Basques et Rifains VI, 1 1926 Autour des monts Pyrenees
grans amas De gent estrange
secourir Roy nouveau: Pres de Garonne du grand temple du Mas, Un Romain chef le craindra dedans l'eau. VI, 2 1926-1927 En l'an cinq cens octante plus et moins, On attendra le siecle
bien estrange: En l'an sept cens,
et trois cieux en tesmoings, Que plusieurs regnes
un a cinq feront change. Si on met en rapport les quatrains 1 et 2 de la Centurie
VI, l'année 580 et la Garonne peuvent faire référence aux incursions vasconnes en Aquitaine jusqu'à ce fleuve. Les années 580 Tandis que les années 600 ne sont liées à aucun événement
historique déterminant, les années 560/580 marquent la fin de la « renaissance
mérovingienne » du VIe siècle, avec le règne de Clotaire Ier (558/ 561) où le
royaume franc fut réunifié, tandis que les années 620/630, avec l'unification
du royaume sous Clotaire II (613-629) et Dagobert Ier (629-639), correspondent
à une seconde « renaissance mérovingienne » La notion de rénovation est liée ici à l'unification ou
l'agrandissement de l'Etat mérovingien. Les quatre fils de Clovis se firent entre eux une guerre
acharnée. Clotaire, resté seul maître en 558, laissa lui-même quatre fils qui
se partagèrent ses domaines. L'Aquitaine échut à Chilpéric. Mais la discorde ne
tarda guère à venir. Gontran, roi de Bourgogne, marcha contre Chilpéric; puis,
en 584, il envoya des troupes en Aquitaine contre Gondebaud qui s'Ă©tait fait
couronner à Brive. L'armée de Gontran traversa la Garonne au Mas-d'Agenais, pilla cette ville et se lança à la poursuite
de Gondebaud, qui périt par trahison à Saint-Bertrand- de-Comminges où il
s'était renfermé. Le général de Gontran, Didier, comte de Toulouse, défit en
587 l'armée de Chilpéric commandée par Regenwald ou Renaud,
gouverneur de l'Agenais et du PĂ©rigord. Il prit PĂ©rigueux, et s'empara dans la
basilique de Saint-Caprais d'Agen de la femme de
Renaud, qu'il fit conduire à Toulouse. C'est en 586, sous Chilpéric, que les
Vascons ou Gascons, descendus des Pyrénées espagnoles, se répandirent dans la Novempopulanie. Bladaste, duc de
Bordeaux, envoyé contre eux, fut tué et son armée fut complètement défaite. Le
duc Astrovald n'obtint ensuite qu'un faible succès;
les envahisseurs restèrent maîtres, malgré tout, du territoire désigné sous le
nom de Vasconie citérieure "Mas" et "Garonne" désignent problement le Mas d'Agenais, lieu de passage des armées de
Gontran selon M. de Saint Amans (XIXème siècle), et non le Mas d'Aire sur
l'Adour. On sait que Nostradamus passa quelques années à Agen auprès de Jules
Scaliger. Des antiquaires reconnurent dans le jardin du presbytère
du Mas d'Agenais, un autel votif avec une inscription comportant le mot
USSUBIUM : TVTELAE. AVG. VSSVBIO. LABRVM SILVINVS. SCIPIONIS. F. ANTISTES. D. Ussubium figure sur la route de Bordeaux Ă Agen aussi bien
dans l'Itinéraire d'Antonin que sur la Table de Peutinger. Le monument que le
prĂŞtre Silvinus avait Ă©tabli Ă Ussubium,
se trouvait sans doute près du temple de la Déité tutélaire ou Tutèle de ce lieu. Silvinus
occupait une place distinguée dans la hiérarchie sacerdotale, et il est
probable que ce ne fut pas seulement pour satisfaire à des besoins hygiéniques
qu'il fit Ă©tablir ce Labrum, mais aussi pour servir Ă des purifications
prescrites à ceux qui entraient dans le temple, ou qui étaient chargés de le
desservir. Peut-ĂŞtre Nostradamus vit-il
cet autel et son inscription. A-t-il
aussi dans l'esprit la légende de saint Vincent d'Agenais. Saint Vincent n'est connu dans nos bréviaires manuscrits
ou imprimés que sous le nom de saint Vincent du Mas d'Agenais. Ce surnom qui a
subsisté dans nos livres liturgiques jusqu'au milieu du XVIe siècle nous
apprend à démêler dans les fables de nos légendes actuelles le til qui nous conduit à noire tradition primitive. [...] L'auteur
des actes du martyre de saint Vincent-d'Agenais est
le premier et presque le seul qui ait fait mention de Vellanum
de Pompejacum. Il Ă©crivait au vr
siècle dans le diocèse d'Agen, et son témoignage est d'autant plus certain
qu'il avait ces deux villes sous les yeux. Il nous apprend que saint Vincent
fut arrêté à Vellanum, petite ville du territoire
appelée Rus Reonemense; qu'il y avait dans cette
ville un temple d'idoles situé, sur une colline, au bas d'un fleuve qu'il ne
nomme pas, mais qui ne peut ĂŞtre que la Garonne, parce que cette ville Ă©tait
dans le territoire d'Agen ; qu'Ă une certaine fĂŞte, un globe de feu sortait de
ce temple, se précipitait dans le fleuve et remontait dans le temple même, sans
s'Ă©teindre; que c'est lĂ que saint Vincent souffrit le martyre et fut enseveli
; que son corps fut transféré dans la suite, en la petite ville de Pompejacum qui se glorifiait encore alors de ce précieux
dépôt; qu'enfin, dans le même lieu où était le temple dans lequel le démon
avait été adoré autrefois, il y avait une église consacrée au vrai Dieu sous l'invocation
de saint Vincent et dans laquelle, tous les ans, les habitants des petites
villes voisines se réunissaient pour célébrer sa fête. Fortunat, évèque de Poitiers, contemporain de cet historien, fait
mention de ces deux Ă©glises que plusieurs auteurs ont confondue en une soule et
les caractérise par le même trait. Il nous apprend que Léonce II, évêque de
Bordeaux, fit couvrir de plomb celle qui était dépositaire des reliques de
saint Vincent. Le même poète fait aussi mention de l'église de Vellanum à laquelle il conserve son nom celtique de Vernemetis, qui signifie un grand temple. En 571, Léovigild prend le site d’Amaya en Cantabrie
après avoir repoussé les assauts des Vascons.La
révolte des Vascons de 579 à 582 fut encore une sérieuse lutte pour leur
indépendance. En 580, les Vascons se rebellent une fois de plus, probablement
sous l’influence de l’insurrection catholique de Baetica
(BĂ©tique (Hispania Baetica)
couvre le sud de l’Espagne, et correspond à peu près à l’actuelle Andalousie).
En 581, Léovigild va à l’encontre des Vascons en personne, et après beaucoup
d’ennui, réussi à occuper une grande partie de la Vasconie,
et prend possession de la ville d’Egessa (Egea de los Caballeros). Pour
assoir son succès, il fonda la ville de civitas victoriaca (Iruña-Véleia) en
bonne position stratégique, c'est-à -dire que, selon son habitude, il restaure
une forteresse antique, ici celle qui porte le nom romain de Iruña-Véleia, pour surveiller la route... de Bordeaux.
