HysteriaIII, 361731Enseveli non mort apopletique Sera trouvé avoir les mains mangées, Quand la cité damnera l'heretique, Qu'avoit leurs loys, si leur sembloit, changées. Ensevelis vivantsWinslow tenait le fait suivant d'un maître chirurgien de Paris : un religieux de l'ordre de Saint-François ayant été exhumé trois ou quatre jours après avoir été mis en terre, on reconnut qu'il vivait encore. Il s'était dévoré les mains. Ce malheureux mourut presque aussitôt qu'il eut revu le jour. Pline mentionne un certain Acilius Aviola, homme consulaire, qui revint à la vie lorsqu'il était déjà sur le bûcher. On ne put le secourir à temps; il fut brulé vif. Le docteur subtil Jean Duns (Scott), enterré vivant, se rongea les mains et se cassa la tête dans son tombeau. L'empereur d'Orient Zénon l'Isaurien paraît avoir eu le même sort. Guillaume Fabri raconte qu'une demoiselle d'Augsbourg fut ensevelie et mise sous une voûte qu'on mura. « Au bout de quelques années, quel qu'un de la même famille mourut et démura-t-on la voûte, dont ouverture faite, le corps de la demoiselle fut trouvé sur les degrés, tout à l'entrée de la closture n'ayant point de doigts à la main droite (Louis Watteau, Catalogue raisonné du Musée Wiertz: précédé d'un biographie du peintre, 1865 - books.google.fr). Duns ScotDUNS, (Jean) plus connu fous le nom de Jean Scot, célèbre Théologien de l'Ordre de Saint François, natif de Donston en Angleterre. Selon la plus commune opinion, après avoir étudié à Oxford, il vint à Paris, où il prit des degrés, & où il enseigna avec tant de réputation, qu'il fut surnommé le Docteur subtil. Il alla ensuite à Cologne, où il mourut le 8 Novembre 1308. Paul Jove (1483 - 1552) & quelques autres Ecrivains ont avancé, qu'étant tombé en apoplexie, on l'avoit enterré comme mort, & qu'ensuite aïant repris ses sens, il se rongea les mains, & mourut en desespéré, en se cassant la tête contre la pierre du tombeau; mais c'est une fable qui a été très bien réfutée. Jean Scot a laissé un grand nombre d'ouvrages dont la meilleure édition est celle de Lyon, en 1639, 10 vol. in-fol. Il affecte d'y soutenir des opinions contraires à celles de S. Thomas. Ce qui a produit dans l'Ecole deux partis, celui des Thomistes, & celui des Scotistes. Quoique ce Théologien écrive avec beaucoup de subtilité, il a néanmoins un talent admirable pour exprimer ses pensées avec clarté. Quelques Ecrivains ont avancé que ce fut lui qui enseigna le premier, dans l'Université de Paris, l'immaculée conception de la sainte Vierge; mais il est constant que plusieurs Docteurs, l'y avoient enseignée avant Scot (Jean Baptiste Ladvocat, Dictionnaire historique-portatif, Tome 1, 1760 - books.google.fr). Jean Duns Scot mourut le 8 novembre 1308 et fut enterré simplement selon l'usage propre aux frères mineurs. Enveloppé dans son habit de moine,
le visage couvert d'un voile, il fut enterré sans cercueil, dans la chapelle des Rois Mages dans l'église de Frères Mineurs de Cologne. Une simple pierre portant l'inscription de son nom et de sa
fonction de théologien marquait l'emplacement où il était enterré. Mais déjà quelques dizaines d'années plus tard, le surnom de Scot - Docteur Marial - étant connu de plus en plus
largement, une inscription, en langue allemande, vint s'ajouter à la première dont voici le début : «Ici repose – arrivé à son terme - le fleuve vivant, la source de l'Eglise,
la voie vers l'enseignement de la justice, la fleur de l'étude, l'arche de la Sagesse...» Quelque 80 ou 90 années plus tard, le corps de Scot fut exhumé et transporté dans
le chœur de l'église. Une tombe dans le chœur, à proximité de l'autel, étant un emplacement réservé aux saints, aux bienheureux, on peut en conclure que Scot,
dès l'origine a dû être vénéré comme bienheureux. Vers l'âge baroque, le tombeau fut placé derrière l'autel, il fut orné, décoré, couvert d'inscriptions.
