Louis le Hutin roi de Navarre

Louis le Hutin roi de Navarre

 

VIII, 86

 

2093-2094

 

Par Arnani Tholoser Villefranque

Bande infinie par le Mont Adrian,

Passe rivière Hutin par pont la planque

Bayonne entrer tous Bichoro criant.

 

Par Hernani, Tolosa, Villafranca de Orio, “bande infinie”, c’est-Ă -dire d’innombrables envahisseurs, venus de Castille puisqu’ils dĂ©bouchent par le fameux passage souterrain du Mont San Adrian, traversent la Bidassoa Ă  Irun par un pont de planches, entrent enfin Ă  Bayonne oĂą tous les habitants poussent leur traditionnel cri d’alarme et de ralliement: Biaforo. J’estime en effet que, sans forcer les choses, Hutin peut ĂŞtre considĂ©rĂ© comme une coquille pour Hurin, Hurin Ă©tant une mĂ©tathèse du nom d’Irun dont il existe des exemples anciens. De mĂŞme, j’incline Ă  voir dans Bichoro : une banale erreur typographique pour Biaforo; clameur – soit dit en passant – qui n’était pas l’apanage des seuls Bayonnais, puisque, par exemple, c’est Ă  l’appel presque semblable de Via fora que les Catalans se soulevèrent, l’an 1461, contre Jean II d’Aragon, en faveur du Prince de Viane (Philippe Veyrin, Deux quatrains de Nostradamus relatifs au Pays Basque, BSB nÂş 72, 1955 - core.ac.uk).

 

Il y a cependant un Villefranque près de Bayonne, dans le Pays Basque comme Hernani (côté espagnol). Toulouzette est dans les Landes, tandis que Tolosa est en Guipuscoa comme Hernani (Jacques Halbronn, Le texte prophétique en France: formation et fortune, Tome 3, 1999 - books.google.fr).

 

"Hutin" / "Hurin"

 

Pampelune qui est depuis sa fondation un lieu de passage, était vasconne et s’appelait Iruñea (Le Pays Basque au Moyen-Âge (du Ve au XIe siècle) - www.muturzikin.com).

 

Gardons Hutin, sachant que Louis X le Hutin, fils aĂ®nĂ© de Philippe IV le Bel, fut de part sa mère roi de Navarre, en mĂŞme temps que roi de France ; et c'est le premier. Il est des trois frères qui terminent les CapĂ©tiens directs.

 

Le Guipuzcoa

 

Alegria, surnommé de Dulanci, bourg dans une vallée formée par le mont San Adrian, sur lequel passe un chemin escarpé qui conduit dans la province d'Alava & dans la vieille Castille. Ce chemin est d'abord obscur dans un espace de 40 à 50 pas parcequ'il est taillé dans le roc. Le mont St. Adrian est regardé comme le plus haut de ceux qui forment les Pyrénées.

 

Villa franca, bourg entouré de murailles, dans une vallée, au bord de l'Araxes.

 

Tolosa ou Toloseta, bourg entouré de murailles, dans une vallée, au bord de l'Araxes, sur lequel est un pont. C'est dans ce bourg que se trouvent les archives de la province de Guipuscoa (Anton Friedrich Büsching, Nouveau traité de géographie, Tome 3, traduit par Joseph Mathias Gérard de Rayneval, 1769 - books.google.fr).

 

Les Pyrénées cantabriques s'étendent du plateau de Raynosa au col de Goritty, à travers l'ancien pays des Cantabres, et constituent, à la suite des monts Ibériens, le faîte de partage des eaux de l'Espagne. Elles séparent le bassin supérieur de l'Ebre, c'est-à-dire la Castille-Vieille, l'Alava et la Navarre, de la province de Santander, de la Biscaye et du Guipuzcoa. La longueur de la chaîne est d'environ 200 kilomètres. Dans la sierra Salinas (1,754 m.), avec le col de même nom, passe la grande route de France, et qui se continue par la sierra d'Aralar qui commence aux sources de l'Orio et de l'Arga, par les monts d'Arrabiscar, à l'est desquels se trouve le mont San-Adrian, et finit au col de Gorilly. La hauteur moyenne de cette chaîne, qui sépare la Navarre du Guipuzcoa, est d'environ 2,000 mètres. (Géographie universelle, Tome 1, Furne et Cie, 1865 - books.google.fr).

 

Le Guipuzcoa et le diocèse de Bayonne

 

La partie espagnole du diocèse de Bayonne comprenait-elle, au moyen âge, et jusqu'en 1566, les provinces de Guipuzcoa et Biscaye, comme le prĂ©tend de Thou, citĂ© par Oihenart ? Il y a sans doute lĂ  exagĂ©ration manifeste. Toutefois Oihenart lui-mĂŞme est-il donc si tĂ©mĂ©raire d'affirmer que toute la rĂ©gion du Guipuzcoa, entre la Bidassoa et l'Urola, faisait partie de l'ancien diocèse de Bayonne? Il appuie son dire sur la fameuse carte d'Arsius, Ă©vĂŞque de Labourd vers 980, charte confirmĂ©e dans les mĂŞmes termes, en avril 1106, par le pape Pascal II, et qui donne pour limites du diocèse en Espagne les vallĂ©es d'Urdach et de Bastan jusqu'au Port de Velate, la vallĂ©e de Lerin en Navarre, puis en Guipuzcoa la terre d'Ernani et de Saint-SĂ©bastien de Pusico jusqu'Ă  SainteMarie de Arrosth et San Adrian. Or, San Adrian est un passage fameux entre le Guipuzcoa et la Biscaye, Ă  1540 mètres au-dessus du niveau de la mer, dĂ©pendant de Cegama, formant un tunnel naturel reliant les deux provinces y a lĂ  un antique ermitage qui a Ă©tĂ© prĂ©cisĂ©ment restaurĂ© cette annĂ©e, et Ă  cette occasion le curĂ© du lieu, M. de Zabala, a fait Ă  la commission historique de la province d'intĂ©ressantes communications sur la dĂ©couverte d'antiques monnaies et de grottes prĂ©historiques. Pourquoi ne pas admettre, avec Oihenart, que Santa-Maria de Arrosth serait Urostil ou Urrestila, quartier d'Azpeitia, ou peut-ĂŞtre Arrona, autre quartier plus en aval dans la vallĂ©e de l'Urola et dĂ©pendant de Cestona? D'autre part, n'est-il pas remarquable que ArrostĂ©guy veut dire, en basque guipuzcoan, lieu frĂ©quentĂ© par les Ă©trangers et les voyageurs ? Le scribe d'Arsius aura voulu dĂ©signer quelque autre passage du cĂ´tĂ© de la mer, indiquant ainsi les quatre points extrĂŞmes du Guipuzcoa Hernani et Saint-SĂ©bastien au Nord, San Adrian et Arrosth (abrĂ©viation pour ArrostĂ©guy) au Sud et Ă  l'Ouest ? (Charles Bernardou, Azpeitia, Bulletin de la SociĂ©tĂ© des sciences & arts de Bayonne, 1894 - books.google.fr).

 

"Bande infinie" : banditisme

 

N'importe quel dictionnaire usuel nous apprendra que la bande, issue du provençal banda, est à rattacher, par le latin bandum comme par le germanique bandwa, à l'«étendard». C'est donc au prix d'une métonymie que l'on serait passé de ce signe de ralliement à la troupe elle-même. Le bandit, lui, descend officiellement du bandito italien, à l'origine participe passé d'un verbe bandire qui signifiait «bannir». À cette aune, il est beaucoup moins celui qui appartient à une bande présumée malfamée que l'exilé, le proscrit, qui a été mis au... ban de la communauté.

 

Ce serait donc pur hasard si ces deux mots se ressemblent comme deux gouttes d'eau passablement croupie ? Gardons-nous de passer d'un extrĂŞme Ă  l'autre... Comme c'est souvent le cas dans la langue, les deux lignĂ©es se sont probablement influencĂ©es, et plus d'un Ă©tymologiste fait remonter bandit au gotique bandwo, « signe », cousin germain (c'est le cas ou jamais de le dire !) du bandwa Ă©voquĂ© plus haut. Le monde est donc plus petit qu'on ne l'imaginait, et notre malheureux bandit se trouve repris... par la bande ! (alafortunedumot.blogs.lavoixdunord.fr).

