L'illuminisme allemand

L'illuminisme allemand

 

III, 76

 

1760-1761

 

En Germanie naistront diverses sectes

S'approchans fort de l'heureux paganisme :

Le cueur captif & petites receptes,

Feront retour à payer le vray disme.

 

Commentaire : Les réformés accusaient le clergé d'être avare et de prélever plus qu'il n'était raisonnable sur les biens des fidèles. Aux faux dîmeurs prélevant une fausse dîme, ils opposaient la vraie dîme telle qu'elle se pratiquait au début de l'Église. Hug (au mot dismeur) cite Eloy Damerval, Livre de la Deablerie, fo 74c, édit. de 1507 : «Je scay bien que nos faulx dismeurs, / S'ils ne changent leur vie et meurs, / Yront en conspirant toujours.» (Pierre Brind'Amour, Les premières centuries, ou, Propheties de Nostradamus (édition Macé Bonhomme de 1555), 1996 - www.google.fr/books/edition).

 

En Allemagne

 

Le temps des amalgames, des anathèmes et des diabolisations prend déjà naissance à partir de 1760 avec la déviation du Sturm und Drang pré-romantique allemand en crise crypto-religieuse associant alchimie et théurgisme à la promotion des idéaux théistes chrétiens. Cette crise se concrétise dans le développement des rites templiers de la Stricte-Observance du Baron de Hund et des Clercs du Temple ainsi que par le rite des Rose-Croix d'Or de Prusse et celui des Chevaliers Bienfaisants de la Cité Sainte du lyonnais Willermoz, lui-même successeur de Martinès de Pasqually (José Orval, Une histoire humaine de la franc-maçonnerie spéculative, 2006 - www.google.fr/books/edition).

 

Certains francs-maçons ont d'autre part fait remonter les origines de leur mouvement aux croisés et aux Templiers. Selon von Hund, fondateur en 1760 de la Stricte Observance Templière, le maître d'Auvergne Pierre d'Aumont aurait, lors de la persécution du Temple, trouvé refuge en Ecosse, avec quelques frères qui l'auraient élu à leur tête. Dans leur fuite, ils auraient pris l'habit de maçons (Les Grandes Enigmes du temps jadis, Tome 3, 2012 - www.google.fr/books/edition).

 

Karl Gotthelf von Hund de son titre complet : Karl Gotthelf, baron von Hund und Altengrotkau né le 11 septembre 1722 et mort le 8 novembre 1776 à Meiningen est un aristocrate allemand, fondateur de la Stricte Observance templière, rite maçonnique qui apparait en Allemagne vers 1755 et qui s'étend et perdure en Europe jusqu'à sa mort. L'influence de son régime imprègne le Rite écossais rectifié créé à l'issue du convent de Wilhelmsbad en 1782 (fr.wikipedia.org - Karl Gotthelf von Hund).

 

Entre Tschoudy et le milieu du XVIIIe siècle il s'est produit quelque chose de très important pour ce qui concerne la Rose-croix dans son rapport avec la Maçonnerie : c'est la constitution, l'existence et la mort, (vers 1760, puis apogée vers les années 70, puis «silentium» en 1786) d'un ordre para-maçonnique extrêmement important, les Rose-croix d'Or, en Allemagne, dont les rituels sont d'inspiration alchimique (Antoine Faivre, Pouvoir du symbole, 1997 - www.google.fr/books/edition).

 

Citons encore, parmi les différentes sectes de l'illuminisme, les Illuminés d'Avignon, société de maçonnerie hermétique, fondée en 1760 par le bénédictin dom Pernety, sur le modèle d'une ancienne secte Swedenborgienne (Ernest d'Hauterive, Le Merveilleux au XVIIIe siècle, 1973 - www.google.fr/books/edition).

 

Saint Germain

 

Entre 1750 et 1760, le personnage le plus célèbre de Paris, donc d'Europe, était le fameux Comte de Saint-Germain, «ambassadeur international» de l'illuminisme, qui prétendait avoir vécu trois mille ans et avoir connu le Christ. "Je lui avais bien dit qu'il finirait mal", murmurait-il, de l'air le plus sérieux. Et la Cour de France, dont il était l'intime, de s'extasier. Cet étrange personnage avait été ramené d'Allemagne en 1743 par M. de Belle-Isle, ambassadeur de France ; il disposait d'un «laboratoire magique» où il prétendait fabriquer un élixir de longue vie, lequel ne l'empêcha pas de mourir en 1784, chez le landgrave Charles de Hesse, lui-même hermétiste convaincu (Maurice Colinon, L'Église en face de la franc-maçonnerie, 1954 - www.google.fr/books/edition).

