre représentation et réalité montre
bien que les récits et les enluminures ne traduisent pas exactement les formes
de la répression judiciaire (Claude
Gauvard, Condamner Ă mort au Moyen Ă‚ge: Pratiques de la peine capitale en
France XIII - XVe siècle, 2018 - books.google.fr). Cf. "Timbre & Rome" du vers 1 du quatrain. Typologie Millénarisme Les reports de dates pivots conduisent dans les quatrains
III, X, III, XI et III, 12 à des dates proches de l'an mille. Elie Marion est né en 1678, dans la "bourgeoisie"
protestante d'un bourg des Hautes-Cévennes. Futur héritier, il accomplit de
classiques études de droit jusqu'en juillet 1702. Mais les façades, du droit
comme de la bourgeoisie, cachent une opiniâtreté huguenote jamais démentie, et
bientôt le surgissement irrésistible de la Parole de Dieu. Ses jeunes frères
sont les premiers touchés, avant qu'il ne les rejoigne dans cette expérience du
prophétisme cévenol qui reste aujourd'hui encore une énigme pour les historiens
et les théologiens. Le jeune homme se lance à corps perdu dans la guerre des camisards
(1702-1705). Cet intellectuel, qui a laissé de ce conflit deux relations
précieuses, participe activement aux négociations qui mettent fin aux combats.
En 1705, il se réfugie en Suisse avec quelques compagnons de guerre. Alors que
l'histoire semble s'arrĂŞter pour la plupart des camisards, Elie Marion vit une
seconde vocation. Il gagne Londres en 1706, et s'y réunit avec une poignée de
réfugiés cévenols. Dans un irrépressible flot de paroles apocalyptiques, les
French prophets annoncent pour bientĂ´t le millenium -
la seconde venue du Christ pour un règne terrestre de mille ans. Ainsi, le
prophétisme resurgit dans l'exil londonien, à la grande colère des pasteurs et
des magistrats, mais non sans déclencher bien des adhésions, dont celle d'un
des plus grands mathématiciens de son temps, jusque-là ami d'Isaac Newton : Nicolas
Fatio. Une incroyable guerre des libelles s'instaure,
qui mobilise la " RĂ©publique des Lettres ". Marion et ses amis sont
traqués, exposés sur un échafaud en plein cœur de Londres, mais persistent... même
quand ils annoncent un peu trop vite une improbable résurrection ! En 1711,
dans le plus pur esprit des revivals anglo-saxons, ils se lancent dans une
extraordinaire aventure missionnaire : conquérir l'Europe en traversant ses
capitales et ses religions. Un premier périple, à travers l'Allemagne, les
conduit jusqu'à Vienne. En 1712, une seconde mission les mènera jusqu'à Rome en
passant par Stockholm, la Pologne, l'Allemagne et Constantinople. Pour Marion,
l'odyssée s'achève à Livourne, en novembre 1713. Qu'a-t-il
vraiment cherché et trouvé ? Quelle est
cette religion cévenole qui laisse Dieu parler aux siens et ses prophètes se
muer en missionnaires millénaristes ? Quelle filiation peut-on envisager
entre les French prophets, les RĂ©veils protestants
postérieurs et, plus largement, la culture européenne à l'époque des Lumières ?
Quelle est la postérité du prophétisme cévenol ? Jean-Paul Chabrol est le
premier à reprendre à fond le parcours d'un homme que l'on peut considérer
aussi bien comme un sectaire dévoyé que comme un marcheur de ce Dieu
prophétique qui se manifeste alors aux camisards comme aux jansénistes. Quant
aux CĂ©vennes, on voit combien le destin tragique d'Elie Marion les inscrit, une
fois encore, comme tout leur protestantisme, dans une dimension européenne,
sinon américaine (Patrick Cabanel et Jean-Paul Chabrol) (Jean-Paul
Chabrol, Élie Marion, le vagabond de Dieu (1678-1713): prophétisme et
millénarisme protestants en Europe à l'aube des Lumières, 1999 -
books.google.fr). Carcassonne et les protestants On ignore trop aujourd'hui que la cité de Carcassonne,
haut lieu touristique mondialement célèbre, a servi, comme la tour de Constance,
de prison pour femmes au lendemain de la révocation de l’édit de Nantes et de
la guerre des camisards. Les lignes qui suivent ont pour ambition de mieux
restituer à la mémoire protestante cet autre lieu d'incarcération et de
«résistance» au sens où l'a entendu Marie Durand, même s'il a cessé d'être
utilisé, semble-t-il, à partir de la fin des années 1710, au moment où
Aigues-Mortes accueillait les premières contemporaines de la restauration des
Églises du Désert. Il n'est pas indifférent, par ailleurs, alors que la cité a
été déclarée patrimoine mondial par l'Unesco (1997), de rappeler que ses murs
ont aussi retenu des innocents. Peut-on identifier, dans les très nombreuses
tours de la cité, celle où furent enfermés ces prisonniers pour la foi ? Il ne
le semble pas, mĂŞme si les noms des tours de la Justice et de l'Inquisition
peuvent donner Ă penser qu'elles servirent de prison. Avant d'en venir aux
femmes, saluons l'opiniâtreté d'un bourgeois de Nîmes, Charles Guiraud, et de
toute sa famille : tandis que sa mère, ses sĹ“urs et ses nièces parvenaient Ă
gagner Genève après s'être cachées tout au long de 1686, et que son père
mourait à la tour de Constance le 24 août de la même année, lui- même passait
d'une prison à l'autre, sans jamais abjurer sa foi. Après quatre mois de
relégation à Carcassonne, il était enfermé pendant près d'un an dans un cachot
du fort de Brescou, avant d'être transféré à la
citadelle de Montpellier, puis Ă la tour de Constance, et enfin sur
L'Espérance, un navire partant de Marseille pour la Martinique (mars 1687).
Rescapé du naufrage du navire, il séjourne pendant cinq mois au fort
Saint-Pierre, avant de passer dans l'île Saint-Christophe, tenue par les
Anglais, puis de gagner le Brandebourg (avril 1688). On possède un état
détaillé des soixante-dix femmes détenues à Carcassonne en novembre 1712 : il a
été rédigé par le pasteur Daniel de Superville (Patrick
Cabanel, Itinéraires protestants en Languedoc du XVIe au XXe siècle: Hérault,
Rouergue, Aude et Roussillon, 2000 - books.google.fr). Tous ces
«méchants» qui refusent de se repentir sont menacés de «destruction, massacres, foudroiement, malédiction, angoisses, pleurs,
deuil, châtiments, carnage, inondations, déluge, foudre, tonnerre et vents, feu
et soufre» (Jean-Paul
Chabrol, Élie Marion, le vagabond de Dieu (1678-1713): prophétisme et
millénarisme protestants en Europe à l'aube des Lumières, 1999 -
books.google.fr). |