 

Sancho VII le Fort, roi de Navarre jusqu’à sa mort en 1234, avait toutefois, pendant les vingt années antérieures à la perte du Guipúzcoa, jeté les bases d’une politique urbaine, commerciale et maritime. Mais comme on sait que la noblesse y était et y sera encore longtemps hostile, il est probable que cette classe agraire espérait que le Castillan mît fin aux velléités du Navarrais en faveur d’une économie de type nouveau. Cela expliquerait encore mieux l’infidélité vassalique. L’histoire ultérieure montre qu’elle s’est trompée, car – même sous la domination castillane – la région sera encore, pendant des siècles, le théâtre de conflits – non seulement entre nobles, mais surtout de ceux-ci avec les villes de plus en plus nombreuses –, voire même, à cause de la crise du XIVe siècle néfaste pour la noblesse, d’un banditisme virulent à la frontière entre la Navarre et la province de Guipúzcoa, devenue castillane. Ce phénomène se manifesta du reste déjà en 1261, mais s’accentua au cours des siècles suivants (Jean Baerten, Chroniques, actes faux et droits territoriaux. étude critique sur le passage définitif du territoire basque Guipúzcoa de la Navarre à la Castille, en 1200, et son utilisation politique par les autorités basques. Revue belge de philologie et d'histoire, tome 88, fasc. 4, 2010 - www.persee.fr).

 

Les seigneurs de guerre dans le Guipuzcoa, les Parentes mayores (chefs de clan), n'Ă©taient que des bandits profitant de la situation de frontière (de Labourd en Aquitaine, et de la Navarre) de leur province. Les chefs de clan poussaient leurs hommes Ă  voler le bĂ©tail, couper le bois, brĂ»ler les villages; contre eux, le royaume de Navarre devait sans cesse entretenir des armĂ©es pour garder châteaux et villages. Les lignages Lazcano et Oñaz Ă©taient les plus acharnĂ©s dans ces incursions. Puis les rois de Navarre Charles II et Charles III de 1350 Ă  1405 virent un très grand avantage Ă  enrĂ´ler ces gens qui ne savaient que se battre. Ce fut une Ă©poque très rentable de mercenariat pour tous ces Murua, Oñaz, Berastegui, Gamboa, Abendaño, qui ne s'interdisaient pas la guerre privĂ©e sur leur propre pays, entre deux expĂ©ditions en Aquitaine ou contre la Castille des Trastamares (B. Leroy, Bibliographie : Los señores de la guerra y de la tierra, nuevos textos para el estudio de los Parentes Mayores guipuzcoanos (1265-1548) (collectif), Revue historique, NumĂ©ro 620, 2001 - books.google.fr).

 

Le royaume de Navarre occupait au XIVe siècle dans ses provinces septentrionales une position stratĂ©gique au passage des vallĂ©es Tandis que le Sud Ă©tait quadrillĂ© de châteaux royaux et organisĂ© autour de villages groupĂ©s, perchĂ©s au-dessus de vastes espaces cĂ©rĂ©aliers, le Nord, montagneux, comptait pour sa dĂ©fense sur les solides communautiĂ©s villageoises que les rois avaient dotĂ©es de «fueros». Sous le règne de Sanche le Fort, au tournant du XIIe et du XIIIe siècle, la Castille avait repris l'Alava et le Guipuzcoa : la navarraise des «Montagnes» se trouvait dĂ©sormais menacĂ©e. Il a fallu nĂ©anmoins plus d'un siècle pour assister Ă  l'essai timide d'un nouveau système de dĂ©fense des frontières : la crĂ©ation de bastides, une nouveautĂ© pour la Navarre. C'est, en effet, en 1312 seulement, que Louis le Hutin appliqua Ă  son royaume de Navarre le système qui avait fait ses preuves en Aquitaine, et fonda deux bastides, les deux seules connues en Navarre, la mĂŞme annĂ©e : en juillet, Labastide-Clairence Ă  l'extrĂŞme nord de la province d'Outre-Ports, pour garder la frontière du Labourd; en septembre, Echarri-Aranaz, dans le Val de Araquil, au nord-ouest du royaume, contre le Guipuzcoa. Si Labastide-Clairence est bien Ă©tudiĂ©e, sa contemporaine souffre un peu de l'oubli.

 

Le pays n'Ă©tait pas dĂ©sert lorsque le roi et ses reprĂ©sentants en Navarre dĂ©cidèrent cette fondation. Le gouverneur Enguerrand de Villiers reçut une supplique des gens de la Terre de Aranaz, une protection militaire, dans le courant de l'annĂ©e 1312. Dans la province des «Montagnes» entourant le bassin de Pampelune, de petits villages vivaient d'Ă©conomie pastorale. Echarri Ă©tait l'un d'entre eux, peuplĂ© de quelques familles paysannes, sur la rive droite de l'Araquil, affluent de l'Arga. Au XIVe siècle, les Castillans pouvaient descendre aisĂ©ment, dans ces vallĂ©es, puisque la frontière suivait les lignes de crĂŞtes, Certes, le roi entretenait dans cette rĂ©gion châteaux «t garnisons, mais les Guipuzcoans savaient Ă©viter les forteresses et rançonner les localitĂ©s trop petites et trop faiblement armĂ©es pour leur rĂ©pondre, avant mĂŞme que l'alerte ait pu ĂŞtre donnĂ©e dans le château de la montagne voisine. Cette insĂ©curitĂ© imposa la des paysans; c'est sans doute la seule raison importante. Le pays n'Ă©tait pas pauvre, car la charte de fondation fait obligation aux habitants de verser de fortes sommes au trĂ©sor dès 1312. Mais il ne lui manquait que la sĂ©curitĂ©. La supplique de 1312 dit : «Devant nous... sont venus les gens de la terre de Aranaz... Ils nous ont exposĂ© que si une bastide se trouvait dans la terre de Aranaz, en frontière du pays des brigands, Ă  Echarri, cette localitĂ© servirait Ă  la dĂ©fense et Ă  la mise en valeur de la terre, et serait un bienfait pour Notre Seigneur le Roi et le Royaume; c'est pourquoi ils nous ont demandĂ© de la peupler»...

 

La région frontalière n'était pas sûre. En 1321 les Guipuzcoans avaient provoqué l'intervention du gouverneur Pons de Mortagne, Vicomte d'Aunay, qui voulait arrêter leurs ravages ... «C'est assavoir murtres les roncins, ravir fames, ardoir mesons, et moût dautres choses qui estoient en grant preiuduce e dommage du Roy, du Royaume et des habitants.» Arch, nat., JJ, n° 62, fol. 26-28. Cette expédition fut un échec, et le château de Gorriti fut perdu momentanément. La guerre reprit en 1335 et ce fut le château de Aussa qui tomba aux mains des Castillans. Tous les ans, le gouverneur de la province devait prévoir des «chevauchées» et des escortes pour accompagner les troupeaux en transhumance. Il fallut surtout des garnisons de «frontaliers» dans les châteaux et, à partir de 1338, le Merino personnellement fut chargé de la bastide de Echarri-Aranaz, avec 50 hommes à pied (Archives de Navarre, Registre de Comptes, t. 39, folio 40).

 

En 1349, les habitants de la Merindad de Las Montanas et ceux de la province de Estella adressèrent des suppliques au gouvernement. Le rouleau en est conservĂ© (Archives de Navarre, Comptes, Caj. 31, n° 55). Les bandits de Guipuzucoa avaient des amis parmi les Navarrais. Leur quartier gĂ©nĂ©ral Ă©tait Lizarriaga, toute proche de Echarri-Aranaz. Dans cette dernière ils pĂ©nètrent souvent, poussent l'audace jusqu'Ă  exiger des rançons, voire prendre des repas Ă  l'intĂ©rieur des murs. Le notaire assure qu'on lui a volĂ© un cheval dans sa maison. Les jurats renchĂ©rissent et demandent un secours Ă©nergique. Cest le Merino de Estella, Johan-Dreu de Rovray, qui est chargĂ© de l'expĂ©dition punitive (BĂ©atrice Leroy, Une bastide frontière navarraise du XIVe siècle : Echarri-Aranaz. In: Annales du Midi : revue archĂ©ologique, historique et philologique de la France mĂ©ridionale, Tome 86, N°117, 1974 - www.persee.fr).

 

Echarri-Aranaz se trouve juste au nord du Mont San Adrian.

