La Sardaigne

La Sardaigne

 

VIII, 88

 

2094-2095

 

Dans la Sardaigne un noble Roy viendra,

Qui ne tiendra que trois ans le Royaume,

Plusieurs couleurs avec soy conioindra,

Luy mesme apres soin sommeil marrit scome.

 

Charles-Emmanuel IV de Savoie ne régna que 3 ans sur le royaume de Piémont-Sardaigne, et se réfugia dans l'île de Sardaigne sous la Révolution Française (Antatole Le Pelletier, Les oracles de Michel de Nostredame, Tome 1, 1867 - www.google.fr/books/edition, Henri Torné-Chavigny, L'histoire prédite et jugée par Nostradamus: texte de l'édition de 1566, à Lyon, par Pierre Rigaud, 1860 - www.google.fr/books/edition).

 

Jacques II d'Aragon

 

Jacques II d'Aragon dit «le Juste» (en catalan : Jaume El Just; en castillan : Jaime el Justo), nĂ© le 10 aoĂ»t 1267 Ă  Valence et mort le 2 novembre 1327 Ă  Barcelone, est roi de Sicile, puis roi d'Aragon, comte de Barcelone et roi de Valence. C'est le second fils de Pierre III d'Aragon et de Constance de Hohenstaufen (fr.wikipedia.org - Jacques II d'Aragon).

 

Il fallut trois ans au roi d'Aragon Jacques II pour conquérir la Sardaigne, partagée entre Gênes et Pise, qui lui avait été livrée par trahison par Huges Visconti des Bassi, seigneur d'Arborea et d'Oristagni, en 1323. L'île fut cédée par traité avec Pise le 10 juin 1326. Il meurt l'année suivante (Biographie universelle, Tome 3, 1811 - www.google.fr/books/edition).

 

Etait mort à Saragosse, le 2 (novembre 1326, le roi Jacques II d'Aragon, après un règne de près de trente-cinq ans, et au moment où il venait de rendre effectif le titre de roi de Sardaigne et de Corse qu'il portait depuis que Boniface VIII lui en avait donné l'investiture par une bulle en 1297 (Histoire d'Espagne depuis les premiers temps jusqu'a nos jours, Tome 8, 1848 - www.google.fr/books/edition).

 

Jacques II, grâce à l'aide des Almogavares et par des mariages, selon les projets ou conseils de Raymond Lull, prétendait agrandir l'empire méditerranéen de la Couronne d'Aragon et recouvrer les terres occupées par les sarrasins en Espagne et en Afrique, en fondant le royaume de Jérusalem, peut-être pour un de ses fils (Sébastien Cirac, Raymond Lull et l'union avec les Byzantins, Pepragmenae, 1956 - www.google.fr/books/edition).

 

"sommeil" : songe, rĂŞve, cauchemar

 

Arnauld de Villeneuve naquit, vers 1240, à Valence, de parents pauvres venus en Catalogne, et fut élevé dans une école gratuite de dominicains. Il abandonna bientôt les velléités qu'il avait ressenties d'entrer dans l'ordre de Saint-Dominique pour chercher dans l'étude des sciences pratiques un moyen plus sûr et plus prompt de conquérir l'aisance et la richesse. Ses études terminées, il vint à Naples. Là, il entendit Jean Calamède et fut initié par lui a la pratique de la médecine.

 

En 1285, c'était un médecin de grand renom, quand il fut appelé près de Pierre III d'Aragon, alors très-malade à Villafranca. Arnauld ne put sauver les jours de son royal client, mais il se créa des amitiés à la cour et y laissa la réputation d'un homme d'immense savoir.

 

En 1299, Arnauld arriva à Paris chargé de quelque message de Jacques II d'Aragon pour la cour de France. Il allait quitter la capitale, lorsqu'il fut arrêté par ordre de l'official du diocèse. Quatre ou cinq maîtres de théologie l'avaient dénoncé comme auteur d'un écrit renfermant les prophéties les plus effrayantes pour les fidèles et les plus outrageantes pour l'Eglise. Interprétant à sa manière le livre de Daniel et plusieurs passages énigmati. ques des vers sibyllins, Arnauld de Villeneuve avait voulu prouver que l'antéchrist devait apparaître vers le milieu du quatorzième siècle, pour mettre à néant l'établissement de Jésus, des apôtres et des papes.

