Folie de Ferdinand VI d’Espagne

Folie de Ferdinand VI d’Espagne

 

III, 68

 

1754-1755

 

Peuple sans chef d’Espagne & d’Italie

Morts, profligĂ©s dedans le Cherronnesse :

Leur duyct trahi par legiere folie,

Le sang nager par tout Ă  la traverse.

 

"Cherronnesse"

 

«Cheronnez» et «Cheronesse» sont volontairement ambigus. Les deux mots Ă©voquent 1°) les deux batailles de ChĂ©ronĂ©e qui ouvrent et ferment les temps hellĂ©nistiques : la victoire de Philippe au IVe siècle et celle de Sylla sur les troupes de Mithridate (en 87 avant J.-C.) ; 2°) la Chersonese Cymbrique ou Jutland. Cf., plus loin, l'importance future du Danemark, dont les souverains selins se nommeront rois (Jean-Charles Pichon, Nostradamus en clair, 1970 - www.google.fr/books/edition).

 

En grec ancien, le terme Chersonèse, (Khersonêsos, de khersos, «le continent» ; et nêsos, l'île) voulait dire «péninsule», «presqu'île». La Chersonèse Taurique est aujourd'hui Crimée, où fut créé le royaume du Bosphore. La cité de Chersonèse était située au sud de la Chersonèse Taurique (au nord de l'actuelle Sébastopol) (fr.wikipedia.org - Chersonèse).

 

Il y avait encore la Grande Chersonèse au Nord-Est de la CyrĂ©naĂŻque ; la petite Chersonèse près d'Alexandrie en Egypte ; la ville de Chersonesos qui est Agosta en Sicile, etc. (A. F. Demoustier, Manuel Lexique philologique, didactique et polytechnique, ou dictionnaire portalif des sciences et des arts, 1844 - www.google.fr/books/edition).

 

L'an 339 a.C. fut manifestement celui de la plus grande puissance du Second Royaume scythe. Mais il marque le début de son déclin. Sa guerre contre Philippe de Macédoine, qui a suscité un tel intérêt tant chez les Anciens (Trogue Pompée dans Justin, IX, 1-9; IX, 2 1-16; IX, 3, 1-3; Eschine, Contre Ctésiphoti, 128; Strabon, VII, 3, 18; Plutarque, Aléas; Lucien, 10; Orose, III, 13, 4-7) que parmi les chercheurs contemporains, se termina par la victoire du père d'Alexandre. Presque centenaire, Atéas périt au combat.

 

La période III couvre les IVe-IIIe siècles. Le Second Royaume scythe atteignit son apogée au IVe siècle sous le roi Atéas. Selon Strabon (VII,3,1 8), (le littoral septentrional de la mer Noire). Dans l'histoire politique et sociale de cette époque, on observe toute une série de phénomènes nouveaux qui se manifestent tant en politique extérieure que dans la vie à l'intérieur du pays. D'après les sources écrites, l'expansion du royaume scythe, au IVe comme au Ve siècle, se fit essentiellement dans la direction occidentale. Entre autres causes, l'affaiblissement, puis la chute du royaume des Odryses au milieu du IVe siècle la favorisa. Il est manifeste que c'est précisément lors de cette expansion qu'Atéas guerroya contre les Triballes (Polyen, Stratagèmes, VII, 44,1). L'activité de ce roi puissant fit qu'une partie des Thraces fut soumise et nantie d'obligations sévères que Cléarque de Soloi (Athénée, XII, 2 7) comparait à celle des esclaves. Sous Atéas, les Scythes s'affermirent en Dobroudja et devinrent un facteur important sur la scène politique des Balkans. On note avec intérêt, à cette époque, une augmentation de la population scythe, tant nomade qu'agricole, dans la région du Dnestr. Au IVe siècle, sur ce territoire, apparaissent de nouveaux établissements et de nouveaux gorodnce fortifiés, sur les rives orientale et occidentale du fleuve. La sphère des intérêts majeurs des Scythes passait, de toute évidence, vers l'Ouest, plus près des principaux centres de la civilisation grecque (A.M. Khazanov, M. Burda, Th. De Sonneville-David, Les Scythes et la civilisation antique. Problèmes de contacts. In: Dialogues d'histoire ancienne, vol. 8, 1982 - www.persee.fr).