Après avoir mis fin ainsi à cette campagne, Léovigild décida de prendre une
mesure énergique contre son fils rebelle. À cet effet, il passa plusieurs mois
en 582 à organiser une armée puissante, et, dès qu’elle fut réunie, marcha sur
Caceres et Mérida. Pour finir, Récarède Ier, dit « le
Catholique », et nouveau roi des Wisigoths dans la pĂ©ninsule ibĂ©rique de 586 Ă
601, fit la guerre aux Vascons afin de reprendre les terres que LĂ©ovigild avait
envahi jusqu’au fin fond des Pyrénées, mais cependant sans succès. Le Traité d’Andelot signé en
587 entre Gontran Ier roi de Burgondie et son neveu
Childebert II roi d’Austrasie, devait assurer une paix perpétuelle entre les
deux royaumes. Childebert II se vit reconnaître, les possessions de Meaux,
Tours, Poitiers, Avranches, Aire-sur-Adour, Couserans, Lapurdum
et Albi. Il semble bien que les Vascons, malgré la possession
mérovingienne sur traité, soient les véritables maîtres de la partie Sud-Ouest
du duché d’Aquitaine. Les Vascons, protégés par l’accès difficile de leurs
montagnes, étaient restés indépendants sur le versant sud des Pyrénées
occidentales. Ils avaient gardé leur langue et leur religion. En 587, ils
sortent de leurs retraites et envahissent les plaines de l’Adour et de la
Garonne. Leur progression dure jusqu’en 602 quand les deux fils de Childebert
II, Théodebert II, roi d’Austrasie et Thierry II, roi
de Burgondie les battent et leurs imposent un duc en
la personne de Genialis. C’est l’union entre
Mérovingiens qui leurs permet de soumettre les Vascons mais cela s’arrête aux
pieds des Pyrénées. En 602, les Francs ayant conquis la Vasconie,
décide de l'ériger en Duché. Ce royaume ou teilreich
ne fut concédé à Caribert II qu’à la condition qu’il soit soumis à l’autorité
de Dagobert Ier. Ce territoire avait été choisi pour servir de zone tampon
entre la Septimanie wisigothique, les Vascons et le royaume franc de Dagobert
I. Le roi des Wisigoths Ă©tait depuis 601 Liuwa
["nouveau roy"] qui régna jusqu'en 603. Entre 660 et 670, suite à l’alliance entre l’aristocratie
aquitaine et les Vascons, le royaume de Toulouse réapparut quoiqu’en cachant
son nom, avec le choix de Félix comme chef, patrice de Toulouse. C'est le début d'une période de l'indépendance Vasco-aquitaine de
660 à 768 En 587, « surgissant des montagnes, ils descendent dans
la plaine, dévastant vignes et champs, livrant les édifices à l'incendie, emmenant
beaucoup de prisonniers et de troupeaux » (Grégoire de Tours), et la réaction
du duc franc ne parvient pas à les bloquer. Dès lors les raids de pillage
ne cessent plus, et l'occupation commence. Une grande expédition royale en 602
les contraint au tribut et leur impose un duc. Ils se retournent alors contre
le territoire wisigothique; mais une nouvelle réaction de ce côté — des
campagnes en 610, 613 et 621 et la construction de la forteresse d'Olite — leur coupe la voie du Sud. Les Vascons une nouvelle
fois font volte-face et il semble bien qu'une partie de la Gascogne passe en
leur pouvoir, puisqu'en 626 l'Ă©vĂŞque romain d'Eauze, sans doute pour sauver son
autorité, pactise avec eux ; il se rend au concile de Clichy, l'année suivante,
sur convocation de Clotaire II, mais il est le seul des Ă©vĂŞques de Novempopulanie Ă y assister. Deux ans plus tard, Ă la mort
de Clotaire II, Dagobert érige pour son frère Charibert II un royaume
d'Aquitaine qui, constitué d'un bloc de pagi comprenant Saintes, Périgueux,
Cahors, Agen et appuyé sur Toulouse, est visiblement destiné à tenir en respect
la Vasconie d'outre-Garonne, désormais considérée
comme une marche. Après la mort de Charibert, Dagobert organise en 635, avec,
notamment, les deux ducs de Bordeaux et de Toulouse, une grande expédition pour
venir Ă bout des Vascons. Ceux-ci acceptent de se soumettre, mais dans la
vallée de la Soule ils écrasent une partie de l'armée franque. Dès le début de
la seconde moitié du VIIe siècle, au temps du maire du Palais Ebroin, un patrice, Félix, est nommé à Toulouse avec
pouvoir de commandement sur toute la région jusqu'aux Pyrénées désormais
contrôlée par les Vascons, mais lui-même fait cause commune avec eux. Pratiquement
l'Aquitaine, demeurée si profondément romaine, fait sécession du royaume franc.
A la mort de Félix (671-672), son « fidèle » Loup se rebelle officiellement
contre le roi, et il agit en « prince ». En vain Clotaire III lance une
offensive contre lui; le « duc » Loup, maître de toute l'Aquitaine méridionale,
vient appuyer militairement avec ses Gascons la vaine tentative de rébellion de
la Septimanie, dont le duc Paul, soulevé contre le roi wisigothique Wamba, s'était proclamé roi. Puis il étend son pouvoir à la
fois vers le Centre-Ouest et vers les pagi proches de la Septimanie. Dans les
premières décennies du VIIIe siècle, les princes des Aquitains, Eudes, puis Hunaud, réussissent pratiquement à réunir sous leur
principat la plus grande partie de l'Aquitaine avec l'Auvergne, le Limousin, le
Poitou et le Berry. Cela ne peut se comprendre qu'avec l'aide prêtée aux
Aquitains par les Vascons, qui, maîtres de la Gascogne, avaient aussi pénétré
dans l'outre-Garonne, notamment en Agenais. Dans diverses sources, les
Aquitains sont appelés « Romains », dans dans
d'autres « Vascons » Eauze (peut-être jeu de mot avec "dans l'eau"
v. 4) est Ă 75 km au sud. Le "romain chef" serait l'Ă©vĂŞque catholique
de la ville qui par crainte des Vascons "pactise avec eux". Génialis mourut, après une
administration assez longue et toujours tranquille. Sous le gouvernement de son
successeur, Aighinan, les Vascons se révoltèrent,
d'accord avec Senoc, évèque
d'Eauze et métropolitain de la Novempopulanie. C'est
alors qu'ils reconnurent pour leur duc Armand, l'un des grands hommes de
l'époque, mais dont l'origine est restée inconnue. Armand franchit l'Adour et
parvint, malgré les rois de France, à faire accepter son autorité sur tout le
pays qui s'Ă©tend jusqu'au fleuve de la Garonne.Cependant,
Dagobert monta sur le trône, en 628, et fit à son frère Caribert un petit
royaume d'Aquitaine, avec la ville de Toulouse pour capitale. Ce royaume borné,
d'un côté, par la Loire, de l'autre, par la Garonne, enveloppait, au sud, la
contrée où les Vascons venaient d'établir leur domination. Mais, Armand, ayant
donné en mariage sa fille Gisèle au jeune roi d'Aquitaine, celui-ci acquit
alors, ou par un simple arrangement de famille, ou mĂŞme par la force des armes,
la souveraineté du duché des Vascons. Voilà donc, dès l'an 650, comment la Novempopulanie, cette ancienne Aquitaine de César, put
recevoir le nom de Vasconie. Mais qu'on ne croie pas que ce vaste duché fût habité exclusivement par
des Vascons proprement dits. Il faut, au contraire, distinguer avec soin les
trois zones qui le partagent : 1° le pays récemment occupé entre l'Adour et la
Garonne; 2° le quartier plus étroit que limitent l'Adour, au nord, et le Gave
d'Oloron au midi; 3° enfin, la petite contrée qui de la rive gauche de ce Gave,
à partir du Vert (près de Moumour), s'élève par
gradins jusqu'au haut des montagnes. Ces trois zones formèrent, dans leur
ensemble, le duché nominal de la Vasconie; mais les
Vascons, loin d'en expulser la population indigène ou de s'y fondre avec elle, se contentèrent de lui être unis politiquement et
continuèrent à vivre, en corps de nation, dans la troisième zone, laissant les
deux autres aux descendants des vieux Aquitains En 626-627, un certain Palladius
et son fils Senoc (Senoch, Sedocus, Sidocus qui assista au
Concile de Reims en 625, avec Audéricus ou Audrit, évêque d'Auch), évêque d'Eauze, furent exilés parce
que le duc Egina (le saxon Ayghinia,
Aignan) leur reprochait d'avoir été complices d'une révolte des Vascons. Nous
retrouverons bientôt le duc, en 630, parmi les chefs de la formidable armée
dirigée par Dagobert Ier contre les Vascons cispyrénéens
une fois de plus révoltés. Nous verrons aussi ce même haut fonctionnaire
s'employer à fléchir Dagobert Ier en faveur de ces rebelles Ainsi, Ayghinia était alors duc de la Vasconie
cispyrénéenne "règnes un à cinq" De 660 à 744, il y a 5 ducs de Vasconie
et d'Aquitaine indépendants : Félix, Loup, Eudes, Hubald
et Waifre En 1640, Pierre de Marca, né à Pau en 1594 et mort en
1662, protégé du chancelier Séguier et de Richelieu, compte Sadregesile,
Boggis, Eudes, Hunaud et Vaifers comme les cinq ducs des Vascons qui possédèrent
sous ce titre, une partie et puis toute la Gascogne Pierre de Marca composa en 1641 le De concordia
sacerdotii et imperii en
réponse au livre de Charles Hersent qui imputait au principal ministre de Louis
XIII la volonté de créer un patriarcat national, indépendant du Saint-Siège. L’ouvrage
de Pierre de Marca, rédigé à la demande du Cardinal, était incontestablement un
manifeste gallican. Deux ans après les frères Dupuy, l'homme d'Église se
faisait à son tour le défenseur des « libertés » françaises. Pour lui, les
droits ecclésiastiques de la monarchie reposaient sur trois principes irrévocables
: l'autorité absolue du prince, indépendant au temporel de toute juridiction
étrangère et a fortiori romaine ; la nécessité pour le pape d'accepter,
sans les modifier les anciens canons de l'Église ; la particularité historique
de la France qui n'avait jamais manqué de porter secours au Saint-Siège et de
sauvegarder la discipline extérieure de l'Église. Comme les Feuillants, Pierre
de Marca pensait que les libertés de l'Église gallicane délimitaient
précisément le cadre légal des relations entre les deux pouvoirs [...] Mais,
selon Pierre de Marca, le respect des libertĂ©s gallicanes ne se limitait pas Ă
l'observation stricte de l'ancienne collection du Corpus canonum
et des coutumes reçues dans le royaume, comme le pensaient certains gallicans (Leschassier, Pithou ou Dupuy). Il estimait, au contraire,
qu'il fallait observer l'usage de l'ancien et du nouveau droit, auxquels il
ajoutait les Décrétales, exceptées bien sûr celles du PseudoIsidore dont l'autorité était contestée On appelle Fausses décrétales ou encore Pseudo-Isidoriana une collection de décrétales pseudépigraphes,
faussement attribuées à un certain Isidore Mercator, lui-même longtemps
confondu avec Isidore de SĂ©ville. Il s'agit d'un immense travail de
falsification de documents canoniques. Rédigées dans les années trente et quarante
du IXe siècle, les Fausses décrétales constituent l'une des plus importantes
sources de droit canonique médiéval. L'un des buts principaux des faussaires est la protection
de l'évêque en procédure criminelle contre les empiétements de l'archevêque et
des grands laĂŻques. Les accusations Ă l'encontre des Ă©vĂŞques sont purement et
simplement interdites dans certains textes. Les fausses décrétales semblent avoir été apportées au
Pape Nicolas Ier, Ă Rome, en 864, par Rothade de
Soissons. Les Papes suivants utilisent ces textes afin d'affirmer leur autorité
à la tête de l'Église puisqu'il y est écrit que les évêques ne peuvent être
jugés que par le Pape et qu'aucun décret conciliaire n'est valable sans leur
approbation. Au Moyen Ă‚ge, les canonistes ont pris les Fausses
Décrétales pour des textes parfaitement authentiques. Seul l'archevèque Hincmar de Reims, au IXe siècle, semble avoir eu
des soupçons — ou peut-être en savait-il plus qu'il
ne jugeait politique de l'admettre. Cette attitude changea au XVe siècle.