 

Louis Ier roi de Navarre

 

Louis, né à Paris le 4 octobre 1289, est le fils aîné du roi de France Philippe IV le Bel et de la reine de Navarre Jeanne Ière. Le 2 avril 1305, à la mort de sa mère, il hérite de la couronne de Navarre et du comté de Champagne. La Navarre est administrée localement par un gouverneur nommé par le roi de France. Philippe le Bel, qui maintient ses fils sous sa dépendance et son strict contrôle selon les habitudes héritées de Philippe Auguste, n'autorise Louis à se rendre en Navarre qu'en août 1307 pour s'y faire couronner par l'assemblée des nobles, les Cortes. Louis part pour la Navarre avec son épouse, Marguerite de Bourgogne, et une forte délégation de nobles français. Les époux sont tous deux couronnés à Pampelune, le 1er octobre 1307, roi et reine de Navarre (fr.wikipedia.org - Louis X).

 

Du 20 octobre au 12 novembre, Louis demeura Ă  Estella; de lĂ  il passa Ă  Olite et Tudela, oĂą il se trouvait le 30 de ce mois; puis Ă  SangĂĽesa le 5 dĂ©cembre et Ă  Pampelune du 8 au 14 dĂ©cembre, après quoi, le 15 de ce mois, il entreprit le retour en France par St-Jean-Pied-de-Port. Et il ne remit plus les pieds en Navarre. La tournĂ©e, malheureusement, avait aussi servi Ă  prĂ©parer une vĂ©ritable rĂ©pression. Certains, comme Fortun Almoravid et Martin Ximenez de Aibar, auraient mĂŞme Ă©tĂ© emmenĂ©s et jetĂ©s en prison Ă  Toulouse, tandis que des fonctionnaires français, clercs et autres, prenaient habituellement la place des navarrais. Passe encore pour un Oger de MaulĂ©on, gentilhomme de la Soule voisine et fidèle vassal du roi de Navarre, que l'on verra promu au poste d'alferez du Royaume. Mais la population fera grise mine aux gouverneurs, "inquisiteurs" et "rĂ©formateurs" qui vont dĂ©sormais se succĂ©der, chargĂ©s avant tout de rĂ©primer les fameuses Juntas d'Obanos, SangĂĽesa et autres, expression de l'opinion, non pas des nobles seulement, mais de l'ensemble du peuple navarrais. On s'aperçut aussi que le droit de patronat ecclĂ©siastique, cĂ©dĂ© rĂ©cemment aux rois par diverses villes, passait dĂ©sormais Ă  des "patrons" Ă©trangers. La situation n'Ă©tait pas seulement humiliante, mais dangereuse. Et il est assez surprennant que de puissants voisins n'en aient pas tirĂ© parti (plus que par des scrupules, retenus par leurs propres difficultĂ©s ?). Quelques historiens comme Moret et Traggia — ont cependant signalĂ© des incursions (plutĂ´t que des invasions proprement dites) venues d'Aragon, et qui fournirent notamment aux habitants de SangĂĽesa l'occasion de manifester leur valeur : en prenant l'offensive Ă  leur tour, faisant lever le siège de Pitillas, battant leurs ennemis sur la rivière de San Adrian, leur arrachant mĂŞme un Ă©tendard dont les "barres" figureront dĂ©sormais sur les armes de leur ville ! Quoi d'Ă©tonnant que dans ce climat de mĂ©contentement gĂ©nĂ©ralisĂ© on vĂ®t surgir Ă  nouveau le pĂ©ril d'un banditisme qui crĂ©ait un Ă©tat d'alarme permanent ? C'est l'heure en particulier oĂą la dĂ©cision devra ĂŞtre prise de fonder dans la Burunda une ville-forte comme Echarri-Aranaz oĂą les populations d'alentour viendront chercher refuge (Pierre Narbaitz, Nabarra ou Quand les Basques avaient des rois, 1978 - books.google.fr).

 

"Bichoro" : biafore

 

Biaffore (du latin via et foras) signifie proprement : Sortez sur la voie, au dehors. En BĂ©arn, on prononce biahore; Montaigne dit bihore, et Goudelin biaforo. On trouve via fora et via fors dans la Chronique de Raymond Montaner. C'est un appel Ă  l'aide; c'est le grand cri d'alarme et de rassemblement, au moyen âge, de Bordeaux en Aragon (Eugène Cordier, Usages basques, Explorations pyrĂ©nĂ©ennes: bulletin trimestriel de la SociĂ©tĂ© Ramond, Volumes 1 Ă  4, 1865 - books.google.fr).

 

Face Ă  l’agression criminelle, l’attachement envers les procĂ©dures accusatoires et les mĂ©diations pĂ©nales paraĂ®t vulnĂ©rabiliser les communautĂ©s qui afficheraient de tels privilèges. Toutefois, il serait inexact d’y voir un rejet des formes institutionnelles de la justice et de la police. Les mĂŞmes coutumes qui mĂ©nageaient l’avenir entre les voisins n’en autorisaient pas moins l’usage licite de la force et le dĂ©ploiement des contraintes de corps les plus abouties. L’univers mental des oustaus n’est pas un monde de maquignons oĂą l’on s’arrangerait en toutes circonstances aux dĂ©pens de la puissance publique. Si les proclamations coutumières entravent le dĂ©veloppement des procĂ©dures coercitives, c’est pour mieux en conserver l’usage. Ă€ bien y regarder, la faiblesse supposĂ©e des moyens de justice qui rĂ©sulte des privilèges des voisins nĂ©cessite l’existence simultanĂ©e d’une force licite venant parer l’offense invasive. Cette force surgit des actes de la pratique sous une forme Ă©tonnante et explosive : le cri de justice jetĂ© par les rues. Selon les cas, il s’écrit «Biafora !», «Biafore !», «Bihora !» ou «Bihore !». Du XIVe siècle au dĂ©but du xvie, les mentions de ce cri se rencontrent dans toute la Gascogne. En latin, il se rĂ©dige via foris et dĂ©rive en gascon par bie, ou biot, et hore ou fors Ă  savoir la voie, la rue et le dehors. LittĂ©ralement, il appelle le public dans la rue en requĂ©rant que tous les besins sortent dehors et quittent leurs oustaus pour rĂ©pondre Ă  l’appel. Les sources conservĂ©es n’en laissent hĂ©las que peu de traces, essentiellement Ă  travers les rĂ©cits circonstanciĂ©s des crimes, car cette procĂ©dure entraĂ®ne une difficultĂ© pour l’historien : elle est orale. MalgrĂ© cette incommoditĂ© documentaire, nous constatons la vivacitĂ© de son usage, l’étendue des droits de poursuite qu’elle permet et l’importance des consĂ©quences lĂ©gales qu’elle engendre. Au cri de «Biafora !» entendu, la population s’assemble, s’arme et la foule ainsi constituĂ©e se lance bruyamment Ă  la poursuite d’un suspect. AutodĂ©fense collective ? Ce serait trop simple car, Ă©voquĂ© par la coutume, le cri s’assimile aussi Ă  la plainte en justice, c’est-Ă -dire la clameur. Toutefois, cette clameur est qualifiĂ©e de « publique » et s’écrit donc clamor publicus, «ley de clam publici», ou «clameur publicque». Les avancĂ©es de la recherche en matière de sons et de bruits au Moyen Ă‚ge permettent dĂ©sormais de comprendre cet Ă©trange phĂ©nomène, sans doute sous-estimĂ©.

 

La clameur de biafore se rencontre dans les archives gasconnes dès le XIIIe siècle. Cette institution est alors présentée comme une «clamor de viafora». Ce dernier terme livre ici son sens car cette rédaction dérive des termes cridafora et criafora4. Criée publique du droit, elle s’enchâsse donc dans l’identité forale et dans les privilèges que l’on proclame à l’occasion d’une iniquité. Le terme viafora évoque le for, sa publicité et la mobilisation humaine.

