Les derniers rois de Rome VIII, 17 2042-2043 Les bien aisez subit seront desmis, Par les trois freres le monde mis en trouble
: Cité marine saisiront ennemis, Faim, feu, sang, peste, & de tous maux
le double. "bien aisez" On sait peu de choses certaines sur cette période où il y
a peu de documents écrits. L'Italie, vers le milieu du VIIIe siècle, est
majoritairement occupée par des peuples pré-indo-européens et indo-européens de
civilisation archaïque, pré-civique. S'en distinguent deux populations qui,
elles, ont atteint le stade de la cité : les Grecs, présents dans toute
l'Italie du sud et en Sicile ; les Étrusques, qui occupent le territoire
de la Toscane actuelle et différents points côtiers. Des Phéniciens sont également
présents en Italie comme commerçants voyageurs ou dans des comptoirs
permanents. Il résulte de la recherche archéologique et historique actuelle que
la création de Rome, en tant que cité, serait le fruit de l'influence de ces
civilisations plus «avancées», et plus précisément d'une colonisation étrusque.
Sur le site de Rome, Ã l'origine, il existe des villages de huttes sur les
sommets de chacune des sept collines. Vers le milieu du VIIIe siècle, ils se
regroupent, formant une collectivité qu'on pourrait dire de type homérique,
avec un roi, un conseil de chefs de famille, une assemblée populaire. Ce roi a
un caractère sacré : il a seul le droit de prendre les auspices, rite
nécessaire avant toute décision publique. Quand le roi meurt ou est chassé, les
auspices reviennent au conseil (le futur Sénat). La société est dominée par
l'aristocratie des chefs de famille ou gentes, qui choisissent le roi. Les
gentes sont réparties en trois tribus, chacune de celles-ci comportant à son
tour dix curies, dont le rassemblement forme l'assemblée populaire, les comices
curiates. La justice, le culte, se situent encore largement dans le cadre
gentilice. Cette royauté sacrée dure environ un siècle et demi. A la fin du
VIIe siècle, les Étrusques, déjà installés en Campanie, occupent le Latium et
s'intéressent particulièrement au site de Rome, favorable au commerce et aux
échanges, avec son «île tibérine» qui permet la traversée aisée du fleuve C'est
sous l'influence de ces envahisseurs que survient une transformation sociale
radicale, et même à bien des égards révolutionnaire : on voit émerger une
Cité à la mode grecque ou étrusque. L'archéologie montre que l'assèchement des
marais, l'ouverture d'une place centrale ou forum, le pavage de la ville, l'érection de remparts,
l'édification de constructions civiles et religieuses en pierre, la création
d'un marché et d'un port fluvial, le tracé du pomerium (enceinte sacrée
délimitant un intérieur où l'armée n'a pas le droit de pénétrer) datent de
cette époque. Or c'est précisément en
ces décennies que l'annalistique (première forme de littérature historique)
romaine situe le règne de trois rois étrusques, Tarquin l'Ancien, Servius
Tullius et Tarquin le Superbe. L'origine des Etrusques est, aujourd'hui encore, inconnue
; peut-être s'agit-il d'une population orientale, mais peut-être aussi d'une
population autochtone qui aurait évolué, notamment sous l'influence des Grecs
(de Marseille ?) et des Phéniciens. C'est à eux qu'est due la mise en place des institutions
sociales caractéristiques de la Cité, analogues à bien des égards aux
institutions civiques grecques à peine antérieures (celles de Solon et des Pisistratides).
