Les Doges Mocenigo

Les Doges Mocenigo

 

III, 90

 

1770-1771

 

Le grand Satyre & Tigre d'Hyrcanie,

Don presenté à à ceux de l'Ocean :

Le chef de classe istra de Carmanie

Qui prendra terre au Tyrren Phocean.

 

"Chef de classe" en Carmanie

 

"classe" à prendre pour classis flotte navale (cf. Gaffiot).

 

Pietro Mocenigo, 70e doge de Venise en 1474, est l'un des plus grands amiraux vénitiens, il remplit les caisses de l'État qui sont au plus bas après la défaite d'Eubée en 1470. En 1472 il prend et détruit Smyrne et entreprend au profit de la République de larges incursions en Asie mineure.

 

En 1473, Mocenigo, aidé des galères du Pape et de celles du Roi de Naples, secourut le Prince de Carmanie, que Mahomet, en haine de l'alliance qu'il avait faite avec le roi de Perse, avait dépouillé d'une partie de ses états. Avec ce secours le Prince de Carmanie [Caramanie] rétablit les trois principales villes de ses états, & Mocenigo ravagea la Lycie, pendant qu'Usum-Cassan roi de Perse attaquait les Turcs d'un autre côté. Mais le Persan ayant perdu une grande bataille, où son fils ainé fut tué, et ayant en vain sollicité les Vénitiens, le Roi de Pologne & le Pape de se joindre à lui contre le Turc, fut obligé de rester en repos.

 

Il place Catherine Cornaro, reine de Chypre, sous la protection de Venise, et par ce biais la république obtient la possession de l'île en 1475.

 

Mocenigo après avoir fait lever le siege de Scudari, assiégée par les Turcs, revint à Venise en 1474 et fut élu doge. Tel fut le succès des grands armemens de l'Italie contre les Turcs.

 

Sous son règne, la lire d'argent commence à être frappée, en son souvenir, elle est appelée mocenigo. Son bref dogat se termine le 23 février 1476, lorsqu'il meurt d'une maladie contractée pendant la campagne militaire de Scutari (fr.wikipedia.org - Pietro Mocenigo, Augustin Calmet, Histoire universelle, sacree et profane, depuis le commencement du monde jusqu'a nos jours, Tome 14, 1769 - books.google.fr).

 

Pietro Mocenigo ritornando dalla Carmania castiga i ribelli di Cipro, che congiurarono contro Andrea, e Catarina Cornaro (Antonio Tommaso Barbaro, Il pellegrino geografo cronistorico da Napoli sino a Venezia, 1738 - books.google.fr).

 

Satyre... Hyrcanie

 

Ainsi, chargeant son manteau de perles d'Érytrée, Bacchus conduit son char, et soumet à des jougs d'ivoire les monstres d'Hyrcanie : les Satyres l'entourent : la Bacchante échevelée enchaîne l'Indien avec le lierre des vainqueurs; et le Gange enivré, gémit sous le poids de pampres ennemis (Claudien, PANÉGYRIQUE SUR LE QUATRIÈME, CONSULAT D'HONORIUS (IVe-Ve siècles) - remacle.org).

 

Pan de Parrhasie (Chant XXIII) : Par une suite de cette répugnance que Nonnos, qui s'inspire parfois de Claudien, a toujours témoignée pour les épithètes d'autrui, n'ayant voulu donner pour patrie à Pan, ni le Coryce, comma Oppien, ni le Ménale, comme l'Anthologie, il a cherché l'adjectif parrhasien, qu'il emploie pour désigner l'habitant de l'Arcadie. Pan, Deus Arcadiæ. (Virgile, Egl., X.) (Nonnos de Panopolis, Les Dionysiaques ou Bacchus: poème grec en XLVIII chants. Grec et Français, 1856 - books.google.fr).

 

A la Renaissance, Pan est assimilé au satyre, dans les Emblèmes d'Alciat par Rouillé et Bonhomme en 1548, à Marsyas pour le Parmesan, et en temps que Grand Pan il est le Grand Satyre (Françoise Lavocat, La syrinx au bûcher, Pan et les satyres à la Renaissance et à l'âge baroque, 2005 - books.google.fr).

 

L'Hyrcanie est une région de l'ancienne Perse; au Sud-Est et au bord de la mer Caspienne, peuplée de tigres selon Virgile (Énéide, livre IV, v. 367). Il est question des déserts d'Hyrcanie dans Le Marchand de Venise (acte II, sc. VII) (Sylvère Monod, Jean-Yves Tadié, Henri Suhamy, Ivanhoé et autres romans de Walter Scott, 2007 - books.google.fr).

 

Pour Bacchus conquérant cf. quatrain IV, 51 ("Gange").

 

Les Parrhases (celt. Par-as, doubles måles, les hommes les plus énergiques, les plus vigoureux), également très anciens en Arcadie, passaient pour avoir envoyé une colonie parmi les Anariaces, dans l'Hyrcanie, sur les bords de la mer Caspienne, où ils auraient changé leur nom en celui de Parses. Nous retournerions volontiers cette tradition pour y avoir, sinon la preuve, au moins une très forte présomption que ce sont les Parses de la mer Caspienne qui avaient envoyé un de leurs essaims en Arcadie (Emile Burgault, Les Aryens en Asie, Bulletin de la Société Polymathique du Morbihan, 1872 - books.google.fr).

 

Strabon, Géographie XI, 7, 1 (à propos du versant caspien de l'Isthme caucasien) : «Ce versant est habité jusqu'aux crêtes, en commençant du côté de la mer, sur une faible étendue, par une fraction des Albaniens et des Arméniens, et sur sa plus grande partie par les Gèles, les Caduses, les Amardes, les Ouitiens et les Anariaques. On dit que certains Parrhasiens, que l'on appelle aujourd'hui Parses, habitent avec ces derniers, et que les Ainianes auraient construit dans le pays de Ouitia une ville fortifiée, qui s'appelle Ainiana et où l’on voit des armes grecques, des ustensiles de bronze et des tombes. Il y aurait aussi, dit-on, dans cette région une ville d'Anariakè où se voit un sanctuaire oraculaire où l'on consulte par incubation...» (Paul Bernard Paul, Les origines thessaliennes de l'Arménie vues par deux historiens thessaliens de la génération d'Alexandre. In: Topoi. Orient-Occident. Supplément 1, 1997 - www.persee.fr).