Ce tombeau qui, aux dires des témoins, était grandiose, a existé jusqu'en 1802. Malheureusement sous Napoléon l'autel fut détruit par des soldats de l'armée française,
les décombres furent dispersées. Certains ont même prétendu que le tombeau avait été transporté en France. Quoiqu'il en soit : il avait disparu. Mais le cercueil,
le sarcophage, dépourvu d'ornements, échappa, Dieu merci, à la destruction. En 1943, lorsque Cologne devint un champ de ruines, lorsque 90 % du centre ville fut détruite,
l'église fut endommagée.
Nous voici devant le nouveau tombeau, le tombeau moderne de 1958. Il s'agit du 3e tombeau de Duns Scot dans cette église des frères mineurs.
Cet emplacement a été choisi dans la mesure où la nef sud de l'église est occupée par la tombe du compagnon Adolf Kolping. Duns Scot se
trouve ainsi placé en face, ce qui introduit un certain équilibre. Le tombeau est une fondation offerte par la ville de Cologne.
On peut dire par conséquent qu'il s'agit d'un don de la population de Cologne. C'est Höntgesberg, un artiste de Cologne qui a créé ce tombeau de granite.
(Frère Gabriel, Histoire d'un tombeau, Jean Duns Scot, ou, La révolution subtile, Tome 3, 1982 - books.google.fr,
de.wikipedia.org - Minoritenkirche (Köln)). Duns Scot est mort subitement ou après une très rapide maladie, peut-être d'une attaque d'apoplexie, dans le moment de ses
plus ardentes controverses contre les Bégards, et cette brusque disparition d'un homme célèbre et encore jeune suffit pour expliquer que de tragiques légendes se soient formées autour de son tombeau.
"Si l'autorité de l'Eglise ne s'y oppose, il semble plus probable d'attribuer à Marie ce qui est le plus parfait" : il y a encore
loin de cette opinion pleine d'une prudente réserve au zèle éclatant que la légende prête à Duns Scot, et il n'a pu être le chevalier résolu et victorieux de l'Immaculée Conception, notion
Ă laquelle s'opposent saint Thomas d'Aquin et saint Bonaventure, qu'elle le suppose.
(E. Pluzanski, Essai sur la philosophie de Duns Scot, 2016 - books.google.fr). La Cité de Paris n'était au XIe siècle qu'un vaste chantier de construction, mais en 1112, le roi Louis VI le Gros s'installa dans le palais de la Cité, avec sa cour et le Parlement, la Curia Regis.
Après plusieurs agrandissements initiés par Saint Louis et Philippe Le Bel, le Palais de la Cité fut abandonné, sur décision de Charles V, par la famille royale qui s'installa au Louvre.
(fr.wikipedia.org - Île de la Cité). À l'issue du Concile de Vienne, les quatre principaux dignitaires de l'ordre, Jacques de Molay, Hugues de Pairaud, Geoffroy de Charnay et
Geoffroy de Gonneville, n'étaient pas concernés par les décisions de celui-ci. Le 22 décembre 1313, le pape Clément V chargea donc trois cardinaux non de juger mais de signifier la sentence
aux quatre derniers dignitaires : Les trois cardinaux arrivent à Paris au début de mars 1314.
Devant la commission envoyée à Paris, les templiers renouvelèrent, une fois de plus, leurs aveux. Le 18 (ou 11) mars 1314, ces
cardinaux entourés du légat du pape le cardinal d'Albano, leur signifièrent publiquement qu'ils étaient condamnés «à la prison perpétuelle et sévère» ! Comprenant la situation, Molay, le dernier maître du Temple,
se révolta. Il confessa son erreur de jugement, sa tactique de défense et dénonça les tourments qu'il avait enduré. Encouragé par les paroles du maître, Geoffroy de Charnay protesta
également. En revenant sur leurs aveux, ces deux dignitaires connaissaient le sort réservé aux relaps : le bûcher. Hugues de Pairaud et Geoffroy de Gonneville gardèrent le silence
et acceptèrent la sentence : la prison à vie.
