Duel à Rome VIII, 39 2058-2059 Qu'aura esté par prince Bizantin, Sera tollu par Prince de Tholouse, La foy de Foyx par le chef Tolentin, Luy faillira, ne refusant l'espouse. Le duel de
Mattecoulon, frère de Michel Montaigne François de Sourdis, auquel revient probablement la
responsabilité de ne pas avoir réussi à empêcher le duel de ses deux
subordonnés, commandait tous les officiers et les pages qui dépendaient de la
Grande Ecurie où il logeait avec ses domestiques qui portaient la livrée du
roi. […] Malheureusement, rien ne laissait prévoir le drame qui
allait arriver, tout ayant été fait en cachette : …hier, au logis de
Monsieur de Gourdille, chez Monsieur le Cardinal d'Este, le jeune Salligny de
Bourbonnais, naguère votre page, prit querelle avec un nommé Asparasac de
Languedoc, qui Ă©tait de votre Ecurie et de la suite dudit Sr. de Gourdil. Et ce
matin ledit Salligny ayant fait appeler ledit Asparasac ils ont combattu par
delà le Pont de Mole, ayant ledit Salligny pour second un nommé La Villate,
Limousin de la suite dudit Sr de Gourdil ; et ledit Asparasac ayant pour second
un nommé Matecoulon de Bordeaux. La fin de ce combat a été que ledit de
Salligny et La Villate ont été tués et Asparasac et Matecoulon ont pris le chemin
de France. (Lettre au roi de Paul de Foix, archevĂŞque de Toulouse, auquel
Montaigne avait dédié les poésies posthumes d'Etienne de La Boétie, 6 juin
1583). Sans aucun doute, tout Rome parle de cette partie
d'armes, mais surtout de sa tragique conclusion, sur laquelle Paul de Foix
glisse opportunément. Entre-temps, pour éviter les foudres de la justice
pontificale, les deux coupables, grâce à l'aide de leurs compatriotes, se
sauvent au galop, en empruntant la route qui mène au port d'Ancône, le plus
important de l'Etat de l'Eglise, où ils espèrent pouvoir s'embarquer pour
Venise. Il vaut la peine de rappeler que Mattecoulon connaissait cet itinéraire
dont lui avait parlé son frère aîné au retour de son pèlerinage au sanctuaire
de Lorette. Malheureusement, les deux
fugitifs seront bientôt appréhendés dans la vallée du Chienti, à Tolentino,
station thermale à dix-huit kilomètres de Macerata. Ironie du sort, deux ans
auparavant, c'est-Ă -dire le 22 avril 1581, Ă Muccia, entre Camerino et
Tolentino, notre moraliste faillit avoir lui aussi des ennuis sérieux avec la
justice après avoir donné une gifle à son voiturier. Entre-temps, Paul de Foix multiplie ses efforts pour
sauver la tête de ces deux Français écroués dans les prisons de Macerata :
samedi 8 juin 1583, deux jours après le duel, il obtient exceptionnellement une
audience du Pape Grégoire XIII pour implorer sa personnelle clémence au nom de Henri III. A ce point, on pourrait se demander quelles
sont les directives que le dernier Valois donne Ă son Ambassadeur, dont le
rapport circonstanciĂ© a dĂ» retenir son attention. [...] L'ambassadeur adresse Ă
son souverain, le 20 juin 1583, un long rapport , lui
aussi très circonstancié , où il résume tout d ' abord sa précédente dépêche. […] Paul de Foix, serviteur diligent et dynamique de son
pays, s'empresse de renseigner le roi sur la conclusion de cette affaire dont
il lui transmet - à toutes fins utiles – les procès - verbaux : “Les deux
gentilshommes français qui avaient été prisonniers, Asparasac et Matecoulon,
sortirent moyennant l'obligation qu'ils passeront de se présenter devant trois
mois devant Votre Majesté. Je vous envoie les instruments (f. 314, 4/7/1583). La lettre qui suit de Paul de Foix, datée du 15 août
1583, nous apporte le dernier Ă©cho de cette affaire dont on parlait beaucoup Ă
Rome : Sire, jeudi 12 de
ce mois arriva l'ordinaire de Lyon, qui m'apporta la dépêche qu'il plut à Votre
Majesté de me faire le 25 de juillet. Le lendemain, vendredi, il y eut audience
du Pape : je commençai par les nouvelles de votre bonne santé et du bon
portement de toutes vos Majestés, et par le remercier de votre part de ce qu'il