 

Le «Biafore !» est avant tout un cri d’appel judiciaire, un son poussĂ© par une victime qui suscite une Ă©motion gĂ©nĂ©rale d’une grande vigueur. Le «Biafore !» a donc pour point de dĂ©part une situation de flagrance criminelle. Une victime subit un outrage qu’elle ne peut faire cesser et qui nĂ©cessite donc que l’ensemble de la collectivitĂ© en soit alertĂ©. Au «Biafore !» criĂ©, la victime ajoute la nature de l’offense qu’elle subit : «forse !», «tort !», «forse de tort !», «ladres !», ou «justice !» pour mieux indiquer ce qu’elle affronte ou ce Ă  quoi elle fait appel. Cri d’alarme, le rituel qui dĂ©clenche la clameur publique constitue donc aussi un appel au secours adressĂ© aux voisins. Tous, hommes comme femmes, jeunes comme vieux, peuvent crier le «Biafore !» tant qu’ils sont des membres de la communautĂ© qu’ils veulent rassembler. Le cri peut ĂŞtre poussĂ© en tout point du territoire de la communautĂ© et il n’est ni lieu, ni heure qui en interdise l’usage. MĂŞme si la rue est son point d’origine privilĂ©giĂ©, le cri peut ĂŞtre poussĂ© depuis une maison assaillie d’agresseurs, sur les chemins de campagne, voire d’une prison. Les femmes crient aussi et nous rencontrons essentiellement le cas lorsqu’elles dĂ©fendent leur mari agressĂ©. On pousse le cri lorsque l’on est convaincu de subir une voie de fait, que l’on est sous la menace de la force et du tort grave portĂ© aux droits dont on pense jouir. Le «Biafore !» n’était donc pas dĂ©clenchĂ© pour des causes lĂ©gères. L’homicide Ă  la suite d’une querelle ne fait jamais l’objet d’un cri. Bien que la mort ou le sang versĂ© soient d’une exceptionnelle gravitĂ©, la quasi-totalitĂ© des rixes ne brisent pas les usages de la communautĂ© et relèvent des procĂ©dures de mĂ©diation pĂ©nale ou de haute justice. On ne crie pas Ă  l’encontre d’un membre de la collectivitĂ© car la procĂ©dure est faite contre les agressions Ă©trangères, commises par des Ă©trangers au fonctionnement de la sociĂ©tĂ© villageoise. Le cri est donc poussĂ© par un membre de la communautĂ©, sur le territoire de celle-ci et en raison d’évĂ©nements ayant les caractĂ©ristiques suivantes : flagrance, imprĂ©visibilitĂ©, extranĂ©itĂ© et gravitĂ© pour la collectivitĂ©.

 

Le contrĂ´le social relevait de la communautĂ© d’habitants qui exceptionnellement pouvait se mouvoir par le cri judiciaire. En revanche, la rĂ©pression des dĂ©lits ainsi constatĂ©s relevait d’une justice que nous dirons ĂŞtre communautaire en ce sens qu’elle reprĂ©sente la communautĂ©, que celle-ci soit seigneuriale, comtale, royale ou, de manière plus communĂ©ment admise, consulaire. L’institution prenait alors le relais du contrĂ´le exercĂ© par les vezins. Que le constat du crime vĂ®nt de la «clamor» ou du «Biafore !», c’était le rĂ´le des justices constituĂ©es que de le poursuivre. Place Ă  la Mayso cominal donc, la maison qui reprĂ©sente les maisons et qui constitue un fait de culture politique rĂ©gionale, Ă©voquĂ© mĂŞme si le consulat n’est que peu instituĂ© en droit. Or, les juges municipaux n’instruisaient qu’après avoir Ă©tĂ© sollicitĂ©s, ce qui explique la faiblesse des moyens qui leur Ă©taient accordĂ©s. Les carences des institutions rĂ©pressives apparaissent au grand jour dès lors que la connaissance du crime ne se constatait pas dans sa flagrance. Face au crime organisĂ© invisible des communautĂ©s et de leurs magistrats, les usages n’avaient d’autre rĂ©ponse que l’exemplaritĂ© des peines administrĂ©es (Pierre PrĂ©tou, Crime et justice en Gascogne : Ă  la fin du Moyen Ă‚ge, 2011 - books.openedition.org).

 

Le 1er janvier 1295, les ouvriers des mines de fer prirent la tête du soulèvement de Bayonne contre les Français (Bulletin de la Société archéologique, historique, littéraire & scientifique du Gers, Volumes 84 à 85, 1983 - books.google.fr).

 

Charles de Valois en 1295, Robert d'Artois en 1296 ramenèrent les Anglais Ă  leur position initiale, autour de Bayonne, de Bourg et de Blaye. La trĂŞve de Vive-Saint-Bavon de 1297 acheva de ramener le calme dans ce secteur, si l'on excepte le soulèvement de Bordeaux en 1302. Toutefois, il fallut au roi de France entretenir assez longtemps des garnisons : ainsi celle de Bordeaux qui aurait coĂ»tĂ© Ă  elle seule 40.000 livres tournois par an en 1298-1299 (Philippe Contamine, Histoire militaire de la France: Des origines Ă  1715, Tome 1, 1992 - books.google.fr).

 

En 1303, on discutait toujours pour mettre au net le contenu de la restitution territoriale prĂ©vue en Guyenne par l'arbitrage pontifical. En s'insurgeant, dès janvier 1303, contre la domination française, les bourgeois de Bordeaux hâtèrent les choses. Les Français chassĂ©s mais les Anglais non encore revenus, une sorte de rĂ©publique s'instaura sur la ville, ce que ni l'un ni l'autre des rois n'entendait laisser s'Ă©terniser : l'exemple pouvait ĂŞtre contagieux. Dans le mĂŞme temps, quelques changements survenaient dans l'entourage politique de Philippe le Bel. Intransigeants quant aux droits du CapĂ©tien sur la Guyenne, le chancelier Pierre Flote et le comte Robert II d'Artois Ă©taient morts en juillet 1302 Ă  Courtrai. Le 20 mai 1303, le troisième traitĂ© de Paris rendait Ă  Édouard la totalitĂ© de ce qui avait Ă©tĂ© conquis par les Français en Guyenne depuis 1294, y compris Bordeaux oĂą le PlantagenĂŞt se rĂ©installa en juin et se garda bien de rĂ©tablir la mairie Ă©lective confisquĂ©e depuis quarante ans (Jean Favier, Les PlantagenĂŞts: Origines et destin d'un empire (XIe-XIVe siècles), 2004 - books.google.fr).

 

En 1304, après les troubles qui avaient suivi la reprise de la ville sur les Français, on défendit aux Bayonnais dans un règlement édicté par Pélegrin de Vièle, maire de Bayonne, de sortir de la ville et d'aller travailler dans la banlieue sans armes; s'ils étaient attaqués, ils devaient pousser le cri de biafore et tous ceux qui l'entendaient étaient obligés de se porter à leur secours.

 

En 1307, un établissement municipal que nous avons déjà cité déclara que si un étranger nuisait (fesse mau ny tort) à un voisin ou lui prenait quelque chose contre sa volonté, le voisin pourrait impunément le blesser ou le tuer, mais c'est là simplement la consécration du droit de légitime défense, à un moment où les environs de Bayonne manquaient de sécurité et où l'on obligeait les voisins à ne sortir des murs qu'armés. A diverses reprises, entre autres en 1281 et 1284, les rois d'Angleterre durent rappeler aux maires que c'était au prévôt qu'appartenait la juridiction des étrangers. Le cumul des fonctions de prévôt, de châtelain et de maire, fréquent au XIIIe siècle, devait naturellement contribuer pour une bonne part à favoriser ces empiètements de juridiction et amener une véritable confusion entre les diverses fonctions que remplissait le même personnage (A. Giry, Les étblissements de Rouen, Sciences historiques et philologiques, Volume 55, 1883 - books.google.fr).

 

BIAFORE. Grito de alarma que apenas puede traducirse sino por estas palabras : Enviad fuera, «socorro». Se usaba en la Edad Media para pedir ayuda. [...] Los alrededores de Bayonne no eran muy seguros; el alcalde, PelegrĂ­n de Viele, mandaba a los jornaleros que no fueran a los trabajos de las viñas sino armados de lanzas, de dardos, de ballestas, de hachas, del arma, en una palabra, que tuvieran o que supieran manejar mejor, bajo multa de 6 soles morlanes (Enciclopedia general ilustrada del PaĂ­s Vasco, Tome 5 : Bi-Caballe, 1970 - books.google.fr, aunamendi.eusko-ikaskuntza.eus).

 

Guillaume-Pierre Godin

 

La paix signée avec la France (20 mai 1303), sa lutte contre Boniface VIII brusquement terminée par la mort de l'infortuné pontife (11 octobre 1303), Philippe-le-Bel s'était mis en route pour Toulouse; il y arriva le jour de la Noël, accom. pagné de la reine Jeanne de Navarre, sa femme, et de ses fils, Louis, Philippe et Charles. le roi de France, suzerain du roi d'Angleterre pour le duché de Guyenne, n'était pas fàché de faire acte de souveraineté aux portes même du duché, à l'égard d'un prince tel que jeune Gaston, son vassal pour le comté de Foix, mais qui pour la vicomté de Béarn relevait directement du duc de Guyenne. [...]