 

Après leur déroute face à Philippe II sur le Danube, assaillis de toutes parts, les Scythes royaux se retranchent dans la presqu'île de Crimée et créent une nouvelle ville, Neapolis (Santiago Juan-Galan, Terra Barda, Tome 1 : Les Indo-européens, 2010 - www.google.fr/books/edition).

 

La bataille de Chéronée est une bataille ayant opposé en Béotie, le 2 août 338 av. J.-C., Philippe II à une coalition de cités grecques menée par Athènes et Thèbes. Remportée par l'armée macédonienne, cette bataille consacre la domination macédonienne sur la péninsule grecque (fr.wikipedia.org - Bataille de Chéronée (338 av. J.-C.)).

 

Espagne et Italie

 

Les plus anciens Habitans après les Cyclopes, Ă©toient les Sicanes, qui, au rapport de Diodore, se disoient originaires de l'Ile. Mais Thucydide, Denys d'Halycarnasse, Philiste citĂ© par Diodore, Solin, & le poete Silius nous apprennent qu'ils vinrent d'une ContrĂ©e en Espagne, arrosĂ©e par le Sicanus, que Servius, sur d'assez foibles fondemens, prend pour le SĂ©gro. Quelques Ecrivains prĂ©tendent qu'on les appelloit Sicani d'après le Fleuve Sicanus ; d'autres, qu'ils prirent le nom du Chef qui les mena en Sicile, & qu'ils donnĂ©rent leur nom Ă  l'Ile, qui s'appelloit auparavant Tinacrie. Diodore est de sentiment que les Sicanes ont Ă©tĂ© les premiers habitans de la Sicile, & s'appuye Ă  cet Ă©gard de l'autoritĂ© de TimĂ©e, qui, dans son Histoire de Sicile, a remontĂ© jusqu'aux tems les plus reculĂ©s. Suivant cet ancien Auteur, les Sicanes furent au commencement en possession de toute l'Ile, & cultivĂ©rent le Pays alentour du Mont Etna, cet endroit Ă©tant plus fertile que les autres. Ils bâtirent un grand nombre de petites Villes & de Villages sur les hauteurs, pour se garantir des Voleurs & des Brigands; & n'obĂ©issoient pas tous Ă  un mĂŞme Prince, mais chaque Ville ou District avoit son Prince particulier. Ils continuĂ©rent Ă  vivre de cette manière, jusqu'Ă  ce que l'Etna commença Ă  vomir des flammes, & Ă  rendre le Pays d'alentour inhabitable. Dans cette extrĂ©mitĂ©, ils abandonnĂ©rent leurs anciennes demeures, & se retirĂ©rent vers la partie la plus Occidentale de l'Ile, oĂą ils Ă©toient encore du tems de Thucydide. Quelques Troyens, après la destruction de leur Ville, Ă©tant venus en Sicile, s'Ă©tablirent parmi les Sicanes, bâtirent les Villes d'Eryx & d'Egeste, & devinrent un mĂŞme Peuple avec les anciens habitans, prenant le nom gĂ©nĂ©ral d'Elymi ou d'Elymæi. Ils furent joints dans la suite par quelques PhocĂ©ens, qui vinrent s'y Ă©tablir Ă  leur retour du siège de Troye. Les Sicules, ou Siciliens proprement dits, passèrent en Sicile après que les Sicanes eurent Ă©tĂ© tranquilles possesseurs de cette Ile durant plusieurs siècles. Ils Ă©toient, au rapport d'Hellanicus de Lesbos, les anciens habitans de l'Ausonie proprement ainsi nommĂ©e; mais ayant Ă©tĂ© chassĂ©s par les Opici, ils se rĂ©fugiĂ©rent en Sicile, & s'y Ă©tablirent dans les endroits mĂŞmes que les Sicanes avoient abandonnĂ©s. Peu contens des Ă©troites limites oĂą les Sicanes prĂ©tendoient les renfermer, ils s'Ă©tendirent peu Ă  peu aux dĂ©pens de leurs Voisins. Cette espèce d'invasion donna bientĂ´t lieu Ă  une sanglante bataille, dans laquelle les Sicanes furent entièrement dĂ©faits, & obligĂ©s Ă  se retirer dans un coin de l'Ile. Les Sicules, se voyant alors maĂ®tres de la plus grande partie du Pays, changerent l'ancien nom de Sicanie en celui de Sicile. Philiste, citĂ© par Denys d'Halicarnasse, nous apprend que les Sicules Ă©toient originairement Liguriens, & qu'ils s'opposĂ©rent Ă  Hercule, quand, Ă  son retour d'Espagne, il voulut passer les Alpes pour se rendre de Gaule en Italie (Histoire Universelle, Depuis Le Commencement Du Monde, Jusqu'A Present, Tome 5, 1744 - books.google.fr).