 

Le Rossi (1570 - 1630) croit que dans le bas relief suivant qui fut aussi trouvé à Bresse (Brescia), la figure qui sacrifie est Bacchus, & qu'il offre ce sacrifice au dieu Pan; mais a il se trompe sans doute : c'est un Pan qui sacrifie au dieu chef de sa bande, à moins qu'on ne veüille dire que c'est le dieu Pan lui-même qui sacrifie à Bacchus; d'ailleurs quelle apparence y a-t-il que Bacchus chef de toute la troupe bacchique, des Baccans, des Satyres, des Pans, & des Sylvains sacrifie ainsi à un dieu subalterne ? Ce sacrificateur a des cornes, on en voit quelquefois au dieu Bacchus, mais cela est extremement rare; il a les oreilles & la queue de chevre : ce qu'on n'a jamais remarqué dans Bacchus. Aux cornes, aux oreilles, & la queue près, il a toute la forme humaine, mais les Faunes, Satyres, Pans & Sylvains l'ont assez souvent de même, comme nous venons de dire. De forte qu'il y a lieu de croire que c'est un Pan de la troupe des Pans qui sacrifie au dieu chef de la bande, fort honoré dans Bresse comme il paroît par les monumens de cette Ville; il est revêtu d'une peau de chevre, attachée à son col; elle flotte au gré des vents, & ne couvre point du tout sa nudité; il tient de la droite un bassin, ou un panier plein de fruits qu'il va sacrifier, & de l'autre main une torche ardente: ce qui semble marquer que le sacrifice se fait à Pan le lumineux. L'autel flamboïant sur lequel il va sacrifier est construit de pierres brutes : ce tigre qui est devant l'autel regarde le sacrificateur, le tigre alloit non seulement avec Bacchus, mais aussi avec toute sa troupe. Quelqu'un croira peut-être que ce tigre marque que c'est à Bacchus que ce Pan sacrifie; cela pourroit être, mais l'autre sentiment me paroît plus raisonnable (Bernard de Montfaucon, L'antiquité expliquée et représentée en figures, Tome 6, 1724 - books.google.fr).

 

Caramanie

 

Il s'agit en fait de la Caramanie plutôt que de la Carmanie.

 

Carmanie pour Caramanie chez Pierre Belon (1517 - 1564) : "Entrâmes en la campagne de Pamphylie, qui est la région qui s'appelle Carmanie, laquelle comprend sous soi Cilicie et Pamphylie. Elle a sept sangiacats dessous sa charge" (Alexandra Merle, Voyage au Levant, les observations de Pierre Belon du Mans de plusieurs singularités & choses mémorables, trouvées en Grèce, Turquie, Judée, Egypte, Arabie & autres pays étranges (1553), 2001 - books.google.fr).

 

Les Karamanides, Qaramanides ou Qaramânogullari forment une dynastie de Beys turkmènes qui règne au sud de l'Anatolie centrale dans le massif montagneux du Karaman qui sépare Konya de la Méditerranée. C’est le plus puissant beylicat après celui des Ottomans pendant la seconde période des beylicats aux XIIIe et XIVe siècles. Leur territoire était appelé Caramanie (fr.wikipedia.org - Karamanides).

 

En Turquie le General Mocenigo qui commandoit les troupes des Venitiens, du Pape, du Roi de Naples & des Chevaliers de Rhodes, étant abordé en Caramanie, prit les places de Sighin, de Curk & de Seleucie, donna la chasse à la flotte Ottomane (Claude de Lisle, Abregé De L'Histoire Universelle: Contenant ce qui s'est passé depuis l'année 1411 jusqu'en 1519, Tome 4, 1731 - books.google.fr).

 

Ussum Cassan

 

Uzun Hasan (en turc : Hassan le Long) (1423 - 1478) fut un dirigeant des Aq Qoyunlu turkmènes. Il régna sur l’ouest de l’Iran qui comportait à l'époque l’Irak et la Turquie d'aujourd'hui. Son règne dura de 1453 à 1478.

 

Uzun Hasan entretint de bonnes relations avec l’empire de Trébizonde. Lorsque les Ottomans veulent annexer cet état, il se range du côté de l'empereur. Ce soutien n’empêcha pas les Ottomans de prendre Trébizonde le 26 septembre 1461. Uzun Hasan fut lui aussi vaincu par les Ottomans en 1471 à Erzincan et le 11 août 1473 à Tercan, près d’Erzincan. Après une dernière campagne contre le roi Bagrat VI de Géorgie à qui il impose un tribut, il tomba malade et meurt en 1478 dans sa capitale, Tabriz. En 1458, Hasan épouse Theodora Megale Komnena, fille réputée illégitime de Jean IV Comnène de l’Empire de Trébizonde. Elle fut aussi connue sous le nom de «Despina Hatun». Leur fille Halima (connue également sous son nom chrétien de «Marta»), devint la mère de Shah ismail d'Iran, fondateur de la dynastie des Séfévides.

 

Après l'assassinat en 1449 du prince-astronome Ulugh Beg de Samarcande, petit-fils de Tamerlan, son élève et collègue Ali Quchtchi partit avec une copie des tables astronomiques auxquelles ils avaient travaillé ensemble et se réfugia à Tabriz, auprès d'Uzun Hasan. Celui-ci l'envoya ensuite à Istanbul, auprès du sultan ottoman Mehmed II Fatih (fr.wikipedia.org - Uzun Hasan).

 

Suivant les orientalistes, le véritable nom du conquérant de la Perse était Hassan,et il fut surnommé le Grand, en arabe Al Thouil ou Al Thawil, en turc, Uzum, soit a raison de sa taille, soit à cause de ses exploits et de sa puissance. De la le nom d’Ussum Cassan, sous lequel il est le plus généralement connu. On lui trouvait une analogie de traits avec les Tartares, conquérants de la Perse; cependant il appartenait à une dynastie de Turcomans, dite du Mouton Blanc, qui gouvernait l'Arménie. Ayant succédé, en 1467, à son frère Géhangir, il défit Géhan Schali, sultan de la race du Mouton Noir, auquel il enleva les États que ce souverain ou ses prédécesseurs avaient conquis dans la Mésopotamie, la Chaldée et la Perse. Il vainquit ensuite le sultan Abu-Saïd, issu de Tamerlan, et lui enleva le Khorassan et la Transoxane. D'antique lignage, mais nouveau souverain, il crut. ajouter a l'éclat de sa puissance en épousant Despoina, nièce d'un Comnène qui gouvernaitune partie de l‘Asie Mineure avec le titre d'empereur de Trébisonde, et cherchait, de son côté, un appui auprès de Hassan contre les armes de Mahomet II. Hassan, en vertu de cette alliance, ayant requis le Sultan d'éloigner ses forces de Trébisonde et de la Cappadoce, la guerre s’allume entre eux. Les États d‘Italie, que la puissance ottomane menaçait de fort près, sentent, à l'instant, le prix de cette diversion. Le pape et Venise s’empressent d’exhorter Ussum Cassan à persévérer dans ses desseins, et un échange d’ambassadeurs s’établit. Ce fut, de la part des Vénitiens, d’abord Catarino Zeno, allié à la famille de la reine Despoïna ; ensuite, en 1471, Josaphat Barbare, chargé de reconduire l'ambassade persana dont parle notre manuscrit, avec de riches présents, de l‘artillerie, des artilleurs et des munitions de guerre. En même temps, une flotte combinée, commandée par Pierre Moncenigo, se dirigeait vers les côtes de l'Asie Mineure et y remportait quelques avantages; mais Barbaro, ne voyant pas jour à pénétrer jusqu'auprès d'Ussum Cassan avec les sccours qu‘envoyait la République, se jeta à travers le pays, en compagnie d'Azimamet qui fut massacré en route, et le Vénitien arriva, à grand‘peine et presque seul, à Ecbatane, au mois d’avril de l’année 1474. On attachait tant d’importance à ces relations, que, vers le même temps, un troisième envoyé de Venise, aussi d‘illustre famille, Ambroise Contarini, se rendait en Perse, par la Pologne, la colonie génoise de Gaffe et l‘Arménie (E. de Lan Coste, Anselme Adorne sire de Corthuy pelerin de Terre-Sainte, sa famille, sa vie, ses voyages et son temps. Récit historique, 1855 - books.google.fr).