 

Germain : de germanus, naturel (de germen) ; le latin distingue le frater germanus, frère au sens plein, du demi-frère et du frère par adoption. Germanus s'applique également à l'enfant d'un frère ou d'une sÅ“ur de l'un des parents, c'est-à-dire le cousin germain (Jean Bouffartigue, Anne-Marie Delrieu, Trésors des racines grecques et latines, 2017 - www.google.fr/books/edition).

 

Les francs-maçons se reconnaissent entre eux pour frères ou sœurs et se nomment mutuellement ainsi. La fraternité ne peut s'acquérir qu'en devenant... Frère, en clair par l'initiation : en passant de l'état de profane à celui de franc-maçon (Alain Queruel, La franc-maçonnerie, 2015 - www.google.fr/books/edition).

 

"vraie dime"

 

La science maçonnique véritable se confond donc avec l'art sacerdotal et vise ainsi à rétablir les vrais secrets du culte primitif. En plein siècle des Lumières, l'ombre de Melchisédech plane dans le huis clos des loges (Pierre Mollier, L'ombre de Melchisédech au siècle des Lumières, Politica hermetica, n° 19 Melchisédech, 2005 - www.google.fr/books/edition).

 

C'est Melchisédech, roi de Salem, qui fournit du pain et du vin. Il était prêtre de Dieu le Très-Haut, et il bénit Abram en disant : "Béni soit Abram par le Dieu TrèsHaut qui crée le ciel et la terre ! Béni soit le Dieu Très-Haut qui a livré des adversaires entre tes mains !" Abram lui donna la dîme de tout (Genèse, 14, 18-20). Melchisédech est une figure clé de l'histoire ancienne de la religion. Il représente le «paganisme» dans son état encore non corrompu, un paganisme qui adhérait encore à la religion naturelle et qui n'avait pas encore sombré dans le polythéisme et le ritualisme. La doctrine d'un monothéisme originel naturel était l'un des rares dénominateurs communs de l'orthodoxie chrétienne et de la librepensée déiste. David Hume semble avoir été le premier à inverser cette séquence, jamais mise en doute auparavant, qui voyait le polythéisme succéder au monothéisme. Pour Michaeler, Melchisédech était le témoin de l'origine commune de toutes les religions dans la religion naturelle (Jan Assman, Religio duplex, Comment les Lumières ont réinventé la religion des Égyptiens, 2013 - www.google.fr/books/edition).

 

Des recherches sont menées en Allemagne au XVIIIe siècle par Karl Joseph Michaeler (1735-1804), prêtre et philosophe catholique qui écrit Sur l'analogie entre le christianisme des premiers temps et la franc-maçonnerie (Dominique Jardin, La tradition des francs-maçons, Histoire et transmission initiatique, 2016 - www.google.fr/books/edition).

 

Aussi, après ce séjour en Égypte, Abraham poursuit son Å“uvre; il est béni par Melchisedech; il reçoit la circoncision; il reçoit l'institution des sacrifices; il reçoit la confirmation effective des promesses qui lui avoient été faites ; il reçoit l'annonce d'un fils, et ce fils lui est donné, mais seulement après sa circoncision, tandis qu'il étoit incirconcis lorsqu'il donna la naissance à Ismaël (Louis-Claude de Saint-Martin, De l'Esprit des choses, ou Coup d'oeil philosophique Sur la nature des êtres et sur l'objet de leur existence, 1799 - books.google.fr).