Nicholas de Cues, qui avait copié un exemplaire des Fausses Décrétales lui-même
(le manuscrit 52 de la Fondation Cusanus) remarqua
certains anachronismes : était-il vraiment crédible que le pape-martyr Clément
Ier ait fondé la prééminence de certains sièges épiscopaux sur le fait que les
paĂŻens, eux, avaient leurs archiprĂŞtres dans ces mĂŞmes villes ? Pendant la
Réforme du XVIe siècle, les attaques devinrent plus systématiques. Les Centuriatores Magdeburgenses
rassemblèrent des arguments contre l'authenticité des Décrétales. Mais il
fallut attendre jusqu'en 1628 pour que David Blondel, prĂ©dicateur rĂ©formĂ© Ă
Genève, fournît la preuve définitive : les soi-disant papes des trois premiers
siècles citaient l'Écriture d'après la version Vulgate, qui ne vit le jour que
longtemps après leur mort Selon Jean Frappier, L. Levillain
a démontré que les Gesta Dagoberti
étaient l'œuvre de Hincmar de Reims, qui doutait de l'authenticité des Décrétales
du Pseudo-Isidore C'est dans les Gesta Dagoberti I. regis Francorum, c. 6 (B. Krusch [Ă©d.],
« MGH SS rer. Merov », 2,
p. 402) : « Aquitaniae ducatu
specialiter ei commisso » ; ibid., c. 35, p. 413 : « Sadragiselus,
dux Aquitaniorum » qu'apparaît
Sadregésile Rabelais était bon; il s'en prit plutôt aux institutions
qu'aux hommes. Laissant un peu à l'écart la royauté qui avait peut-être encore une
certaine raison d'être pour résister aux dernières convulsions de la féodalité,
il s'attaqua principalement à la théocratie. Dans tout le cours de son œuvre on
entend le cri, on sent le coup de fouet de la satire à l'adresse de l'Église,
mais c'est surtout dans les quatrième et cinquième livres qu'il lâche la bride
Ă la plus mordante, Ă la plus impitoyable raillerie. Il s'en prend d'abord,
livre IV. chap. 48, aux Décrétales qu'il turlupine
d'une façon si amusante et si foudroyante en même temps. On sait peu
aujourd'hui, ce que sont au fond les Décrétales, parce que un
petit nombre d'hommes seulement ont sondé l'esprit dans lequel elles ont été
rédigées, les maximes qu'elles ont recommandées, les sophismes qu'elles ont
fait éclore, les monstruosités qu'elles ont enfantées. [...] Que
d'enseignements à retirer de ce grimoire ténébreux dont on affecte de ne pas
connaitre l'existence et qui est là dans l'ombre n'attendant qu'un événement
miraculeux, heureusement fort improbable, pour reprendre haleine, pour faire
irruption, pour s'Ă©taler au grand jour pour commander encore Ă l'univers ! Que
sont donc les Decrétates ? On donne le nom de
Décrétales aux différents recueils qui contiennent les rescrits ou ordonnances,
décisions et règlements émanés de la cour pontificale, rescrits consignés dans
un grand nombre de lettres authentiques ou supposées des souverains pontifes,
adressées à des évêques, à des prêtres ou à de simples fidèles depuis le pape
Sirice, à la fin du IVe siècle jusqu'au pape Paul IV, à la fin du XVIe . Le
premier recueil des Décrétales, connu sous le nom de Décret, remonte au VIe
siècle; il est intitulé Collectio decretorum
Pontifieum Romanorum a Siricio ad Anastasium
II. Il fut collationné par un moine grec appelé Denys Petit. Le second date du
IXe siècle; il parut sous le nom supposé d'Isidore Mercator. L'auteur publia
toutes les pièces données par Denys Petit et en ajouta un grand nombre d'autres
parmi lesquelles plusieurs furent reconnues apocryphes. Le troisième, corrigé
et considérablement augmenté, fut mis au jour au XIIe siècle par un religieux
italien nommé Gratien ; il est connu sous le titre de Decretum
Gratiani. Ce dernier recueil, généralement adopté
devint classique et remplaça les deux premiers. Il comprend trois parties,
divisées en Destinations, Questions, Causes et Canons. Le quatrième est dû au
pape Grégoire IX. Il fut publié dans la première moitié du XIIIe siècle sous le
titre de Nova Compilatio decretalium.
Ce quatrième recueil est divisé en cinq parties. Le cinquième est connu sous le
nom de Sexte, c'est-à -dire sixième, parce qu'il est considéré comme faisant
suite au précédent recueil qui renferme, comme nous venons de le voir, cinq
parties. Il fut publié par le pape Boniface VIII, à la fin du XIIIe siècle. Le
sixième, divisé, lui aussi, en cinq livres, porte le titre de Clémentines; il
est dû au pape Clément V, mais il ne sera publié que par le pape Jean XXII, au
commencement du XIVe siècle. Le septième, enfin, est intitulé Extravagantes,
c'est-à -dire constitutions égarées, oubliées, dispersées, errantes en dehors du
droit canonique (extra vagantes). Ce recueil est divisé
en deux parties : la première contient les vingt bulles propres de Jean XXII,
et la seconde, divisée en cinq livres, est appelée Extravagantes connmunes. Ces deux parties furent publiées successivement
par ledit pape Jean XXII, dans la première moitié du XIve
siècle. Ces différents recueils ont été répandus en nombre incroyable
d'exemplaires et sous tous les formats : « Décrétales, dit Panurge, avons
trouvé en papier, en parchemin lanterné, en velin, escriptes à la main ou imprimées en moule. » (Liv. IV, ch.
49.) Si l'on parcourt le volumineux code décrétalien,
on rencontre, au premier coup d'œil, des décisions concernant la foi, des
règlements relatifs au culte, aux cérémonies religieuses et surtout à la
discipline ecclĂ©siastique; mais si, de cet examen superficiel, on passe Ă
l'Ă©tude attentive de chaque paragraphe des distinctions, des causes, etc., on
sera bien vite convaincu qu'un grand nombre de canons contiennent le germe des
plus révoltantes aberrations. Homenaz n'exagère pas
lorsqu'il dit (liv. IV, ch. 50) : « Cela luy est
non seulement permis mais commandé par les sacrez Décrétales, et doibt à feu incontinent empereurs, roys,
ducz, princes, républiques et à sang mettre qu'ilz transgresseront un iota de ses mandemens
: les spolier de leurs biens, les déposséder de leurs royaulmes,
les proscrire, les anathématizer, et non seulement
leurs corps, et de leurs enfans et parens aultres occire, mais aussi
leurs âmes damner au parfond de la plus ardente chaudiere
qui soit en enfer » Les décrétales insérées dans le recueil de Denys le Petit
furent reproduites dans une collection composée en Espagne vers le premier
tiers du VIIe siècle et attribuée, sans preuves, à Isidore de Séville. Cette oeuvre espagnole, disposée d'abord suivant un ordre
chronologique, fut ensuite adaptée à une classification méthodique des matières.