 

Un Bayonnais destiné à la plus brillante fortune sacerdotale, déjà connu probablement, du roi de France et demeurant alors à Toulouse, acheva d'y gagner sa confiance: nous voulons parler de Guillaume Pierre Godin, humble frère prêcheur, et plus tard célèbre sous le nom de «cardinal de Bayonne.» Pierre Godin, né dans la rue Bourgneuf vers 1260, non loin du couvent des Frères Prêcheurs, entra fort jeune dans cette illustre communauté. Clément V, nouveau pape en août 1305, quitte Bordeaux, il s'arrête à «Prouille», le séjour de prédilection de Godin, traverse Béziers, Montpellier, Nimes, et arrive à Lyon, où Philippe-le-Bel, le roi de Majorque, le comte de Foix et une foule de princes et de seigneurs assistent à son couronnement. Avignon devient définitivement le siége de la papauté; les Templiers sont livrés à la convoitise du roi faux-monnayeur, et notre Godin, successivement chapelain, théologien de Sa Sainteté, maître du sacré palais, l'oreille à tous les secrets d'état, la main à toutes les intrigues diplomatiques, amassera des titres au chapeau de cardinal, sans compter d'immenses richesses (Jules Balasque, Études historiques sur la ville de Bayonne, Tome 3, 1875 - books.google.fr).

 

Guillaume-Pierre Godin ou Godieu est nommé en 1312 cardinal-prêtre de Sainte-Cécile, cardinal-évêque de Sabine en 1317, légat pontifical en Castille au concile de Valladolid en 1322. Il contribua puissamment à la construction et à l'ameublement de la cathédrale et de l'église des Jacobins dans sa ville natale. Il meurt en 1336 en Avignon (Paul Mesplé, Les Jacobins de Toulouse, 1954 - books.google.fr).

 

Pierre Gaveston

 

Le gascon Gaveston, favori d'Edouard II devenu roi d'Angletrre en 1307, parmi les donations qui lui furent faites en 1308, reçut la prévôté de Bayonne.

 

Gaveston est crĂ©Ă© duc de Cornouailles, avec concession de toutes les terres qui avaient appartenu Ă  Edmond d'Almaine, fils de Richard roi des Romains; puis fiancĂ© Ă  la nièce du roi; enfin, faveur incroyable ! investi de la rĂ©gence du royaume au moment oĂą le jeune roi se rend en France afin d'y exĂ©cuter, après avoir prĂŞtĂ© hommage pour la Guyenne, l'une des principales clauses du traitĂ© de paix de 1303 celle d'Ă©pouser Isabelle fille du monarque français (Jules Balasque, Études historiques sur la ville de Bayonne, Tome 3, 1875 - books.google.fr).

 

Gaveston est assassiné en 1312 par les barons anglais conduit par Thomas de Lancastre (fr.wikipedia.org - Pierre Gaveston).

 

"pont de planches" : Bayonne ou Lyon ?

 

La construction d'un premier pont en bois Ă  Bayonne date de 1125 (Philippe Veyrin, Les Basques de Labourd, de Soule et de basse Navarre (1943), 2013 - books.google.fr).

 

Le pont Saint-Esprit franchit le large cours de l'Adour. Il a été maintes fois renouvelé depuis le pont de bois du XIIe siècle. Sur l'autre rive, il débouchait, face à la porte de France, sur le Réduit, massif éperon de Vauban dont l'échauguette marquait le confluent avec la Nive. Porte et réduit rasés ont fait place à un square où se dresse, en bronze, Mgr Lavigerie, enfant de Bayonne (Pierre Dubourg-Noves, Bayonne, 1986 - books.google.fr).

 

En 1310, lorsque Pierre de Savoie, archevĂŞque de Lyon, eut dĂ©clarĂ© la guerre au roi Philippe le Bel et que ce dernier eut chargĂ© son fils Louis le Hutin de s'emparer de Lyon, de vive force, Ă  la tĂŞte d'une forte armĂ©e, les troupes du roi purent pĂ©nĂ©trer dans la ville Ă  l'aide de radeaux qu'elles avaient placĂ©s sur la SaĂ´ne. D'après une chronique en vers, attribuĂ©e Ă  Geffroi de Paris (clerc Ă  la chancellerie des rois de France mort vers 1320), insĂ©rĂ©e dans le recueil des Histoires de France. T. XVII p. 131, ces radeaux Ă©taient ainsi construits :

 

Et sus la Sone ont amassée

Main fust et mainte planche liée.

Tant que sus Sone orent passage

Dont la ville eust grant domage.

 

Toutefois, M. Bonassieux, dans sa remarquable étude sur la réunion de Lyon à la couronne de France émet un doute sur l'existence de ces radeaux, mais il ajoute que Pierre de Savoie assiégé dans son chateau de Pierre-Scize, dut capituler vers le 22 juillet 1310 (Léopold Niepce, Lyon militaire: notes et documents pour servir à l'histoire de cette ville depuis son origine jusqu'à nos jours, 1897 - books.google.fr, Bouquet, Recueil des historiens des Gaules et de la France: continué par M. J. J. Brial et d'autres religieux Bénédictins et achevé par Daumon et Naudet, accomp. de sommair, de tables et de not, Tome 22, 1865 - books.google.fr, fr.wikipedia.org - Geoffroi de Paris).

 

De 1271 à 1307, les rois de France deviennent peu à peu maîtres de Lyon en fait, sinon en droit; ils sont servis par un singulier concours de circonstances. En 1307, l'archevêque et le chapitre sont forcés de signer des traités où la suprématie de la France est officiellement reconnue. [...] Ignorant sa faiblesse, l'archevêque Pierre de Savoie refuse, en 1310, d'exécuter ces traités. Philippe le Bel saisit l'occasion qui lui est offerte; il envoie aussitôt une armée à Lyon. Pierre de Savoie, fait prisonnier, n'obtiendra sa liberté du roi qu'en signant le traité de 1312. [...] Par le traité du 10 avril 1312, Philippe le Bel obtint de l'archevêque et du chapitre la cession de la juridiction de Lyon. C'est à cette date que la majeure partie des historiens ont placé la réunion de Lyon à la couronne, bien que l'annexion ne fût pas encore consommée. Tout en adoptant cette date, il est bon peut-être de ne pas la séparer de celles de 1307 et de 1315. Malgré les difficultés de son règne, Louis Hutin n'abandonne pas la conquête de son père et réunit définitivement, le 30 décembre 1315, la ville de Lyon à la France. Au moment de l'annexion, les empereurs d'Allemagne sont trop faibles pour s'y opposer. Ils ont du reste renoncé depuis longtemps à rétablir à Lyon leur autorité; la papauté leur donne inutilement son appui. Ils font contre fortune bon cœur et n'élèvent aucune réclamation contre la France (Pierre Bonnassieux, Etude sur la réunion de Lyon à la couronne, Positions des thèses soutenues par les élèves de la promotion, Ecole nationale des chartes, Volume 5, 1873 - books.google.fr).

 

Surnom de Hutin

 

Le surnom de Hutin lui fut attaché, ou pource que son père l'employoit à réprimer les hutins, c'est en vieil langage émeute, mêlée et sédition, comme il fit celle de Navarre, puis encore par deux fois celle de Lyon; ou pource que dès son enfance, au lieu des jeux puériles, il amassoit des troupes de ses égaux, et les rangeoit les uns contre les autres, présage qu'il aimeroit le hutin, c'est-à-dire les querelles et les combats; et si cela ne vous satisfait, croyez qu'à cause de ses mœurs altières il fut nommé Hutin, comme qui diroit hautain (François Eudes de Mézeray, Histoire de France, Tome 1, 1643 - books.google.fr).

Louis Hutin fut envoyĂ©, l'an 1312, par son père Ă  Lyon pour apaiser les troubles qui s'Ă©taient Ă©levĂ©s entre les habitants et Arnaud de Bresse, leur archevĂŞque [?]. Louis fit arrĂŞter le prĂ©lat : action rĂ©putĂ©e alors si hardie, que, suivant quelques auteurs c'est de lĂ  que lui est venu le surnom de Hutin, qui veut dire mutin ou querelleur (L'art de vĂ©rifier les dates des faits historiques, des inscriptions, des chroniques, et autres anciens monuments, avant l'ère chrĂ©tienne, Tome 16, 1818 - books.google.fr).