 

"Sans chef"

 

Quelques Auteurs prétendent, non sans fondement, que les Lestrigons & les Sicanes étoient un seul & même peuple de Sicile. Pour ce qui est des Sicanes, ils avoient au commencement autant de Rois que de Villes, mais ils furent assujettis dans la suite à un seul Prince. L'Histoire n'a conservé le souvenir que de deux de leurs Rois, nommés Cocalus & Teutus. Tout ce que nous savons du dernier, est que de son tems les Sicanes, n'étant pas d'accord entre eux, furent subjugués par Phalaris Tyran d'Agrigente, & que Teutus lui-même fut pris par trahison dans sa Capitale (Histoire Universelle, Depuis Le Commencement Du Monde, Jusqu'A Present, Tome 5, 1744 - books.google.fr).

 

"Syracuse"

 

Les mêmes troupes & le même Général (Timoléon), qui délivra depuis Syracuse (en 340 av. J.C.), & vainquit Carthage étoient dans Corinthe, lorsque les Corinthiens faisoient de vains efforts contre Philippe (Claude Matthieu Olivier, Histoire de Philippe, roi de Macedoine et pere D'Alexandre Le Grand. Par M. Olivier, de l'Académie des Belles-Lettres de Marseille, Tome 2, 1760 - books.google.fr, Pierre Carlier, Le Quatrième Siècle grec, jusqu'à la mort d'Alexandre, 2014 - www.google.fr/books/edition).

 

Timoleon, après avoir comme ressuscité Syracuse, entreprit d'affranchir toute la Sicile, & d'extirper les Tyrans & la Tyrannie dans les autres Villes. Il commença par Icetas Tyran de Léonte, qu'il obligea de renoncer à l'alliance des Carthaginois, à raser ses Forteresses, & à abdiquer la Souveraineté. Leprine, Tyran d'Apollonie & d'Engye, après avoir essuyé un siège, se rendit au Vainqueur, qui lui laissa la vie, & l'envoya avec plusieurs autres Tyrans à Corinthe, où il vécut comme un simple particulier. Il s'empara dans la suite d'Entelle, & fit mettre à mort tous les partisans des Carthaginois. Le bruit de ses victoires s'étant répandu dans toute la Sicile, Toutes les Villes Grecques de l'Ile se soumirent à lui, & furent remises en possession de leurs privilèges. Plusieurs autres Villes des Sicanes & des Sicules, sujettes aux Carthaginois, lui envoyérent des Ambassadeurs, pour demander à être admises au nombre de les Alliés.

 

Timoléon, après avoir ainsi nettoyé la Sicile des Tyrans qui la tenoient sous le joug, & avoir rendu la liberté à toute l'Ile, retourna à Syracuse, où conjointement avec Céphale & Denys, deux Législateurs que les Corinthiens lui avoient envoyés, il établit les Loix propres à un Gouvernement Démocratique. Parmi plusieurs autres sages institutions, il créa un premier Magistrat annuel, que les Syracusains appelloient l'Amphipole de Jupiter Olympien. Le premier de ces Amphipoles se nommoit Callimène. De puis ce tems les Syracusains comptèrent leurs années par la date du gouvernement de ces Magistrats; & cette coutume étoit encore en usage du tems de Diodore de Sicile, c'est-à-dire, sous le Règne d'Auguste, trois cens ans après l'institution de la Charge dont il s'agit (Histoire Universelle, Depuis Le Commencement Du Monde, Jusqu'A Present, Tome 5, 1744 - books.google.fr).

 

Typologie

 

Le report de 1755 sur la date pivot -339 donne -2433.

 

Après la mort de Salé, fils d'Arphaxad, et avant la naissance de Sarug (Lenglet Du Fresnoy, Tablettes chronologiques de l'hist. univers., sacrée et proph., ecclésiast. et civile, depuis la création du monde, jusqu'à l'an 1762, 1763 - books.google.fr).