 

Ces événements se passaient en 1300. Il est probable qu'Arnauld de Villeneuve, absous par le pape, ne rentra pas en France, où ses ennemis, vaincus, n'auraient pas manqué de le poursuivre avec acharnement. En 1304, il est à la cour du pape Benoil XI; peut-être était-il un de ses médecins.

 

En 1305, il est appelĂ© auprès de Jacques II d'Aragon pour lui donner l'explication d'un songe. «Mon père, lui dit le roi, m'est apparu en rĂŞve, et, m'ayant offert quatre grandes pièces d'or, m'a ordonnĂ© de les porter au monnoyeur, qui ne manquera pas d'en faire de la belle et bonne monnaie. Le monnoyeur c'est Arnauld de Villeneuve.» Le mĂ©decin expliqua ainsi le songe : sous les traits de son père le roi avait vu Dieu, le père de tous les Ă©lus; les pièces d'or Ă©taient les quatre Ă©vangiles. Arnauld n'a Ă©tĂ© dĂ©signĂ© comme monnoyeur que parce qu'il a Ă©crit sur les Ă©vangiles de petits livres très-clairs et très-moraux. Que le roi veuille prendre cependant la peine de les lire. Ainsi fut fait, après une belle remontrance, dans laquelle le savant recommanda au roi de veiller plus attentivement au besoin des pauvres et aux intĂ©rĂŞts des petits.

 

RassurĂ© par l'Ă©lection de ClĂ©ment V, Arnauld revint en France. En 1306, on le voit Ă  Bordeaux, discutant, en prĂ©sence du nouveau pape, avec Dominique de Athera, moine jacobin : les deux adversaires s'imputaient rĂ©ciproquement un certain nombre d'hĂ©rĂ©sies. Peu après, Arnauld est Ă  la cour du roi de Sicile, frère de Jacques II; lĂ  encore, il explique les songes et rassure le prince, qui avait conçu des doutes. sur la divinitĂ© du christianisme. Il rentre en Espagne porteur d'une lettre de FrĂ©dĂ©ric de Sicile Ă  l'adresse de son frère. Nous possĂ©dons la rĂ©ponse de Jacques II; elle fait allusion Ă  une mission diplomatique dont fut chargĂ© Arnauld de Villeneuve. Après de longs et solennels dĂ©bats, ClĂ©ment V avait couronnĂ© roi de Sicile et de JĂ©rusalem, en fait roi de Naples, Robert, le troisième fils de Charles II. Celui-ci allait partir d'Avignon pour prendre possession de son royaume, quand Arnaud et le vice-chancelier d'Aragon vinrent lui dĂ©clarer que FrĂ©dĂ©ric, rĂ©solu de conquĂ©rir la Terre-Sainte, Ă©tait prĂŞt Ă  rendre la Sicile, au prix fixĂ© par le traitĂ© de 1302 et moyennant la cession du titre de roi de JĂ©rusalem. La nĂ©gociation Ă©choua; Robert rĂ©pondit qu'il avait aussi formĂ© le dessein d'aller dĂ©livrer les Lieux-Saints. Arnauld retourna-t-il en Espagne ? On ne sait. Un homme de sa renommĂ©e devait mieux se plaire Ă  la cour de ClĂ©ment V. Le pape en fit son mĂ©decin. Mais il ne put le retenir bien longtemps. Le roi Robert, le Salomon de son siècle, l'attira près de lui Ă  Naples et le traita si bien, qu'il lui fit oublier Saragosse, Catane et Avignon. Il Ă©crivit pour pour lui plusieurs traitĂ©s de mĂ©decine et d'alchimie, entre autres celui qui a pour titre : L'Art de rester jeune (De conservanda juventute). C'est Ă  Naples qu'il rencontra le fameux Raymond Lull, et voulut apprendre de lui le dernier mot de la chimie. ClĂ©ment v, souffrant, le rappela; l'illustre mĂ©decin mourut en mer pendant la traversĂ©e et fut inhumĂ© Ă  GĂŞnes avant le mois de mars 1312 (Ferdinand Delaunay, Revue de France, Partie 6, 1878 - www.google.fr/books/edition).