 

Pendant le règne du Tartare Ussum Cassan, une partie de la Perse, flattée d'opposer un culte nouveau à celui des Turcs, de mettre Ali au-dessus d'Omar, & de pouvoir aller en pèlerinage ailleurs qu'à la Mecque, embrassa avidement les dogmes du sophi (le sage) surnom du persan Eidar. Les semences de ces dogmes étaient jetées depuis longtemps : il les fit éclore, et donna la forme à ce schisme politique et religieux, qui paraît aujourd'hui nécessaire entre deux grands empires voisins, jaloux l'un de l'autre (Voltaire, Essai sur les mÅ“urs et l'esprit des nations: et sur les principaux faits de l'histoire depuis Charlemagne jusqu'à Louis XIII, 1829 - books.google.fr).

 

Uzun Hasan et le vin (Bacchus)

 

Voici le portrait que fit Contarini qui le vit trois ans avant sa mort : «les manières d'Uzun Hasan sont certainement bonnes. Il boit du vin et a l'air bon vivant et de disposition gaie. Il est de haute taille et maigre; il a une expression de visage légèrement tatare, avec un bon teint constant. Sa main tremblait lorsqu'il buvait. Il paraissait avoir 70 ans. Il aimait s'amuser de façon familière, mais lorsqu'il allait un peu loin il était parfois dangereux. Tout compte fait c'était un gentilhomme agréable.» (Vladimir Minorsky, La Perse au XVe siècle entre la Turquie et Venise, 1933 - books.google.fr).

 

Ambrogio Contarini (1429-1499) est un marchand et diplomate vénitien connu pour son récit de voyage relatant son ambassade en Perse (1474-1477). Envoyé par la Sérénissime République pour nouer une alliance de revers contre les Ottomans, Ambrogio Contarini traverse l'Europe centrale, orientale, la Russie, le Caucase, vit de multiples aventures au péril de sa vie. La relation de voyage qu'il tire de son long périple, les longues descriptions de la vie à la cour d'Ispahan permettent aux Occidentaux de compléter une géographie lacunaire et de découvrir une civilisation méconnue. Il n'est cependant pas le premier représentant de la grande cité maritime à se rendre en Orient dans le même but car deux autres italiens, Caterino Zeno et Josaphat Barbaro, l'avaient précédé de quelques mois.

 

Il faut attendre 1486 pour que soit publié à Vicence son récit de voyage sous le titre de Questo e el viazo de mister Ambrosio Contarin ambasador de la illustrissima signoria de Venesia al signor Uxuncassan Re di Persia (fr.wikipedia.org - Ambrogio Contarini).

 

Le premier ambassadeur vénitien, Quirini, partit pour la Perse en 1463. Ensuite deux ambassadeurs de Uzun Hasan visitèrent Venise. Pendant ce temps là, en 1467 et 1469, le chef des Aq-qoyunlu rehaussa son prestige par deux victoires éclatantes. Lorsque Djihan-châh Qara-qoyunlu marcha sur lui, il épia ses movements à travers l'Arménie et, profitant d'un moment d'insouciance, attaqua son camp. Djihan-châh perdit la vie et en peu de mois son état s'écroula. C'est alors que le dernier Timouride énergique Abu-Sa'id crut le moment venu de faire valoir les anciens droits de sa famille sur la Perse. Avec une énorme armée il partit de Herat contre Uzun Hasan mais les rigueurs de l'hiver de l'Azarbaydjan et le manque de vivres décimèrent ses troupes. Abu-Sa'îd, fait prisonnier, fut mis à mort par un Timouride, à qui on avait reconnu à cet effet un droit de vendetta. Tout le plateau iranien gisait maintenant aux pieds d'Uzun Hasan. Il devenait une force de premier ordre, bien qu'il soit possible qu'en dispersant ses forces sur des territoires aussi vastes, il eût affaibli son front occidental. En 1469 les Ottomans enlevèrent aux Vénitiens l'île d'Eubée (Négroponte), que la république avait possédée pendant 264 ans. Tandis que l'envoyé de Uzun Hasan insistait pour recevoir des armes perfectionnées, la Sérénissime eut la brillante idée d'envoyer en Perse Caterino Zeno, marié à la nièce de Despina Caterina, épouse de Uzun Hasan, fille de l'empereur ce Trébizonde Jean IV. Zeno fut très aimablement reçu au palais, et «ce qu'il y a de plus extraordinaire - remarque Ramusio - il pouvait entrer dans les appartements privés même lorsque les deux majestés étaient au lit». Finalement Messer Iosaphat Barbaro fut chargé d'un convoi de 6 bombarde, 600 spingarde, des schiopetti et des munitions, accompagnés de 200 fusiliers avec leurs officiers. Dans les instructions données à Barbaro il était dit que «Venise ne conclurait jamais de paix avec les Ottomans avant de les avoir forcés à céder à la Perse toute l'Asie Mineure, jusqu'aux Détroits. Malheureusement pour les alliés, Barbaro fut retardé à Chypre où il prit part aux opérations de la flotte de l'amiral Mocenigo, et le convoi d'armes à feu n'arriva jamais à sa destination. Pendant ce temps là, soit sur sa propre initiative, soit sur les instances d'ambassadeurs habiles, Hasan avait déjà engagé la lutte en Asie Mineure. L'armée du sultan, sous son commandement personel, se mit en branle, et malgré un succès initial de Uzun Hasan, le feu de l'artillerie ottomane faucha ses troupes et il dut battre en retraite jusqu'à Tabriz. Maintenant plusieurs ambassadeurs vénitiens se pressèrent à sa cour : Ognibene, Barbaro (très en retard !) et Ambrogio Contarini. Uzun Hasan les entretenait de promesses de cavalcar adosso all'Ottoman, mais lorsque les troupes furent rassemblées il les détourna soudain contre la Géorgie, laquelle jusque là jouait le rôle d'un associé dans les plans de l'alliance entre le lion de St. Marc et celui du Soleil Levant. Uzun Hasan décéda le 6 janvier 1478 et fut bientôt remplacé par son fils Yaqub. Au cours de l'année 1485 encore, on voit présents au camp persan près de Qazvin des représentants polonais, hongrois, et l'envoyé du bailo vénitien de Costantinople, pendant que d'autre part Ya'-qûb recevait l'ambassadeur ottoman Davoud-pacha. Il ne restait décidément aucun espoir de relancer les Aq-qoyunlu contre la Turquie (Vladimir Minorsky, La Perse au XVe siècle entre la Turquie et Venise, Orientalia Romana, Volume 1, 1933 - books.google.fr).