Sous cette dernière forme, elle valut à Isidore de Séville, l'auteur présumé,
une grande réputation. La première partie des Fausses Décrétales comprend une
préface empruntée à Isidore de Séville Consacrée aux Décrétales et au droit canon, dont elle
recense en annexe les mentions dans le Quart Livre, l’étude d’Olivier Millet
appartenant au recueil Langue et sens du Quart Livre issu du
colloque international qui s’est tenu à Rome en novembre 2011 à l’invitation de
l’université La Sapienza, apporte de précieux
éléments contextuels pour comprendre l’épisode des Papimanes,
mais aussi celui des Chicanous, dans lequel la
présence des Décrétales est moins explicite, mais bien réelle. Par exemple, c’est
conformément à une Décrétale qu’un cordelier refuse de prêter à Villon des
vêtements liturgiques pour une représentation théâtrale. De même, la coutume
des chicanous, qui gagnent leur vie Ă se faire
battre, peut faire référence à une Décrétale consacrée aux clercs qui acceptent
de recevoir des coups de fouet pour racheter une offense. L’article éclaire les
enjeux de ces allusions : les épisodes commentés abordent des sujets
particulièrement polémiques, comme l’immunité cléricale et la distinction entre
clercs et laïcs ; en outre, le pape Paul III était un spécialiste des
Décrétales, qui concentrent donc les critiques des gallicans, celles des
érasmiens désireux de revenir aux sources du droit canon et celles de Luther. Si
l’épisode des Papimanes reflète ce contexte, la
critique de la papauté y est cependant estompée pour mettre en scène une « idolâtrie
de fantaisie ». Basques et décrétales : une histoire de pantoufle Dans le Pantagruel de Rabelais (Livre II), le géant va à Paris (chapitre VII) où, vers l'abbaye Saint-Antoine (actuel hôpital Saint-Antoine),
il rencontre pour la première fois Panurge, babélien, maître en tous langages et possesseur d'un savoir apparemment universel, qui parle en langue basque. Au chapitre VII, Rabelais prend pour type d'une bibliothèque théologique et monastique la fameuse librairie de l'abbaye Saint-Victor. Dans la
longue énumération qui va suivre, il se moque des titres bizarres de plusieurs écrits du temps, principalement sur la théologie et la scolastique. Quelques-uns de ces titres sont réels ou légèrement modifiés.
La plupart sont de i'invention de Rabelais, mais forgés de manière à rappeler certaines particularités relatives à l'auteur ou à la matière. Parmi lesquels : Bigua salutis (Le palan du salut. C'est la parodie du titre
d'un recueil de sermons , imprimés à Haguenau en 1498 et en 1512 : Sermones dominicales, a quodam fratre hungaro, biga salutis intitulati. A biga (chariot à deux roues, Du Cange) Rabelais a substitué plaisamment bigua
(bigue, enfrançais; bigou, en breton; biga, en basque; bighe en italien) le palan) ; Bragueta juris (Plaisanterie fondée, dit Le Duchat, sur ce que le droit est réputé habiter dans la braguette) ;
Pantoufla decretorum (La pantoufle des Décrétales. Les Décrétales, écrit Morellet, étant l'ouvrage des papes qui font baise leurs pantoufles, l'auteur suppose qu'elles sont sorties de ces pantoufles où elles étaient
renfermées, comme le droit dans la braguette). [...] Adonc dist Panurge (au chapitre IX) : Jona andie guaussa goussy etan beharda er remedio beharde verselaysser landa. Anbat es otoy y es nausu
ey nessasust gourray proposian ordine den. Nonyssena bayta facheria egabe gen herassy badia sadassu noura assia. Aran hondauangualde cydassu naydassuna. Estou oussyc eg vinau soury hien er darstura eguy harm. Genicoa
plasar vadu. Ceci est du basque, mais défiguré. Nous le trouvons pour la première fois dans l'édition de 1542, de F. Juste. Il manque dans Dolet. Voici un projet
de restitution que nous avons emprunté à l'opuscule publié sous le pseudonyme de Urhersigarria (Examen critique du Manuel de la langue basque) : « Jaun handia, gauza gucietan behar da erremedio ; behar da, be1cela
icer lan da. Ambatez othoyez mauzu, eguin ezazu gur, aya proposatia ordine den. Non izanen baita facheria gabe, ginaraci bada zadazu neure asia. Arren horen hondoan, galde zadazu nahi duzuna; eztut hujcic
eguiren zuri nic, erten derauzut eguia arimaz, Jaincoac placer badu. » C'est-à -dire, littéralement : Mon grand monsieur, à toute chose il faut un remède; il en faut un, autrement besoin est de suer.
Je vous prie donc de me faire connaître par signe si ma proposition est dans l'ordre; et si elle vous paraît sans inconvénient, donnez-moi ma subsistance. Puis, après cela, demandez-moi tout ce que vous voudrez,
je ne vous ferai faute en rien ; je vous dis la vérité du fond du cœur, s'il plaît à Dieu Rabelais parle auparavant dans Gargantua du liège, dont les pantoufles étaient faites, dont le
gonflement d'une certaine mesure par le vin sortant des pores du buveur définissait l'arrêt des beuveries Pour certains auteurs, l'origine de pantoufle serait à chercher dans le grec "pantophellon" de "pan" et "phellon" (tout, liège), par le napolitain
"pantofola" (Nouveau dictionnaire étymologique et historique, Larousse, 1969). Les « pantoufles de Turpin », en velours violet, qu'aujourd'hui encore montrent au visiteur les religieux de Roncevaux,
datent du règne de François Ier (voir Joseph Bédier, Les légendes épiques t. III, Paris, H. Champion, 1921, p. 309) Hac requiescit humo Tilpinus praesul honoris, / Vivere cui Christus vita & obire fuit. / Hunc Rhemi populo, martyr Dionisius almus, / Pastorem vigilem misit & esse patrem.
Quem pascens quadragenis est amplius anni, / Veste senectutis despoliatus abit. / Quartas cum nonas Mensis September haberet / Mortua quando fuit mors, sibi vita manet. /
Et quoniam locus atque gradus hos iunxerat, Hincmar / Huic fecit tumulum, composuit titulum. Cet epitaphe composé a la louange de l'Archeuesque Turpin ou Tilpin, est de la façon d'Hincmar aussi Archeuesque de Rheims,
tres-grand Prélat aussi bien que Turpin, & tiré de la mesme Abbaie roiale de sainct Denis en France, ou ces deux grands hommes auoient pris l'habit de sainct Benoist auparauant que d'estre faits Archeuesques de Rheims Tilpin sous le nom de Turpin devait devenir dans les chansons de gestes l'archétype du titulaire de la fonction d'archevêque. C'est de 779/780 qu'on peut dater l'érection définitive de l'archevêché par l'octroi du pallium à Tilpin. Toutefois ce n'est pas à lui mais à Hincmar, son successeur de 845 à 882, qu'on doit une réflexion de fond sur l'exercice de l'autorité métropolitaine. Il fut le premier qui l'assuma en plénitude et comme cela ne se passa pas sans friction il fut aussi le premier qui rassembla des dossiers et scruta le droit de l'Église pour y trouver de quoi conforter ses positions. [...] La mise en circulation des Fausses Décrétales pendant cette période avait développé une conception de la primatie comme échelon intermédiaire entre les métropoles et le siège de Rome. Hincmar mena la résistance. Il n'hésita pas à forger à l'occasion les textes dont il avait besoin pour renforcer son dossier. C'est ainsi qu'à partir d'un document authentique trouvé dans la collection Hispana, il fabriqua la lettre du pape Hormisdas (514-523) nommant saint Remi son vicaire dans le royaume des Francs et utilisa une version interpolée de la lettre envoyée par Hadrien Ier à Tilpin au moment de l'octroi du pallium. On y lit notamment : « Tu nous as demandé pour toi et pour ton Eglise de t'accorder en vertu de l'autorité de saint Pierre, prince des apôtres, de celle du saint siège romain et de la nôtre, un privilège pour maintenir ce que tu as déjà fait et pouvoir, sous notre autorité, avec l'aide de Dieu et de saint Pierre apôtre, mener à bonne fin ce que tu n'as pas achevé. C'est pourquoi, de grand cœur et avec l'aide de Dieu et de l'autorité apostolique, conformément aux saints canons et aux décrets du saint siège apostolique, non seulement nous confirmons tes anciens droits, mais encore, dans notre affection pour toi, nous t'en accordons de nouveaux de l'autorité de saint Pierre, prince des apôtres, à qui a été donné par Dieu et Jésus-Christ notre Sauveur, le pouvoir de lier et de délier les péchés des hommes sur la terre et dans le ciel ; nous confirmons et corroborons que l'Eglise de Reims, ainsi qu'elle l'a été de toute antiquité, demeure la métropole et le siège principal de la province, et toi qui as été, par la coopération de Dieu, ordonné sur ce siège, nous te confirmons la qualité de primat de cette province ; sur toutes les cités qui de toute antiquité ont été soumises à l'Église métropolitaine de Reims ; qu'il en soit ainsi à perpétuité pour toi et tes successeurs ». La référence à saint Pierre et au siège apostolique est d'une redondance frappante. L'archevêque Hincmar entendait clairement être maître chez lui, mais il n'a jamais eu de tentation autocéphale. S'il concevait l'Eglise comme une communion et non une monarchie pontificale, il était sans réserve sur la prééminence du pape qui occupait le premier siège du collège épiscopal. [...] Au milieu du IXe siècle entrent en circulation trois collections de pièces apocryphes : les capitula attribués à Angilramme, les Faux capitulaires de
Benoît le Lévite, les Décrétales du pseudo-Isidore, qui ont exercé une influence considérable sur le développement du droit ecclésiastique, en particulier dans la question des rapports entre suffragants et métropolitains.