Devant cette situation inédite, les cardinaux, pris de court, ne savent comment réagir et décident de renvoyer l'affaire au
lendemain. Bien entendu, l'information arrive très vite à Philippe le Bel, qui une fois de plus, outrepasse ses droits et décide de se substituer à l'autorité pontificale. Il condamne à mort Molay et Charnay
et ordonne, pour le soir même, leurs exécutions.
Le bûcher fut dressé sur un îlot au bout de l'île de la Cité, au-dessous des Jardins du Roi. Ce jardin s'arrêtait au Pont-Neuf
actuel et la pointe formant l'actuel square du Vert-Galant n'existait pas encore. L'îlot n'appartenait pas au Roi mais à l'abbaye de Saint-Germain-des-Prés. Cet îlot était situé sur le côté des
jardins du roi, à la place du quai des Orfèvres et de la place Dauphine actuelle et non à la pointe de la cité; il sera appelé au XIVe siècle «Île aux Juifs»
(templedeparis.jimdoweb.com). ...ilz furent finablement menez prisonniers en la cite de Paris...
(Bocace des nobles maleureux, traduit par Nicolas Couteau, 1538 - books.google.fr). ...et a la poursuite dudit Phelippe, furent tous les Templiers par l'auctorité de l'eglise brulez en ung mesme jour et leur
ordre abolie pour cause de certaine et secrete heresie dont leur vie estoit soilliée ordousement. En cellui temps fut richement fait et ediffié le beau palais roial dudit Phelippe, dont la cité de
Paris fut et encor est de moult plus grant magnifficence que par avant
(Alexandre Héron, Oeuvres de Robert Blondel : historien normand du XVe siècle, Tome 1, 1891 - books.google.fr). Legman, reprenant l'idée développée par G. A. Campbell (Les Chevaliers du Temple, leur ascension et leur chute), pense que si Molay accepta
d'être reconnu sacrilège, ce fut uniquement pour éviter d'être brûlé ou enterré vivant, puisque tel était le sort réservé aux homosexuels conformément à la tradition biblique depuis la
destruction de Sodome et Gomorrhe. On trouve d'ailleurs une description de ces pratiques justicières dans le chef-d'œuvre de Chaucer, Les Contes de Cantorbéry, qui datent [...] du XIVe siècle
(Alain Lameyre, Guide de la France templière, 1975 - books.google.fr). De la lettre du ministre général Gonzalve, 18 novembre 1304, il appert que Duns Scot était proposé pour le doctorat,
l'obtint en effet après Pâques 1305. Le successeur de Scot, comme régent du Studium de Paris, Alexandre d'Alexandrie, apparaît dans un document du 27
octobre 1307. Il Ă©tait donc Ă Paris depuis au moins le 14 septembre, date de l'ouverture des cours; bien mieux, deux mois auparavant, le
cours; bien mieux, deux mois auparavant, le ministre général Gonzalve l'envoyait de Gênes à Paris. Pendant ce temps D. Scot partait pour Cologne.
C'était l'époque où Guillaume de Nogaret préparait le procès contre les Templiers et forgeait les soi-disant libertés de l'Église gallicane. Jean Duns,
en sa qualité d'Écossais, était odieux aux légistes gallicans; de plus, le maître parisien, Jean de Pouilly, l'accusait d'hérésie pour sa doctrine de l'Immaculée Conception
et parlait de le supprimer. Pour éviter de graves ennuis au Subtil docteur, le ministre général le remplaça dans la régence par Alex. d'Alexandrie et lui ménagea un asile sûr à Cologne
(André Callebaut, O.F.M., La maîtrise du B. J. Duns Scot en 1305, son depart de Paris en 1307, durant la preparation du procès contre les Templiers, in Arch. Franc. Hist., t. XXI, 1928 - books.google.fr). Après l'obtention de sa maîtrise au studium de Paris (1305), Jean Duns Scott refusa de se rallier à la cause de
Philippe le Bel contre Boniface VIII et dut s'exiler du Grand couvent lorsque Guillaume de Nogaret chercha à exploiter l'université pour l'affaire des Templiers. Plusieurs
fois déjà , le franciscain avait été amené à prendre position contre le roi, notamment au sujet de l'évêque de Pamiers, Bernard Saisset
(Utzima Benzi, Francesco Panigarola (1548-1594): L'éloquence sacrée au service de la Contre-Réforme, 2015 - books.google.fr). Alexandre d'Alexandrie est un des maîtres consultés par Philippe le Bel dans le procès contre les Templiers (25 mars 1308).
