Chypriotes et Turcs

Chypriotes et Turcs

 

VI, 75

 

1980-1981

 

Le grand pilot par Roy sera mandé,

Laisser la classe pour plus haut lieu attaindre,

Sept ans après sera contrebandé,

Barbare armée viendra venise craindre.

 

"Pilot"

 

"Pilot" (provençal) : "Un pilot qu'a lou vent en poupo", qui conduit un navire (Frédéric Mistral, Lou tresor dóu Felibrige, ou, Dictionnaire provençal-français: embrassant les divers dialectes de la langue d'oc moderne, Tome 2, 1878 - www.google.fr/books/edition).

 

On retrouve en anglais "Grand Pilot" titrant Richard Chancellor mort dans un naufrage en novembre 1556 (Augustin LĂ©ger, Notes sur Hakluyt, Revue de l'enseignement des langues vivantes, Volume 30, 1913 - www.google.fr/books/edition).

 

Galceran Suarez

 

Parmi tous ces nobles qui avaient quitté l'Espagne pour chercher des honneurs à Chypre, il y en eut un qui joua un rôle de premier ordre sous les règnes de Janus Ier, de Jean II et de la reine Charlotte. Ce fut un Catalans, Galcerán Suárez, qui rendit de grands services au roi Janus pendant la bataille de Chiérokitia et la captivité d'Egypte, et que le roi Alfonse considérait comme un des dignitaires de Chypre sur lequel il pouvait compter dans ses calculs politiques. En récompense des services rendus pendant la guerre avec le Soudan, Janus Ier lui accorda la main d'une de ses filles bâtardes et le nomma amiral de Chypre. Malgré ses attaches avec le royaume de Chypre, Galcerán Suárez, avait combattu sous les ordres d'Alfonse V en 1432, lors de son expédition contre l'île de Djerba. A ce moment, il faisait partie du conseil de régence institué à institué à Chypre après la mort du roi Janus (29 juin 1432) et portait à côté du titre d'amiral, celui de seigneur de Césarée. En 1445, le roi Alfonse voulait le convaincre de quitter le royaume des Lusignan pour venir le servir à Naples. Mais Jean II se garda bien de se priver des services d'un homme qui avait donné tant de preuves de dévouement à la dynastie et avec lequel il était même apparenté. Le Catalan parvint pendant les dernières années du règne du roi Jean à la dignité de connétable du royaume et quelques années plus tard, il devint sénéchal et gouverneur de Chypre; c'était la récompense de la fidélité montrée à la reine Charlotte qu'il fut le premier à reconnaître à comme héritière du trône, après la mort de son père (26 juillet 1458). Ce Catalan apparenté à la dynastie des Lusignan, dut être sous les rois Janus et Jean II un des représentants les plus utiles de la politique d'Alfonse V dans le bassin oriental de la Méditerranée.

 

Jean II de Lusignan (1432-1458) fut un roi très faible qui se laissa gouverner toute sa vie, d'abord par le conseil institué à la mort de son père, et plus tard par sa seconde femme, la reine Hélène. comme aucun souverain d'Occident ne voulait faire de Jean II son gendre , après ce triste événement, il se vit obligé d'épouser en 1442 une orthodoxe, Hélène, fille de Théodore Paléologue, despote de Morée, femme extrêmement énergique, qui resta le véritable souverain de Chypre jusqu'à sa mort, survenue en 1458. L'île redevenait sous son règne une sorte de royaume d'aspect byzantin (Constantin Marinescu, La politique orientale d'Alfonse V d'Aragon, roi de Naples (1416-1458), 1994 - www.google.fr/books/edition).

 

Charlotte de Lusignan, née le 28 juin 1444 à Nicosie et morte le 16 juillet 1487 à Rome, est une princesse issue de la Maison de Lusignan, reine de Chypre (1458-1460). Elle devient reine de Chypre à la mort de son père (sacrée à Nicosie), mais son demi-frère bâtard Jacques l'Archevêque, ecclésiastique, ayant mis dans ses intérêts le sultan d'Égypte, a également des vues sur le trône. Son frère prend la fuite en 1459 et se réfugie à la cour d'Al-Achraf Sayf ad-Dîn Inal al-Ala’i, sultan mamelouk d'Égypte. Elle se marie en secondes noces, en 1459, avec son cousin germain Louis de Savoie, dit de Genève (1436-1482), comte apanagé de Genève. Pendant ce temps Jacques l'Archevêque intrigue à la cour du sultan. Il débarque en septembre 1460 à la tête d'un détachement mamelouk, et prend rapidement le contrôle de l'île. La reine et les barons loyalistes se retirent dans la forteresse de Cérines (Kyrenia), qui n'est prise que trois années plus tard, en septembre 1463. Charlotte part alors en Occident. En 1485, elle cède tous ses droits sur Chypre et Jérusalem à son neveu Charles Ier de Savoie et meurt à Rome le 16 juillet 1487. Elle est enterrée au Vatican, dans la crypte de la basilique Saint-Pierre. Elle n'a aucun enfant de ses deux mariages (fr.wikipedia.org - Charlotte de Lusignan).