 

Cf. la "blanche laine" du quatrain VI, 35.

 

"Ocean"

 

...et quant on est sus [sur le mont du lac], on voist bien clerement la mer de Romme devers le midy, et du costé vers tresmontaine voist on bien clerement le gouffre de Venise, que on dist la mer ausseanne. (LA SALE, Salade, c.1442-1444, 69) (cnrtl.fr).

 

Ou "occeane" selon les versions du manuscrit (Bruxelles, version imprimée) (Fernand Desonay, La Salade d'Antoine de la Sale, 1935 - books.google.fr).

 

L'absence de lexicalisation est l'une des raisons qui explique parfaitement les éventuelles confusions ou interversions que l'on observe dans l'emploi des noms (mer Méditerranée, mer Océane) ou désignations (celle de Grande Mer est en particulier fluctuante). Ainsi Antoine de La Sale dans le Paradis de la reine Sibylle croit bon d'ajouter, en parlant du golfe de Venise, «que certains appellent la mer océane»... Ailleurs, chez Villehardouin, un passage de La Conqueste de Constantinople laisse le doute subsister, puisque le chroniqueur y parle de la mer Égée comme de la «Grande Mer». Encore au XVe siècle, Louis de Rochechouart confirmera à son tour que tout n'est pas clair pour lui en ce qui concerne les toponymes utilisés, même en dépit de certitudes qui font leur chemin : [...] en quittant le golfe de Satalie, nous avons pénétré dans la haute mer à laquelle on donne des noms bien singuliers, selon sa bonne ou sa mauvaise fortune. À notre droite, il y avait la mer Océane que certains appellent la Méditerranée, et je crois que c'est un meilleur nom (Hatem Akkari, La Méditerranée médiévale, perceptions et représentations, 2002 - books.google.fr).

 

Antoine de La Sale, ou de La Salle, est un écrivain satirique français du XVe siècle. Le lieu exact de sa naissance est incertain : il naquit en Provence, dans la région arlésienne, vers 1386 (son père est Bernardon de la Salle, dit Chicot, soldat mercenaire, l'"eschelleur" de villes dont nous parle Froissart dans ses Chroniques; sa mère, Perrinette Damendel, était une simple paysanne). Bâtard, il entra tôt à la cour d'Anjou. Il voyagea en Italie (en 1407 il était dans les ÃŽles Lipari); en 1420 il se rendit dans les Marches et s'intéressa aux légendes des Monts Sibyllins (voir Sibylle) qu'il racontera dix-sept ans plus tard pour la duchesse de Bourbon Agnès de Bourgogne dans son Paradis de la reine Sibylle). Il mourut vers 1462 (fr.wikipedia.org - Antoine de La Sale).

 

Cf. quatrains IV,68 et IV, 69 pour le Mont de la Sibylle et le Venusberg de Tannhäuser.

 

En 1473, l'armée turque se mit en campagne et vint se déployer à Tercan dans la plaine d'Erzincan. Uzun Hasan, qui avait marché à sa rencontre, prit position sur une chaîne de hauteurs dominant la rive gauche de l'Euphrate. On dit qu'il s'écria en voyant les troupes ottomanes : « Vay kâpoglu, ne derya dir! » (Ah, fils de pute, quel océan est-ce là !). C'est Has Murat pacha qui franchit le fleuve le premier. Mal lui en prit, car les soldats de Hasan ne firent qu'une bouchée de ses effectifs et il périt lui-même dans la mêlée. Mehmet, désespéré de la mort de son favori, en fut tellement démoralisé qu'il ordonna immédiatement la retraite vers Trébizonde. (Emile Janssens, Trébizonde en Colchide, Travaux de la Faculté de philosophie et lettres, Volume 40, 1930 - books.google.fr).

 

Mais Uzun fut vaincu quelques temps plus tard (André Clot, Mehmed II: Le conquérant de Byzance, 1990 - books.google.fr).

 

Mais on ne fit pas de cadeau à Mehmet II, sauf à perdre des batailles.

 

Puisqu'il a été question de Marco Polo, notons que pour les chinois Ta-Si-yang ou "Grand Ocean Occidental", c'est toute l'Europe occidentale (Henri Cordier, Gustaaf Schlegel, Edouard Chavannes, Paul Pelliot, Paul Demiéville, Jan Julius Lodewijk Duyvendak, T'oung pao: T'ung pao, 1935 - books.google.fr).

 

"Don" : cadeau

 

Je ne puis passer sous silence une des pièces les plus célèbres du Trésor ; je veux parler d'une grande coupe quadrilobée sur laquelle sont représentés cinq lièvres en bas-relief. Sa monture se compose d'un large bandeau d'or gemmé et filigrane orné de place en place d'émaux cloisonnés. Ce vase qui passe pour avoir été donné par un roi de Perse à la république de Venise, en 1472, est dit-on de turquoise. Je ne puis avoir la prétention de trancher cette question qu'un examen minutieux de la pièce permettrait seul de résoudre. [...] Ce vase est du reste depuis longtemps connu en France et ce n'est pas la première fois qu'il donne lieu à des discussions entre archéologues. Montfaucon l'a décrit et a donné l'explication de l'inscription arabe qui se lit sur le fond :Bar Allao, Opifex Deus, ce qui veut dire dans la pensée de l'artiste que Dieu seul était capable de produire une telle Å“uvre. On trouve une assez mauvaise gravure de ce beau monument dans les Voyages de La Mottraye. D'où venait ce vase quand il tomba entre les mains du schah Uzun Hassan qui en fit cadeau à la République ? Il est impossible de le savoir, mais il est très vraisemblablement antérieur au XVe siècle. Uzun Hassan fut un prince conquérant et  par conséquent il dut lui passer par les mains une grande quantité de butin; il est probable que la coupe du Trésor de Saint-Marc a fait partie des dépouilles de la conquête de la Perse. Uzun Hassan était du reste en relations d'amitié avec les Vénitiens : en 1471 il donna à Catarino Zeno un morceau de corne de licorne monté en argent pesant huit livres, et le dessin de ce précieux témoignage de cordialité nous a été conservé (Emile Molinier, Le trésor de la basilique de Saint Marc à Venise, 1888 - books.google.fr).