 

Barbarisme, est une des quatre espèces de sectes, ou d’hĂ©rĂ©sies, d’oĂą les autres se sont formĂ©es. Le barbarisme ne s’est trouvĂ© que parmi les hommes qui ont vĂ©cu sans sociĂ©tĂ©, sans composer une Eglise, ni un corps politique. Voyez S. Jean Damascène, qui dit que le barbarisme a durĂ© depuis Adam jusqu’à NoĂ©, qui est le temps oĂą les hommes ont vĂ©cu dans une entière indĂ©pendance & dans une pleine libertĂ© ; c’est cet Ă©tat d’indĂ©pendance & de libertĂ© qui est marquĂ© par le nom de barbarisme ; soit que ceux qui vivoient ainsi dans les premiers temps, & avant NoĂ©, reconnussent & adorassent le vrai Dieu, soit qu’ils fussent idolâtres. D’autres disent que le barbarisme, qu’ils appellent aussi Scythisme, est l’athĂ©isme, ou l’erreur de ceux qui, selon le Psalmiste, disent dans leur cĹ“ur, il n’y a point de Dieu. Quelques Anciens, selon S. Epiphane, disoient que le barbarisme avoit prĂ©cĂ©dĂ© le dĂ©luge, & que le Scythisme avoit regnĂ© depuis le dĂ©luge, jusqu’à Sarug, oĂą l’HellĂ©nisme avoit commencĂ©. Mais 1°. Epiphane ne dit point que ces Barbares avant le dĂ©luge, & ces Scythes d’avant Sarug, n’eussent point de connoissance de Dieu. 2°. Toute la distinction de ces sectes est vaine. Elle n’a d’autre fondement que l’onzième verset du ch. 3, de l’EpĂ®tre aux Colossiens, oĂą S. Paul dit, oĂą il n’y a point de Gentil & de Juif, de circoncis & d’incirconcis, de Barbare & de Scythe, d’esclave & de libre. Mais S. Paul ne prĂ©tend point par ces mots marquer diffĂ©rentes sectes, ou opinions de Dieu ; mais seulement nous apprendre que tout homme Ă©toit Ă©galement appelĂ© & reçu, s’il vouloit, au christianisme, sans distinction de nation ou de condition, & que les Juifs n’avoient point de privilĂ©ge en cela plus que le Gentil, le Barbare, le Scythe & le Grec, le libre plus que l’esclave (Dictionnaire de TrĂ©voux, 1771 - fr.wikisource.org).

 

Les Grecs font descendre les Scythes, dont ils étaient voisins, de Scythès, fils d'Hercule, et d'un monstre à queue de serpent. Une chronologie plus rapprochée leur donne des rois déjà fameux du temps d'Abraham. Depuis cette époque jusqu'à Alexandre, il n'est fait mention dans l'histoire que de quelques rois, dont la succession n'est pas suivie. On n'en sait guère que les noms (Cours élémentaire d'histoire universelle redigé sur un nouveau plan, ou lettres de Mme d'Ivry à sa fille, Tome second, 1809 - books.google.fr).

 

On trouve la déification de Pylade et Oreste par les Scythes dans le Toxaris de Lucien de Samosate qui s'insère pour son contenu (les louanges de l'amitié) dans la tradition à laquelle se rattache l'œuvre de Louise Labé (Enzo Guidici, Oeuvres complètes de Louise Labé, 1981 - books.google.fr).

 

C'est d'ailleurs un fait que la guerre est favorable à l'éclosion de l'amitié, et les Scythes vivent dans «des guerres perpétuelles». Ils ont institué l'amitié comme moyen de défense; ils s'en font dans les batailles «une arme invincible» (XXXVI). L'amitié est en outre chez eux un objet de vénération et de culte. Ils ont élevé un temple à Oreste et à Pylade, et leur offrent des sacrifices; ils leur pardonnent d'avoir envahi leur pays, pillé et massacré leur roi, et ils honorent en eux «les génies tutélaires de l'amitié». S'ils sont battus à la guerre, mais qu'il se produise dans leurs rangs quelque beau trait d'amitié, ils se consolent de leur défaite (XLI). Ils comblent d'honneur les amis illustres, les nourrissent aux frais de l'État (XLI) et les ensevelissent dans le même tombeau (XLIII). Chez eux, l'amitié est un pacte qui se conclut suivant un rite barbare. Les amis font le serment de vivre toujours ensemble, et de mourir, s'il le faut, l'un pour l'autre. On procède ainsi. Après s'être incisé ensemble le bout des doigts, on en fait couler le sang dans un vase; chacun y trempe la pointe de son épée, et tous deux, penchés sur le vase, boivent le sang qu'il contient. A partir de ce moment, rien ne doit plus les séparer (XXXVII) (Ludovic Dugas, L'amitié antique d'après les moeurs populaires et les théories des philosophes, 1894 - books.google.fr).

