La Corse sous la coupe française

La Corse sous la coupe française

 

III, 87

 

1768-1769

 

Classe Gauloyse, n’approches de Corseigne,

Moins de Sardaigne : tu t’en repentiras.

Trestous mourrez, frustrĂ©s de l’aide : grogne

Sang nagera : captif, ne me croyras.

 

Une escadre française, commandée par le chevalier de La Ferrière, en 1655, sombrera dans le golfe de Lyon, en côtoyant la Corse & la Sardaigne. Ils périront tous; ils n'atteindront pas le cap du Pourceau; ils seront engloutis dans la mer, parce que cet oracle n'aura pas servi d'avertissement au maître pilote, Jean de Rian, dit le Captif (Balthazar Guynaud, La Concordance Des Propheties De Nostradamus, 1693 - books.google.fr).

 

Le latin "classis" désigne une flotte, armée navale. "Grogne" est synonyme de Pourceau, nom d'un cap avec petit port dans la Méditerranée. Jean de Rian avait été esclave (Anatole Le Pelletier, Les oracles de Michel de Nostredame, Tome 1, 1867 - books.google.fr).

 

Cette interprétation historique peut être valide si les Centuries sont fortement antidatées (cf. quatrain II, 22 etc.).

 

Typologie

 

Le report de 1769 sur la date pivot 1655 donne 1541.

 

1541. La tempête souffle en Méditerranée alors que l'immense flotte impériale de Charles Quint (1500 - 1558) rentre d'Alger vers la péninsule Ibérique. Force est de s'abriter sur les côtes de Corse, dans le golfe de Sant'Amanza. L'Empereur descendrait par hasard à terre. Se promenant avec sa suite, en attendant des cieux plus cléments, il aurait rencontré, quelque peu par hasard encore, le Génois Cattacciolo qui l'aurait reçu à Bonifacio - du 3 au 6 octobre 1541 - en sa maison qui existe toujours et qui est celle d'un riche patricien génois. Telle est du moins la vulgate telle qu'on la trouve sous la plume de plusieurs auteurs qui mentionnent ce passage de Charles Quint à Bonifacio dont plusieurs ont douté. [...] Des sources authentiques prouvent ce séjour impérial. [...]

 

La Tempête - donc Dieu -, est favorable à l'alliance contractée entre Charles Quint et Andrea Doria en 1528. En conduisant “par hasard” les pas de Charles Quint en un préside génois, Bonifacio, le 1541, Dieu approuve du Ciel l'alliance hispano - génoise. Dieu lave aussi un affront. En 1420, le roi d'Aragon a été tenu en échec à Bonifacio justement par les Génois qui ont empêché les Espagnols de gravir les marches du fameux escalier du Roi d'Aragon. Un siècle plus tard, Dieu conduit le roi d'Aragon en une ville qui avait jadis résisté à ses prédécesseurs (Alphonse V) et lui offre généreusement l'hospitalité. Si Bonifacio refusait d'être aragonaise en 1420, Dieu à présent lui conseille - sinon de se soumettre -, du moins de s'allier à Charles Quint.

 

La Corse en 1541 constitue un enjeu entre trois protagonistes :

 

a ) les musulmans qui s'y intéressent de près, car ils viennent y faire de l'eau et des vivres ; ils réparent même leurs chébecks, felouques, galiotes et brigantins sur les plages du Cap Corse !

 

b ) la France de François Ier s'intéresse aussi à la Corse depuis 1533. - 1533 c'est l'arrivée à Marseille de Tomasino Lenche de Morsiglia, venu du Cap Corse ; c'est aussi l'arrivée de Sampiero Corso de Bastelica dans le sillage de Catherine de Médicis et du futur Henri II, mariés à Marseille en 1533. - 1541 : c'est l'année où François Ier signe des lettres de naturalité à Bartolomeo Baglione, de Calvi, préside génois ; c'est aussi l'année où Tomasino Lenche épouse à Marseille Hugone Napollon, fille du maître-calfat royal de l'arsenal de Marseille. 1541, c'est enfin l'année où François Ier se veut le plus conquérant sur mer : c'est le 27 janvier 1541 que le cardinal de Tolède a rapporté à l'Empereur la fameuse phrase du Valois : “Est-ce déclarer la guerre et contrevenir à mon amitié avec Sa Majesté que d'envoyer là bas mes navires ? Le soleil lui pour moi comme pour les autres ; je voudrais bien voir la clause du testament d'Adam qui m'exclut du partage du monde” ! C'est-à-dire qu'en 1533 - 1541, plusieurs Corses oeuvrent pour le roi [...] Tous utiles à la France : Lenche, riche négociant, bientôt fondateur de la Compagnie du corail ; Sampiero , soldat d'exception : futur colonel ; Baglione, père du héros (“Libertat") qui qui débarrassera Marseille du consul ligueur Cazaulx.

 

c ) il est donc “normal” que Dieu dise à qui doit revenir la Corse : aux musulmans, c'est exclu ; Dieu a alors le choix entre le Très Chrétien François Ier et le Roi Catholique : Charles Quint (Michel Vergé-Franceschi, L'Empereur Charles Quint est-il vraiment venu à Bonifacio ?, La Corse, île impériale: troisièmes Journées universitaires d'histoire maritime de Bonifacio actes du colloque des 27-28 juillet 2001, 2002 - books.google.fr).

 

Annexion de la Corse en 1768

 

C’est au traitĂ© de Versailles en 1768 que la RĂ©publique de GĂŞnes confie la Corse au roi de France en gage de l’aide que celui-ci lui a procurĂ©e pour combattre les insurrections depuis 1737, jusqu’à ce que GĂŞnes puisse rembourser les frais occasionnĂ©s aux Français par la pacification. C’est ainsi que Choiseul acquit la Corse Ă  la France. « La prise de possession ne se fit pas sans peine et l’on dut lutter près d’un an pour rĂ©duire les partisans de l’indĂ©pendance que dirigeait Paoli [1]». Celui-ci Ă©tait soutenu par l’Angleterre qui convoitait l’île pour sa position stratĂ©gique.

 



[1] A. Malet et J. Isaac, « XVIIème & XVIIIème siècles », Hachette, 1923, p. 540

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