 

"Satyre"

 

L'Antiquité donnait le nom de satyres à diverses espèces de singes d'Afrique (Pline, Histoire naturelle, V, 7, V, 46 et VI, 197) et d'Asie (VII, 24). (Pierre Brind'Amour, Les premières centuries, ou, Propheties de Nostradamus (édition Macé Bonhomme de 1555), 1996 - books.google.fr).

 

Les tigres d'Hircanie obéissent à la prêtresse Enothée dans le Satyricon de Pétrone (pour "satyre"), sorcière chargée de guérir Encolpe de son impuissance.

 

Prosélénos le confie à la prêtresse du dieu Priape, Oenothéa, qui se charge de le guérir (CXXXIV), et l'emmène dans sa cellule où le charme doit opérer (CXXXV). Pendant une courte absence d'Oenothéa, trois oies saorées fondent sur Encolpe, qui, en se défendant, tue l'une d'entre elles. Douleur et colère d'Oenothéa à cette nouvelle (CXXXVI). Encolpe l'apaise à prix d'or, et les opérations magiques commencent. Mais elles sont si douloureuses qu'Encolpe s'échappe, poursuivi par les deux vieilles (CXXXVII-CXXXVIII).

 

Elle lui a enfoncé dans 1e rectum un gros instrument de cuir (un fascinum) et l'a battu avec des orties. On ignore ce qui se passe ensuite et de quelle manière finit le Satyricon. Pétrone se suicida dans son bain en 67 de notre ère, pour obéir à l'ordre de mort de Néron, à la cour duquel il avait été l'arbitre des élégances. On crut, sur la foi de Tacite, qu'il aurait dicté le Satyricon le jour de sa mort (ce qui serait vraiment un exploit surhumain), pour flétrir le règne de ce tyran. En fait, le Satyricon est surtout un ouvrage d'esthète, avec des morceaux parodiques ou volontairement exagérés; Pétrone voulut intervenir dans la querelle des Anciens et des Modemes agitant les lettrés de son temps par un livre dont les outrances le mettaient du côté des Modernes (Alexandrian, Histoire de la litterature erotique, 1989 - books.google.fr).

 

La première édition du Satyricon (Bernardinus de Vitalibus, Venise. 1499, in-4) contenait peu de fragments, la seconde à Leipzig, par Jacobus Thanner, en 1500. Le Souper de Trimalcion ne fut découvert qu'en 1663, à Traun en Dalmatie, par Martinus Statilius (Pierre Petit) qui défendit sa découverte et envoya le manuscrit à Grimani, ambassadeur de Venise à Rome, pour le faire étudier par les savants : il fut établi qu'il datait au moins de deux cents ans. Il fut publié en 1664 (Padoue et Paris, in-8). Une supercherie littéraire de Fr. Nodot, bientôt découverte, annonça un Satyricon complet, dont le manuscrit prétendu aurait été trouvé à Belgrade et publié en 1693 (Rotterdam, in-12) (Gustave Vapereau, Dictionnaire universel des littératures, 1876 - books.google.fr).

 

Dans l'Epistolae Magni Turci (Neapel 1473 u.6.) de Laudivius Zacchia, véritable best-seller, les deux adversaires du moment s'y vantent l'un et l'autre d'avoir dépassé ou égalé le Macédonien, leur prédécesseur en matière de chance, de gloire et de puissance. Mehmet II: Alexandrum felicitate ac rerum gestarum gloria equavimus. Uzun Hasan: solusque post Alexandrum bella gentibus indixi. À la veille d'une autre bataille décisive, celle qui eut lieu sur le Tigre (1457), dans une lettre authentique adressée au général de Djahangir Mirza, son frère et rival, Uzun Hasan s'était comparé lui-même à Alexandre, «jeune, vaillant, averti, éclairé», face à Darius, «vieux césar (qaysar) impuissant» (Abu Bakr-i Tihrânî, Kitâb-i Diyàrbakriyya). Après la victoire du chef de la confédération turcomane du «Bélier Blanc», les docteurs en théologie musulmane l'avaient proclamé «sultan du monde», empereur destiné à régner sur l'Univers en vertu de la magie de lettres, dates, chiffres et paroles, dont celles du Coran, XXX 3-4, sourate de Rûm. Uzun Hasan au blanc drapeau était aussi qualifié de maintes autres épithètes, bien dans l'esprit de l'époque: «Envoyé du IXe siècle» de l'Hégire, «Seigneur du Temps», Iskandar i sani, «le second Alexandre». Et le Sénat Vénitien d'y faire écho, l'appelant el secondo Alessandro dans la mission secrète (11 février 1474) confiée à A. Contarini. C'est dire que la représentation du triomphe de Uzun Hasan, assimilé au Roi de Macédoine, mise en scène à Rome dans la nuit du 1er au 2 mars 1473, mardi de carnaval, ne fut pas une simple mascarade. Ce spectacle complexe, quoiqu’éphémère, nourri d'allusions événementielles et d'allégories politico-culturelles, pensé et réalisé à la veille de l'affrontement entre les deux puissances du temps, eut l'allure d'un rite propitiatoire. Nous nous bornerons ici à en restituer le déroulement scénique, sur la base de témoignages (annexes I-III) dont plusieurs savants n'ont pas saisi la véritable signification (Angelo Michele Piemontese, La représentation de Uzun Hasan sur scène à Rome (2 mars 1473), Turcica, 1991 - books.google.fr).

 

Dans le quatrain X, 31, on retrouve la Carmanie, Alexandre et le carnaval en relation avec la fête de Pourim.

 

D'Attila à Tamerlan, les peuples des steppes semèrent la panique à l'est (en Chine) comme à l'ouest (en Occident). Uzun Hasan se dit descendant de Tamerlan.