"pont la planque" : "pont et planche" ou la Loi Salique

 

Jean Juvénal reprend d'abord la généalogie de Charles VII depuis saint Louis, et il établit comment il descend en droite ligne de ce prince, par la branche des Valois, qui hérita de la couronne à défaut de mâle dans la ligne des Capétiens directs. Puis, entrant en discussion, il pose en principe que, dans aucun cas, les Anglais ne peuvent réclamer la couronne. S'ils disent que les filles sont inhabiles à succéder, Isabelle est par là même exclue; s'ils disent qu'elles sont habiles à succéder, Isabelle est encore écartée, parce que Blanche, fille de Charles-le-Bel, dernier Capétien direct, était plus proche héritière qu'elle et ses descendants; s'ils disent qu'une femme peut «faire planche et pont,» Charles, roi de Navarre, fils de Jeanne d'Evreux, et petit-fils de Louis-le-Hutin, ou encore Louis, comte de Flandre, petit-fils par sa mère de Philippe-le-Hardi, doivent venir avant Edouard III, parce qu'ils descendent de rois, tandis qu'Edouard ne descend que d'une sœur de roi. Et que les Anglais n'allèguent pas qu'il y a eu de la part de ces héritières négligence à faire valoir leur droit, car l'histoire contemporaine prouve qu'elles ont tout fait pour recueillir la couronne, et néanmoins elles ont été déclarées inhabiles et ont été écartées. Pour établir que les femmes sont incapables de succéder au trône de France, Jean Juvénal invoque la loi salique, dont il donne, comme un extrait, le texte suivant «Nulla portio in regno mulieri veniat, sed ad virilem sexum tota hereditas perveniat.» Cette loi a été confirmée et amplifiée en 802 par Charlemagne; aussi l'exclusion des femmes est-elle devenue un dicton populaire (Pierre Louis Péchenard, Jean Juvénal des Ursins, historien de Charles VI., évêque de Beauvais et de Laon, archevêqueduc de Reims: Étude sur sa vie & ses oeuvres, 1876 - books.google.fr).

 

Une femme qui ne possède pas par elle-même de droits successoraux peut-elle transmettre à ses héritiers mâles des droits qui ne lui ont jamais appartenu et, en aucun cas, n'auraient pu lui appartenir, ou, pour me servir d'une heureuse expression, peut-elle leur faire «le pont et planche» (manuscrit français 23281 de Jean de Montreuil) (Paul Viollet, Comment les femmes ont étét exclues, en France, de la succession à la couronne, Mémoires de l'Institut National de France, Académie des inscriptions et belles-lettres, Volume 34,Partie 2, 1895 - books.google.fr).

 

Jeanne II de Navarre

 

Jeanne II (28 janvier 1312 – 6 octobre 1349) est reine de Navarre de 1328 à sa mort. Elle est la seule enfant de Louis X de France et de Marguerite de Bourgogne. La paternité de Jeanne reste toutefois douteuse car sa mère a été impliquée dans l'affaire de la tour de Nesle, mais Louis X reconnaît sa fille peu avant sa mort. Cependant, les barons de France sont opposés à l'idée de voir une femme accéder au trône et élisent roi de France Philippe V, frère de Louis X. Les nobles navarrais rendent également hommage à Philippe. La grand-mère de Jeanne, Agnès de Bourgogne, ainsi que son oncle, Eudes IV de Bourgogne, essaient sans succès de récupérer pour Jeanne les comtés de Champagne et de Brie, qui lui reviennent de droit. Après avoir épousé une des filles de Philippe V et reçu les deux comtés en dot, Eudes renonce au nom de Jeanne à ses revendications sur la Champagne et la Brie en échange d'une compensation en mars 1318. Jeanne épouse Philippe d'Évreux, membre de la famille royale de France. Décédé en 1322, Philippe V est remplacé sur les trônes de France et de Navarre par son autre frère, Charles IV. À la mort de Charles en 1328, les Navarrais expulsent le gouverneur français et proclament Jeanne reine de Navarre. En France, Philippe de Valois est couronné roi. Il conclut un accord avec Jeanne et son époux où, en échange de la renonciation de Jeanne sur la Champagne et la Brie, il l'accepte comme souveraine de Navarre. Jeanne et son époux sont couronnés ensemble à la cathédrale de Pampelune le 5 mars 1329. Le couple royal coopère étroitement pendant leur règne conjoint, mais Philippe d'Évreux est plus actif. Cependant, ils résident la plupart du temps dans leurs domaines en France. La Navarre est alors administrée par un gouverneur en leur absence (fr.wikipedia.org - Jeanne II de Navarre).

 

Traité d'extradition entre le Labourd et la Navarre

 

A l'occasion des fĂŞtes du couronnement de Louis le Hutin comme roi de Navarre, et peut-ĂŞtre sur la flotte qui portait en Angleterre les mille tonneaux de vin de Gascogne, Bayonne, selon la coutume, envoya des dĂ©putĂ©s chargĂ©s de prĂ©senter au roi les fĂ©licitations de la ville et..., un cahier de vĹ“ux. Les vĹ“ux, qui en doute ! Ă©taient mĂŞlĂ©s de plaintes : «1° que le roi garantisse les privilèges et les libertĂ©s accordĂ©s Ă  la ville par les rois anglais ; 2° les marchandises des Bayonnais paient en Angleterre 3 deniers sterling d'entrĂ©e et 3 deniers de sortie, tandis que les gens d'Espagne ne paient rien ; que les marchands de Bayonne soient traitĂ©s aussi favorablement que les Ă©trangers ; 3° que les Bayonnais soient, comme les Dacquois, francs de toute coutume et pĂ©ages royaux dans le duchĂ© de GuyennĂ© ; 4° que si un voisin blesse ou tue Ă  Bayonne un Ă©tranger, il ne soit condamnĂ© qu'Ă  la peine infligĂ©e Ă  cet Ă©tranger pour pareil fait dans son pays ; 5° que les lettres de marque donnĂ©es par les rois de France contre les gens de Bayonne, soient retirĂ©es ; 6° qu'il plaise au roi de prĂŞter en mains de leurs messagers, le serment que les ducs de Guyenne ont accoutumĂ© de prĂŞter aux habitants de Bayonne, Ă  leur avènement. Quant aux plaintes, elles Ă©taient dirigĂ©es contre des officiers royaux : les baillis de Labourd, de Labenne, de Gosse, etc.; le gardien du sceau de Gascogne. Par suite de l'incurie des baillis, les Bayonnais ne pouvaient aller Ă  leurs possessions dans ces bailliages sans ĂŞtre exposĂ©s aux attaques des voleurs et autres malfaiteurs de la pire espèce; et, faute d'un tarif prĂ©cis, le contrĂ´leur se permettait des perceptions lĂ©onines. Une note annexĂ©e Ă  la pĂ©tition des Bayonnais nous donne les rĂ©ponses qui furent faites aux rĂ©clamations des messagers : la garantie des privilĂ©ges de la ville de Bayonne peut ĂŞtre l'objet d'une charte conçue «en termes gĂ©nĂ©raux» s'informer des concessions faites aux Dacquois, pour tâcher d'accommoder les Bayonnais; il importe qu'il y ait un tarif uniforme pour le sceau de Gascogne; le roi de France sera requis pour les lettres de marque, et le sĂ©nĂ©chal de Gascogne, pour l'affaire des baillis; c'est au sĂ©nĂ©chal de Guyenne de jurer pour le roi, qu'il prĂŞte serment s'il ne l'a dĂ©jĂ  fait». Qu’advint-il des voeux pour l'affranchissement des droits d'entrĂ©e et de sortie en Angleterre, pour l'Ă©galitĂ© de traitement entre les Ă©trangers et les voisins de Bayonne en matière pĂ©nale. C'Ă©taient les points auxquels la commune tenait le plus : ils furent catĂ©goriquement repoussĂ©s. Grande dĂ©ception pour PĂ©legrin de Vièle et ses amis. Gui Ferrier, nommĂ© sĂ©nĂ©chal de Gascogne Ă  la place de Johan de Havering (12 mars 1308), fut chargĂ© de notifier aux Bayonnais les rĂ©solutions de la couronne. Du reste, une affaire de sĂ©rieuse importance l'attendait sur notre frontière des PyrĂ©nĂ©es.