Contre les abus de pouvoir de ces derniers, les evêques, soucieux de leur indépendance et confortés par l'action centralisatrice de Nicolas Ier, ont cherché à se servir du recours romain La chronique du Pseudo-Turpin composée au début du XIIe siècle ne parle que des expéditions ibériques, mais le remaniement de sa traduction
française (début XIIIe) intègre en l'abrégeant la Descriptio qualiter dans sa version vulgaire due à Pierre de Beauvais (avant 1206). La croisade passe naturellement dans l'historiographie officielle capétienne
que constituent les Grandes chroniques de France On sait que Turpin, archevêque de Reims et compagnon de Charlemagne, n'a jamais écrit la chronique appelée Historia Karoli Magni et Rotholandi
qu'on lui attribue, et qui est une compilation du XIe ou du XIIe siècle. Mais cette chronique a été beaucoup lue et elle a tellement frappé les esprits, justement par le contraste entre son contenu irrationnel et merveilleux
et sa prétention à la vérité, que Rabelais n'est pas le seul à utiliser le nom de Turpin pour désigner la fiction la plus débridée. L'Arioste l'allègue aussi une vingtaine de fois dans son œuvre, le plus souvent
pour souligner ironiquement le caractère invraisemblable d'un passage "trois cieux" Là où l'hygiène du pantagruélisme exclut les mauvais
rieurs, les « agelastes », le discours d'Homenaz exclut les mauvais croyants, les hérétiques : O
comment lisant seulement un demy canon, un petit
paragraphe, un seul notable de ces sacrosainctes Decretales, vous sentez en vos coeurs
enflammée la fournaise d'amour divin : de charité envers vostre
prochain, pourveu qu'il ne soit Hereticque
: contemnement asceuré de
toutes choses fortuites et terrestres : ecstasique elevation de vos espritz, voire
jusqu'au troisième ciel : contentement certain en toutes vos affectations On remarque d'abord que les Décrétales ne servent que de
matière première pour la fabrication d'accessoires en préparation d'une
représentation théâtrale médiévale. Leur association aux farces, sornettes et
momeries, formes d'une satire populaire discréditée au Quart Livre, en dit long
sur leur statut. Pour Homenaz pourtant, les
Décrétales sont au-dessus de tout soupçon et de toute critique, infaillibles
comme son Dieu, le pape. Pareillement Ă Bridoye, l'Ă©vĂŞque
fait ainsi état d'une qualité bien panurgienne: il
interprète tout en faveur de ses idoles comme le joyeux luron s'efforce de
tourner tout événement négatif, son endettement excessif par exemple, à son
avantage à l'aide de son discours sophiste. L'impact des Décrétales sur Frère
Jean est tout aussi néfaste : - Un jour (dist frere Jan) je m'estois à Seuillé torché le cul d'un feuillet d'unes
meschantes Clementines
[...]: je me donne Ă tous les Diables, si les rhagadies
et hasmorrutes ne m'en advindrent
si trés horribles, que le paouvre
trou de mon clous bruneau en feut
tout déhinguandé. - Injan, dist Homenaz, ce feust évidente punition de Dieu, vengeant le peché qu'aviez faict incaguant ces sacres livres, les quelz
doibviez baiser et adorer, je dis d'adoration de
latrie, ou de hyperdulie pour le moins. Le Panormitan
n'en mentit jamais. (QL LII, 658-59) Révélée par l'apôtre Paul en 2 Cor 12, 2, la hiérarchie
des trois cieux dans l'Homélie sur la Genèse de Jean Chrysostome rappelle la
place importante dévolue aux Séraphins dans les hauteurs célestes puisqu'ils «
purifièrent les lèvres d'Isaïe » Pour des lecteurs modernes, il semble étrange qu'Athanase
ait situé en dernier lieu la vision qu'eut en extase Antoine des attaques ariennes
de 356-357 Ă Alexandrie et de la victoire de l'orthodoxie (82) comme la
prédiction qu'il fit de la mort du persécuteur arien Balacios,
le dux d'Egypte, frappé par la colère divine (86) (cf.
le ravissement de saint Paul au troisième ciel, Antoine serait aller plus
haut). Mais à regarder de plus près cette fin de la Vie d'Antoine, nous voyons
surgir des charismes essentiels aux yeux d'Athanase, ceux de la parole et de
l'action : le solitaire détourne des schismatiques mélitiens,
lutte contre l'hĂ©rĂ©sie arienne Ă Alexandrie mĂŞme (68-69), appelle les paĂŻens Ă
la conversion, en trois discours successifs (72-80). Dans son exil aux déserts
d'Egypte, Athanase, combattant de la foi, revoit la vie d'Antoine comme centrée
sur la foi et la piété, au service de l'orthodoxie militante. Les visions
ultimes ont ce sens Ce qui rehausse encore la gloire de saint Phébade, c’est l’opinion assez généralement répandue parmi
les historiens ecclésiastiques, qu’il avait composé son traité contre les
Ariens au nom des évêques des Gaules. Toutefois, cette opinion a été contredite
par des auteurs assez graves pour que nous ne lui donnions pas plus
d’importance qu’elle n’en a réellement. C’est assez que les historiens de
l’Église gallicane affirment que les évêques des Gaules se consolaient de
l’absence d’Hilaire par le zèle et l’érudition de Phébade;
c’est assez que saint Jérôme ait inscrit le nom de notre évêque parmi les
défenseurs de la foi catholique. Il nous apprend qu’indépendamment du livre
contre les Ariens, saint Phébade fit plusieurs autres
écrits qu’il semble regretter de n’avoir pas lus. Saint Jérôme écrivait son
livre des historiens ecclésiastiques en 392, et il nous apprend que Phébade était alors dans une extrême vieillesse. Il le
désigne dans ce catalogue sous le nom de Fæbade. Il
est appelé ailleurs Phæbade, qui paraît être son
véritable nom. C’est du moins ainsi qu’on le lit dans son livre contre les
Ariens. Du reste, il a été étrangement défiguré par les copistes. On lit Fygadius dans saint Ambroise, Fægadius
dans Sulpice-Sévère, Fagadius ou Phægadius
au concile de Valence, Fitadius Ă celui de Saragosse;
mais nulle part il n’a été défiguré comme dans le lieu même de son siége. On trouve encore dans Agen une rue qui porte le nom
de Saint—Fiari. C’est ainsi que les Agcnais appelaient le grand évêque dans leur langue
vulgaire. Enfin, nous le trouvons sous le nom de Fedarius,
dans l’ancien bréviaire d’Agen qui étend ainsi le passage de saint Jérôme dans
la troisième leçon : Fedarius, Agennensium
episcopus, ab Arianis multa pro fidei amore sustinuit [...] Selon les Bénédictins de Saint—Maur, Phébade
n’aurait pas seulement réfuté la formule de Sirmium
contre les Ariens, mais il aurait aussi composé un savant ouvrage pour
foudroyer le conciliabule de Rimini. C’est trop d’honneur pour notre illustre
prélat, et nous ne pouv0ns pas nous dispenser de faire connaître un traité si
important. Saint Chrysostome lui donna les honneurs de la traduction, et on
l’avait d’abord inséré parmi les discours de ce Père; mais comme il est
parfaitement reconnu que ce n’est pas l’ouvrage de l’évêque de Nazianze, les Bénédictins de la même congrégation l’ont
porté, dans leur édition des écrits de ce Père, comme un appendice des œuvres
de saint Chrysostome Il aurait assisté au Concile de Valence (Gaule) en 374,
son nom étant noté Foegadius, et celui de Saragosse
en Espagne en 381, son nom étant noté Fitade. Mémoires pour servir a
l'histoire ecclesiastique des six premiers siecles qui contient les vies de S. Athanase & des
Saints qui sont morts depuis l'an 378 jusques en 394 & les histoires des
Priscillianistes & des Messaliens, Tome 8, 1702 L'Apôtre Saint Paul, qui avoit fait connoître dans son Epître aux Romains la résolution où il étoit de prêcher en Espagne le Nom de Jesus-Christ, ne fut pas plûtôt hors des prisons de Rome, qu'il se disposa à exécuter son projet (Henri-Simon-Pierre Gissey, Histoire generale d'Espagne, Tome 1, 1751 - books.google.fr). Divers auteurs attestent sa venue effective en Espagne :
Clément de Rome au IIIe siècle ; le Canon de Muratori vers 160 ou 180 ; plus
tard saint Athanase, saint Epiphane, saint Jean Chrysostome, saint Jérôme, Théodoret S. Jean Chrysostome (398-407) en parle dans l'Homélie 76
sur S. Matthieu, dans l'Homélie 13. sur le chap. 4. de la première Epitre aux Corinthiens. Voulez-vous voir le reste, à partir de la tête ? ou voulez-vous remonter de bas en haut ? Voyez cette statue
d'or, bien plus précieuse que l'or, telle qu'elle existe sans doute dans le
ciel, non-enchaînée par le poids d'un plomb vil, non fixée en un seul lieu;
mais courant de JĂ©rusalem jusqu'en Illyrie, puis partant pour l'Espagne, et
portée comme sur des ailes à travers le monde entier. Quoi de plus beau que ces
pieds qui ont parcouru toutes les contrées, éclairées par le soleil ? Le
prophète avait prédit cette beauté, quand il disait : « Qu'ils sont beaux les
pieds de ceux qui annoncent la paix ! » (Is. LII, 7.) Voyez-vous comme ces
pieds sont beaux? Voulez-vous aussi voir sa poitrine ? Venez, je vous la
montrerai, et vous vous convaincrez qu'elle est beaucoup plus belle que ces
pieds déjà si beaux, et plus belle encore que celle de l'ancien Législateur.