 

Boniface VIII lui manifeste son soutien et le médecin peut continuer ses pérégrinations méditerranéennes pour se rendre, en 1309, au chevet de Frédéric II de Sicile, le frère puîné de son mécène aragonais. Le jeune roi se plaint alors de cauchemars et souhaite qu'Arnaud lui explique la nature de ses rêves. Après avoir rassuré son patient, il retourne auprès de Jacques avec une lettre de son frère, un témoignage supplémentaire de la confiance qu'on a en lui. Le médecin sert d'intermédiaire et, pourrait-on dire, de confident. Mais cette confiance a peut-être été trahie dans l'Interpretatio de visionibus in somniis en raison de l'évocation du goût de Frédéric et Jacques pour l'oniromancie, un art d'interpréter les songes prisé dans les cours princières et proche de la magie (Stanis Perez, Histoire des médecins, 2020 - www.google.fr/books/edition).

 

"soin sommeil marrit scome"

 

"marri" : affligé, triste (Gilles Menage, Dictionnaire etymologique de la langue francoise, 1750 - www.google.fr/books/edition).

 

"scomma" : raillerie (Gaffiot).

 

L’étymologie traduit d’ailleurs le sens double et global, matĂ©riel et spirituel, du soin. Le mot soin possède deux racines : l'une songne vient du latin mĂ©diĂ©val sunnia et du francique sunnja et signifie «nĂ©cessitĂ©, besoin»; l'autre soign qui vient du latin tardif sonium signifie «souci, chagrin» (CĂ©line Lefève, La philosophie du soin, La Matière et l’esprit, n° 4 : MĂ©decine et philosophie, 2006, - www.sphere.univ-paris-diderot.fr).

 

Avec le jeu de mot "marrit scome"/mariscae, on donne sur les hémorroïdes (sujet de railleries) dont souffrait en effet Jacques II (Jean-Michel Gouvard, La Littérature française à l'agrégation de Lettres Modernes: Béroul, Rabelais, La Fontaine, Saint Simon, Maupassant, Lagarce, 2012 - www.google.fr/books/edition).

 

Cf. quatrain VII, 15, le siège de 7 ans de Milan par Frédéric Barberousse.

 

Le sourire morbide tétanique est désigné sous le nom de rire sardonique ou ris sardonien, expression vicieuse qui ne donne absolument aucune idée du mal, et qui ne saurait être mieux remplacée que par celle de tétanique qui embrasse toutes les diverses manières d'être de celte espèce de rire , et en donne la véritable nature. C'est ausei celle que, à l'exemple de M. Roi, nous adopterons. L'origine du mot rire sardonique n'est poini connue; on peut la regarder comme un problème encore non résolu. Cependant l'opinion généralement admise est que le mot sardonique ou sardonien dérive de celui de Sardaigne, ile où croît en grande quantité une plante nommée sardonia herba, sardoa herba, sardoïne, etc., plante de la famille des renonculacées, à l'usage de laquelle on attribuait le rire sardonique. Prise dans un langage figuré, cette épithèle désigne ordinairement un rive forcé, et sous le masque duquel on cherche à déguiser des sentimens peu compatibles avec l'expression vraie du rire naturel et franc de la joie expansive. Voyez à ce sujet les adages d'Erasme, centur. 5 , chiliad. 3, adag. 1. (Dictionnaire des sciences médicales, Tome 49, 1820 - www.google.fr/books/edition).