Une réforme agraire est accomplie. Le peuple est divisé en tribus
territoriales, remplaçant les anciennes tribus et curies ethniques (il y a
désormais quatre tribus «urbaines» et dix tribus «rustiques»). L'armée, à la
suite d'une mutation technique minorant le rôle guerrier de l'aristocratie
(comparable, donc, à la «révolution hoplitique» grecque), est réorganisée de
manière à faire contribuer chaque citoyen à l'effort de guerre en fonction de
ses moyens financiers. Les hommes sont répartis en classes censitaires. Chaque
classe comporte un certain nombre de centuries. Sur cette base est créée une
seconde assemblée populaire, les comices centuriates : la fortune et le
rôle militaire déterminent désormais le rôle politique. Ce système permet d'intégrer
les nombreux nouveaux habitants que compte Rome (qui est, Ã la fin du VIe
siècle, à la suite de l'impulsion économique apportée par l'influence étrusque,
une grande ville, de quelque 100000 habitants, qui attire les populations
avoisinantes). Ces nouveaux venus, n'appartenant pas aux gentes d'origine, sont
intégrés à la faveur d'une définition plus abstraite de la citoyenneté. Il
s'agit donc, on le voit, d'un processus assez analogue aux réformes de Solon Ã
Athènes. Les Étrusques les avaient probablement empruntées à la Grande-Grèce. On
a même supposé une influence grecque directe : des légendes affirment que
Servius Tullius était un Corinthien. Rome, en d'autres termes, bénéficie d'une
innovation faite ailleurs et d'une formule toute prête, qui lui font économiser
une longue évolution autochtone. Le
caractère révolutionnaire de ce changement se marque par le recul de
l'aristocratie. Le roi de l'époque étrusque est un allié du nouveau populus
contre le Sénat, selon le modèle grec de la tyrannie. La réforme agraire s'est
faite contre les vieilles familles, la définition de la citoyenneté par les
nouvelles tribus territoriales et le rôle militaire des fantassins vient
détruire l'organisation ethnique-gentilice, donc miner le pouvoir du Sénat composé
des chefs de gentes. Les nouveaux maîtres bouleversent d'ailleurs le
recrutement du Sénat et suppriment certains de ses privilèges comme
l'interrègne. L'accent mis sur le marché, sur le port fluvial, sur les liens
économiques avec l'Étrurie, marque aussi le rôle nouveau des négociants.
Les grands travaux urbains donnent du travail aux artisans (là encore, ce sont
des traits qui rappellent la politique des Pisistratides). Le pouvoir du maître
étrusque est absolu. Les Étrusques ont apporté la notion d'imperium, pouvoir de
commandement civil et militaire, symbolisé par les licteurs portant des faisceaux
(un faisceau est une double hache entourée de verges), pratique et symbolisme
étrusques. [...] Le roi exerce cet imperium sur tout le peuple, sans la
médiation du Sénat ; il peut donc l'exercer en faveur du peuple et au
détriment de l'aristocratie. On comprend que celle-ci se révolte : c'est
l'origine de la République, traditionnellement datée de 509. La légende romaine
a présenté cet événement comme le triomphe de la liberté contre la tyrannie des
derniers rois. Ceux-ci étant étrangers, leur expulsion constitue, en effet, une
libération nationale. Mais, d'un point
de vue social et politique, la «mise en république» est plutôt une prise, ou
une récupération, du pouvoir par l'aristocratie, et un recul du populus. Celui-ci,
en conséquence, va entamer une longue guerre contre les patriciens. Cette lutte
va dominer la première partie de l'histoire de la République. Un équilibre ne
sera établi qu'un siècle et demi plus tard avec les lois liciniennes (Philippe
Nemo, Histoire des idées politiques dans l'Antiquité et au Moyen Âge, 1998 -
books.google.fr, fr.wikipedia.org
- Servius Tullius). Cf. quatrains II, 17 ; V, 66 et IX, 9 pour servius