 

En Allemagne, Attila, à la suite du Nibelungenlied, est peint comme un roi sage et vaillant. En Italie, il continue à être le flagellum Dei des auteurs chrétiens. Il est représenté avec des oreilles de chien et l'apparence d'un satyre. Cela tient à la description d'un auteur, de l'époque de Justinien, qui affirme que les Huns descendaient des faunes des bois qui s'étaient accouplés à des sorcières (Matteo Campagnolo, Falso ma non troppo, L'art d'imiter: images de la Renaissance italienne au Musée d'art et d'histoire, 1997 - books.google.fr).

 

Dans la symbolique chrétienne les démons sont les héritiers des pans, satyres et faunes. M. Babelon montre une médaille d'Attila, fabriquée en Italie au début du XVIe siècle d'après les données de la tradition médiévale. Attila y est figuré comme un faune avec des cornes. des oreilles et une barbiche de bouc (Chroniques de l'Institut, Journal des savants, Académie des inscriptions et belles-lettres, 1914 - books.google.fr).

 

"Tyrren Phocean" : Smyrne

 

D'où vient donc le nom de Tyrséniens ou Tyrrhéniens, par lequel cette ancienne race est désignée, sinon constamment, du moins très-fréquemment depuis le temps de Thucydide, avec omission fréquente du nom de Pélasges (Apollon, de Rhodes, iv, 1760 ; Plut., Virt. mut., 8; Quest.gr., 21; - Polyaen., vn, 49 ; - Porphyr., V. Pyth., 10)? Pour répondre à cette question, il faut naturellement s'adresser à la ramification de cette grande famille chez laquelle on trouve pour la première fois le nom de Tyrrhéniens. Or nous le trouvons, et déjà complétement isolé, dans un hymne homérique, où il est appliqué à des pirates qui s'emparent de Dionysos, ou Bacchus, sur la côte, pour le transporter dans des régions éloignées, en Egypte, en Chypre, ou même chez les Hyperboréens, et qui, pour ce fait, sont changés par les dieux en dauphins. Il est évident qu'il ne s'agit pas ici des Étrusques, mais du rameau des Pélasges dont nous venons de parler. Le caractère de ces Tyrrhéniens et celui des Pélasges-Tyrrhéniens de Lemnos est complétement identique. C'est, en effet, à ceux-ci, comme à un peuple voisin, que l'auteur de l'hymne devait penser tout d'abord; puis, en outre, c'est précisément l'Italie, ou Hespérie, qui n'est pas nommée dans cet hymne parmi les pays où les Tyrrhéniens comptent emmener leur prisonnier. On sait que le mythe deBacchus est une tradition populaire de Naxos, puisque cette île de la mer Égée est le siège principal du dieu et qu'on la cite plusieurs fois comme le lieu où il veut être conduit (Hygin, Poet. aslr., 1,17; Apollodor., III, 5,3 ; Ov., Met.,III, v. 577-700 ; Serv. ad AEn., I, v. 71 et III, v. 125). Mais les Tyrrhéniens sont représentés dans cette tradition comme habitant la côte opposée, par conséquent la côte asiatique ou lydienne : or beaucoup d'autres documents placent dans cette contrée le souvenir des Tyrrhéniens : c'est ainsi qu'une tradition populaire de Samos raconte que les Tyrrhéniens avaient entrepris d'enlever, au profit des Argiens, l'image de Junon adorée dans cette île (Ménodote dans Athénée, XV, 672). On trouvait aussi, eu Carie, un promontoire nommé Termérion, où, d'après la tradition, les Tyrrhéniens auraient renfermé les captifs dont ils s'étaient emparés dans leurs expéditions (Photius, Lex., p. 579, 25, et Suidas, s. v. "Terméria"). On est donc amené à supposer que ce fut d'abord dans l'Asie antérieure qu'un rameau de la grande famille pélasgique reçut le nom de Tyrrhéniens, nom qui fut appliqué plus tard aux établissements qu'ils formèrent dans différentes contrées. Si ce sont les Pélasges de l'Asie Mineure qui portèrent d'abord le nom de Tyrrhéniens, d'où leur vint-il ? Nous pouvons supposer que "Turrènos" ou "Tursènos" n'est autre chose qu'un nom topique dérivé d'un lieu nommé "Turra" ou "Tursa", d'après une forme que nous retrouvons dans "Kuzikènos", "Plakiènos", et qui était surtout usitée en Asie. Dès lors, la ville de "Tursa", dont "Turrènos" est formé d'une façon tout à fait régulière, ne saurait être cherchée loin de la contrée indiquée par les notions rassemblées jusqu'ici. C'était une ville de la Lydie (étymol. M., s. v. "Turranos"), et, d'après toute probabilité, c'est la même qui fut appelée par les Grecs Métropolis, mais qui plus tard reprit son nom primitif Tyria (Mannert, Geogr., VI, 3, p. 371). Elle était située dans la Lydie méridionale sur les bords du Caystre; mais la Lydie méridionale s'appelle dans le dialecte indigène Torrhébie (Et. de Byz., s. v. "Torrèbos"): or Tyrrha et Torrha sont évidemment deux prononciations différentes du même mot; on peut donc considérer Tyrrhéniens et Torrhébiens comme identiques. Nous arrivons ainsi à déterminer qu'il y a une grande conformité entre la tradition rapportée par Xanthus de Lydie et celle que nous transmet Hérodote, lorsque l'un donne aux fils d'Atys les noms de Lydus et Torrhébus, tandis que l'autre les appelle Lydus et Tyrrhénus; car le premier, en sa qualité de Lydien, employait la forme lydienne du nom, et le second a employé la forme grecque (Otf. Müller, Die Etrusker, Introd., ch. II, § 3-5) (Joseph Marin Adolphe Noël Desvergers, L'Étrurie et les Étrusques; ou, Dix ans de fouilles dans les maremmes toscanes, Tome 1, 1864 - books.google.fr).

 

Sous le règne d'Atys, fils de Manès, dit Hérodote, toute la Lydie fut affligée d'une grande famine, que les Lydiens supportèrent quelque temps avec patience; mais voyant que le mal ne cessait pas, ils y cherchèrent un remède et chacun en imagina à sa manière. Ce fut à cette occasion qu'ils inventèrent les dés, les osselets, la balle, et toutes les autres sortes de jeux, excepté celui des jetons, dont ils ne s'attribuaient pas la découverte. Or, voici l'usage qu'ils firent de cette invention pour tromper la faim qui les pressait. On jouait alternativement pendant un jour entier, pour se distraire du besoin de manger, et le jour suivant on mangeait au lieu de jouer. Ils menèrent cette vie pendant dix-huit ans; mais enfin le mal au lieu de diminuer, prenant de nouvelles forces, le roi partagea tous les Lydiens en deux classes et les fit tirer au sort, l'une pour rester, l'autre pour quitter le pays. Celle que le sort destinait à rester eut pour chef le roi même, et son fils Tyrrhénus se mit à la tête des émigrants. Les Lydiens que le roi bannissait de leur patrie, allèrent d'abord à Smyrne, où ils construisirent des vaisseaux, les chargèrent de tous les meubles et instruments utiles et s'embarquèrent pour aller chercher des vivres et d'autres terres. Après avoir côtoyé différents pays, ils abordèrent en Ombrie où ils bâtirent des villes qu'ils habitent encore à présent; mais ils quittèrent leur nom de Lydiens et prirent celui de Tyrrhéniens, de Tyrrhénus, fils de leur roi, qui était chef de la colonie. (Histoire, trad. Larcher, lib. 1, c. 4.) (Louis-François Jéhan, Dictionnaire de linguistique et de philologie comparée, Encyclopédie théologique, 1858 - books.google.fr).