Il assiste aussi Ă un interrogatoire de Jacques de Molay (25 octobre 1307)
(Alonzo M. Hamelin, Tractatus de usuris d'Alexandre de Alexandria, 1962 - books.google.fr). Les princes électeurs de Cologne décident en 1263 de transférer leur résidence et le siège de leur gouvernement à Bonn, sur le Rhin.
Il leur faut échapper à l'agitation de Cologne, cité-État dont les citoyens supportent difficilement le régime monarchique
(Jean-Louis Dufour, La Guerre, la Ville et le Soldat, 2002 - books.google.fr). L'archevêque de Cologne, Henri II de Wirnenburg, en 1306, s'était déjà plaint que des laïques, des ignorants, permissent de résister publiquement, dans les
sermons, aux dominicains et aux franciscains, à qui le soin d'instruire les fidèles avait été confié par l'Eglise.
(E. Pluzanski, Essai sur la philosophie de Duns Scot, 2016 - books.google.fr). Ce fut dans un concile ou synode provincial, réuni à Cologne en 1306, qu'une sentence d'improbation fut, pour la première fois,
lancée contre des corporations, comme ayant introduit de nouvelles superstitions, détourné à leur profit les aumônes des fidèles, critiqué les mariages légitimes. Sous le nom vulgaire d'apôtres,
et encore de Boggards ou BĂ©gards, elles se composaient d'hommes astucieux et de femmes idiotes.
(Alphonse Wauters, Table chronologique des chartes et diplômes imprimés concernant l'histoire de la Belgique, Tome 8, 1892 - books.google.fr). Les Bégards, en effet, soutenus par le peuple, ne manquaient
aucune occasion de résister violemment aux Prêcheurs et aux Mineurs, qui leur semblaient être de faux frères, d'autant plus dangereux qu'ils affectaient une pauvreté et une simplicité
évangéliques. La lutte, en 1308, était arrivée à son plus haut degré de vivacité. Comme l'Eglise tenait beaucoup à cette époque à paraître n'avoir rien négligé pour convaincre les
hérétiques, qu'elle faisait toujours marcher de front les inquisiteurs et les controversistes, l'argumentation et les bûchers, il est très-possible que le motif principal qui fit
appeler Duns Scot à Cologne ait été de l'opposer aux Bégards. C'est ce qu'a cru Bale, protestant fanatique du XVIe siècle, qui appelle Duns Scot un gouffre de ténèbres et d'ignorance.
Un autre fait, rapporté par les biographes de Duns Scot, confirme ce que nous venons de dire des espérances que les réguliers aussi bien que les séculiers
plaçaient en Duns Scot pour les délivrer du fléau commun, c'est-à -dire des Bégards. Quand on sut qu'il allait arriver, une foule de gens de toute sorte, de religieux
surtout, sortirent de Cologne avec les principaux magistrats, et allèrent au-devant du docteur de l'Université de Paris.
Il semble avoir livré aux Bégards une guerre acharnée : Hic hæresi proelia dura dedit. Il se mêlait souvent, selon Matthieu
de Veglia, à la foule qui venait écouter les prédications, et là , dans l'église, quand les Bégards interrompaient à grands cris le prédicateur, il les prenait à partie, et, par ses merveilleux arguments,
les réduisait à garder le silence.
Devenu le docteur par excellence de l'école franciscaine, Duns Scot était prédestiné à être le controversiste des occasions solennelles, celui que pour toutes les grandes
causes les Ă©crivains de l'ordre se plurent Ă mettre en avant
(E. Pluzanski, Essai sur la philosophie de Duns Scot, 2016 - books.google.fr). Considérez encore quelle fut l'erreur d'autres dévots et dévotes appelés les Bégards et Béguines. Ces Bégards se sont encore
abusés sur le sujet des lois humaines et ecclésiastiques, croyant que les justes n'y étaient pas sujets. En suite de quoi, croyant être justes, ils prétendaient que les lois du jeûne et autres lois
portées par les papes et les supérieurs légitimes, ne les obligeaient pas sous peine de péché. Ainsi ils se donnaient licence de les enfreindre à leur discrétion, sans en faire
aucun scrupule. Le pape Clément V, dans le concile général de Vienne, condamna cette erreur comme hérétique, et défendit à toutes personnes de la soutenir ou enseigner
(Louis Bail, La théologie affective ou saint Thomas en méditation, 1845 - books.google.fr). Walter de Hollande, auteur du livre intitulé Des neuf rochers spirituels, qui est aujourd'hui perdu et dans lequel
J. L. von Mosheim voit «un vrai manuel de Libre-Esprit, plus cher que tout autre aux bégards». Une chronique fait état d'une cinquantaine d'exécutions consécutives aux aveux de Walter
(Dictionnaire du Moyen Âge, histoire et société: Les Dictionnaires d'Universalis, 2015 - books.google.fr). Cf. quatrain V, 32.