 

Lorsque Louis de Savoie débarqua en Chypre, à l'automne de 1459, Charlotte avait déjà été proclamée reine depuis près d'un an par le connétable Calceran Suarez, et couronnée le 15 octobre 1458. Mais Jean Il avait dans sa dernière année de règne fait preuve de sa confiance dans son fils illégitime auquel il aurait laissé ses pouvoirs, aussi Calceran se brouilla-t-il bientôt avec ce dernier et s'éloigna de la cour (L'art gothique en Chypre, 2006 - www.google.fr/books/edition).

 

Le parti de la reine Charlotte fut servi principalement par un autre Catalan (?), un des plus redoutables corsaires de son temps, Suero (Assuérus) de de Nava. Employé d'abord dans une des flottes que le roi Alfonse V envoya dans le Levant à la fin de 1450 il entra au service de la reine Charlotte, devint le commandant du château de Cérines assiégé par Jacques II et finit par le rendre au Bâtard qui lui accorda la main d'une de ses filles illégitimes et le titre de connétable. Il répétait, comme on le voit, la carrière de Galcerán Suárez, à peu de différence près (Constantin Marinescu, La politique orientale d'Alfonse V d'Aragon, roi de Naples (1416-1458), 1994 - www.google.fr/books/edition).

 

Guerre entre venise et les Ottomans

 

Selon l'historien grec Critobule d'Imbros, les hostilitĂ©s Ă©clatent Ă  la suite de la fuite d'un esclave albanais appartenant au commandant ottoman d'Athènes vers la forteresse vĂ©nitienne de Coron (aujourd'hui Koroni) avec 100000 aspres provenant du trĂ©sor de son maĂ®tre. Le fugitif se convertit au christianisme et les autoritĂ©s vĂ©nitiennes rejettent les demandes de restitution des Ottomans. Sous ce prĂ©texte, en novembre 1462, Turahanoglu Ă–mer Bey, le commandant ottoman de la Grèce centrale, attaque et rĂ©ussit presque Ă  prendre la forteresse vĂ©nitienne de LĂ©pante, Ă  haute valeur stratĂ©gique. Le 3 avril 1463, le gouverneur de la MorĂ©e, Isa-Beg Ishakovic, s'empare par trahison de la ville d'Argos, tenue par les VĂ©nitiens. Bien que Venise, qui dĂ©pend du commerce avec les Ottomans, ait par le passĂ© Ă©tĂ© rĂ©ticente Ă  les affronter en guerre, les exhortations du lĂ©gat du pape, le cardinal Bessarion, et un discours passionnĂ© de Vettore Cappello, membre du Conseil des Dix, font pencher la balance du cĂ´tĂ© de la guerre et le 28 juillet, le SĂ©nat vote de justesse la dĂ©claration de guerre Ă  la Sublime Porte. Le pape Pie II profite de cette occasion pour lancer une nouvelle croisade contre les Ottomans : le 12 septembre 1463, Venise et le roi de Hongrie Matthias Corvin signent une alliance, suivie le 19 octobre d'une alliance avec le pape et le duc Philippe le Bon de Bourgogne.

 

La nouvelle alliance lance une double offensive contre les Ottomans : une armĂ©e vĂ©nitienne, sous les ordres du Capitano Generale da Mar Alvise Loredan, dĂ©barque en MorĂ©e, tandis que Matthias Corvin envahit la Bosnie. Au mĂŞme moment, Pie II commence Ă  rassembler une armĂ©e Ă  AncĂ´ne, espĂ©rant la diriger en personne. DĂ©but aoĂ»t, les VĂ©nitiens reprennent Argos et refortifient l'isthme de Corinthe, en restaurant le mur de l'Hexamilion et en l'Ă©quipant de nombreux canons.