 

Folie d’Espagne

 

Le roi d’Espagne Ferdinand VI (1713-1759), petit-fils de Louis XIV et dominĂ© par sa femme Marie-ThĂ©rèse Barbara de Portugal, se laissait distraire de sa perpĂ©tuelle mĂ©lancolie (« lĂ©gère folie Â») par le chanteur Farinelli. Il devint complètement fou Ă  la mort de sa femme, laissant l’Espagne sans chef. Naples et Sicile (« Italie Â») Ă©taient passĂ©s aux mains des Bourbons espagnols en 1738. « Cherronnesse Â» est une transcription de Chersonèse qui signifie « presqu’île Â» et qui peut dĂ©signer le rocher de Gibraltar conquis par les Anglais en 1704 et qui leur est reconnu par diffĂ©rents traitĂ©s dont celui de Paris en 1763.

 

En 1724, déprimé, Philippe V abdiqua au profit de son fils Louis, mais reprit finalement le pouvoir sept mois plus tard à la mort de ce dernier. Atteint par des crises de folie, il mourut en 1746, en laissant une nouvelle dynastie dont les descendants sont toujours rois d'Espagne (Jean-Philippe Cénat, Louis XIV, 2012 - books.google.fr).

 

Il s'agit bien d'une maladie héréditaire – plus sûrement transmise par les Wittelsbach que par les Bourbons ou les Savoie – car Ferdinand VI, qui va régner treize ans de 1746 à 1759, connaît à son tour, dans l'année où il survit à son épouse, Barbara de Bragance, des accès de folie furieuse (Philippe Nourry, Histoire de l'Espagne: Des origines à nos jours, 2019 - books.google.fr).

 

"Ă  la traverse"

 

Oreste fut joué à Paris, pour la première fois, le 12 janvier 1750. Voltaire y assista en loge grillée. La pièce avait été lue en novembre 1749, chez le comte d'Argental. A la première représentation, un récit fait par Mlle Gaussin choqua les spectateurs, qui le trouvaient déplacé dans la bouche d'une femme, et la représentation ne fut achevée qu'avec peine. Voltaire, rentré chez lui, s'occupa de faire un nouveau cinquième acte. Il changea le récit, fit quelques corrections dans les premiers actes; tout était fini à minuit. Les rôles furent bientôt remis aux acteurs, et la seconde représentation eut lieu le 19 avec des changements; ce qui dérouta les ennemis de l'auteur. Cependant sa tragédie n'eut que neuf représentation.

 

Remis au théâtre en 1762, Oreste obtint un succès complet, grâce surtout à la manière supérieure dont Me Clairon interpreta alors le rôle d'Électre. Cette tragédie disparut ensuite de la scène pendant plus de vingt ans. Mme Vestris, qui remplaça M'le Clairon, fit de vains efforts pour obtenir qu'on reprit cette pièce. Brizard, qui avait un rôle brillant dans Palamède (d'Électre) et un médiocre dans Pammène (d'Oreste), écarta obstinément la reprise d'Oreste. Oreste toutefois fut joué pour quelques débuts, entre autres pour celui de Mlle Raucourt, et toujours avec succès. L'œuvre de Voltaire eut, comme la plupart de ses pièces, une sorte de renouveau après la Révolution. «L'effet du théâtre, dit Laharpe, a confirmé par degrés une justice d'abord refusée; et, dans les dernières représentations d'Oreste, toutes les beautés en ont été vivement senties, et l'impression en a été beaucoup plus grande que n'est depuis longtemps celle d'Électre.» (OEuvres complètes de Voltaire, Tome 5 : Théâtre, 1877 - books.google.fr).

 

Vous me demandez la différence de l'Oreste de la seconde représentation à celui de la première : quelques longueurs de moins & un récit de plus, la voilà toute. Le récit m'a paru beau & bien fait ; mais il jette un nouveau ridicule sur le dénouëment, qui n'en avoit que faire. On vient nous annoncer Oreste vainqueur, reconnu du Peuple, & n'ayant plus rien à craindre,

 

A peine délivré du fer d'un ennemi

C'est un Roi triomphant sur son trĂ´ne affermi,

 