 

Une étymologie évoque l'île de Sardon, non loin de Carthage, où l'usage veut que des vieillards soient mis à mort et partagent le rire de leurs sacrificateurs. D'autres évoquent plutôt la sardoine, une herbe de Sardaigne provoquant un rictus douloureux sur le visage qui donne l'impression d'un sourire ou d'un rire figé, utilisée notamment pour la mise à mort des vieillards (David le Breton, Sourire : Anthropologie de l'énigmatique, 2022 - www.google.fr/books/edition, Les Images ou Tableaux de Platte peinture, de Philostrate Lemnien Sophiste Grec. Mis en François par Blaise de Vigenère, 1611 - www.google.fr/books/edition).

 

De son côté, E. Pais reprend l'hypothèse de C.O. Müller, et fait remonter le rire sardonique à un dieu Sandan/Sardan, assimilé au roi Sardanapale : les victimes qu'on lui sacrifiait, notamment en Lydie, mouraient le sourire aux lèvres (Dominique Arnould, Le rire et les larmes dans la littérature grecque d'Homère à Platon, 2009 - www.google.fr/books/edition).

 

L'Hercule assyro-babylonien, dont nous verrons bientôt que le nom propre était Sardan (Asar Adan) ou Sandan, deux formes différentes du même mot, était adoré dans la planète Mars; ce qui ne pouvait avoir lieu qu'à cause de la nature ignée de ce Dieu. Le témoignage classique à cet égard est celui du Grand Étymologique; et d'autres témoignages qui tendent à assimiler Hercule et Mars, en leur attribuant à l'un et à l'autre la planète de Mars“, ne laissent aucun doute à cet égard, non plus que sur la source chaldéenne où avait été puisée cette idée, qui, pour avoir pu pénétrer dans une des plus anciennes institutions de Rome, celle du collége des Saliens, ne saurait guère avoir été introduite en Italie que par l'émigration tyrrhénienne (M. Raoul-Rochette, Archéologie comparée asiatiaque, grecque et étrusque, Histoire et memoires de l'Institut royal de France, Volume 17, 1847 - www.google.fr/books/edition).

 

"couleurs"

 

Pendant tout le XIVe siècle, une lignée de princes amis des sciences gouverne l'Aragon, de Jacques II (1291-1327), qui s'intéresse assez à l'astrologie pour encourager des observations aux armilles, à Martin Ier (1396-1410), et parvient, en particulier sous les règnes de Pierre IV le Cérémonieux (1336-1387) et de Jean Ier (1387-1396), à créer un véritable milieu scientifique (Jacques Blamont, Chiffre et le Songe (Le): Histoire politique de la découverte, 1993 - www.google.fr/books/edition).

 

Des couleurs symboliques avaient été attribuées aux planètes par les astronomes chaldéens. Les Grecs les imitèrent. Au Soleil était généralement affectée la couleur or tandis que l'on réservait la couleur argent à la Lune. Selon Ptolémée (Tetrabiblos, II, 9) le noir est la couleur de Saturne, le blanc celle de Jupiter, le rouge celle de Mars, le jaune, celle de Vénus. Quant à Mercure, c'est une couleur changeante et par suite mal définie qui lui était attribuée. Mais, cette répartition des couleurs ne faisait sans doute pas l'unanimité, car on note des attributions différentes d'un auteur à l'autre.

 

Les plantes attribuées à chacune des sept planètes diffèrent d'un opuscule astrologique à l'autre. Mais d'une façon générale, chaque plante est supposée avoir la propriété d'être bonne pour soigner les parties du corps placées sous la domination de la planète à laquelle elle est elle-même affectée (Guy Ducourthial, Flore médicale des signatures: XVIe-XVIIe siècles, 2016 - www.google.fr/books/edition).

 

"soin"

 

Wallon, sogn, s. f. peur, besogne; provenç. sonh, soing, suenh; anc. ital. sogna. Origine douteuse. Plusieurs y voient un dérivé du bas-lat. sunnis, sunnia, sonia, qui signifie empêchement juridique, d'où l'idée de s'arrêter à une affaire difficile, de soin. Sunnis, qui se trouve dans les lois barbares, est un mot germanique. Cependant il faut dire qu'on n'a pas une série d'intermédiaires qui établissent comment le mot est venu du sens d'empêchement juridique à celui de soin; à moins qu'on ne regarde comme tels es-soine, exemption, et ensoignié, chargé d'embarras, de soucis. Du Cange a mis en avant le lat. somnium, le trouvant dans un glossaire avec le sens de soin; l'anç. franç. songne et le wallon sogn en viennent sans doute (www.littre.org).