 

Avant d'entrer dans le golfe de Smyrne, on trouve, en venant du nord, les baies de Cumes, de Phocée la vieille et de Phocée la nouvelle. Phocée la vieille est le berceau de Marseille. Son port est excellent; il est le refuge ordinaire des bâtiments que la contrariété des vents empêche d'entrer dans le golfe de Smyrne. Une forteresse trop élevée est destinée à protéger ce port. Le golfe de Smyrne, qui a dix lieues de profondeur, est bordé par la péninsule de Phocée, par le cap Maléna, aujourd'hui Carabouroun, vis-à-vis les bouches de l'Hermus; par les îles Vourla, et au fond par la ville de Smyrne, bâtie sur la croupe du mont Pagus (Antoine de baron Juchereau de Saint-Denys, Histoire de l'empire ottoman depuis 1792 jusqu'en 1844, Tome 1, 1844 - books.google.fr).

 

En 1472, Mocenigo ravage Mitylène, Dilo et les Cyclades, pendant que le sultan était occupé ailleurs. Il avait menacé toute la Natolie, et avait enfin pris Smyrne, qu'il ruina de fond en comble. La retraite d'Oussoun-Haçan, qui n'avait pu forcer le camp retranché de Mahomet, priva, en 1473, Mocenigo des avantages qu'il avait espérés. (Biographie universelle (Michaud) ancienne et moderne, Tome 28, 1854 - books.google.fr).

 

"Tigre"

 

Le léopard et la panthère ont été souvent confondus sous le nom général de tigres. Le vrai tigre, le tigre royal (felis tigris, L.), était encore inconnu du temps d'Aristote; car il ne se trouve point compris parmi les animaux féroces qu'Alexandre rencontra dans l'Inde, patrie du tigre royal, que Buffon dépeint comme «bassement féroce et cruel sans justice». Mégasthène, cité par Strabon, parle le premier du tigre comme habitant une province de l'Inde (Bengale), traversée par le Gange. Pompée montra aux Romains les premiers tigres qu'ils eussent vus. Pline signale l'Hyrcanie et l'Inde comme le séjour naturel du tigre, qu'il appelle un animal d'une effroyable vélocité, tremendæ velocitatis animal, et il donne à entendre que de son temps il était bien plus rare que la panthère. Le vrai tigre, le tigre rayé, appartient exclusivement à l'Asie. C'est par erreur qu'il a été signalé comme habitant aussi l'Afrique. Ses lieux d'élection sont la côte de Malabar, le Bengale, l'île de Java, le royaume de Siam ; de là il a pénétré jusque vers le nord de la Chine (Ferdinand Hoefer, Histoire de la zoologie: depuis les temps les plus reculés jusqu'a nos jours, 1873 - books.google.fr).

 

C'est sans doute à l'influence du bas-latin uncia, que sont dues les désinences des formes italiennes loncia, lonzia, etc., employées au XIVe et au XVe siècles, en même temps que lonza. Pour ce qui est des autres variantes de ce nom, voici comment je m'explique leur origine. A partir de la seconde moitié du XIIIe siècle, la rapide extension que prit le commerce des Vénitiens, des Génois et des Pisans, en Asie Mineure et sur les cotes d'Afrique, eut, entre autres conséquences, celle d'une plus frequente importation d'animaux orientaux en Italie. L'occasion de voir les panthères, exhibées sous le nom de lonze, se presenta souvent, et le peuple observant qu'elles avaient un air de famille avec les lions, les lionnes et les leopards, fut amené à les appeler leonze, leonzie, lionse, etc. Mais ces altèrations sont extrèmement rares dans les écrits antérieurs au XIVe siècle. Jusqu'ici on n'a relevè que celle de leonza dans un vers de Rustico di Filippo, et celle de leuncia dans un texte latin de la fin du XIIIe siècle. Cette sorte de classification des grands felins, basée sur le « type lion », s'étendit au tigre dans les narrations des premiers voyageurs, qui ont décrit cet animal de visu. Ainsi pour Marco Polo c'est «un lyon grandisme, tout vergé par long, noir et vermoil et blanche» ; pour Josaphat Barbaro, amassadeur vénitien auprès des Persans (Giornale storico della letteratura italiana, Volume 53, 1909 - books.google.fr).

 

Josaphat ou Giosafat Barbaro (né en 1413 à Venise et mort en 1494 dans la même ville) est un explorateur vénitien du XVe siècle. De 1436 à 1475, il fit plusieurs voyages dans la Perse, la Turquie, la Tartarie et la Géorgie dont la relation a été publiée en 1543 et 1545 à Venise (fr.wikipedia.org - Josaphat Barbaro).

 

Vennero in questo mezo alcuni con certi animali che erano sta' mandadi da un signor de India. E primo de i quali fu una leonza in cadena menata da uno che havea pratica de simil cose, la qual in suo lenguazo chiamano babincht.

 

"babincht" : Si tratta probabilmente della parola persiana babr, «tigre», o babr-i-bayan, «tigre reale» (Laurence Lockhart, I Viaggi in Persia degli ambasciatori veneti Barbaro e Contarini, 1973 - books.google.fr, Secondo volume delle Navigationi et viaggi, raccolto gia da M. Gio. Battista Ramvsio, 1583 - books.google.fr).

 

Acrostiche : LDUQ, eL DUQue

 

Pour "le doge" en espagnol (Antonio de Herrera y Tordesilla, Comentarios de los hechos de los españoles, franceses, y venecianos en Italia, desde el año de 1281. hasta el de 1559, 1624 - books.google.fr).