Tullius et le quatrain précédent VIII, 16 pour la Fesulan/Faesula/Fiésole
étrusque. "les trois
frères" La notice de
Varron faisant état de l'appartenance aux Mystères de Samothrace d'un dieu
Casmillus mentionné par Callimaque, mérite de retenir l'attention, car la
présence d'un dieu "Kasmilos" aux côtés des divinités de Samothrace
est attestée très anciennement. Les premiers témoignages littéraires traitant
des «Grands Dieux» des Mystères de Samothrace, les Cabires, remontent au Ve
siècle av. J.-C, mais on est en droit de penser que ces divinités furent
connues des Grecs bien plus tôt, vraisemblablement dès la fin de la période
archaïque 120. Hérodote en fait mention par deux fois (II, 51 et III, 37). Un
texte dont la source date du Ve siècle fait état d'un "Kamillos" en
relation avec les Cabires : un
passage conservé du logographe Akusilaos d'Argos qui vécut dans la première moitié
du Ve siècle av. J.-C. affirme que "Kamillos" est le fils de Cabeiro
et d'Héphaistos, et eut pour descendance les trois Cabires et les trois nymphes
Cabirides. Dans une scholie à Apollonios de Rhodes, selon Dionysodoros, un
Béotien qui écrivit vers le milieu du IVe siècle av. J.-C,
"Kasmilos", la divinité ajoutée en quatrième position au groupe des
Cabires de Samothrace était Hermès. A Samothrace ce dieu "Kasmilos"
avait conservé une place indépendante, en marge des Megaloi Theoi dont il
faisait figure de serviteur, dans le rôle d'échanson - d'"oinochoos",
ou de messager divin, fonction propre à Hermès, avec qui Dionysodoros
l'identifiait (Bernard
Combet-Farnoux, Mercure romain. Le culte public de Mercure et la fonction
mercantile à Rome de la république archaïque à l'époque augustéenne. Rome :
Ecole française de Rome, 1980 - www.persee.fr). Les trois Cabires sont des frères à Lemnos, ils sont
identifiés aux Dioscures ou aux Anaces que Cicéron nommait Tritopatreus,
Eubuleus et Dionysius, nés à Athènes de Jupiter premier et de Proserpine (Bernard
de Montfaucon, Supplément au livre de l'Antiquité expliquée et représentée en
figures, Tome 1, 1724 - books.google.fr). Selon toute apparence, c'est sur les miroirs que nous
devons trouver l'image de la triade cabirique. M. Gerhard la rencontre sur
plusieurs monuments de ce genre représentant trois jeunes gens nus et coiffés
du bonnet des Dioscures, tantot debout, tantôt assis (Etruskische Spiegel, T.
LV, no 1, 7), et quelquefois ayant au-dessus de leur tête l'étoile des
Tyndarides (Ibid., T. LVI, nos 2, 3), communauté d'attributs qui n'a rien de
surprenant, quand on songe que la confusion des Cabires avec les Dioscures
devait se retrouver dans le domaine de l'art. Un miroir trouvé dans un sépulcre
à Chiusi, en 1826, et publié par Micali (Storia degli antichi popoli ilaliani ,
t. III, p. 80, tavol. XLVIII; F. Gerhard, Etruskische Spiegel, Tafel LVI, n° 2)
a le mérite de reproduire une des scènes les plus mystérieuses des orgies de
Samothrace. Nous voulons parler du
meurtre commis par les Cabires sur leur troisième frère. Nus et la tête
ceinte d'une bandelette, Kasutru (Castor) et Paltuce (Pollux) étreignent leur
frère Kaluchasu. Cette lutte, car c'est bien une lutte, ce que Micali n'a pas
saisi, se passe en présence de Minerve, tandis que la Vénus étrusque, Turan, placée
à la droite des trois frères, ouvre une ciste ou coffret. Micali a
judicieusement conclu que cette dernière particularité se rattachait à la
tradition hiératique des Cabires, déposant le membre viril de leur victime dans
une ciste qu'ils portèrent ensuite chez les Tyrrhènes. Dans cette hypothèse, et
c'est ce que l'antiquaire italien n'exprime pas clairement, Vénus serait
représentée sur le miroir attendant le meurtre et la mutilation sanglante qui
doit en être la suite ‘(Georg
Friedrich Creuzer, Religions de l'antiquité considérées principalement dans