 

Le roi Jacques II d'Aragon semble avoir souffert d'une maladie contractée à Jaca autour de 1302, qu'on appelle, dans les sources, discrasia, c'est-à-dire déséquilibre, et dont les symptômes incluaient de fortes fièvres et des accès de dysenterie et d'hémorroïdes. À partir de ce moment-là, il paraît incapable de recouvrer la santé. Il fonda dans son royaume la première université, à Lérida, qui occupe une position centrale, en 1300(Geneviève Dumas, Santé et société à Montpellier à la fin du Moyen Âge, 2014 - www.google.fr/books/edition).

 

Si la présence de médecins auprès des plus grands n’est pas nouvelle, c’est surtout à partir du XIIIe siècle que le praticien, souvent assisté de chirurgiens ou de barbiers, apparaît comme une figure habituelle des milieux de cour. [...]

 

Vers la fin du siècle, le roi Jacques II d'Aragon manifeste un même désir de s'entourer en permanence des meilleurs praticiens du temps. Michael McVaugh, dans une étude consacrée à la médicalisation de la société dans les pays de la couronne d'Aragon avant la Peste Noire, a mis en lumière le rôle joué par la cour dans ce processus, révélant la volonté du roi de faire venir auprès de lui les plus grands de Paris, Toulouse ou Montpellier. Le recrutement d'Arnaud de Villeneuve et de son neveu Armengaud Blaise sont les fruits de cette politique. Les registres de la couronne ont conservé de très nombreuses lettres de Jacques II adressées à ses médecins ou à des membres de sa famille, dont la santé est le sujet principal; une telle attention y prend presque les formes d'une obsession, notamment vers la fin de sa vie, lorsque le roi apparaît sous les traits d’un vieillard valétudinaire. Ces attitudes quasi maniaques, qui révèlent le besoin d’une présence permanente du médecin de confiance dans l’entourage du prince, ou à défaut (dans le cas de Jacques II et d’Arnaud de Villeneuve), d’un régime de vie pouvant pallier son absence, ne sont pas des phénomènes isolés. [...]

 

C’est pour prendre soin de la reine Blanche qu’en mars 1297, Arnaud de Villeneuve (qui se trouvait à Rome auprès du pape) fut la première fois contacté par Jacques II. Il suivit, avec Bernard Marini, le médecin personnel du roi, la naissance de l’infante Constance, en avril 1300. Il est encore réclamé par le roi pour la naissance d’un cinquième enfant, au printemps 1302. [...]

 

Dans la bibliographie des auteurs de manuels de santé, prédomine l’association d’une écriture diététique et d’une production essentiellement tournée vers la thérapie et, plus largement, la médecine pratique. Petrus Hispanus, Arnaud de Villeneuve, Bernard de Gordon ou encore Ugo Benzi ont certes commenté des traités universitaires, mais ils se sont aussi attelés à écrire des practicae ou des consilia. [...]

 

Les associations entre la diététique et l’analyse de cas individuels sont aussi fréquentes dans les consilia ou encore dans des ouvrages plus généraux, comme le Lilium medicine, ou le De decem ingeniis curandorum de Bernard de Gordon. Aussi bien ce dernier que Taddeo Alderotti, Arnaud de Villeneuve, Barnabas Riatinis que Niccolò Falcucci217ont ainsi privilégié conservation et soins, deux domaines complémentaires (Marilyn Nicoud, Les régimes de santé au Moyen Âge : Naissance et diffusion d’une écriture médicale en Italie et en France (XIIIe- XVe siècle), 2007 - books.openedition.org).

 

Antéchrist

 

La centurie VIII est la sienne.