lui avait plu vous renvoyer les deux gentilshommes Aspresac et Matecoulon et
lui dis le déplaisir que votre Majesté avait de ce que sa Sainteté avait été
par ci devant importunée par l'indiscrétion des jeunes gentilshommes français, et
le commandement que Votre Majesté me faisait d'y donner tout l'ordre que je
pourrai (Lauro-Aimé
Colliard, Montaigne, nouvelles lumières sur l'auteur des Essais, Les libertins
et Montaigne, Volume 19,Numéros 1 à 2 de Montaigne studies, 2007 -
books.google.fr). Paul de Foix,
"Prince" de l'Eglise de Toulouse Paul de Foix, né en 1528 et mort en 1584, est un prélat
français du XVIe siècle, archevêque de Toulouse, un diplomate et un conseiller
de la reine Catherine de MĂ©dicis. Homme de confiance de la reine Catherine, il
devient en 1566 membre du Conseil privĂ© du roi Charles IX. En 1577, il est nommĂ© archevĂŞque de Toulouse, et en 1579 ambassadeur Ă
Rome, où il resta jusqu'à sa mort. Soupçonné d'avoir toujours des
sympathies pour les idĂ©es protestantes, le pape ne reconnut sa nomination Ă
l'archevêché de Toulouse qu'en 1582. Il meurt peu après, en 1584 (fr.wikipedia.org - Paul de
Foix). "chef Tholentin" : Tolentino, les Marches dans les Etats
du Pape Les Marches font partie des territoires des États
pontificaux entre 1532 et 1860 (fr.wikipedia.org
- Marches). Le XVIe siècle constitue le siècle d’or de la ville de
Macerata, la vie citadine se manifeste par un renouveau politique et
économique, où fut achevée la construction des murs d’enceinte et fut
restructurée la place centrale. La ville est alors en nette expansion. Et dans
la ferveur qui voit naître en Italie du XVIe siècle tant d’académies
culturelles, le 2 juillet 1574, Gerolamo Zoppio, professeur de poétique,
rhétorique et philosophie morale à l'Université de Macerata fondée par Bartolo
da Sassoferrato, alors réputée pour ses études sur Dante et Petrarque, fonda l’Accademia dei Catenati (fr.wikipedia.org - Macerata). Le même nom de Tolentino divise les savants quant à sa racine : certains la font dériver du grec "thòlos" (cumulus, en référence à la colline alluviale sur laquelle la ville se dresse), à celle plus récente qui le croit dérivé de la racine "Tul" avec le sens de "limite" ou plutôt "limite finale". Tolentino incluse dans les "villes moyennes"
est placée sous le commandement indirect de Rodolfo Varano, capitaine des
troupes pontificales. Cette domination indirecte des Varano, mal supportée par
le peuple de la ville, prit fin en 1434 avec l’assassinat de Berardo Varano. En
1445, le pape Eugène IV soumettra la commune directement à l’Église. Après la
chute des Da Varano, l’Église ordonne que la ville, pas encore complètement
soumise, soit occupée par Piercivalle Doria, commandant des troupes des Sforza,
mais lui aussi est chassé par une bataille acharnée. Cependant, la ville ne se
remit jamais et une période sombre s’ouvrit dictée par la soif de pouvoir qui
provoqua des crimes, des tromperies et des vengeances. Ce n’est qu’en 1585 que
le pape Sixte V intervient personnellement pour résoudre les affaires désormais
tristement célèbres de Tolentino, et élève cette même année Tolentino au rang
de ville et de diocèse ; les familles nobles de la ville, pour remercier le
pape de la pacification, érigèrent en dehors des murs l’Église de la Paix,
toujours existante (fr.wikipedia.org
- Tolentino). "tollu": Paul de Foix et Byzance tollere : soulever, lever,
abolir mais aussi célébrer, vanter, sens qu'on retient (Gaffiot). Lorsque Henri III avait été élu Roi de Pologne, il avait
chargé de Foix, en son nom et au nom du Roi Charles IX, d'une Ambassade
extraordinaire auprès de tous les Princes italiens qui l'avaient félicité lors
de son avènement. Paul de Foix était aussi grand philosophe qu’éminent
jurisconsulte : ses leçons aux écoles de Toulouse avaient remué tout le monde
savant, et l'archéologie le considérait comme un de ses premiers initiateurs.