 

La dîme était un signe d'alliance entre l'homme et le dénaire, ou le représentatif de l'unité d'où nous émanons. Depuis que, par la prévarication, nous ne payons plus cette dîme en nature réelle ou spirituelle, on nous avait fourni le moyen d'y suppléer figurativement par la dîme matérielle de nos biens. Le Christ nous avait mis à portée de payer de nouveau notre dîme en nature, mais ceux qui se sont dits ses successeurs et ses imitateurs, au lieu de nous apprendre comme lui à payer notre dîme en nature, se sont jetés avec plus d'avidité encore que les prêtres de l'ancienne loi sur le régime des dîmes matérielles ; et cela avec d'autant plus de tort que notre divin instituteur et réparateur avait enseigné que notre royaume n'était pas de ce monde . Voilà une des causes cachées de la Révolution et de l'abolition du clergé. Cependant, la Sagesse a tant d'empressement de nous rappeler à notre vraie dîme qu'elle laisse les hommes retracer sa loi dans les images, lorsqu'ils n'ont pas la force de la suivre dans ses réalités. Aussi, en abolissant la dîme matérielle, les législateurs français ont introduit la division dénaire et décimale qui nous peint encore en figure les caractères et le nombre de notre terme. Mais, comme cette figure est fausse et ne peut s'appliquer au temps, ainsi que je l'ai noté dans mon écrit sur les Nombres, elle ne peut durer et elle nous sera encore bien plus tôt enlevée que ne l'a été la dîme matérielle (Etincelles politiques) (Louis-Claude de Saint-Martin, Poésies et écrits politiques, Robert Amadou, 2001 - www.google.fr/books/edition).

 

Saint Martin

 

«L'homme, écrit S.-M., qui ne prend jamais que la figure des choses, et qui la prend toujours à contresens.» (L. A. [Lettre à un ami, ou Considérations politiques, philosophiques et religieuses sur la Révolution française, Paris, Migneret, an III,], p. 42-43.) Jugement d'une importance primordiale, puisqu'il montre que, loin d'être d'accord avec les théoriciens conservateurs, S.-M. démonte leur argumentation, et leur ôte leur plus ferme appui théorique. La société hiérarchisée est ainsi une création humaine car, «comme la nature n'a constitué entre eux ni sujets ni puissance, et qu'elle les a faits tous égaux et enfants du même père, ils ont été obligés d'y suppléer par des différences de convention» («Étincelles politiques », publiées par R. Amadou, L'Initiation, 1966, n° 1, p. 40).

 

Moins connue que l'anticléricalisme de S.-M. est sa dénonciation permanente de la propriété, type même de ces institutions qui pour avoir perdu tout lien avec les principes divins, peuvent être dites fondées par l'homme. Dans ses Notes sur Burlamaqui, il réfutait déjà ceux qui veulent que l'acte de tuer un voleur fasse partie des droits naturels, et écrivait : «Les droits de la propriété sont conventionnels parmi les hommes, mais les droits de la nature sont invariables.» Il y reviendra dans ses «Étincelles politiques», précisant que «les justices criminelles, en sévissant comme elles le font contre les voleurs de nos propriétés actuelles, transportent encore à la figure de la chose ce qui ne devrait convenir qu'à la chose même, p. 34». De droit divin, l'homme ne possède que «sa propre existence d'homme-esprit» (L. A., p. 39), et les propriétés terrestres, «étrangères au code primitif» (M. H. E., p. 159), ne peuvent être rendues légitimes que par le travail. La Révolution, loin de le faire changer d'avis, renforce encore ses idées (Nicole Chaquin, Le citoyen Louis Claude de Saint-Martin, théosophe révolutionnaire. In: Dix-huitième Siècle, n°6, 1974. Lumières et Révolution - www.persee.fr).

 

Louis-Claude de Saint-Martin, dit « le Philosophe inconnu », né le 18 janvier 1743 à Amboise et mort sur la commune de Châtenay-Malabry le 14 octobre 18031,2 (21 vendémiaire an XII), est un philosophe français. Le nom de Louis-Claude de Saint-Martin est à rattacher dans l'Histoire des idées au courant illuministe. À peu près à la même époque que Saint-Martin, l’Allemand von Eckartshausen écrit un certain nombre d’ouvrages, parmi lesquels La nuée sur le sanctuaire, qu'Éliphas Lévi recommandera plus tard à son élève, le baron de Spedialieri. L’extatique suédois Emmanuel Swedenborg se rattache aussi à l’illuminisme (fr.wikipedia.org - Louis-Claude de Saint-Martin).