Trithème l'appelle «chef des fraticelles et des lollards». Écrivant et prêchant en langue vernaculaire, donc pour les simples,
Walter compte parmi les victimes de la répression entreprise par l'évêque Henri II de Virnebourg. Il est brûlé en 1322. Le chroniqueur Guillaume d'Egmont évalue à 50 le nombre des victimes exécutées
par le bûcher ou la noyade dans le Rhin. Il rapporte que des assemblées nocturnes, tenues en un lieu secret, le «paradis», auraient été présidées par un couple figurant
Jésus et Marie et célébrant le retour à l'innocence édénique. Après une sorte de messe célébrée par le Christ, revêtu d'habits précieux et couronné d'un diadème,
intervenait un prédicateur nu, qui invitait l'assemblée à se dévêtir en témoignage de l'innocence retrouvée. Un banquet reproduisant la Cène, avec chants et allégresse
se terminait en orgie
(Raoul Vaneigem, Le mouvement du Libre-Esprit: généralités et témoignages sur les affleurements de la vie à la surface du Moyen Age, de la Renaissance et, incidemment, de notre époque, 1986 - books.google.fr). En 1357, lorsque la peste dévastait Cologne, Richmodis de Liskirchen, épouse du chevalier Mengis d'Adocht, fut enterrée vivante dans
l'Ă©glise des ApĂ´tres; mais comme le fossoyeur voulut s'emparer de l'anneau qu'elle portait au doigt, elle s'Ă©veilla, prit la lanterne que le voleur avait
oublié d'emporter dans sa fuite et retourna auprès de son époux en deuil. Celui-ci déclara que la chose était inconcevable et qu'il admettrait plutôt que ses
chevaux pourraient monter sur le balcon et regarder par la fenêtre. Bientôt, dit la légende, on entendit des pas de chevaux sur l'escalier et l'on vit leurs têtes
s'avancer par la fenêtre. En attendant, Madame Richmodis guérit complètement, vécut longtemps encore et pour prouver sa reconnaissance, elle donna à l'église des
Apôtres une draperie qu'elle avait tissée elle-même et que l'on y conserve encore. En souvenir de cet événement, on a fait construire, il n'y a pas
longtemps, des têtes de chevaux qui regardent par la fenêtre de la maison où l'événement aurait eu lieu et qui se trouve au marché neuf, côté du nord
(Johann August Klein, Le Rhin de Bâle à Dusseldorf: manuel du voyageur traduit de l'allemand, 1846 - books.google.fr). D'autres léthargiques ont été enterrés, et n'ont été sauvés que par la cupidité de ceux qui les ont exhumés pour les
dépouiller : témoin, le fait rapporté par Massieu d'une dame de Cologne qui, en 1571, fut enterrée vivante et revint à elle au moment où le fossoyeur rouvrit sa fosse pour lui enlever une bague de prix
(Dictionaire des sciences médicales par une société de médecins et de chirurgiens, Tome 4 : Can-Cha, 1813 - books.google.fr). Le report de 1731 sur la date pivot 1314 donne 897. L'année 1314 correspond au bûcher des Templiers,
en prenant "l'hérétique" pour un terme collectif, même si Walter de Hollande correspondrait mieux, mais la date pivot de 1322 ne définit pas une date assez significative.