 

Louis-le-Hutin, fils ainĂ© de Philippe-le-Bel, devenu roi de Navarre par suite du dĂ©cès de la reine Jeanne, sa mère, visitait ses nouveaux Ă©tats, depuis bien longtemps dĂ©shĂ©ritĂ©s de la prĂ©sence du souverain. La Navarre, Ă  peu de chose près, Ă©tait administrĂ©e comme la Gascogne : un gouverneur, ayant les mĂŞmes fonctions que le sĂ©nĂ©chal de Guyenne, dirigeait le personnel militaire, financier et civil du royaume, sous la surveillance intermittente de lieutenants de roi, sorte d'inspecteurs de haut rang, investis, pour les cas de grave nĂ©cessitĂ©, des pleins pouvoirs de la royautĂ©. Philippe-le-Bel n'appela jamais que des Français aux fonctions de gouverneur. A la mort de Jeanne de Navarre, les cortès de Pampelune (1305) avaient dĂ©pĂŞchĂ© des ambassadeurs Ă  Paris, chargĂ©s de demander l'envoi immĂ©diat de Louis, fils ainĂ© de la reine dĂ©funte, pour procĂ©der, conformĂ©ment aux fueros, Ă  la solennitĂ© du couronnement. Philippe-le-Bel ne s'en souciait pas; il diffĂ©ra deux ans ce voyage : mais enfin, comme il fallut cĂ©der devant les lĂ©gitimes rĂ©clamations des Navarrais, le jeune prince Ă©tait parti, et il s'essayait prĂ©cisĂ©ment Ă  porter sa première couronne de roi, attendant, sans trop d'impatience, l'heure d'aller l'offrir, comme un chapeau de fleurs, Ă  l'idole passagère de ses courtes amours, Ă  sa femme Marguerite de Bourgogne, la future hĂ©roĂŻne des sinistres aventures de la tour de Nesle, lorsque Gui-Ferrier parut sur la frontière pyrĂ©nĂ©enne avec la mission d'arrĂŞter, d'accord avec lui, les prĂ©liminaires d'un traitĂ© d'extradition entre la Navarre et la Guyenne.

 

Ce document (Archives de Bayonne, Registre AA. 11, pag. 67), d'un rare intĂ©rĂŞt pour l'Ă©poque oĂą il se produisit, ne fut pourtant signĂ© que le 12 mars suivant (1308-1309) par Johan de Jomulhe, chevalier, seigneur de Juli-Castro, sĂ©nĂ©chal de Pampelune, pour le roi de Navarre, et par Gui Ferrier, chevalier, sĂ©nĂ©chal du duchĂ© de Guyenne, pour le roi d'Angleterre : il a pour but capital de mettre un terme aux actes de violence, meurtres, vols, brigandages, dont les deux pays Ă©taient le théâtre, avec une impunitĂ© absolue pour les coupables, lesquels Ă©chappaient au châtiment en traversant une frontière impossible Ă  garder. Pour le passĂ©, afin de rĂ©gler les indemnitĂ©s qui pouvaient ètre dues aux parties lĂ©sĂ©es depuis la dernière occupation de la Guyenne par les Français, des arbitres sont dĂ©signĂ©s : ce sont le chevalier Garcia Martinez de Olloqui, alcalde de la cour, et Johan Isarn, sergent d'armes, pour le roi de Navarre; le chevalier Gassernaud d'Espelette et Narremond-Durand de Viele, citoyen de Bayonne, pour la Guyenne.

 

Quant Ă  l'avenir, voici les principales dispositions :

 

Tout habitant du Labourd ou du reste du duchĂ© convaincu du accusĂ© d'un cas de meurtre accompli en Guyenne, qui se rĂ©fugiera en Navarre, devra sur la requĂŞte du sĂ©nĂ©chal de Gascogne et de ses officiers, leur ĂŞtre dĂ©livrĂ© par l'autoritĂ© espagnole. Par rĂ©ciprocitĂ©, le meurtrier navarrais rĂ©fugiĂ© en Gascogne, devra ĂŞtre remis en mains des officiers du roi de Navarre. L'extradition s'appliquera aux larrons et dĂ©trousseurs de grands chemins ; afin d'Ă©viter la formation des bandes qui courent le pays, que nul vilain ou fils de vilain n'aille en armes en compagnie de gens de haut parage; et celui d'entr'eux qui sera surpris en pareille compagnie sera mis en arrestation par le bailli, et dĂ©tenu jusqu'Ă  ce qu'il ait acquittĂ© l'amende de 65 sols de Morlaas; chaque jour de prison sera complĂ© au dĂ©tenu pour 12 deniers morlans, un sol par jour. Le chevalier ne pourra amener avec lui, en voyage, plus de quatre compagnons, et le damoiseau plus de trois; la femme du chevalier, trois, et celle du damoiseau, deux, sous peine de l'amende de 66 sols ou de la prison, chaque jour Ă©galement comptĂ© pour 12 deniers. DĂ©fense Ă  qui que ce soit d'exiger le droit d'aubergade, si ce n'est de ses propres hommes; celui qui demandera indument Ă  loger, et celui qui par peur subira cette exigence, seront tous deux punis de la peine de 66 sols morlans ou de la prison. Que personne sciemment n'accueille un banni, sous peine d'encourir Ă  son tour la peine du bannissement. Ordre Ă  tous les bannis d'Ă©vacuer le territoire des deux pays dans le dĂ©lai de 30 jours; passĂ© ce dĂ©lai, les bannis seront livrĂ©s aux autoritĂ©s dont ils relèvent. D'après la coutume de Bayonne, le banni arrĂŞtĂ© en rupture de ban Ă©tait pendu; il en Ă©tait probablement de mĂŞme en Navarre (Jules Balasque, Études historiques sur la ville de Bayonne, Tome 3, 1875 - books.google.fr).

 

Dans son voyage Ă  la frontière des PyrĂ©nĂ©es, Gui Ferrier avait pu constater dans le pays de Labourd l'insĂ©curitĂ© des roules, l'usurpation des domaines de la couronne, les excès de toute sorte auxquels s'abandonnait une noblesse Ă  demi sauvage, surtout l'impuissance du bailli Ă  faire respecter de qui que ce soit l'autoritĂ© royale. Que valait le traitĂ© d'extradition conclu avec la Navarre, si l'on n'avait pas en main la force nĂ©cessaire pour en exiger l'exĂ©cution ? A Bayonne, les difficultĂ©s ne manquaient pas non plus : on commençait Ă  ĂŞtre quelque peu las de la domination sans contre-poids de la famille de Vièle, devenue plus hautaine dans les mains de la nouvelle gĂ©nĂ©ration: Pierre-Arnaud le jeune, Raymond-Jean, Bernard, Laurent. Tant que Raymond-Durand restait debout sur la brèche avec Pelegrin, couvrant ses jeunes parents du prestige de son incontestable droiture non moins apprĂ©ciĂ©e des Ă©trangers nos voisins que de ses concitoyens, le mal n'Ă©tait pas grand; mais il Ă©tait facile de prĂ©voir que le jour oĂą il disparaitrait, la puissante famille aurait Ă  lutter contre de vives oppositions. La vieille faction aristocratique comptait encore de nombreux adhĂ©rents, tous plus ou moins hostiles aux de Vièle ; ils se recrutaient surtout parmi les riches propriĂ©taires des environs de Bayonne, dont les pères retirĂ©s des affaires avaient acquis des fiefs seigneuriaux ou s'Ă©taient alliĂ©s Ă  des familles seigneuriales : les Saubaignac Ă  Guiche, les Lalanne Ă  Saint-Etienne, les de France Ă  Villefranque, etc. Le plus influent de ces adversaires c'Ă©tait Arnaud-Sanz de Luc, seigneur de la maison noble de BĂ©riots, fermier de riches pĂŞcheries sur la Nive, et dont l'un des ancĂŞtres, au siècle dernier, avait occupĂ© le siĂ©ge Ă©piscopal de Bayonne (Jules Balasque, Études historiques sur la ville de Bayonne, Tome 3, 1875 - books.google.fr).

 

Acrostiche : PBPB, double Pays basque

 

En basque, la formule Euskal Herria est attestée à partir du XVIe siècle (chez Joanes Leizarraga (1506-1601) en 1571). Comme pour les formes françaises, on désigne ainsi les régions peuplées de Basques. En 1643, le traité de religion Gero de Pedro de Axular, en langue basque, est le premier document connu qui décrit territorialement ce «Pays basque» en fournissant l'énumération des sept provinces qui le composent. Une telle description géographique demeure isolée. On note une nouvelle énumération des sept provinces (désignées comme «pays particuliers») constituant un Pays basque, cette fois en français sous la plume du chevalier Jean-Philippe de Béla (1709 - 1796) dans son Histoire des Basques rédigée entre 1761 et 1766. Au XIXe siècle, l'expression «Pays basque» est désormais d'usage courant en français (fr.wikipedia.org - Pays basque, Jean Loret, La Muze historique, Lettre en vers à madame la duchesse de Nemours (24 septembre 1664), 1664 - www.google.fr/books/edition).