Les langues grecque, latine et italienne lui étaient également familières; aucune
des connaissances humaines ne lui était restée indifférente. Arnaud d'Ossat et
Jacques-Auguste de Thou l'avaient suivi, l'un en qualité de Secrétaire, et
l'autre comme Clerc ou Attaché d'Ambassade ; celui-ci n'avait que vingt ans et
Ă©tait alors chanoine de Notre-Dame. Les deux diplomates, qui devaient bientĂ´t
jeter tant d'éclat sur la politique française, avaient eu cette fortune de
visiter la terre des arts et des lettres au moment de la Renaissance, en
compagnie de l'esprit le plus cultivé de leur temps. Ce voyage fournit de
curieux détails sur les mæurs diplomatiques au seizième siècle. De Thou nous a
transmis, à ce sujet, d'intéressantes indications. Dans chaque ville que
l'Ambassadeur traversait, son premier soin était de se rendre auprès des savants
dont les noms lui Ă©taient connus. Notre reprĂ©sentant visita, en passant Ă
Ferrare, François Patrici, qui discuta avec lui les divers textes d'Aristote,
pour lequel Paul de Foix professait une sorte de culte. Il alla chercher Ă
Sienne le vieux Alexandre Piccolomini qui, courbé sous le poids des ans, travaillait
encore à ses Commentaires de l'euvre de ce philosophe. De Thou, malgré ses
vingt ans, devait garder un souvenir impérissable de ce grand et salutaire
spectacle de la science consolant l'homme des atteintes de la vieillesse et de
l'adversité. «Pendant les longs trajets que nécessitaient les voyages alors si
pénibles, dit de Thou, Arnaud d'Ossat, à cheval aux côtés de l'Ambassadeur, commentait
Platon et discutait avec lui les gloses des textes obscurs. De Foix se sentait toujours attiré vers Aristote, dont la dialectique
précise convenait à son esprit exact. Le secrétaire vantait, au contraire, le
charme des digressions qui viennent si souvent interrompre le cours de l'exposé
du système platonicien. Dans les hôtelleries, pendant les apprêts du souper, le
lecteur de l'Ambassadeur, François Chesne, lui exposait les sommaires de Cujas
sur le Digeste. On accompagnait enfin le dessert de la Glose de Piccolomini sur
la Physique d'Aristote» (Edouard
Frémy, Diplomates du temps de la Ligue, 1881 - books.google.fr). François Chesne lisait,
avant son repas, les Paratitles de Cujas sur le Digeste. Paul de Foix les
expliquait ensuite, car il les trouvait trop sommaires. […] Les illustres voyageurs arrivèrent à Rome en 1574.
L'envoyé du roi apprit, à son arrivée, qu'on y suivait encore contre un
officier français, accusé d'hérésie, une procédure, au sujet de laquelle la
cour de France avait déjà protesté'. D'Ossat fut chargé de rédiger un Mémoire
sur cette affaire. Il révéla à cette occasion des qualités qui le firent
vivement remarquer, et il fut dit dans le collège des cardinaux auquel le
Mémoire était destiné, que si l'auteur demeurait longtemps à la cour de Rome,
il s'y ferait connaître avec distinction et parviendrait un jour aux plus
hautes dignités. Il y demeura, en effet, et ne quitta même plus la capitale du
monde chrétien. Il entra bientôt après dans les ordres. Paul de Foix, qui avait
Ă©tĂ© instruit de la mort du roi, s'Ă©tait dĂ©jĂ Ă©loignĂ© de Rome, moins peut-ĂŞtre Ă
cause de cet événement lui-même, que des soupçons qu'on avait réveillés, et de
l'information qu'on dirigeait contre lui Ă raison de la conduite qu'il avait
tenue au parlement, dans cette séance historique du 15 juin 1559, où pourtant,
malgré la persécution qui l'atteignit, il n'avait pas renie sa foi, mais où, en
face d'Henri II qui venait demander au parlement assemblé une jurisprudence