 

Pourquoi en espagnol ? On aurait préféré en catalan :

 

Pietro Mocenigo passed the winter months of 1470–71 readying his armada at Venetian Modone (Methoni) where he was joined in the spring by ten Neapolitan galleys under command of Catalan Galcerán de Requesens had meanwhile made rendezvous with Mocenigo's Venetian contingent and were together preying on island and coastal targets of opportunity. Three ambassadors of the Aq Qoyunlu or White Sheep Turkomans arrived at the Holy See seeking an ally in the Aq Qoyunlu's insipient war with the Ottoman Empire, and found yet another of the Orthodox Christian Eastern Roman Empire stood in startling contrast to the Holy See's centuries-long refusal of a similar alliance with Greek schismaticst. In two more expeditions accompanied by a Naples contingent expanded to seventeen galleys with arrival of Belprato who assumed command of the Neapolitans, as well as with arrival of the two Hospitaller galleys under Werdenberg, Mocenigo invested Knidos at Cape Crio in Caria and Delos in mid-Aegean without encountering a single person. He then crossed the remainder of the Aegean and put into Napoli di Romania (Nauplion) in the Morea where the Venetians wintered. Franz Babinger describes this period of Mocenigo's command as 'cruising the Aegean visiting allies and making quick inconsequential raids on Ottoman possessions. No encounters with the Turkish fleet take place'. It is not clear whether Mocenigo encountered, destroyed, or removed evidence of antiquity at either of these depositories of history. It is not even clear there was a human presence at either Knidos or Delos. What is clear is that Pietro Mocenigo's tomb, elaborately decorated with fifteen life-size sculptures, is inscribed in Latin 'Paid for with enemy plunder' (Gordon Ellyson Abercrombie, The Hospitaller Knights of Saint John at Rhodes 1306-1522, 2025 - books.google.fr).

 

Typologie

 

Le report de 1771 sur la date pivot 1471 donne 1171.

 

L'île d'Eubée fut exposée aux ravages des Sarrasins, surtout dans la période où ceux-ci furent possesseurs de la Crète. Au temps des croisades, de nouveaux ennemis de l'empire tentèrent de s'en emparer; ce furent les Vénitiens. En 1171 Venise prépara contre l'empire un armement formidable, sous le commandement du doge Vital Michieli. La flotte vint, après quelques ravages, débarquer ses troupes dans l'Eubée. Toutes les places de l'île étaient en état de défense; cependant, le gouverneur, soit par crainte, soit pour gagner du temps, engagea les Vénitiens à députer vers l'empereur. Manuel traîna les négociations en longueur; la peste se déclara dans l'île, et sévit particulièrement dans l'armée vénitienne. Le doge, craignant que les Grecs n'eussent empoisonné les fontaines, fit rembarquer ses troupes. C'est vers cette époque que l'île d'Eubée commença à s'appeler Negrepont, (Louis Lacroix, L'Univers. Histoire et description de tous les peuples, Tome 38 : Iles de la Grèce, 1881 - books.google.fr).

 

Le quatrain II, 21, daté de 1646, raconte la perte de l’Eubée en 1470 par Venise, qui perdra encore la Crète en 1669 après une guerre commencée en 1645 contre les Turcs.

 

Si Pietro Mocenigo règne au moment de l'apogée de Venise, un autre Mocenigo est doge, en 1770, à son déclin (cf. Lettre à Henry), d’une manière antitypologique.

 

Alvise IV Giovanni Mocenigo

 

Alvise IV Giovanni Mocenigo (né le 19 mai 1701 à Venise – mort le 31 décembre 1778 dans la même ville) est un homme politique italien du XVIIIe siècle, qui est le 118e doge de Venise, élu en 1763. La République de Venise est désormais en plein déclin, sans politique internationale car elle est enfermée dans une immobile neutralité, isolée du progrès économique, presque le jouet des évènements. Son dogat est plus rappelé pour la finesse du mobilier de ses appartements que pour des actes politiques ou historiques. Vers 1770 la crise économique frappe la République et les remèdes ne sont que des palliatifs. Les lois contre le luxe se révèlent tout aussi inutiles et il y a de nombreux scandales financiers et de mœurs, signe du déclin moral de la classe dirigeante. Même le doge est impliqué dans une histoire embarrassante lorsque son anneau est retrouvé entre les mains d'une «noble dame». Malgré ces faits, Mocenigo est un bon souverain, modéré, généreux. Il limite les privilèges du clergé, et par conséquent entre en conflit avec le pape Clément XIII. Pour chercher à développer l'économie, il crée d'importantes relations commerciales avec Tripoli, Tunis, le Maroc, la Russie et même l'Amérique (fr.wikipedia.org - Alvise Giovanni Mocenigo).

 

L'Arcadie

 

Le despotat de Morée, État grec détaché de l'Empire byzantin, est conquis par les Ottomans entre 1458 et 1460. Les forteresses vénitiennes de Coron, Modon, Monemvasia et Nauplie sont prises entre 1500 et 1540. Selon les époques, le Péloponnèse a eu le statut de sandjak, district dépendant du pachalik de Roumélie) ou celui de pachalik ou eyalet (province de premier rang), avec une interruption de 1687 à 1715 où la presqu'île est occupée par les Vénitiens. Elle a eu pour capitales successives Corinthe, Leontari, Mistra, Patras, Nauplie et enfin Tripoli (1715) en Arcadie. En 1533, le sandjak de Morée, avec d'autres régions de la Grèce insulaire et péninsulaire, est rattaché à une nouvelle province, le pachalik de l'Archipel dont le gouverneur est le capitan pacha, chef de la marine ottomane. En 1661, pendant la guerre de Candie (conquête de la Crète par les Ottomans), la Morée devient un pachalik séparé En 1687, pendant la guerre de Morée, les Vénitiens, commandés par Francesco Morosini, débarquent et s'emparent du Péloponnèse, puis de l'Attique et de l'Eubée. Ils établissent dans le Péloponnèse une colonie baptisée «Royaume de Morée». Au traité de Karlowitz, en 1699, Venise conserve la Morée. En 1715, pendant la guerre vénéto-ottomane de 1714-1718, les Ottomans reprennent la Morée, ce qui est acté par le traité de Passarowitz (fr.wikipedia.org - Péloponnèse).

 

L'ancienne Mantinée se trouve à 12 km de Tripoli.

 

La ville fut fondée vers le XIVe siècle. Son nom a parfois été compris comme faisant allusion à trois villes antiques abandonnées (selon les versions : Mantinée, Tégée et Pallantion; Nestani, Mouchli et Thana… ou d'autres variantes), mais il s'agit d'une parétymologie. Au Moyen Âge, elle apparaît sous les noms de Dobrolica (selon les interprétations «bon lieu» ou «ville aux chênes» en slave), de Drobolitsa («morcelée, fragmentée, partagée» en valaque), de Tripolizza pour les Génois et les Vénitiens au XVIIe siècle, et de Tarabolu pour les Turcs (fr.wikipedia.org - Tripoli (Grèce)).

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