 

Arnaud de Villeneuve 1238-1311 détermine plusieurs décennies durant l'avenir du franciscanisme de la confédération catalano-aragonaise. Ce médecin le plus prestigieux de son temps originaire de Valence était le familier de Jacques (1291-1327) d'Aragon et de son frère Frédéric III (1296-1337) de Sicile. Membre du tiers ordre franciscain et défenseur outrancier de la pauvreté évangélique il rédige à côté de ses ouvrages médicaux et alchimiques de nombreux opuscules eschatologiques prédisant la naissance de antéchrist autour de 1368-1378. Son joachimisme, ses diatribes anti-scolastiques et ses critiques contre le clergé séculier lui attirent la méfiance des autorités ecclésiastiques. Ses écrits et ses doctrines sont solennellement condamnés titre posthume par archevêché de Tarragone en 1316 (Martin Aurell, Messianisme royal de la Couronne d'Aragon. In: Annales. Histoire, Sciences Sociales. 52e année, N. 1, 1997 - halshs.archives-ouvertes.fr).

 

ARNAUD étoit naturellement curieux & vain. Ces deux passions le jetterent dans plusieurs erreurs. On l'accula d'avoir voulu découvrir l'avenir par le moyen de l'astrologie. Il regardoit cette science chimérique comme un art infaillible. Il publia que la fin du monde arriveroit bientôt; il osa même en fixer le temps à l'année 1335. La raison en étoit toute simple. Il la trouvoit dans la conjonction des trois planetes supérieures (Mars, Jupiter & Saturne), qui devoit se faire dans ce temps-là, dans le signe du verseau. Il se ravisa ensuite, & il transporta son époque à l'an 1464, où la conjonction de Saturne & de Jupiter devoit se faire, dans le signe des poissons. On a voulu le laver de l'opprobre de cette folie. Mais il est certain qu'il fit des prédictions sur la venue de l'Ante-Christ, & il n'y a pas loin de l'apparition de ce faux prophete à la fin du monde (Dictionnaire historique et critique ou Recherches sur la vie, le caractère, les moeurs & les opinions de plusieurs hommes célebres, Tome 1, 1771 - www.google.fr/books/edition).

 

Acrostiche : DQPL, décupler

 

«Onirocritique» est aujourd’hui le dernier chapitre de L’Enchanteur pourrissant. Peter Froehlicher pense qu’on peut aisément considérer le texte comme autonome, quitte à tenter d’interpréter ensuite sa situation dans l’Enchanteur.

 

Premier livre de Guillaume Apollinaire, L’Enchanteur pourissant est une rĂ©criture de Merlin. L’ouvrage est conçu comme un dialogue entre Merlin et la fĂ©e Viviane. Pour finir, Merlin meurt des mains de la Dame du lac et repose dans son cercueil. Des animaux, des personnages mythiques dĂ©filent devant lui pour lui dire quelques mots. Une fois ce cortège passĂ©, la Dame du lac partie, l’enchanteur, pourrissant, Ă  nouveau seul, fait le rĂŞve intitulĂ© «Onirocritique» :

 

...Mais j’avais la conscience des éternités différentes de l’homme et de la femme. Deux animaux dissemblables s’aimaient. Cependant les rois seuls ne mouraient point de ce rire et vingt tailleurs aveugles vinrent dans le but de tailler et de coudre un voile destiné à couvrir la sardoine. Je les dirigeai moi-même, à reculons. Vers le soir, les arbres s’envolèrent, les singes devinrent immobiles et je me vis au centuple. La troupe que j’étais s’assit au bord de la mer... (Guillaume Apollinaire, Onirocritique, 1908 - www.reves.ca).

 

Les prophéties attribuées à Merlin l'enchanteur servirent de programmes politiques, ou au contraire furent des pamphlets contre telle ou telle dynastie.