OĂą Ă©toit donc la difficultĂ© d'immoler Egisthe sans tuer Clytemnestre ? Mais il la falloit tuer cette Clytemnestre : on la laisse donc adroitement en pleine libertĂ©, afin qu'au moment du fer levĂ© sur le Tyran, elle puisse se jetter Ă  la traverse, & que tous deux du mĂŞme coup... Oui, MONSIEUR, tous deux du mĂŞme coup ; l'Ă©pĂ©e Ă©toit longue ; ne les voyez-vous pas l'un & l'autre entre la garde & la pointe ? On assure cependant qu'Ă  la troisiĂ©me reprĂ©sentation ils recevront chacun leur coup Ă  part. Mais soit en un coup, soit en deux, que deviendra Oreste qui les a frappĂ©s ? OĂą fuira le meurtrier de sa mère ? OĂą l'entraĂ®neront les furies ? Eh parbleu, il s'en ira en Tauride; les Dieux ne l'y avoient-ils pas exilĂ© d'avance ? Il se le rappellera tout Ă  propos; voilĂ  son ami Pylade qui s'offre Ă  le suivre ; ils nous font leurs adieux, ils partent. Ce projet de voyage n'est-il pas bien trouvĂ© pour fermer la scène.

 

P.S. On avoit mis, je ne sçais pour quoi, sur les billets de parter, les lettres initiales de ce vers d'Horace

 

Omne tulit punctum qui miscuit utile dulcis : O. T. P. / Q. / M. U. D.

 

Ceux qui ne sçavent pas le Latin ont prétendu que cela vouloit dire, Oreste, Tragédie Pitoyable, Que Mr. Voltaire Donne (Les cinq années litteraires ou lettres de M. Clément, sur les ouvrages de littérature qui on paru dans les années 1748, 1749, 1750, 1751 & 1752, Tome 1, 1755 - books.google.fr).

 

"légère folie"

 

Vous ĂŞtes sage ? vous ? Si vous preniez des pierres pour les jetter aux passans ; si vous faisiez pendre aujourd'hui un esclave que vous avez payĂ© hier de votre argent, tout le monde diroit que vous avez le cerveau troublĂ© : lorsque vous Ă©cranglez votre femme, que vous empoisonnez votre mere, pouvez-vous dire: que vous l'avez fait ? Il est vrai que vous ne le faites point Ă  Argos, ni avec le fer Oreste, quand il tua sa mere. Mais croyez-vous que les fureurs d'Oreste n'aient commencĂ© qu'après son parricide ? C'est tout le contraire : depuis qu'il eut plongĂ© le poignard dans le sein de sa mere il n'a rien fait dont vous puissiez le blâmer. A-t-il percĂ© son ami Pilade, ou sa soeur Electre ? Il leur a dit seulement quelques injures ; Ă  sa soeur, qu'elle Ă©toit une des Furies ; Ă  Pilade, quelqu'autre chose que lui inspiroit sa phrĂ©nĂ©sie: c'est tout ce qu'il a fait (Les PoĂ«sies D'Horace, Tome 2, traduit par Charles Batteux, 1750 - books.google.fr).

 

Voltaire fait honneur, nous l'avons dit, Ă  la discipline littĂ©raire des jĂ©suites : il a docilement saisi et conservĂ© le sens de leur enseignement; mais, docile Ă  l'excès sur ce point, il n'en a pas comblĂ© les lacunes. Les humanitĂ©s ne lui ont pas donnĂ© la connaissance intime de l'antique; l'âme grecque surtout et cette «aimable simplicitĂ© du monde naissant», si profondĂ©ment ressentie par FĂ©nelon, lui sont Ă  peu près demeurĂ©es lettre close. Racine en avait fait connaissance Ă  Port-Royal; Ă  Louis-le-Grand on ne pĂ©nĂ©trait pas jusqu'Ă  ces sources vives. On y enseignait du moins, par le moyen des meilleures Ĺ“uvres latines, beaucoup plus voisines de nous, l'art de composer, d'exprimer des pensĂ©es justes avec sobriĂ©tĂ©, concision, finesse, des sentiments dĂ©licats sans enflure et sans diffusion : c'est de Virgile et d'Horace que Voltaire a tirĂ© de la perfection antique une idĂ©e très accessible Ă  l'esprit d'un moderne et immĂ©diatement applicable Ă  son usage. C'est Ă  cette perfection de forme et de goĂ»t que se borne aux yeux de Voltaire la supĂ©rioritĂ© des anciens. Pour la pensĂ©e il est bien de son temps ; il ne s'est pas rendu compte de l'infidĂ©litĂ© qu'il commettait envers l'EnĂ©ide en la prenant pour modèle de sa Henriade, et l'on connaĂ®t l'exclamation naĂŻve qui lui Ă©chappa pendant la reprĂ©sentation de son Oreste : «Courage, AthĂ©niens ! C'est du Sophocle.» Sur Homère, il Ă©tait, au fond, du parti de Lamotte, avec un peu moins d'irrĂ©vĂ©rence et un peu plus de tact naturel. Les purs chefs-d’œuvre de la primitive antiquitĂ© ne lui ont jamais rĂ©vĂ©lĂ© leurs mystères; il ne les entrevoit qu'Ă  travers le siècle d'Auguste et celui de Louis XIV. Il consent que la Grèce soit la patrie du GoĂ»t (qu'il ne distingue pas du Beau), mais il n'en met pas l'âge d'or Ă  l'origine : la grande Ă©poque des arts et des lettres, c'est Ă  son avis celle dont il a vu la fin, c'est le dix-septième siècle (L. Brunel, Extraits en prose de Voltaire, 1895 - books.google.fr).