 

En 1743, Swedenborg (1688 - 1772) a sa première expérience mystique, dont il parle ouvertement dans une lettre à son ami le Dr Hartley : «J'ai été appelé à une fonction sacrée par le Seigneur lui-même, qui s'est manifesté en personne devant moi son serviteur. Alors il m'a ouvert la vue pour que je voie dans le monde spirituel. Il m'a accordé de parler avec les esprits et les anges...». À la suite de cela, alors âgé de 56 ans, il abandonne ses recherches scientifiques pour se consacrer entièrement à la recherche théologique et philosophique afin de faire découvrir aux hommes une spiritualité rationnelle basée sur des visions de l'au-delà (fr.wikipedia.org - Emanuel Swedenborg).

 

Par l’entremise d’un de ses amis du cercle des officiers, le capitaine de Grainville, Saint-Martin est admis dès 1765 dans l'Ordre des Chevaliers Maçons Élus Coëns de l’Univers, fondé quelques années plus tôt par le théosophe thaumaturge J. Martinès de Pasqually, dont la doctrine se présente comme la clef de toute théosophie judéo-chrétienne, étant directement reliée aux enseignements secrets d’Égypte, de Grèce et d’Orient. L’enseignement et les rites coëns lui fournissent l’essentiel des thèmes philosophiques qu’il ne cessera de développer dans toutes ses Å“uvres. Il quitte l’armée en 1771 pour se consacrer à sa vocation et fut le secrétaire de Martinès de Pasqually pendant plusieurs mois. En 1773 et 1774, il demeure à Lyon chez Jean-Baptiste Willermoz (1730-1824). Cet autre disciple de Martinès de Pasqually créa en 1778 le Rite écossais rectifié (RER), pratiqué par de nombreux francs-maçons, et dans lequel il allait faire passer l’essentiel de la théosophie martinésiste. Au cours de ce séjour chez Willermoz, Saint-Martin rédigea son premier ouvrage, Des erreurs et de la vérité, ou les Hommes rappelés aux principes de la science. Quand parut ce livre, en 1775, l’auteur se trouvait à Paris et devint déjà le «Philosophe inconnu» qu’il allait rester pour la postérité. Le Tableau naturel des rapports qui unissent Dieu, l’Homme et l’univers (1782) reprend et prolonge les enseignements des Erreurs… Dès cette époque, Saint-Martin se détache des voies actives de la magie pour s’orienter dans une direction de plus en plus «intérieure» : le Réparateur a, selon lui, montré la voie d’un contact direct avec le divin, par la prière. Saint-Martin se défie même finalement de la franc-maçonnerie, malgré une appartenance de courte durée au rite rectifié de Willermoz (fr.wikipedia.org - Louis-Claude de Saint-Martin).

 

"cœur captif", "receptes"

 

Après L’Homme de désir (1790), puis Le Nouvel Homme et Ecce homo (destiné à instruire la duchesse de Bourbon), parus en 1792, Saint Martin écrit principalement sous l’influence de Boehme, dont il concilie l’enseignement avec celui de son «premier maître» Martinès de Pasqually (fr.wikipedia.org - Louis-Claude de Saint-Martin).

 

Au lieu de partir de la conception intellectualiste, Boehme inaugure la conception pragmatique. "Saint Thomas considère que dans l'être parfait la connaissance doit précéder la volonté. Vouloir en effet, c'est tendre vers un but connu. Et par conséquent Dieu en se connaissant lui-même, acte primitif entre tous, engendre. Puis la connaissance réciproque du Père et du Fils produit leur Amour et leur volonté commune qui correspond au Saint-Esprit. Boehme se place au contraire au point de vue opposé. Il part d'un désir pour ainsi dire instinctif, sorte de besoin inhérent à l'activité qui est le fond de toute existence. La connaissance, l'intelligibilité naît alors de la détermination que produit le désir en passant à l'action" (La Théodicée de la Kabbale, par Francis Warrain. Vega, 1949).

 

Quiconque a étudié les formules alchimiques sait que ce sont pour la plupart des recettes de laboratoire, aussi précises que les recettes de cuisine, à cette exception près, que les alchimistes emploient une notation symbolique extrêmement compliquée dont le sens eract ne pourrait être déterminé que par la pratique. Boehme, à qui manquait toute pratique et qui puisait sa science dans des ouvrages populaires, les comprenait probablement tout aussi peu que nous. Mais, au fond, on lui fait peut-être tort, en cherchant avec Harless une base scientifique à ses conceptions. Nous avons déjà vu qu'elles ont un sens physique, mais que ce que Boehme cherche est tout autre chose. Il veut exprimer et nous rendre sensible une intuition que, dans les temps modernes, il a été le seul ou du moins le premier à avoir, l'intuition de ce que les romantiques ont appelé plus tard la Nachtseite der Natur (Alexandre Koyré, La philosophie de Jacob Boehme, 1929 - www.google.fr/books/edition).