leurs formes symboliques et mythologiques, Tome 2, 1849 - books.google.fr). Mercure et les
Cabires Le culte de
Mercure avait une autre portée, il correspondait à une autre activité que les
formes traditionnelles de la richesse issues de la production agraire et
pastorale : Hermès adopté sous un nom d'allure romaine, appartenait au
ritus graecus qui visa toujours, en dépassant les différences civiques et
juridiques, à instituer un climat d'unanimité sociale, et de fraternité
religieuse, par la participation à ses cultes et à ses cérémonies de l'ensemble
de la population sur un pied d'égalité. Le culte de Mercure romain dès son
installation procédait de ce courant de renouvellement religieux, auquel le
dernier roi étrusque avait donné une source féconde en achetant selon la
tradition les Livres Sibyllins. La référence de
Varron à l'initiation de Tarquin l'Ancien, fils de Démarate de Corinthe,
indique que les Etrusques connaissaient les Grands Dieux et Hermès
"Kasmillos" dès le VIe siècle, au temps où Rome était entrée l'orbite
politique et culturelle des cités d'Etrurie méridionale. Le témoignage
fourni par cette notice issue des investigations de Varron sur les Mystères de
Samothrace est unique, cependant il mérite créance, car dans ce texte la
mention de Tarquin constitue le seul donné de fait, propre à insérer dans le
temps, en leur prêtant couleur d'authenticité, des développements théologiques
inspirés d'une pensée étrangère à l'époque archaïque. Dans le contexte de cette
notice, l'initiation de Tarquin l'Ancien aux Mystères de Samothrace fait figure
d'élément positif, au même titre que la fondation du sanctuaire capitolin, dont
le souvenir s'attachait au premier roi étrusque. La substance de la notice est faite de spéculations
étayées des ressources du symbolisme allégorique stoïcien sur l'assimilation
des Pénates entendus comme les Magni Dei, à la Triade Capitoline, et sur la
participation à ce groupement d'un Mercure, homologue de l'Hermès
"Logios". Le seul donné de fait qui confère unité aux éléments
disparates de cette interprétation théologique, en les intégrant au passé
romain archaïque, est la référence à Tarquin l'Ancien. De même que s'attachait
au premier souverain étrusque le souvenir de la fondation du sanctuaire de la
Triade Capitoline, une tradition dont Varron s'est fait l'écho en l'occurrence,
devait lui prêter des accointances avec les Mystères de Samothrace. Cette mention occasionnelle de l'initiation de Tarquin
l'Ancien nous apporte un indice sur l'antiquité de la diffusion en Italie
centrale du culte des Cabires de Samothrace, et l'ancienneté de la présence en
Etrurie de l'Hermès Camillus, en marge des Magni Dei, précisément dans le temps
qui précéda immédiatement la fondation à Rome en 495 av. J.-C. de l'aedes
Mercurii. Mercure par son effigie et ses attributs
caractéristiques, le pétase, les ailes et le caducée, apparaît bien comme la
transposition latine de l'Hermès hellénique. Cependant Rome en a doptant le
type iconographique du personnage divin d'Hermès n'a pas repris son nom grec,
et l'a désigné par un vocable apparenté avec une activité économique, mais sans
attaches avec la langue grecque. Le même personnage divin était Hermès en
Grand-Grèce et en Sicile, Turms en Etrurie, Mercurius à Rome, Mercus Ã
Faléries, Miriku en Campanie : dans le domaine italique, chez les Latins,
les Falisques et les Osques, l'appellation composée à partir de la racine merc-
implique les attaches du dieu avec la merx, c'est-Ã -dire avec la relation
mercantile. La relation étymologique, envisagée déjà par l'érudition
antique entre Mercurius et la merx, va beaucoup plus loin que l'interprétation
traditionnelle qui présente le dieu comme le protecteur bienveillant des
marchands. Certes Mercure veille sur les opérations de trafic, mercium