 

Après des débuts prometteurs, cette guerre qui a lieu peu de temps après la chute de Constantinople entraîne la perte de plusieurs possessions vénitiennes en Albanie et en Grèce, notamment l'île de Négrepont (ou Eubée), qui avait été un protectorat vénitien pendant des siècles.

 

Le traité de Constantinople qui met fin à la guerre est signé le 25 janvier 1479. Le traité prévoit la remise aux Ottomans de Shkodër et de Lemnos, ainsi que les territoires conquis pendant la guerre; les Ottomans conservent leurs conquêtes de Négrepont, Argos et Croie. Venise n'a plus que les forts de Navarin, Modon, Coron, Monemvasia et Lépante. La République doit en outre payer la somme de 100000 ducats pour régler les dettes de ses négociants et 10000 ducats pour le commerce en mer Noire. Ce traité consacre l'expansion ottomane dans les Balkans, au détriment de la Sérénissime (fr.wikipedia.org - Guerre vénéto-ottomane (1463-1479)).

 

Acrostiche : LLSB

 

Elisabe ou Hellisabe pour Isabelle qui est une variante d'Elisabeth (Aelius Antonius de Lebrixa, Rerum A Fernando Et Elisabe Hispaniarum, 1550 - www.google.fr/books/edition, Catalogue de la bibliothèque de feu m. Le Marquis De Morante, Tome 1, 1872 - www.google.fr/books/edition).

 

Philippe le Bon et Isabelle de Portugal ont choisi l'épouse de Jean de Coïmbre dans la dynastie française des Lusignan qui régnait sur le royaume de Chypre, après l'échec d'un projet de mariage entre Charlotte de Lusignan, fille de Jean II, et un frère d'Alphonse V de Portugal. Le duc de Bourgogne était favorable à un tel type d'alliance. En février 1434, il avait assisté à Chambéry aux noces de son cousin Louis de Savoie (fils de Marie de Bourgogne et d'Amédée VIII), avec la soeur de Jean II, Anne. Depuis, ses projets de croisade se sont précisés et il voit les avantages qu'il pourrait retirer d'une présence à la fois bourguignonne et portugaise à Chypre. Charlotte étant la seule héritière de Jean II, son mari était appelé à devenir roi. Quant à Isabelle, elle ne pouvait que travailler à une alliance qui donnerait un royaume à son neveu. Les négociations furent menées rapidement au cours de l'année 1455. Les ambassadeurs de Jean II et de Philippe le Bon se rencontrèrent à Venise et le roi de Portugal Alphonse V donna son accord au projet. Isabelle de Portugal offrit à Jean une chambre a personnaiges et six autres grans tappis ausi a personnaiges pour tendre en une salle, ensamble autres parties de bancquiers, de napes et de serviettes, montant à la somme de 900 £ 14 s 40 gr (Monique Somme, Isabelle de Portugal Duchesse de Bourgogne: Une femme au pouvoir au XVe siècle, 1998 - www.google.fr/books/edition).

 

Jean de Portugal, né en 1431, mort le 11 septembre 1457, connu aussi par Jean de Coimbra, fils de Pierre de Portugal (1392-1449), 1er duc de Coimbra, et d'Isabelle d'Urgell, infante d'Aragon (1409-1443), petit-fils de Jean Ier de Portugal, de Philippa de Lancastre, de Jacques II, comte d'Urgell et d'Isabelle d'Aragon. Il épousa en 1456 Charlotte de Lusignan, fille et héritière de Jean II roi de Chypre et d'Hélène Paléologue et reçoit à cette occasion le titre de «Prince d'Antioche». Il meurt empoisonné le 11 septembre 1457, et des rumeurs accusèrent Hélène, épouse de Jean II roi de Chypre, du meurtre (fr.wikipedia.org - Jean de Coimbra).

 

Typologie

 

Le report de 1981 sur la date pivot 1458 donne 935.

 

En 647 puis surtout en 688, les Arabes dĂ©barquent Ă  Chypre : l'empereur Justinien II et le calife Abd al-Malik signent un accord sans prĂ©cĂ©dent. Pendant les 300 annĂ©es suivantes, Chypre fut dirigĂ©e conjointement par les Arabes (sur le plan politique, fiscal et militaire) et par les Byzantins (sur les plans religieux et administratif), malgrĂ© les luttes constantes entre les deux parties sur le continent. Le traitĂ© prĂ©voyait notamment le partage des revenus entre l'Empire byzantin et l'Empire omeyyade. Pour Ă©viter que ce dernier ne s'enrichisse, Justinien II ordonne en 692 la dĂ©portation des Chypriotes Ă  Cyzique, dans la ville nouvelle de Neajustianopolis. Les Chypriotes retournèrent Ă  Chypre en 699. La pĂ©riode de co-dominion dura jusqu'en 965, quand l'empereur byzantin NicĂ©phore Phocas reconquit l'Ă®le (fr.wikipedia.org - Histoire de Chypre).