 

Statues

 

Athéas, qui vivait du temps de Philippe, roi de Macédoine, trompa ce monarque, le plus habile des princes de son temps. Il obtint de lui un secours considérable contre une invasion dont il était menacé; et quand ses ennemis, effrayés par les préparatifs de Philippe se furent retirés, il l'envoya remercier, et prétendit ne lui devoir aucun dédommagement pour ses préparatifs, puisqu'on n'avait pas fait la guerre. Les deux princes alors combattirent de ruse. Philippe fit savoir à Athéas qu'il avait fait vœu d'ériger une statue d'Hercule sur le bord de l'Ister, opposé à ses états, et qu'il désirait la poser lui-même. Athéas pénétra son motif, lui fit dire d'envoyer la statue, qu'il se chargeait de la consacrer et de veiller à sa sûreté. Philippe prit un autre moyen d'entrer dans les étals du roi scythe, et remporta sur lui une grande victoire, emmena vingt hommes prisonniers, un grand nombre de femmes encore et d'enfans, un nombre prodigieux de bestiaux, et vingt mille des plus belles cavales. On remarque que dans le butin il ne se trouva ni or, ni argent, ni bijoux, preuve de la pauvreté et de la simplicité que les Scythes conservaient. Après cette défaite, on ne les voit plus guère figurer dans l'histoire comme corps de nation; on ne parle plus de leurs rois ; mais nous reverrons ces peuples se faire redouter sous d'autres noms (Cours élémentaire d'histoire universelle redigé sur un nouveau plan, ou lettres de Mme d'Ivry à sa fille, Tome second, 1809 - books.google.fr).

 

Après le meurtre de sa mère et son acquittement par l'Aréopage, pour échapper aux Érinyes, Oreste doit, selon l'oracle d'Apollon à Delphes, ramener de Tauride sa sœur Iphigénie, ainsi qu'une statue d'Artémis emportée lors de l'enlèvement. Plusieurs villes se disputaient l'honneur de posséder l'idole dérobée par Oreste. Les Athéniens reconnaissaient l'Artémis Taurique dans la déesse qu'ils honoraient à l'Acropole sous le nom d'Artémis Tauropolos. L'endroit nommé Limnæum était consacré à Artémis Orthia : les Lacédémoniens disent que sa statue en bois est celle qu'Oreste et Iphigénie enlevèrent de la Tauride, et qui fut apportée dans leur pays par Oreste, qui en était roi.

 

Acrostriche : PMLL

 

S. PM(avec tilde)LL : abrĂ©viation en rapport avec Saint Pierre de Varengeville (Bernard de Montfaucon, Bibliotheca bibliothecarum manuscriptorum nova, Tome 2, 1739 - books.google.fr, Dictionnaire topographique de Seine Maritime, 1921 - doczz.fr).

Pierre-Robert Le Cornier de Cideville, né le 2 septembre 1693 à Rouen et mort le 5 mars 1776 à Paris, est un magistrat, bibliophile et homme de lettres français, cofondateur de l’Académie de Rouen. Il se fait construire le château de Launay, à Saint-Paër contiguë au Nord-Ouest de Saint Pierre. Condisciple de Voltaire au collège Louis-le-Grand, il sera, de l’aveu de ce dernier, son ami plus de cinquante ans. Faisant grand cas de son jugement, celui-ci n’hésitait pas à soumettre ses écrits à son jugement. Voltaire est même venu chercher refuge chez lui en 1730 alors qu’il était poursuivi pour certaines de ses œuvres. Il aurait écrit Éryphile et la Mort de César lors de ce séjour en Normandie. La correspondance de cette figure majeure des Lumières en province, avec Voltaire constitue une mine pour les spécialistes de cette époque (fr.wikipedia.org- Pierre-Robert Le Cornier de Cideville).