 

Salimbene Adam 1221-1288) franciscain de Parme est le premier qui se fait Ă©cho du nouveau rĂ´le messianique des Barcelonais hĂ©ritiers des Hohenstaufen, copiant dans sa chronique une longue prophĂ©tie qu'il attribue Ă  la sybille. Il est question d'un aigle au dur visage Pierre III rĂ©clamant le royaume de Trinacrie (la Sicile) s'unissant Ă  une poule orientale Constance et combattant le lion Charles Ier. Des prophĂ©ties semblables circulent vers 1300 en Catalogne oĂą Constance apparaĂ®t plus logiquement en tant qu'aiglonne. Le Breviloquium mentionne le mariage entre Pierre III, l'insigne corne du bouc et Constance l'unique petite de l'aigle : c'est dans leur descendance que surgira le onzième roi destructeur. Le transfert de aigle des Souabes aux Barcelonais n'est pas seulement hĂ©raldique mais eschatologique. Cette translation prophĂ©tique de la Sicile vers la Catalogne est souvent Ă©voquĂ©e dans oeuvre de Jean de Roquetaillade. Dans le Livre rĂ©vĂ©lateur le franciscain auvergnat attribue Merlin une prophĂ©tie rĂ©pertoriĂ©e en Aragon en 1285 au moment oĂą Philippe III battait en retraite de sa croisade catalane. Cet oracle mentionne un aigle ardent surgi de la terre qui mouille la poitrine du plus grand avec le liquide virginal qui jaillit de son ventre Pour Roquetaillade ce rapace est un futur empereur romain furieux et colĂ©reux qui verse le sang du souverain pontife la terre humide dont il provient est autre que la Sicile La conclusion impose donc : "Je crois comme beaucoup que cet aigle monte des humeurs du roi Pierre Aragon et de sa race". Pour ce franciscain admirateur de la maison de Naples aigle exĂ©crable incarnĂ© par les Catalans de Sicile est la seconde tĂŞte d'Apocalypse XIII, antĂ©christ sĂ©duisant et thaumaturge amenant l'humanitĂ© Ă  la perdition (Martin Aurell, Messianisme royal de la Couronne d'Aragon. In: Annales. Histoire, Sciences Sociales. 52e annĂ©e, N. 1, 1997 - halshs.archives-ouvertes.fr).

 

André Thevet emploie le mot "decuple" dans le portrait de l'alchimiste arabe Geber (André Thevet, Pourtraits et vies des hommes illustres Grecs, Latins et Payens, Tome 1, 1524 - www.google.fr/books/edition).

 

Paracelse enseigne comment multiplier par 10 la force d'un aimant (Michiel Coignet, nstruction nouvelle des poincts plus excellents & necessaires, touchant l'art de naviger, 1581 - www.google.fr/books/edition).

 

L'alchimie est un domaine connu d'Arnaud de Villeneuve et on prĂŞte Ă  Raymond Lull, son contemporain, des Ă©crits de ce type.

 

Il faut convenir que ces Mrs Philosophes sont bien chiches de leur PoussiĂ©re Aurifique, qui leur coute si peu Ă  fabriquer; car ils disent que leur première OpĂ©ration, une fois faite, ils peuvent en moins de rien dĂ©cupler cette Poudre, toutes les fois que bon leur semble : Or s'il n'en faut qu'une Dragme pour faire la fortune d'un Homme, convenons que ce sont de vilaines gens que ces Adeptes (Jean Baptiste de Varenne, Le Glaneur Historique, Moral, Litteraire Et Galant, Tome 8, 1732 - www.google.fr/books/edition).

 

Typologie

 

Le report de 2094 sur la date pivot 1326 donne 558.

 

Partageant le destin de l'Empire d'Occident en pleine décomposition, la Sardaigne passa en 445 sous la domination des Vandales. Mais ceux-ci ne la conservèrent pas longtemps. En 558 elle tomba aux mains des Byzantins. Sous le gouvernement de Byzance le pays continua à se dépeupler et à s'appauvrir, les fonctionnaires impériaux se contentent de lever les impôts et de lutter contre les razzias des pâtres de la «Barbaria sans se soucier autrement des besoins des autochtones. Profitant de cette incurie administrative le pape St Grégoire le Grand, qui possédait à la suite de donations faites à l'Eglise romaine d'importants biens dans la région, se substitua progressivement à l'autorité vacillante de l'Empire d'Orient (Ernest Weibel, La création des régions autonomes à statut spécial en Italie, 1971 - www.google.fr/books/edition).

 

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