commerciorumque mutator, il préside à l'échange, mais convient-il de préciser,
à une forme particulière de l'échange, l'échange mercantile caractérisé par
l'intervention d'un intermédiaire bien individualisé, le mercator. Dans leur principe, achat et vente sont indépendants de
la merx; le propre de la mercatura, c'est la présence du mercator, agent de la
relation mercantile, qui met en contact les parties, prend en charge et
garantit le transfert des objets d'échange (Bernard
Combet-Farnoux, Mercure romain. Le culte public de Mercure et la fonction
mercantile à Rome de la république archaïque à l'époque augustéenne. Rome :
Ecole française de Rome, 1980 - www.persee.fr). "trouble" Mot issu apr. métathèse du -r du lat. pop. *turbulus (cf. le lat. turbulare > fr. troubler*, le roum. turbure et des formes dial. ital.), réfection du lat. turbidus «troublé, agité, bouleversé, désemparé», d'apr. turbulentus «agité, en désordre», «turbulent, remuant, facétieux» (www.cnrtl.fr). De turba (Gaffiot). TURBA qui, au sens propre, signifie «le désordre», exprime aussi dans un sens plus concret la notion d'une foule désordonnée et en révolte ; il s'applique aux Catiliniens chez Cicéron, à la factio forensis d'Ap. Claudius chez Tite-Live (Joseph Hellegouarc'h, Le vocabulaire latin des relations et des partis politiques sous la République, Tome 1, 1963 - books.google.fr). "peste" Institués l'année
même de la fondation de la république, en 509 avant Jésus-Christ, en l'honneur
des divinités infernales, Dis et Proserpine, pour implorer la fin d'une peste
terrible, les ludi saeculares avaient été, comme garantie solennelle de la
sécurité publique, répétés tous les siècles, bien qu'à une date plus ou moins
exacte, trois autres fois : en l'an 346, en l'an 249, en l'an 149 ou,
selon d'autres en l'an 146. Les cinquièmes jeux séculaires seraient donc tombés
vers l'an 49, c'est-à -dire à l'époque où commençait la guerre civile de César
et de Pompée (Guglielmo
Ferrero, Grandeur et décadence de Rome, Tome 5 : La république d'Auguste, 1907
- books.google.fr). "tous maux le
double" Quand la crainte de l'étranger vint à s'apaiser, quand la
guerre, sans être interrompue, pesa d'un poids moins lourd sur la république,
ce fut alors que le temps de la justice et de la modération atteignit son
terme, pour faire place à celui que Salluste décrit en ce peu de mots : «Les patriciens se mirent à traiter les gens
du peuple en esclaves, condamnant celui-ci à mort, et celui-là aux verges,
comme avaient fait les rois, chassant le petit propriétaire de son champ et
imposant à celui qui n'avait rien la plus dure tyrannie. Accablé de ces
vexations, écrasé surtout par l'usure, le bas peuple, sur qui des guerres
continuelles faisaient peser, avec le service militaire, les plus lourds
impôts, prit les armes et se retira sur le mont Sacré et sur l’Aventin; ce fut
ainsi qu'il obtint ses tribuns et d'autres prérogatives. Mais la lutte et les
discordes ne furent entièrement éteintes qu'à la seconde guerre Punique.» Mais à quoi bon arrêter mes lecteurs et m'arrêter
moi-même au détail de tant de maux ? Salluste ne nous a-t-il pas
appris en peu de paroles combien, durant cette longue suite d'années qui se
sont écoulées jusqu'à la seconde guerre punique, Rome a été malheureuse,
tourmentée au dehors par des guerres, agitée au dedans par des séditions ? Les
victoires qu'elle a remportées dans cet intervalle ne lui ont point donné de
joies solides; elles n'ont été que de vaines consolations pour ses infortunes,
et des amorces trompeuses à des esprits inquiets qu'elles engageaient de plus
en plus dans des malheurs inutiles (Livre II, Chap. XVII) (Saint
Augustin, La Cité de Dieu, Tome 1, 1855 - books.google.fr). "port...
ennemis" 511-510 av. J.-C. : guerre entre Sybaris et Crotone.