Moïse, Il est vrai, porta les tables de pierre; mais celui-ci possédait le
Christ en lui-mĂŞme, et portait l'image du roi et du
propitiatoire; il était donc plus honorable que les chérubins. La voix qui
sortait du propitiatoire n'Ă©tait point comparable Ă celle-ci ; elle ne parlait
guère que des choses sensibles; celle de Paul exprime des chose
plus élevées que les cieux; l'une ne s'adressait qu'aux Juifs, l'autre
s'adresse au monde entier ; la première sortait d'objets inanimés, la seconde
d'une âme douée de vertu La légende, racontée dans le bréviaire de Lescar imprimé
en 1541, montre Galactoire combattant les Wisigoths Ă
Mimizan à la tête d'une troupe armée alors qu'il se rend au secours de Clovis Où sont les grands coups d'épée de naguère, les casques
rutilants, les boucliers cabossés, les chevauchées fantastiques ? Hélas nous n'avons
pas eu dans les Landes de Wagner aux trompettes d'or pour chanter l'épopée des vascons de Galactoire. Les
Wisigoths engagés par l'empereur décadent pour défendre l'empire romain,
s'installèrent en maître au grand dam des populations aquitaines. Ils étaient
ariens, hérétiques et voulaient imposer leur loi. Galactoire,
EvĂŞque de Lescar, mena contre les Wisigoths une campagne sanglante avec ses
fidèles vascons. Il remporta d'abord maints succès,
s'emparant du trésor des Wisigoths. Trésor merveilleux sauvage, dont les pièces
maîtresses étaient un cheval en or. Dieu des migrations, et une vache et un
veau en or, Dieu de la FĂ©conditĂ© et de la Force de ce peuple. Convertis Ă
l'arianisme ils avaient toutefois gardé ces images magiques. La réaction fut
terrible et immédiate. De Toulouse et de la Narbonnaise les contingents wisigoths
convergèrent dans le Tursan, à Aire, leur deuxième
capitale. La colonne aux longs cheveux et bijoux brillants partit Ă la
poursuite des Vascons. Moins mobiles, moins aguerris, ces derniers furent en
partie rejoints à Mimizan. Leur colonne était échelonnée ; avec l'arrière garde
Galactoire fit une défense héroïque et fut tué. Les
Wisigoths rendus furieux par la perte de leurs talismans firent preuve d'une
férocité implacable. Retraitant le long des lacs, et des anciens forts romains,
les Vascons encombrés par le cheval en or, trop grand et trop lourd
l'enterrèrent à Saint-Paul-en-Born, au Tuc de Houns,
oĂą nous sommes ; toujours talonnĂ©s, Ă Eulalie-en-Born ils enfouirent au Tue de Castet la vache et le veau en or, essayant d'Ă©chapper Ă
leurs poursuiveurs. HĂ©las, Ă Sanguinet ce dernier
carré vascon fut rejoint et massacré complètement au
cours d'une sanglante bataille. Les Wisigoths furieux de ne pas pas trouver leur trésor exterminèrent les Vascons résolus.
Le sang répandu fut si grand que gorgée, la terre alentour, en garda la teinte
rouille. Les populations épouvantées conservèrent le souvenir de ce massacre et
le nom de Sanguinet resta Ă la bourgade. Mais le
cheval en or et la vache et le veau, me direz-vous ? Autrefois dans le pays de
Born nombreux sont ceux qui firent des rêves de Perrette. Certains cherchèrent
mĂŞme, arasant presque le Tuc de Houns. On y retrouva
des briques, des restes de constructions, mais de cheval, point. Pensez donc,
les Vascons n'Ă©taient pas fous ! Avant de les enterrer ils les avaient faits
bénir. Aussi les Wisigoths ariens, hérétiques, ne purent jamais les trouver, ni
les cupides chercheurs de trésor. Parfois pourtant, ils sortent de leur
cachette, la nuit de Noël, et dans la brume qui danse près des étangs vous pouvez
voir, si vous êtes pur, ces bêtes de l'Apocalypse dressées sur leur Tuc, la
tête tournée vers l'Orient Sulpice Sévère et Phoebadius,
évêque d'Agen, furent en effet à peu près contemporains, S. Hilaire de Poitiers
d'une génération leur aîné. Ils menèrent en Occident le combat pour
l'orthodoxie, surtout après le concile arien de 357 et la publication de sa
formule dite «Blasphème de Sirmium». Une édition de Contre les Ariens
attribué à Phébade par saint Jérôme est parue à Paris
en 1570 en latin Ecoutons le savant Ă©vĂŞque : « DirigĂ© par l'amour de la foi catholique, j'avais dĂ©jĂ
composé contre les Ariens un livre que j'avais confié à un ami. Il le trouva
convenable et le jugea digne de la publicité. Je l'avais conjuré par-dessus
tout de le communiquer, sans me faire connaître, à des hommes doctes et
prudents, afin que, s'il trouvait de la sympathie, je pusse au moins profiter
de leurs conseils pour corriger tout ce qui serait plus ou moins bien Ă©tabli
dans cet ouvrage. Quel est en effet l'homme assez arrogant pour assumer Ă lui
seul toute l'étendue, toute la gravité de la doctrine céleste, et pour
s'imaginer qu'il comprend clairement tous les mystères, alors que l'apôtre
saint Paul s'écrie : « Celui qui croit savoir quelque chose ne « sait pas même
les premiers éléments de la science » : et ailleurs : « Nous ne voyons
maintenant qu'à travers un miroir et comme par énigme, mais alors « nous
verrons face à face. » Saint-Paul a été ravi dans le troisième ciel où il a entendu des choses inénarrables (2 Cor. XII, 4). Le troisième ciel désigne l'ordre de choses le plus relevé, celui où Dieu se manifeste le plus à découvert, et où, par conséquent, l'Apôtre a pu apprendre et comprendre quelque chose du mystère de la Divinité manifestée en gloire dans le ciel et en chair sur la terre. Il n'est donc pas étonnant que, sans révéler ce qu'il lui est ordonné de taire, il parle avec tant d'élévation de la divine personne du Sauveur , et oppose l'autorité de l'enseignement apostolique à la philosophie, aux enseignement humains, et à la science mondaine (Col. II. 8) (Charles Moulinié, L'enseignement graduel des vérités religieuses par J.C. et les apôtres, fondement de la vraie tolérance, 1818 - books.google.fr). Retour en Espagne
: Isidore de Séville et les cieux Pour présenter le monde dans lequel vivait Isidore de
Séville, il convient de situer d'abord cette Espagne du début du VIIe siècle,
telle qu'elle est devenue après les derniers soubresauts de l'Empire romain et
l'installation des royaumes barbares, particulièrement celui des Visigots. Pour
cela, sans doute sera-t-il intéressant de suivre, comme fils conducteurs, la
Chronique universelle qu'Isidore a rédigée vers 616 et qu'il a abrégée dans ses
Etymologies, mais surtout l'Histoire des Gots qu'il a
écrite un peu plus tard, et remaniée en 625 Isidore de Séville (en latin : Isidorus
Hispalensis), né entre 560 et 570 à Carthagène et
mort le 4 avril 636 , est un ecclésiastique du VII
siècle, évêque métropolitain d'Hispalis (Séville),
une des principales villes du royaume wisigothique entre 601 et 636. Il vient
d'une famille influente (son frère, Léandre, ami du pape Grégoire le Grand le
précède à l'épiscopat de Séville) qui contribue largement à convertir les Wisigoths,
majoritairement ariens, au christianisme trinitaire La période pendant laquelle il a vécu 560 - 636 est
contenue dans celle des 580 - 700 du quatrain. M. Bernhard Bischoff, de l'Université de Munich, étudie
la diffusion des œuvres d'Isidore de Séville en Europe au moyen âge, diffusion
assez rapide puisque, dès 700, un moine de Ligugé, Defensor,
connaissait déjà les Sententiae, reprenant un
passage, invitant ses lecteurs novices à ne pas lire les «mensonges des poètes»
; diffusion qui augmenta ensuite avec l'exil de Wisigoths vers la Catalogne (au
Xe siècle) et les monastères de l'Empire carolingien (dès le VIIIe) (Die europäische Verbreitung der Werke Isidors von
Sevilla). La présence de son œuvre est
notée dans un manuscrit écrit à Wearmouth ou à Jarrow vers 700 encore ; mais Virgile le Grammairien,