uniforme contre les hérétiques, il avait eu la noble hardiesse de conseiller la
modération et de faire ressortir l'injustice qu'il y avait à traiter tous les
hérétiques sacramentaires avec une égale rigueur. Paul de Foix revint à Rome en
1579 (François
Sacase, Le cardinal d'Ossat, Revue de Comminges (Pyrénées Centrales): Bulletin
de la Société des études du Comminges à Saint-Gaudens et de l'Académie
Julien-Sacaze, Volumes 1 Ă 2, 1885 - books.google.fr). Le Digeste (en
latin : Digesta [neutre pluriel substantivé de digestus], au génitif
Digestorum) ou les Pandectes (en latin : Pandectae, au génitif Pandectarum) sont
une œuvre juridique ordonnée par l'empereur byzantin Justinien Ier en 530
et publiée le 16 décembre 533 avant d'entrer en vigueur le 30 décembre de la
même année, consistant en un recueil de citations de jurisconsultes romains. Le
Digeste forme la deuxième partie du Corpus iuris civilis, dont l'étude est
importante dans l'histoire du droit (fr.wikipedia.org- Digeste). "Luy
faillira... espouse" : en Corse ? Le délit le plus courant est celui d'inceste,
c'est-à -dire le mariage contracté en des degrés prohibés. On signale sa recrudescence
à chaque période de crise sans qu'il soit possible d'y remédie. Mgr Giovanni
Battista Centurione, évêque d'Ajaccio de 1570 à 1584 et fondateur du séminaire de Mariana, constatait que "les mœurs du
peuple sont plutôt mauvaises à cause des troubles" (François
J. Casta, Le diocèse d'Ajaccio, 1974 - books.google.fr). La douloureuse affaire des incestueux, pendant des
siècles en Corse, allait empoisonner la question matrimoniale corse au grand
désespoir des chancelleries épiscopales. Il fallait en effet recourir à Rome
pour obtenir une dispense longue et coûteuse. Cependant, le 28 mai 1583, le
pape Grégoire XIII devait délivrer un Bref à Mgr Centurione, par lequel il
accordait pouvoir de dispenser par lui-même ou par son vicaire général.
Beaucoup se passaient alors de la dispense (François
J. Casta, Évêques et curés corses dans la tradition pastorale du Concile de
Trente (1570-1620), 1964 - books.google.fr). Acrostiche : QSLL Terme espagnol de généalogie qsll signifie "que sigue la linea" (qui suit la lignée) (P.
Crespo, La noble familia gallega de Los Pardo, Estudios, Volume 14, 1958 -
books.google.fr, Asturias
illustrada, Tomo segundo, que trata de la varonia, y origen de las principales
familias de Espana, Tome 2, 1739 - www.google.fr/books/edition). Antoinette de Louppes, la mère de Michel de Montaigne
était fille de Pierre, et donc de la branche établie à Toulouse. On connaît les
sentiments religieux de certains membres de cette nombreuse famille. Les frères
Lopès avaient un oncle : Jean, habitant Toulouse et dont le testament a
été retrouvé. Par ce testament, Jean Lopès demandait à être enseveli dans le
couvent des Jacobins, dans la chapelle Notre-Dame de Grace avec le pieux habit
du Tiers ordre de saint Dominique. Il Ă©tait tertiaire dominicain. Il faisait de
nombreux legs Ă tous les couvents de religieux et de religieuses de Toulouse,
aux trois léproseries, aux hôpitaux (Maturin
Dreano, Maturin Dréano, La pensée religieuse de Montaigne, 1936 -
www.google.fr/books/edition). La famille s'était installée à Toulouse en 1492 avec le
père de Pierre de Louppes qui fut élu capitoul en 1542. Election contesté, car
on le soupçonnait de conserver des relations commerciales avec l'Espagne. Ils
sont issus d'une famille juive de Catalyud (Aragon) nommée Paçagon. L'espagnol fait
partie, avec le latin et l'italien, du plus intime du paysage linguistique de
Montaigne, de sa famille linguistique, par la lignée paternelle qu'il souligne.