Sybaris déclare la guerre à Crotone qui refusait d’extrader les Sybarites,
partisans de l’oligarchie et chassé par les démocrates. Crotone, à la tête d’une ligue de cités, prend Sybaris et la détruit
jusqu’à modifier le cours du fleuve Crathis (actuel Crati) pour qu’il coule sur
les ruines. Sybaris était le seul port d’accès
des Étrusques vers l’Orient (marchandises de luxe de Milet) : la
destruction de la ville signifie pour eux un début d’asphyxie économique et une
aggravation des conflits avec les Grecs (fr.wikipedia.org
- Années 510 av. J.-C.). De toute façon, le fait peut être tenu pour
vraisemblable, car il s'accorde avec d'autres données de la tradition attestant
l'intérêt de la dynastie des Tarquins pour les nouveautés religieuses, et
l'ouverture de l'Etrurie aux influences ioniennes. Ainsi l'initiative de
l'achat des Livres Sibyllins est attribuée à un Tarquin, et une tradition
diffuse prêtait à l'Etrurie des contacts avec les croyances et les rites du
monde grec et égéen. A cet égard, les liens de l'Etrurie avec l'Ionie par l'intermédiaire
de Sybaris, et la curiosité pour l'enseignement pythagoricien qui se développa
en Grande-Grèce à la fin du VIe siècle et au Ve siècle, dans des cités
achéennes, telles Crotone, Sybaris, Métaponte, ont dû contribuer à la diffusion
du culte des Grands Dieux que la tradition associa à l'expérience et à la
science de Pythagore. La légende relative à sa formation rappelait que jeune
encore, au cours de ses voyages, il s'était fait initier à tous les mystères,
non seulement des Grecs, mais aussi des peuples barbares, et Jamblique dans sa «Vie de Pythagore»
énumérant les rites dont le philosophe avait été l'adepte, mentionne qu'il
avait été initié précisément aux mystères célébrés à Imbros, Samothrace et
Délos. La tradition conserve encore le souvenir de Tyrrhéniens
qui se mirent à l'école de Pythagore à Crotone. Dans la liste des premiers
Pythagoriciens, Jamblique qualifie un personnage, du nom de Nausithoos, comme
«Tyrrhénien». D'autre part, au nombre des disciples pythagoriciens de Sybaris
comptaient un certain "Tursènos", et une femme "Tursènis
Subaritis". A ce groupe appartenaient également un Eléate et des
Poseidoniates, originaires de deux cités grecques riveraines de la Mer
Tyrrhénienne, Velia et Poseidonia, au contact de la Campanie étrusque. Dès la seconde moitié du VIe siècle av. J.-C, compte tenu de leur expansion en Campanie, et des relations qui les unissaient aux cités achéennes de Grande-Grèce, les Etrusques étaient en mesure de connaître l'enseignement pythagoricien, aussi bien que les cultes à mystères en provenance du monde égéen, dans la science desquels Pythagore passait pour être versé. La qualification d'Hermès-Turms comme Camillus, c'est-à -dire ministre divin, en Etrurie, remonte donc à l'époque archaïque. Or compte tenu du rôle de l'Etrurie dans la genèse du processus mercantile à Rome, et dans l'introduction d'Hermès, cette qualification pose un problème. Turms l'Hermès étrusque était praeminister deorum, à Rome Hermès fut d'entrée de jeu Mercurius spécialisé dans la merx, c'est-à -dire dans la relation d'échange mercantile. Comment le ministerium divin attesté comme le propre de l'Hermès-Turms étrusque, a-t-il pu contribuer à faire choisir et retenir Hermès, sous le nom de Mercurius, à titre de divinité appelée à prendre en charge le mode d'échange mercantile ? Dans le ministerium de l'Hermès-Turms étrusque, quel élément préparait la vocation mercantile de l'Hermès-Mercurius romain ? La réponse à la question de déterminer les affinités éventuelles entre le ministerium et la merx, est à chercher dans la nature du processus mercantile, dans la spécificité de la relation d'échange mercantile (Bernard Combet-Farnoux, Mercure romain. Le culte public de Mercure et la fonction mercantile à Rome de la république archaïque à l'époque augustéenne. Rome : Ecole française de Rome, 1980 - www.persee.fr). Typologie Le report de 2043 sur la date -510 donne -3063. Date antédiluvienne : 20 ans avant le déluge et la
mort de Mathusalem mort à 969 ans (Lenglet
Du Fresnoy, Tablettes chronologiques de l'hist. univers., sacrée et proph.,
ecclésiast. et civile, depuis la création du monde, jusqu'à l'an 1762, 1763 -
books.google.fr). La date à laquelle
les érudits plaçaient la sibylle de Cumes importe peu, car la légende locale
pouvait tolérer les appréciations les plus extrêmes en faisant vivre la Sibylle
un millier d’années. La croyance à la longévité indéfinie des sibylles,
réduites par l'âge à n'être plus qu'une voix impalpable, remonte assez haut :
c'est la forme mythique de la pensée exprimée par Héraclite. Quand le
philosophe disait que «la Sibylle
traverse mille ans avec sa voix, par la grâce du dieu,» l'imagination
du vulgaire ne pouvait concevoir cette idée sous la forme abstraite et faisait
de cette voix un être vivant, dernier reste de la Sibylle usée par le temps.