peut-être Irlandais qui écrivait probablement en Gaule, dans la deuxième moitié
du VIIe siècle connaissait déjà Isidore Je puis citer à l'appui l'autorité de saint Isidore de
SĂ©ville, en son livre des Etymologies, oĂą il ne parle des Vascons que pour
expliquer leur nom et leur position géographique. Ce passage est très
remarquable au point de vue des nos recherches. Après
avoir dit que les Vaccéens sont appelés ainsi du nom
de leur capitale, Vacca, saint Isidore assure qu'on les nomma ensuite Vaccones et, plus lard, Vascones, par le changement de la lettre C en S. Mais il
ajoute qu'ils « habitent sur la crête des » Pyrénées, la vaste solitude des
montagnes ». C'est donc dans les lieux les plus abrupts des Pyrénées (Pyrennei Jugis) que les Vascons
avaient leurs cantonnements, vers l'an 630 La manière dont Isidore mêle les connaissances profanes
aux textes sacrés dans l'étude de la pluralité des cieux est encore plus
singulière. La comparaison entre les données de la Bible et celles de
l'astronomie antique était traditionnelle dans l'examen de ce problème, comme
on peut le constater dans les commentaires exégétiques sur la Genèse. Le savoir
d'Isidore s'appuie d'abord ici sur l'Exameron
d'Ambroise : c'est là qu'il a trouvé une comparaison entre la théorie païenne
de l'harmonie des sphères, les « cieux des cieux » du Psaume 148 (Ps 148, 4 : « laudate eum caeli
caelorum », cité par Isidore, au début du
chapitre,) et le « troisième ciel » où Paul déclarait avoir été ravi.
Mais Ambroise n'a été suivi
textuellement qu'au début de ce chapitre d'Isidore « sur les sept planètes
célestes et leurs révolutions ». L'auteur de l’Exameron
se contentait de suspendre prudemment son jugement devant la diversité des
opinions philosophiques paĂŻennes sur le nombre des cieux, et de restituer Ă
David, suivant la tradition du judaïsme helléniste et de l'école exégétique de
Césarée, la paternité de la théorie des sphères célestes. En s'appuyant sur un
texte d'Hilaire de Poitiers, Isidore vaÂ
plus loin. Il force jusqu'à lui donner un sens matériel l'idée, exprimée
dans l'Hexaéméron de Basile, d'une lumière
spirituelle située dans l'espace au-delà des limites de notre monde céleste. A
l'en croire, c'est dans le « ciel du cercle supérieur, auquel il a fixé des
limites propres », que Dieu « a placé les vertus des créatures spirituelles ».
Assigner ainsi aux esprits une résidence au-delà des sphères planétaires
revient à situer le monde spirituel dans le prolongement de l'univers matériel.
Du même coup, c'est impliquer qu'il n'existe aucune solution de continuité
entre la matière et l'esprit. Cette théorie singulière n'est pas sans analogie
avec la croyance païenne suivant laquelle les âmes des morts survivent dans l'éther
supérieur, ou avec la conception manichéenne d'un au-delà igné. D'autant
qu'Isidore prolonge sa théorie par des considérations sur le rôle réfrigérant
des « eaux supérieures », qui paraissent supposer la nature ignée de ce monde
spirituel extérieur à notre univers : « De ce ciel, le divin Artisan du monde a
tempéré par des eaux la nature (ignée), de peur que le brasier du feu supérieur
n'enflammât les éléments inférieurs ». L'influence de la théologie matérialiste
des StoĂŻciens se manifeste encore dans cette conception d'un univers spirituel
igné, naïve autant qu'étrange pour notre pensée moderne puisqu'elle paraît nier
radicalement la transcendance du spirituel. Tout se passe comme si l'effort de
pensée théologique avait échoué, dans ce texte où Isidore s'inspire d'Hilaire
de Poitiers, par impossibilité de se dégager des cadres traditionnels de la
cosmologie païenne, mais surtout faute de renoncer à une intelligence littérale
de ces expressions, faute de les interpréter d'une manière purement
allégorique. [...] Le littéralisme a poussé Isidore, en partant de la
matérialité du « troisième ciel » et des « eaux supérieures » chez Ambroise et
Augustin, à installer les purs esprits dans une sorte de monde extérieur qui
n'est pas sans analogie avec le séjour des bienheureux du Songe de Scipion,
voire avec les intermondes épicuriens, ou, plus près
d'Isidore, avec le huitième ciel de la glose valentinienne, en contact avec le
plérôme divin Typologie Au VIe siècle, au nord des Pyrénées, les Vascons occupèrent le
pays compris entre l'Adour et la Garonne, laissant des traces de leur race et
de leur langue, mais rapportant chez eux, lorsqu'ils regagnèrent leurs
montagnes avec Loup-Centule, quelques éléments
Ă©trangers. Certains savants ont voulu aussi rapprocher les
Basques des Berbères, en se basant sur quelques éléments linguistiques dont la
parenté paraît probable. La question ne semble pas avoir une importance
capitale, les données d'archéologie, de sociologie et de folklore ne venant pas
corroborer cette hypothèse Comme les Basques dans les Pyrénées, les Berbères se sont réfugiés dans les montagnes de l'Atlas qui leur ont permis de survivre aux invasions Un troisième roman, Guerin de Montglave, avait également donné une place honorable au
récit de la bataille de Roncevaux: il sera imprimé jusqu'à la fin du XVIe
siècle ; il faut compter encore avec les éditions du Pseudo-Turpin à partir de
1527, et surtout avec celles des Chroniques de France, qui intègrent pour le
récit de Roncevaux l'affabulation du Pseudo-Turpin et paraissent dès 1476. Notons
encore que dans Fierabras, Galien et Guerin, l'histoire du voyage de Charlemagne en Orient est
associée à la légende de Roncevaux; dans Galien comme dans les Guerin, elle utilise la tradition du Pèlerinage et explique
l'apparition du fils d'Olivier; dans Fierabras elle
reprend, comme les Chroniques de France, la légende latine qui se préoccupe
seulement de la glorification de Charlemagne. Or le propos du romancier de
Guillaume d'Orange est justement de conter des faits qui se déroulent après la
bataille de Roncevaux : il ne pourra donc faire à cet événement que de rapides
allusions Dans le Fierabras occitan,
Roland est vaincus par les Vasques et non par les Sarrasins Vaste compilation de textes historiques rédigée sur
l'ordre de saint Louis au XIIIe siècle, Les Grandes Chroniques de France ont
pour objet de mettre en valeur les grands moments de l'Histoire de France : on
y retrouve bien sûr Charlemagne et Roland. Ses auteurs ont puisé aux mêmes
sources de La Chanson de Roland, et la mort de Roland à Roncevaux est racontée
avec les mêmes détails, que l'on retrouve dans les enluminures peintes par Jean
Fouquet au XVe siècle pour illustrer la version du roi Charles VII. […] Une des miniatures des Chroniques illustrées par Fouquet
montre Roland étendu, non loin des nombreux Sarrasins qu'il a combattus. Auprès
de lui est agenouillé son frère Baudouin. Dans l'herbe, son épée Durandal qu'il a vainement essayé de briser sur le rocher,
comme on en voit la trace dans la fente derrière lui, et l'olifant qui lui a
servi à appeler Charlemagne. En vain : Charlemagne est arrivé trop tard, mais
il venge son neveu en battant les Sarrasins et le traître Ganelon, qui a vendu
Roland à l'ennemi, sera écartelé La plupart des historiens s'accordent à dire qu'à la
bataille de Roncevaux, les chevaliers carolingiens ont, en fait, affronté la
milice vasconne et non l'armée sarrasine. Mais ce
sont les Sarrasins dont La Chanson de Roland fait les protagonistes de la
bataille. La Chanson de Roland est un poème épique et une chanson
de geste du XIe siècle attribuée parfois sans certitude à Turold
(la dernière ligne du manuscrit dit : Ci falt la
geste que Turoldus declinet).