 

Juste au niveau de Roncevaux, au pic d'Orzanzurieta, elle s'incurve vers le sud-ouest et demeure parallèle Ă  la cĂ´te jusqu'aux Pics d'Europe. Cette ligne de crĂŞte fait le travail de toutes les lignes de crĂŞtes : elle rĂ©gule le passage des pluies. Les nuages venus de l'Atlantique butent sur les crĂŞtes et les prĂ©cipitations arrosent l'ouest, crĂ©ant ainsi deux Pays basques : un atlantique (Gipuzkoa et Biscaye au sud et les provinces françaises au nord) et un mĂ©diterranĂ©en (Navarre et Alava). Ă€ cet Ă©gard, le plus important col de la zone est le col d'Etxegarate oĂą les zones de vĂ©gĂ©tation (les climax) apparaissent clairement. Etxegarate sĂ©pare le Pays basque vert du Pays basque ocre Raymond Chabaud, L'invention du Pays basque, 2019 - www.google.fr/books/edition).

 

L'ouverture de la route par le col d'Etxegarate en 1851 fait que le passage de San Adrián perde de l'importance (fr.wikipedia.org - Zegama).

 

Le passage naturel du pays Basque du Mont San Adrian a été un passage très fréquenté. L'accès le plus proche en voiture est une piste forestière qui quitte le col d'Etxegarate.

 

Typologie

 

Le report de 2094 sur la date pivot 1309 donne 524.

 

Si, ce qui n'est pas douteux, une prĂ©sence franque fut instituĂ©e en Aquitaine et mĂŞme en Novempopulanie, la vie des Basques ne dut pas en ĂŞtre radicalement modifiĂ©e, car les nouveaux maĂ®tres durent choisir, pour s'implanter, des citĂ©s comme Bordeaux, Toulouse, Dax, Eauze et Auch. Tout au plus s'intĂ©ressèrent-ils Ă  Lapurdum et Ă  ses fortifications romaines ? Une nouvelle haine, cependant, venait de naĂ®tre dans le cĹ“ur du Basque la haine du Franc. L'Ă©tau barbare, dĂ©cidĂ©ment, se resserrait de plus en plus. Peut-on, Ă  vrai dire, parler dĂ©jĂ  d'un Ă©tau qui, au lendemain de VouillĂ©, aurait enserrĂ© le domaine vascon ? L'image est pour l'instant inexacte, car pour l'heure (hormis le royaume suève de Galice) il n'est de royaume barbare qu'en Gaule. LĂ , il y en a mĂŞme deux : le royaume franc, qui vient de remporter une victoire Ă©clatante, et le royaume visigothique, considĂ©rablement rĂ©duit, de Narbonne Ă  la rive droite du RhĂ´ne. Encore faudra-t-il qu'un monarque ostrogoth, ThĂ©odoric le Grand, permette Ă  son petit-fils Amalaric de conserver la Septimanie. Cependant, on ne doute pas qu'après VouillĂ© il se produisit une Ă©migration en masse de la population visigoth en Espagne oĂą s'Ă©tablit un Etat qui va durer deux siècles, constituant un jour le fameux Royaume de Tolède. Les Vascons ont-ils profitĂ© de la faiblesse de ce temps de rĂ©gence pour se livrer Ă  quelque campagne d'intimidation dans la Tarraconaise ? On l'a dĂ©duit d'un acte du Concile de Lerida (tenu en 524) qui interdisait aux clercs cĂ©lĂ©brant dans des villes assiĂ©gĂ©es de rĂ©pandre le sang, fĂ»t-ce des ennemis... Il n'Ă©tait donc assaillants que basques ? (Pierre Narbaitz, Le matin basque: ou, Histoire ancienne du peuple vascon, 1975 - www.google.fr/books/edition).

 

L’histoire des Basques et du Pays Basque a commencé il y a des milliers d’années sur des terres qui sont maintenant connues sous le nom de Navarre. Ces terres ont dès le départ été nommées par les Romains sous le nom de Vasconia.

 

À l’époque Franco-wisigothe, les Vascons de Navarre qui étaient à la tête de tribus basques, défendent les institutions et un mode de vie très romain, contre des invasions germaniques. À partir de cette époque, fruit de l’assimilation vasconne, de nombreuses tribus basques disparaîtront des textes et on ne parlera désormais qu’uniquement des Vascons. La forme basque du mot Vascons était ’’euskaldunak’’, terme qui continue actuellement à être utilisé par les Basques. Dans d’autres langues, par contre, les noms utilisés pour les désigner ont été très souvent varié et ceci durant des siècles.A l’époque Franco-wisigothe, les Basques étaient connus sous le nom de «Vascons» (écrit aussi parfois Wascons). Plus tard, dans les chroniques carolingiennes, on a commencé à différencier les «Vascons» qui étaient sous le joug de gouvernements francs et ceux qui étaient indépendants, en utilisant pour ces derniers le terme de «Navarrais», ou le mot «Vascon», uniquement. Pour les Vascons sous gouvernement franc, le terme évoluera ultérieurement sous le nom actuel de Gascon.

 

Selon BartolomĂ© Bennassar : En fait aux V-VIIe siècle, les Basques qui vivent l’une des pĂ©riodes les plus dynamiques de leur histoire, loin d’être sur la dĂ©fensive sont conquĂ©rants.

 

Les Wisigoths pĂ©nĂ©trèrent en Espagne dès 414. L’IbĂ©rie Ă©tait alors aux mains des Vandales, installĂ©s en BĂ©tique (l’Andalousie actuelle), des Suèves et des Alains ; les Wisigoths vainquirent ces derniers, qui furent rejetĂ©s en Lusitanie, et harcelèrent les Vandales qui finirent par migrer vers l’Afrique romaine en 439. Toujours comme fĂ©dĂ©rĂ©, ThĂ©odoric Ier combattit aux cĂ´tĂ©s d’Aetius contre Attila, et y trouva la mort en 451.

 

Lorsque la paix avec les Romains fut conclue par le fœdus de 418, traité passé entre l’Empire romain et une cité ou un peuple étranger, Honorius accorda aux Wisigoths des terres dans la province Aquitaine seconde. La sédentarisation en Aquitaine a lieu après la mort de Wallia.

 

Le roi Euric (466-484) rompant le fœdus après la disparition de la famille impériale, agrandit son territoire aux dépens des Suèves qu’il battit en Hispanie en 468, et des Gallo-romains alliés aux Armoricains à la bataille de Déols, affrontant Ægidius et Ecdicius. Pampelune qui est depuis sa fondation un lieu de passage, était vasconne et s’appelait Iruñea. Or, ce sont les Romains qui fondent la ville actuelle connue comme Pompaelo ou Pompailon et à cette époque, sont bâtis des remparts. La ville sera envahie par les Barbares et rasée par les Germains au Ve siècle. En 472, elle est occupée par les Wisigoths, selon le témoignage écrit de Saint Isidore.

 

En 507, Clovis, roi des Francs et considéré comme le premier roi chrétien du royaume, chasse les Wisigoths qui étaient installés au nord des Pyrénées lors de la bataille de Vouillé. Cette victoire ouvre pour Clovis la route du Midi. Réussissant à conquérir Toulouse, ancienne capitale des Wisigoths, puis temporairement le Narbonnais qui sera repris par les Ostrogoths après la défaite du siège d’Arles, il s’empare de l’Aquitaine, de la Gascogne, du Languedoc et du Limousin, ce qui consacre la domination franque sur l’Auvergne. A partir de 561, une alliance basque entre les Vascons et les Aquitains permet de vaincre les Francs et de créer le "Principat de Vasconie" qui semble marquer la souveraineté d’un état Basque et dont l’apogée se situe autour de l’an 1000. Le terme "Vascon" donnera "Gascon" au nord germanisé (V se transformant en G), "Basques" au sud ibérique (V se lisant B).

 

Entrée en théorie depuis 507 dans le territoire franc, la province ecclésiastique des Neuf Peuples a fait auparavant partie de façon très dynamique du royaume goth des Balthes. La bataille de Vouillé n'a cependant mis fin ni à la royauté gothique, ni aux espérances des Goths. Tant que vécut Amalaric, le dernier descendant mâle des rois balthes, les tentatives de restauration sont manifestes.

 

A partir de ce moment les Vascons sont pris en étau, face à deux ennemis, les Francs au nord des Pyrénées et les Visigoths au sud. Plusieurs faits d’arme vont se produire. D’après les écrits de Barbero et Vigil, dans la seconde moitié du VIème siècle, les Vascons comme les Cantabres étaient des peuples indépendants que ni les Francs, ni les Wisigoths, ni les Suèves ne purent soumettre (Le Pays Basque au Moyen-Âge (du Ve au XIe siècle) - www.muturzikin.com).

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