Un court paragraphe (v. 122-130) détaille les outrages subis par le cadavre du pape Formose : débarrassé de ses
vêtements pontificaux, il est également amputé des «deux dois de la main destre / Qui sunt enoins de cresme au prestre» (v. 127-128), et enseveli avec les laïcs. Détachés de ce qui précède,
ces neuf vers mettent en évidence à la fois l'atroce humiliation subie par une victime qui ne peut plus se défendre et l'ignominie de celui qui l'a ordonnée :
«Apres par le commandement / D'Estienne moult vilainement de son sepulcre le jeterent» (v. 122-124). L'alternance des «hauts et des bas» est reprise dans le paragraphe
suivant (v. 131-164), dans lequel, selon les papes qui se succèdent, Formose est réhabilité, par Théodore et par Jean, «Qui les faiz Formose approuva» (v. 139), avant de
connaître une dernière humiliation que l'auteur situe sous le pontificat de Serge (Serge III, 904-911) :
[...] il le fist isnellement
De son sepulcre traire arriere
Et seoir en une chaëre,
D'abit pontifical vestu;
Et puis a un murtrier testu
Le commanda a decoller. (v. 150-155)
avant de le jeter dans le Tibre «comme vil caroigne», (v. 158).
Le poète a dans ce paragraphe, intentionnellement ou non, modifié l'ordre des événements : c'est Adrien III (884-885) et Étienne V (885-891) qui, réhabilitant Formose de
son vivant, détruisirent les indictions du pape. Cf. Dictionnaire de théologie catholique, op. cit., col. 596 : «Ils en profitèrent pour lacérer le registre des lettres
de Jean VIII, détruire le cahier de la neuvième indiction, parmi lesquelles se trouvaient celles que Jean VIII avait écrites contre eux». D'autre part, c'est Étienne qui,
en 897, organisa le «synode du cadavre» au cours duquel le corps de son prédécesseur fut condamné, dépouillé de ses ornements pontificaux, amputé de deux doigts et jeté dans le Tibre.
Serge III (904-911) ne fit qu'approuver Étienne, contrairement à Théodore II (897) et à Jean IX (898), favorables à Formose (ibid. col. 597).
Le dernier paragraphe présente l'ultime réhabilitation de Formose, celle qui sans contestation clôt définitivement la série de ses revirements de fortune :
remonté dans leurs filets par des pêcheurs des bords du Tibre, le cadavre Maigre et sechié, ne puoit mie». C'est là un premier signe de sainteté,
que vient magistralement confirmer un second signe : les pĂŞcheurs apportent Ă saint Pierre le corps devant
lequel s'inclinent les statues des saints qui ornent les églises de Rome : Salué fu de maint ymage / De saints de Romme et aouré (v. 174-175)
Le miracle est rapporté par Liutprand, Antapodesis, § 31 (in Migne, Patrologie Latine, op. cit., CXXXVI, col. 804
(C. Bougy, "De la deshonneteté que l'en fist au pappe Formose" : le XXVIIe conte du Tombel de Chartrose (ms 244 du Mt St Michel), Remembrances et resveries : hommage à Jean Batany, 2006 - books.google.fr). En Piémont-Sardaigne, jusqu'en 1732, quand est mort Victor-Amédée II, le jansénisme a essentiellement bénéficié de la
faveur que celui-ci lui accordait : c'est l'époque où l'on accueillait des «quesnellistes» – comme le dominicain Hyacinthe Drouin –, et où l'on chassait les jésuites du collège du
Turin pour mieux faire appel à ces réfugiés français
(Bernard Quilliet, L'acharnement théologique: Histoire de la grâce en Occident (IIIe-XXIe siècle), 2007 - books.google.fr). Le titre de duc ne parut pas suffisant à Victor-Amédée II; il voulut être roi, et il le fut. C'étoit un prince législateur et
guerrier, qui, vers la fin du règne de Louis XIV, avoit combattu nos meilleurs généraux, et rempli l'Europe de son nom. A la paix d'Utrecht, en 1713, il se fit reconnoître roi de Sicile, dont la cession lui
avoit été faite par le roi d'Espagne Charles II. Il jouit de ce titre pendant cinq ans. Mais la distance qui sépare la Sicile du Piémont, ne lui paroissant pas commode, il l'échangea
en 1718 avec l'empereur, pour l'isle de Sardaigne, plus rapprochée de moitié de ses Etats de terre-ferme. Douze ans après, ce ne fut plus ni duc, ni toi qu'il voulut être. Il avoit
soixante-quatre ans. Il crut qu'il étoit temps de vivre en homme, et de jouir de quelque repos. II épousa secrètement une marquise de Saint-Sébastien, qui n'avoit jamais été sa maîtresse,
et qui avoit quarante-cinq ans. Elle n'Ă©toit pas dans le secret de son projet de retraite; elle ne fut reine qu'environ vingt jours. Le roi abdiqua en 1730, laissa sa couronne Ă son fils Charles-Emmanuel,
et se retira en Savoie, ne se réservant qu'une pension de cinquante mille écus. Tous les historiens ont dit que le regret du trône et les instigations de sa femme l'engagèrent à conspirer
pour reprendre la couronne qu'il fut arrêté par ordre de son fils, et renfermé dans une prison, où il mourut. Un seul qui paroît mieux instruit, raconte cet événement
d'une façon qui suppose moins d'inconstance dans le caractère du père, et qui jette moins d'odieux sur celui du fils (M. de Condorcet, dans une note sur le précis du règne de Louis XV, par Voltaire,
chap. 3).