 

Lettre de Voltaire du 1757 A M. DE CIDEVILLE. Aux DĂ©lices, près du lac de Genève, 15 juillet. Mon cher et ancien ami, j'ai l'air bien paresseux ; je ne vous ai point remerciĂ© de la belle exposition de la tragĂ©die d'IphigĂ©nie en Tauride, que vous m'avez envoyĂ©e. De maudites occupations que je me suis faites emportent tout le temps. On sort fatiguĂ© de son travail; on dit, j'Ă©crirai demain : la mauvaise santĂ© vient encore affaiblir les bonnes rĂ©solutions, et on croupit long-temps dans son pĂ©chĂ©. C'est lĂ  la confession de l'ermite des DĂ©lices. Je vous crois Ă  prĂ©sent dans vos DĂ©lices de Normandie, vers les bords de votre Seine ! Vous y jugerez la famille d'Agamemnon Ă  la lecture, vous verrez si les vers sont bien faits, si on les retient aisĂ©ment, si l'ouvrage se fait relire : car c'est lĂ  le grand point, sans lequel il n'y a pas de salut (Oeuvres de Voltaire: avec prĂ©faces, avertissements notes, etc, Tome 57, 1832 - books.google.fr).

 

Musique

 

Iphigénie en Tauride est une tragédie en musique en cinq actes et un prologue, commencée par Henry Desmarest (1662 - 1741), aux environs de 1696, sur un texte de Joseph-François Duché de Vancy. Obligé de quitter la France pour la Belgique, puis l’Espagne, il laissa l’oeuvre inachevée. Il fut nommé surintendant de la musique du nouveau roi d'Espagne Philippe V de Bourbon, père de Ferdinand VI. L’ouvrage fut achevé par André Campra avec le concours d’Antoine Danchet. Il fut créé à l’Académie royale de musique, le 6 mai 1704, et accueillie froidement. Elle fut reprise le 12 mars 1711, avec succès (operabaroque.fr, Michel Brenet, Henri Desmarets, Le Ménestrel: journal de musique, 1882 - books.google.fr).

 

Dans une de ses lettres, l’abbĂ© Le Blanc mentionne la prĂ©sence de Farinelli Ă  Londres :

 

Comme je n'ai aucunes nouvelles Ă  vous mander, & que je ne suis pas de ceux qui s'amusent Ă  en faire, un article d'un des derniers Papiers Publics que je viens de lire, fera le sujet de ma Lettre, c'est une description bizarre d'un Etre Ă  la vĂ©ritĂ© assez singulier, & que les Anglois appellent Fox-Hunter. L'Auteur lui-mĂŞme va vous mettre tout de suite au fait :

 

"[...] Quoique les Fox-Hunters manquent absolument d'esprit, il s'en trouve nĂ©antmoins qui s'en piquent. On peut juger du leur par ce trait. Un d'entre eux que je connois beaucoup, rĂ©pondit un jour Ă  sa Soeur qui l'invitoit de venir Ă  Londres pour y entendre Farinelli : Ma Soeur, je ne donnerois pas un sol pour entendre votre Farinelli & tout votre OpĂ©ra Italien. J'ai ici vingt voix avec lesquelles je fais chorus, & que je fais chanter tantĂ´t dans les bois, & tantĂ´t dans les plaines, & c'est la seule Musique dont je fasse cas. On ne finiroit pas si l'on vouloir dĂ©crire toutes les singularitĂ©s du Fox-Hunter : les traits qu'on en a rapportĂ©s suffisent pour en faire le Portrait." [...] 

 

C'est ainsi qu'Athéas, Roi des Tartares, ayant fait Prisonnier de Guerre Isménias, excellent Joueur de Flûte, après l'avoir fait jouer devant lui, dit à ceux qui l'admiroient, qu'il prenoit plus de plaisir à ouir un Cheval hennir. Plutarque, Dits notables des Anciens Rois (Lettres de Monsieur l'Abbé Le Blanc, historiographe des bastimens du roi, Tome 2, 1751 - books.google.fr).

 

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