En outre, la traduction de la Théologie naturelle de Raimond Sebond se rattache à la mort de Pierre Eyquem, dont
c'est la dernière volonté. Montaigne doit «mettre en français» cet espagnol et
ce latin, ces langues du père. Il doit ainsi, pour son père, à travers Sebond,
se «mettre» lui-même «en français», se traduire, inventer les Essais. Faut-il rappeler, de surcroît, quel rôle
joue Sebond, quelle importance cruciale eut son ouvrage dans la constitution de
la pensée de Montaigne ? Sebond est une des images du Père dans les
Essais, une de ces figures de Père spirituel sans laquelle il n'est pas
d'écrivain. Avec Sebond, légué par son père, Montaigne a une parenté vitale. Le
second texte, plus révélateur encore peut-être, est l'addition ultime de l'essai
«De l'Ivrognerie», qui s'épanouit en portrait de Pierre Eyquem, son unique
portrait, dessiné plus de vingt ans après sa mort : Pierre Eyquem, ressuscité. Il
aimait le Libro aureo de Marco Aurelio de Guevara. Il parlait peu et bien ; et
si mĂŞlait son langage de quelque ornement des livres vulgaires, surtout
espagnols... (II, 2, C, 343). C'est ce rappel qui amène le portrait d'un père
éternellement jeune, désormais, dans le livre de son fils, robuste, vif,
adroit, chaste : tout le contraire de ce fils ; ce père au visage
brun de méridional, et qui lui a légué, sinon tous ses dons du moins, avec sa
gravelle, sa taille petite, «forte et ramassée» (Géralde
Nakam, Le dernier Montaigne, 2002 - books.google.fr). Cf. quatrain suivant VIII, 40 - Toulouse et marginaux. Typologie Le report de 2058 sur la date pivot 1583 donne 1108. Les épreuves ou jugements de Dieu, de natures très
diverses, - eau, feu, combats, etc., remontent aux premiers temps de notre
histoire. L'objet de cette étrange législation était de donner à Dieu
l'occasion d'éclairer la justice en désignant les coupables. Au moyen âge, elle
était constamment suivie; mais les abus qui en résultèrent furent si criants
qu'elle tomba peu à peu en désuétude. La
seule épreuve qui résista pendant un temps assez long fut le duel judiciaire,
parce qu'il était en harmonie avec les mœurs du temps; et encore, depuis le douzième
siècle, la royauté s'attacha-t-elle à en restreindre les applications. En 1108, une ordonnance royale le limite
aux contestations qui dépassent la somme de cinq sous. Saint Louis l'interdit
dans ses domaines; ses successeurs réservent au Roi seul le droit de
l'autoriser. Au seizième siècle, ces combats n'étaient plus guère usités;
cependant, aucune loi ou ordonnance ne les ayant détruits, ils restaient dans
la tradition féodale et le droit public du royaume. Le plus célèbre de tous
est, à l'avènement de Henri II, celui de Jarnac et La Châteigneraye, qui eut
tous les caractères d'un événement politique (Clarisse
Coignet, Un gentilhomme des temps pasés: François de Scépeau, sire de
Vieilleville, 1509-1571, portraits et récits du seizième siècle, règne de Henri
II, 1886 - books.google.fr). Les moines de
Saint Maur des Fossés obtinrent de Louis VI, en 1108, de faire battre leurs serfs
contre toute personne libre (Adolphe
Chéruel, Dictionnaire historique des institutions: moeurs et coutumes de la
France, Partie 1, 1880 - books.google.fr). En 1108, Louis le
Gros, à la prière des chanoines de Notre-Dame, assimila leurs serfs aux hommes
libres quant à la jouissance des droits
judiciaires ; c'est-à -dire qu'il leur accorda, dans toute espèce de
causes et d'affaires, le droit d'être témoins et de se battre en duel (Cartulaire
de l'Église Notre-Dame de Paris, Volume 1, 1850 - books.google.fr). C'est ainsi qu'en 1013 et 1041, les décrets des Empereurs
allemands ordonnent encore le duel judiciaire, qu'en 1108, l'empereur Henry IV, sans songer Ă restreindre la vengeance
privée, décide qu'elle ne pourra s'exercer que dans les lieux publics et qu'elle doit respecter le
domicile. En 1187 encore, l'empereur Frédéric n'apporte à l'exercice du
droit de guerre privée que des restrictions de détail (Bulletin
de l'Institut archéologique liégeois, Volumes 59 à 60, 1935 - books.google.fr). Le duel judiciaire dont, au IXe siècle déjà , Louis le Pieux a exempté les marchands de la marche d'Espagnes, ne peut se maintenir longtemps au milieu d'une population de commerçants et d'artisans. Dès le début du XIIe siècle, il est supprimé dans un grand nombre de localités : en 1108 à Staveren, en 1116 à Ypres, en 1130 à Fribourg, en 1127 à Saint-Omer (Henri Pirenne, L'origine des constitutions urbaines au moyen âge, Revue historique, Volume 58, Presses universitaires de France, 1895 - books.google.fr). |