 

Chypre après 1974

 

Rauf Raif Denktash, né le 27 janvier 1924 à Paphos et mort le 13 janvier 2012 à Nicosie, est un homme d'État nord-chypriote. Il exerce la fonction de procureur à la cour de Nicosie dans les années 1950. Il se rapproche en même temps de Fazal Küçük, leader de la défense des droits de la minorité turque de l'île et participe à la création du Türk Mudafa Teskilat. Il est vice-président de la République de Chypre du 18 février 1973 au 15 juillet 1974.

 

Le 15 juillet 1974, la garde nationale dirigée par des officiers grecs acquis aux colonels lance une tentative de coup d'État contre le président Makarios avec l'aide du groupe armé de l'EOKA B (branche armée et dissidente du mouvement «EOKA» qui souhaitait réaliser l'Enosis par des voies politiques). Le 20 juillet, la Turquie intervient militairement arguant la protection des intérêts de la minorité turque, en lançant l'opération Attila, et occupe le nord de l'île en deux jours (s'assurant le contrôle de 38 % du territoire). En Grèce, le refus de l'armée de s'impliquer davantage dans ce conflit provoque la chute de la dictature des colonels. Malgré la restauration de la république chypriote, la Turquie refuse de se retirer et impose la partition du pays de part et d'autre de la «ligne verte» (appelée «ligne Attila» par les Turcs). 200000 Chypriotes grecs sont contraints à l'exode entre 1974 et 1975, chassés du territoire occupé par la Turquie; les Chypriotes turcs sont forcés de s'installer au nord en 1975 à la demande de leur chef Rauf Denktash, lors de pourparlers à Vienne (Autriche). Le 13 février 1975, se met en place l'«État fédéré turc de Chypre» qui n'est reconnu que par la Turquie (fr.wikipedia.org - Chypre (pays)).

 

Cf. VI, 53 - Tensions à Chypre et en Tunisie, pour l'année 1964 et V, 35 lorsque Chypre passe sous le protectorat de la Grande Bretagne en 1878.

 

Denktash, dès 1978, doit faire le voyage d'Ankara avec son Premier ministre pour demander des fonds. En 1980-?1981, cette aide représente un tiers du budget; il faut y ajouter l'aide apportée dite «au développement», non comptabilisée dans le budget, notamment pour le financement d'infrastructures et d'équipements publics ou de l'aéroport. [...] L'arrivée au pouvoir en Grèce d'Andréas Papandréou, en octobre 1981, conduit les Chypriotes grecs à une attitude plus dure, car le nouveau Premier ministre grec déclare que «Chypre est un cas d'occupation étrangère [et] un enjeu national vital pour la Grèce, qui a le droit légal et un devoir d'aider la lutte du peuple chypriote». Cette intransigeance encourage les Chypriotes turcs à soutenir Rauf Denktash qui accueille très mal la résolution 37/253 de l'Assemblée des Nations Unies, en mai 1983, car, entre autres points, elle approuve les affirmations du gouvernement chypriote sur sa souveraineté légale sur l'île entière et condamne la distribution de titres de propriété aux occupants des biens des réfugiés et et les actions unilatérales. En Turquie, le régime militaire est menacé et Rauf Denkta?, jugeant plus sûr de s'appuyer sur lui, hâte la réalisation de son objectif d'indépendance (Alexandre Lapierre, Chypre : les espoirs du rapprochement communautaire, 2018 - www.google.fr/books/edition).

 

En 1983, est créée la «République turque de Chypre du nord». L'ONU désapprouve cette occupation dans sa résolution 541 du 18 novembre 1983. Denktash fonde le 1er octobre 1975 le Parti de l'unité nationale. Il a été le dirigeant de la République turque de Chypre nord autoproclamée du 20 juin 1976 au 17 avril 2005, État reconnu uniquement par la Turquie qui a fait sécession de la République de Chypre. Le 17 avril 2005, les électeurs chypriotes turcs élisent Mehmet Ali Talat pour lui succéder au terme de quatre mandats de cinq ans (fr.wikipedia.org - Chypre (pays)).

 

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