De mĂŞme que les Vascons seront pris en tenaille entre Wisigoths espagnols au
Sud et les Francs au Nord, les rifains auront affaire Ă combattre l'alliance
franco-espagnole. En pleine époque de reconquête de l'Europe  et de conquêtes en Orient, il est fort
possible que le texte de la Chanson de Roland ait été écrit pour donner un
fondement historique aux croisades, et transformer une guerre territoriale en
guerre sainte Henri Monin découvrit, en 1832, un
poème nommé « La chanson de Roland » dans la Bibliothèque du roi. Francisque
Michel donne une première édition du texte en 1837 qui était fondée sur un
autre manuscrit conservé  à la
bibliothèque d'Oxford en Angleterre. Ensuite, d'autres manuscrits sont
découverts à Venise, à Versailles, à Lyon et à Cambridge. Toutefois celui
d'Oxford présente le plus d'autorité, il est écrit de la main d'un scribe
anglo-normand et date de 1170 environ La conquête musulmane de la péninsule Ibérique se déroule
entre 711 et 726 après celle du Maghreb par le califat omeyyade. Avant
l'arrivée des musulmans, la péninsule Ibérique était dominée par les Wisigoths La guerre du Rif est une guerre coloniale qui opposa les
Rifains aux armées espagnole puis française, dans le Rif, région montagneuse
occupant le nord du Maroc de Tanger à la frontière algérienne (le conflit se
concentra au Rif central et au Rif oriental). Le conflit dura de 1921 Ă 1926
pour ce qui est de la participation de l'Espagne et de 1925 Ă 1926 pour ce qui
est de la participation de la France. Le 20 juillet 1921, l'armée espagnole fait face aux
rebelles, et elle va être défaite à Anoual. C'est le départ du projet de
Mohamed Abdelkrim El Khattabi, dit Abd el-Krim. Les Rifains,
organisĂ©s dans une armĂ©e de libĂ©ration du monde musulman, s'attaquent Ă
l'Espagne et à la France. En décembre 1924, le Tercio commandé par le général
Franco couvre la retraite de Xauen. L'Espagne cherche
à négocier un accord avec Abdelkrim. Ceci déclenchera une insurrection générale
en Yebala et en Gomara.
Abdelkrim attaque alors par surprise la zone française. Cela entraîne
immédiatement une alliance de l'Espagne avec la France. En septembre 1925, la
flotte française soutient le débarquement espagnol d'Al Hoceima, première
opération amphibie aéronavale de l'Histoire. Le maréchal Lyautey, résident
général au Maroc depuis 1912, obtient des victoires, mais il est remplacé par
le général Pétain. L'aide de camp de Pétain, Charles de Gaulle, lui reproche
d'avoir accepté de lui succéder et rompt avec lui. Abdelkrim se rendra à la
France pour empêcher l’extension de la guerre chimique et le massacre de tout
un peuple par les colons. Lors de ce conflit, du gaz moutarde a été largué par avions
en 1924, un an avant la signature du protocole de Genève « concernant la
prohibition d'emploi Ă la guerre de gaz asphyxiants, toxiques ou similaires et
de moyens bactériologiques ». Abd el-Krim fut envoyé en exil à l'île de la Réunion en 1926, d'où
il s'évada 20 ans plus tard pour fuir en Égypte, où il mourut en 1963 Entre 1909 et 1926, le développement du conflit colonial
connu sous le nom de Guerre du Rif occupa en Espagne toute l'attention et les
efforts de « l'africanisme gouvernemental », mais il eut comme opposant les
formations ouvrières et républicaines, un secteur de l'armée et une bonne
partie de l'opinion publique, qui après s'être déclarée interventionniste en
1860, avait commencé à changer d'attitude avec l'incident de Melilla en 1893.
La prolongation de la campagne du Maroc n'a pas seulement compromis l'image de
l'Espagne en tant que puissance administratrice du territoire, et conditionné
profondément sa politique intérieure (« La Semaine Tragique » de 1909,
épuration après le désastre de Annual en 1921) mais
elle réactiva également l'image littéraire et populaire du Marocain en tant
qu'ennemi barbare et cruel (sauf pour les indépendantistes galiciens, catalans
et basques qui furent solidaires avec le Rif en tant que « nationalité opprimée
»), parallèlement à un questionnement de plus en plus prononcé et généralisé
sur l'engagement colonial espagnol Dans les positions de Sabino Arana vis-à -vis du problème colonial nous trouvons des
arguments qui seront développés par les partis de gauche, tels que l'incapacité
de l'Espagne à apporter les bénéfices de la "civilisation" étant
donné son bas niveau de développement économique et culturel ; ou la manière de
juger le problème en tant qu'affaire espagnole ne touchant le Pays Basque que
dans la mesure oĂą celui-ci subissait Ă son tour l'oppression de l'Etat
espagnol. Nous retrouverons ce mĂŞme argument dans certains secteurs du
nationalisme basque qui combattirent violemment la guerre menée par l'Espagne
contre Ibn Abd-el-Krim El-Khattabi. [...] Quoique très marquée par la pensée de son fondateur, la
position du nationalisme basque face à la question coloniale a traversé
différentes phases. Dans les années 1910-1912, Luis de Elizalde, professeur de
mathématiques au lycée de Vitoria (chef-lieu de la province basque d'Alava),
joua un rĂ´le important dans la politisation du mouvement nationaliste basque,
en Ă©tablissant des comparaisons entre le mouvement nationaliste basque et celui
d'autres nationalités opprimées. Elizalde participa au Congrès des nationalités
européennes qui eut lieu à Lausanne en 1916. Il écrivit quelques ouvrages dont
le sujet central Ă©tait le colonialisme. Dans son livre Palses
y razas (Pays et races), il revendiquait le droit des
peuples à l'indépendance. Il développa abondamment la question des peuples opprimés
par l'Empire austro-hongrois, son but Ă©tant celui d'Ă©duquer la jeunesse dans un
nouvel esprit où le nationalisme parviendrait à déborder son cadre local. Après
la première guerre mondiale, les idées d'Elizalde commencèrent à avoir une
audience plus large . La revendication basque prit une
dimension plus universelle, où le problème apparaît lié à celui du colonialisme
et à celui d'autres nationalités opprimées. Le Parti Nationaliste Basque subit
une scission dans les années 20, en raison des divergences survenues au sein de
la direction. Le groupe le plus modéré, le plus conservateur, modifia le nom
original de Parti Nationaliste Basque, le remplaçant par celui de "Comuniôn Nacionalista Vasca". D'autre part, les partisans de la tendance d'Arana y Goiri et du Parti
Nationaliste Basque rétablirent ce nom tout en constituant un groupe à part. A
la tĂŞte de cette scission se trouvait Luis de Arana y
Goiri, frère du fondateur du Parti Nationaliste
Basque, et Elias de Gallâstegui, qui estimaient que
la ComuniĂ´n Nacionalista Vasca s'acheminait dangereusement vers des positions collaborationistes avec le gouvernement de Madrid. L'organe
des scissionistes fut le journal Aberri
(Patrie) , fondé en mai 1923 et dont la publication
alla jusqu'au 23 septembre de la même année, date à laquelle il fut frappé d'interdiction
par la dictature du général Primo de Rivera. La Comuniôn
Nacionalista Vasca et le
Parti Nationaliste Basque sont restés séparés pendant sept ans, jusqu'à 1930 ;
les deux organisations fusionnèrent alors sous le nom de Parti Nationaliste Basque . Afin d'Ă©viter toute confusion, nous tenons Ă
préciser que ce fut le Parti Nationaliste Basque du groupe Aberri
qui mena une vigoureuse campagne contre la guerre du Maroc, alors que le
journal Euzkadi qui Ă©tait en 1923 l'organe de la ComuniĂ´n Nacionalista Vasca, se limita Ă manifester son opposition Ă la guerre et
à condamner les opérations militaires, mais ses critiques étaient plutôt faites
en termes de responsabilités politiques, sans jamais aller jusqu'à s'ériger en
défenseur de l'indépendance du Rif comme ce fut le cas pour le groupe Aberri |