 

Boehme a lutté pour concevoir, pour saisir en Dieu le négatif, le mal, le diable. Si grossier et si barbare que soit cela par un côté, et si impossible qu'il soit de lire Boehme d'une manière continue et d'en suivre la pensée (la tête vous tourne avec toutes ces qualités, ces esprits, ces anges), cette âme rude n'en possède pas moins, à dire vrai, une prodigieuse force barbare pour employer la réalité comme concept. A l'arrière-plan, il y a la pensée spéculative, mais qui ne parvient pas à la présentation qui lui est adéquate. Il n'y a pas à attendre chez lui de présentation systématique, ni de véritable passage au détail. Il ne s'arrête pas non plus à une seule forme, mais se jette tour à tour en plusieurs, car ni la forme sensible ni la forme religieuse ne peuvent suffire. On trouve un mode de représentation populaire, rude, / un complet franc-parler qui nous parait vulgaire. Il a fort à faire avec le diable ; il lui adresse fréquemment la parole. "Viens ici, dit-il, noire créature. Que veux-tu ? Je vais te prescrire une recette".

 

Trostschrift von vier Complexionen, § 43-63, S. 1602-1607 "Une traduction fr. de 1722 de cette Écriture Consolatoire des Quatre Complexions (c'est-à-dire, Instruction au temps de la tentation, pour un cÅ“ur continuellement triste et tenté)" se trouve dans le recueil suivant : J. Boehme, Le Chemin pour aller à Christ, reproduit par Éditions Awac-Bretagne, 1978. Cette "recette contre le démon noir" (Recept vor dem schwarzen Teufel) s'adresse aux hommes de complexion mélancolique : "§ 41. Le démon prend plaisir à reprocher continuellement aux hommes mélancoliques les péchés qu'ils ont commis, il leur représente qu'ils ne peuvent obtenir la grâce, qu'il n'y a pour ceux que le désespoir, qu'ils se doivent percer eux-mêmes, se noyer, se pendre, ou tuer quelque autre personne, afin de pouvoir seulement avoir l'entrée dans une tac, car autrement il n'ose pas la toucher". Cette recette (Recept) consiste à se moquer de l'orgueil du diable, à rabattre sa superbe, à le mettre en face de lui-même, ange déchu, "valet de bourreau" c'est-à-dire "valet de péchés artisan de remords". Et cette recette est une potion ("Recept" a aussi ce sens comme d'ailleurs "recepte" dans la trad. de 1722) qu'il avale volontiers car - nous interprétons - elle apaise pour un temps sa torture d'orgueil, principe de sa laideur, c'est-à-dire le tourment d'une fuite de soi-même dans une révolte qui se sait vaine contre le Bien, contre la bonté de l'Être (Georg Wilhelm Friedrich Hegel, Leçons sur l'histoire de la philosophie, Tome 6, traduit Pierre Garniron, 1985 - www.google.fr/books/edition).

 

Acrostiche : ESLF, "e sconosciuto, lo filosofo"

 

Notons encore, pour la petite histoire, que Rousseau et Saint-Martin firent un voyage en Angleterre et connurent l'Italie, et que tous deux moururent d'apoplexie, l'un à Ermenonville, l'autre à Châtenay-Malabry, dans des domaines qui, à des époques différentes, appartinrent à la famille des Girardin, laquelle leur fit subir des transformations sensibles (Nicole Chaquin, Louis-Claude de Saint-Martin et Jean-Jacque Rousseau. In: Dix-huitième Siècle, n°3, 1971 - www.persee.fr).

 

En 1787, Louis Claude de Saint-Martin passe par Chambéry pour se rendre en Italie, il est accueilli par Joseph de Maistre qui était depuis plusieurs années un vif admirateur de sa pensée dont il disait qu'il s'engageait à soutenir à son égard sur tous les points la parfaite orthodoxie (Jean-Marc Vivenza, Entretiens spirituels et écrits métaphysiques, 2017 - www.google.fr/books/edition).

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