Charles Emmanuel, depuis l'abdication de son père, lui envoyoit tous les jours le bulletin des opérations du ministère.
Cela gênoit fort d'Ormea, ministre très-ambitieux, qui s'étoit emparé du pouvoir. Il prit occasion d'une attaque d'apoplexie qu'eut Victor-Amédée en 1731, pour discontinuer l'envoi du bulletin, et fit si bien,
qu'à sa convalescence cet usage ne fut point repris. Victor en fut outré; il reçut fort mal son fils. qui l'alla voir quelque temps après, et traita plus mal
encore ses ministres, et sur-tout d'Ormea. Celui-ci ré solut sa perte. Il ne cessoit d'aigrir l'esprit du roi contre son père. Il alla jusqu'à lui persuader que ses jours
n'étoient pas en sûreté à Chambéry. Charles, qui devoit y rester quinze jours, part, et s'évade la nuit. Victor le suit, et arrive aussi en Piémont avec sa femme. Ils se virent:
l'entrevue se passa en reproches, et de la part de Victor en menaces contre les ministres. D'Ormea saisit ce moment, imagina un complot qu'il accusa Victor d'avoir tramé pour de
trôner son fils, accumula les présomptions et les prétendues preuves, et secondé de tous les autres ministres, obtint enfin du roi l'ordre d'arrêter son malheureux père. Cet ordre
fut exécuté avec des violences et des indignités, au milieu desquelles le roi Victor, quoique né très-irascible, garda toute sa dignité. Il fut d'abord conduit dans une maison dont
on avoit fait griller les fenêtres, et sa femme reléguée loin de lui dans un lieu où l'on n'enfermoit que des femmes perdues. Quelques mois après, il fut transféré à Montcarlier :
on lui rendit sa femme, dont il reçut au moins les consolations à son dernier moment. Il mourut la même année, sans pouvoir obtenir de voir son fils. D'Ormea eut le crédit d'empêcher
cette entrevue, qui eût révélé au roi toute l'atrocité de sa conduite
(La Feuille villageoise, Partie 1, 1791 - books.google.fr,
fr.wikipedia.org - Victor-Amédée II). D'où "sans mains" du latin "manus" : autorité, pouvoir (Jean-Charles de Fontbrune, Nostradamus, Historien et prophète, 1982, p. 195).
La peur d'être enterré vivant est si commune au XVIIIe siècle que beaucoup de testaments exigent que les cercueils
ne soient clos que trente-six ou quarante-huit heures après la mort. L'Encyclopédie de Diderot y fait écho : «On voit en effet souvent en exhumant les corps après plusieurs mois
qu'ils font changés de place, de posture, de situation; quelques-uns paroissent avec les bras, les mains rongées de rage.
Dom Calmet raconte sur la foi d'un témoin oculaire, qu'un homme ayant été enterré dans le cimetière de Bar-le-Duc on entendit du bruit dans la fosse;
elle fut ouverte le lendemain et on trouva que le malheureux s'étoit mangé le bras. On vit à Alais (Alès) le cercueil d'une femme dont les doigts de la main
droite étoient engagés sous le couvercle de son cercueil qui en avoit été soulevé
(Michel Ragon, L'Espace de la mort: Essai sur l'architecture, la décoration et l'urbanisme funéraires, 2012 - books.google.fr). |