Mais, nulle part, la Sibylle ne fit parler de son âge comme à Cumes. La
vieillesse de la sibylle de Cumes passa en proverbe. Ovide lui donne déjà sept
cents ans lors de la venue d'Énée en Italie, et lui prête la mélancolie d'une
femme qui se sent enlaidir. Pour d'autres, cette mélancolie se transforme en désir
de la mort. Un personnage de Pétrone raconte qu'il a vu, à Cumes, la Sibylle
suspendue dans un bocal et que, quand les enfants lui demandaient ce qu'elle
voulait, elle répondait : «Je veux mourir.» Cette vie de dix siècles
s'accommodait de tous les systèmes. On pouvait la faire toucher d'un côté à la
guerre de Troie et de l'autre au règne de Tarquin, à moins qu'on ne se laissât
aller, comme Ovide,  à en dater le début
de sept siècles avant la guerre de Troie. Le règne de Tarquin est un point fixe
dans la chronologie sibylline. C'est à cette époque, en effet, selon la
légende, que la sibylle de Cumes était venue à Rome pour offrir au roi Tarquin
– soit l'Ancien, soit le Superbe - les livres qui contenaient les destinées de
la ville éternelle. Il n'était pas sûr, comme le voulait la tradition italienne
dont Virgile s'est fait l'écho, qu'elle les eût écrits elle-même. Les Grecs
prétendaient que la sibylle de Cumes n'avait rien laissé par écrit, et cette
opinion donna à réfléchir aux Romains; car, lorsque leurs livres sibyllins
eurent été brûlés (83 av. J.-C.), c'est surtout en Ionie qu'ils cherchèrent les
éléments d'une collection nouvelle. Varron s'était décidé à croire que l'auteur
des livres sibyllins était la sibylle d'Érythræ. Mais, en admettant que celle de Cumes les avait apportés
à Tarquin, Varron s'aperçut qu'il était bien difficile de faire venir à Rome,
au VIe siècle, une femme déjà plusieurs fois centenaire au temps d'Énée. Il
distingua donc deux sibylles en Campanie; l'une, qu'il inscrivit au septième
rang sous le nom de «Cuméenne,» l'autre, beaucoup plus ancienne, qui figure au
quatrième rang avec l'épithète de «Cimmérienne.» Cette désignation n'était pas
nouvelle. Les anciens poètes et annalistes de Rome, Nævius, L. Piso Frugi, C.
Acilius Glabrio, Volcatius avaient appelé la sibylle de Campanie «Cimmérienne,»
sans prétendre la distinguer de celle de Cumes. Ils voulaient seulement montrer
qu'ils avaient lu Éphore et qu'ils savaient où trouver les Cimmériens de
l'Odyssée. Varron partage donc entre deux prophétesses les légendes de Cumes. A
la première, qu’Énée avait ensevelie dans l'ile de Prochyta, le nom de
Cimmérienne et les actes supposés antérieurs à l'arrivée des Troyens; Ã
l'autre, la sibylle de Cumes proprement dite, tout ce qui ne pouvait convenir Ã
la première. Virgile évita d'une manière beaucoup plus simple la difficulté si
laborieusement résolue par Varron : il fit sa sibylle de Cumes
contemporaine d'Enée, et lui attribua la rédaction des livres sibyllins, mais
il ne dit pas que la Sibylle dût jamais les apporter elle-même à Rome. Il
sauvait ainsi l'unité de la sibylle de Cumes, et flattait le patriotisme
italien en sacrifiant un détail qui n'avait plus d'intérêt depuis que, les
anciens livres sibyllins étant détruits, il n'était plus question d'en
apprécier l'authenticité. Il importait peu à l'autorité de la nouvelle
collection d'oracles qu'on pût dire au juste comment l'ancienne avait pénétré
dans les archives romaines (Auguste
Bouché-Leclercq, Histoire de la divination dans l'antiquité: Les sacerdoces
divinatoires. Devins, chresmologues, sibylles. Oracles des dieux, Tome 2, 1880
- books.google.fr). |